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Psychanalyse et spiritualité : voici deux mots qui n'ont pas été souvent accolés.

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  • Psychanalyse et spiritualité : voici deux mots qui n'ont pas été souvent accolés.

    Psychanalyse et spiritualité : voici deux mots qui n'ont pas été souvent accolés.

    Jean SARKISSOFF
    https://www.revue3emillenaire.com/le...lit%C3%A9.html

    Freud, qui avait ouvertement rejeté la religion en totalité, avait cependant conservé la distinction kantienne du noumène et du phénomène. Qui pourrait trancher, dire qui a raison des religieux et des areligieux ? La raison n'est pas capable de nous départager. Il n'est pas plus déraisonnable de croire que de ne pas croire. A quelle religion un psychanalyste peut-il adhérer ? Évidemment à une religion qui serait exempte de projections de l'inconscient. Freud, en refusant toute religion parce qu'il y décelait, avec raison, des projections de l'inconscient, a jeté, comme on dit en allemand, l'enfant avec l'eau du bain sans voir que l'essence de la religion différait des projections humaines qui en ternissent l'image. Dieu n'est pas un surmoi parental paternel, juge et vengeur. Mais derrière ces anthropomorphismes il y a peut-être une réalité dernière qui régit l'univers. Maintenant que les physiciens ont admis cette donnée fondamentale du réel, les autres sciences comme la psychanalyse, auront moins de peine, moins de mérite aussi, à suivre le mouvement. Le développement de la psychanalyse se heurte comme on sait à de grandes difficultés, dont une des raisons pourrait bien se trouver dans l'erreur fondamentale que fit Freud en rejetant la transcendance. (Admirons au passage son courage de briseur d'idoles. Mais s'il faut briser les idoles il est bon de savoir conserver le temple.)

    Ce qui donne à l'homme sa place au-dessus des animaux ce n'est pas l'intelligence rationnelle et la technologie si grande soit leur beauté, mais bien sa capacité de se reconnaître relié au cosmos.

    Cette capacité lui est essentielle et l'homme ne réalise son humanité que s'il atteint cette dimension. L'homme ne peut atteindre à l'équilibre, à la maturité, à l'amour vrai, que s'il se sait et se sent relié à l'amour (au noumène, au logos, au verbe, au divin, qu'on l'appelle comme on voudra), et comprend que cet amour qui n'a pas sa source en lui, le dépasse et l'inonde de toutes parts. Alors sa joie est telle que toute régression n'est plus possible. Seule une telle attitude peut faire que l'homme se sente gratifié de façon si profonde, à vrai dire illimitée, pour que toute revendication, agression jalousie ou envie, ne pouvant plus trouver d'aliment pour subsister, ne puissent que disparaître.

    La religion est donc une source de gratification indispensable à l'équilibre de l'homme. La psychanalyse est fort utile pour dénouer des conflits qui paralysent la croissance. Mais son rôle se borne là. Elle ne peut prétendre à elle seule donner la santé. Pas plus que la pénicilline ou la cortisone. Le spectacle que donnent les disputes des psychanalystes et de leurs groupements nous renseigne suffisamment à ce sujet. Tout est relié à tout, c'est une loi universelle. Chaque atome, chaque électron dépend de tous les autres. Les physiciens nous l'ont appris. C'est maintenant au tour des biologistes et des psychologues de reconnaître la même vérité.

    Les liens de la plante avec le cosmos sont plus subtils et plus nombreux que ceux du minéral ; ceux de l'animal sont plus nombreux et plus subtils que ceux du végétal. On comprend que les liens de l'homme avec le cosmos soient les plus nombreux et les plus subtils de tous.

    L'homme peut donc être conscient de sa relation au cosmos, et quand il développe la faculté dont il dispose à cette fin, il atteint un état particulier qui est le point maximum de l'évolution auquel il puisse accéder. Cette relation religieuse au Tout lui permet de recevoir le savoir, la sérénité, la force et l'équilibre. C'est cet état qui mérite le terme de santé.

    Cette relation au cosmos, faite d'amour, n'est pas nécessairement consciente. Elle peut fort bien demeurer inconsciente et n'être jamais verbalisée. C'est elle qui fait l'homme en santé, optimiste, heureux de vivre, aimant, généreux et confiant dans la vie. Une philosophie de l'absurde est une frustration de toutes les aspirations spirituelles de l'homme, et représente un handicap au développement de l'amour, puisque la relation psychique avec la source est coupée. L'homme dans cette position, qui ne sait pas où chercher l'amour (puisqu'il ignore qu'il se trouve en dehors de l'individu) ne peut que le chercher en lui-même. Il le cherche souvent en vain et son échec le culpabilise. Une psychanalyse qui ne lui montre pas le chemin du lieu où se trouve l'amour, ne le sortira pas d'affaire. Il restera un névrosé, quelles que soient les illusions ou les erreurs ou les mensonges avec lesquels il tentera de camoufler son mal.

    L'a-religion est donc une maladie que la psychanalyse seule ne peut pas guérir et qui peut se traduire par tout l'éventail des symptômes névrotiques, caractériels, voire même le suicide ou la psychose.

    Bien souvent les découvertes les plus valables de la science moderne trouvent dans les anciens textes sanscrits une confirmation saisissante. Ainsi les notions anciennes du rôle nocif de l'ego et de la philosophie dualiste trouvent dans l'œuvre psychanalytique de Mélanie Klein un écho très impressionnant.

    En découvrant la position de réparation , c'est-à-dire la tendance à la réparation par amour, Mélanie Klein a montré l'existence dans l'inconscient de l'homme d'une aspiration vers les valeurs, à laquelle elle a donné la place centrale dans sa description du psychisme humain. Pour elle l'homme normal n'est donc pas déterminé par ses seules pulsions ni son aspiration au plaisir.

    La psychanalyse a fort bien montré comment se forme le surmoi sadique de la névrose, de la maladie mentale et du comportement criminel. Elle a montré aussi comment la position de réparation permet à ce surmoi sadique de s'adoucir au point de devenir le moteur de l'évolution et des progrès individuels et collectifs. Mais son erreur a été de vouloir réduire en totalité la morale et la conscience aux facteurs individuels qu'elle venait de découvrir. Bien souvent l'homme de science se montre borné en disant : " j'ai découvert cela, cela seulement existe et rien n'existe au-delà de ce que j'ai vu moi-même ". Les arbres l'empêchent de voir la forêt. Si l'image du père a quelque chose à voir avec la formation du surmoi ou de la religion il ne faut pas réduire la morale ou la religion à de simples reflets des images paternelle ou parentale.

    Il est bien des sentiments de culpabilité qui doivent être pris très au sérieux (par le patient et par le psychothérapeute) parce qu'ils émanent des profondeurs de notre être en évolution et n'ont rien de commun avec le sentiment de culpabilité de la névrose. C'est de ce dernier seulement que nous devons nous libérer.

    Si le psychanalyste ne distingue pas entre les deux, il aggrave l'état de son patient au lieu de le libérer. Une bonne partie de l'égarement du monde moderne vient peut-être de là.
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