Une histoire fascinante, au-delà de l'horreur de ce cette série de meurtres, c'est incroyable comment un petit mensonge pour "bien paraître" aux yeux des personnes qu'on aime aboutis à une tuerie de toute une famille.
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UNE VIE PARFAITEMENT FACTICE
Papa, je t’aime." Trois mots plein d’amour d'un enfant pour son père, écrits au bas d'un dessin accroché sur le mur de la cuisine. C'est ce dessin qui a frappé le substitut du procureur, Jean-Yves Coquillat, quand il est entré chez les Romand, le 11 janvier 1993. "C'était la maison du bonheur", dira-t-il plus tard à Christophe Hondelatte dans l'émission de France 2, "Faites entrer l'accusé". Car tout semble parfait dans la vie de Jean-Claude Romand : une belle situation professionnelle, une épouse dévouée, de beaux enfants, des amis…
Comme beaucoup de fonctionnaires internationaux, Jean-Claude s'installe, en 1983, avec son épouse Florence à Prévessin-Moëns, la banlieue chic et résidentielle de Genève. Le couple habite une grande maison. Deux ans plus tard naît leur fille, Caroline, puis leur fils, Antoine, en 1987. La famille Romand est rapidement acceptée dans la très sélecte communauté locale. Charmeur et érudit, le faux docteur a su rester modeste.
On l'écoute plus qu'on ne le questionne, celui qui dit connaître personnellement Bernard Kouchner et le professeur Léon Schwartzenberg, qui le soigne pour son cancer imaginaire. Les Romand mènent une vie bien réglée. Florence fait quelques remplacements à la pharmacie du village, mais s'occupe essentiellement de Caroline et d'Antoine. Leur père les dépose tous les matins à l’école. Quand il n'est pas dans son bureau au 3e étage de l'OMS, il dispense des cours à l'université et anime régulièrement des conférences. Mais cette image d'une famille parfaite n'est qu'une façade. Le médecin ne travaille pas à l'OMS. Il n'a d’ailleurs aucun travail.
S'il possède un badge "visiteur" de l'OMS, c’est pour lui permettre de suivre des conférences. Il fréquente les bibliothèques, lit beaucoup d'ouvrages scientifiques et acquiert une solide connaissance médicale. Son ami d’enfance, Thierry Devaux, se rappelle, dans "Faites entrer l'accusé", que lors d'un dîner où il avait invité une sommité en cardiologie, ce dernier s'était étonné du niveau de Jean-Claude. Il lui confie que "à côté de gens comme ça, on se sent tout petit". Tous les jeudis, le docteur Romand est censé donner ses cours en Bourgogne. Il s’arrête en chemin pour déjeuner avec ses parents. Puis repart errer dans les forêts alentours.
Il passe des heures dans sa voiture, stationnée sur un parking de supermarché ou sur une aire d'autoroute. Quand il part en mission à l'étranger, il reste, en réalité, cloîtré dans une chambre d'hôtel, à l’aéroport de Genève. Il y étudie les guides touristiques des régions qu'il a soi-disant visitées. Les souvenirs qu’il rapporte à ses enfants sont achetés à la boutique de l'aéroport. Jean-Claude ne laisse rien au hasard. Il prend toujours les devants. Sa femme ne peut le joindre qu'en lui laissant des messages sur son Alphapage.
Ce train de vie de notable a un coût. L'instruction, menée par le juge chargé de l'enquête, a démontré que la famille Romand a dépensé plus de 60 000 francs (9 150 euros) par mois durant plusieurs années. Sur la feuille d'impôt du couple ne figure que le salaire de madame. A l'OMS, les fonctionnaires internationaux comme lui sont directement prélevés à la source. Mais comment financer cette vie de mensonges ?
Sa principale source de revenus vient de ses parents. Il bénéficie d'une procuration sur leur compte qu'il finira par vider. Cela ne suffit pas à assurer le niveau de vie de la famille : loyer élevé, voiture de luxe, vacances en famille. Alors Jean-Claude emprunte de l'argent à son entourage. Entre 1985 et 1993, il aurait ainsi mis la main sur près de 3 millions de francs (un peu plus de 450 000 euros).
Le mythomane ne manque pas de ressources pour arriver à ses fins. Il évoque auprès de ses proches ses soi-disant placements financiers en Suisse à des taux de rendement très intéressants. Son entourage lui fait confiance et lui demande alors de placer leur argent.
Il était toujours calme, il maîtrisait tout. Il me servait presque un petit peu d’exemple.
Thierry Devaux, ami d’enfance de Jean-Claude Romand, dans l'émission "Faites entrer l’accusé"
Les frères de Florence, Emmanuel et Jean-Noël, lui donnent 15 000 francs (2 300 euros) chacun. Son beau-père, Pierre Crolet, lui confie l'intégralité de sa prime de retraite, soit 400 000 francs (61 000 euros). Il va jusqu'à vendre des faux médicaments à un oncle de sa femme, souffrant. Il lui extorque 60 000 francs (9 150 euros). L'oncle meurt quelque temps après. En 1988, après le décès de son beau-père, Jean-Claude s'occupe de la vente de la maison familiale et récupère 650 000 francs (100 000 euros). De quoi assurer le train de vie de la famille durant quelques années encore.
Mais les réserves s'amenuisent. Jean-Claude réussit un dernier coup au début des années 1990. A cette époque, il s'est rapproché de Chantal Delalande, l'ex-femme d'un ami du couple Romand qu'il couvre de cadeaux. Elle lui parle des 900 000 francs (137 000 euros) obtenus de la vente de son cabinet de dentiste et lui demande conseil. Comme les autres, Chantal confie son argent à Jean-Claude.
La vie de Jean-Claude Romand bascule dans l'horreur le 9 janvier 1993, le jour où il assassine sa femme, ses deux enfants, ses parents et tente de tuer sa maîtresse.
Samedi 9 janvier 1993, dans la matinée, Antoine regarde la télévision. Son père est assis à côté de lui, silencieux. Au bout d'un moment, il prétexte qu'il le trouve chaud et l'emmène dans sa chambre pour prendre sa température. Le fils s'allonge sur son lit. Le père met un oreiller sur sa tête, c'est pour jouer, le rassure-t-il, et tire. A côté, dans son lit, la grande sœur, Caroline, est déjà morte. Dans la chambre voisine, Florence, la mère, gît dans le lit conjugal, le crâne fracassé à coups de rouleau à pâtisserie. Ces trois meurtres sont les premiers d’une journée macabre qui scelle une longue série de mensonges.
Quelques mois avant le drame, Chantal, alertée par sa meilleure amie sur l'absence de garanties écrites, demande à récupérer son argent. Il joue la montre, l'attendrit avec son faux cancer, parle de délais à respecter. Mais lors d'un dîner à la fin de l'année 1992, elle revient à la charge. Il ne peut plus s'échapper. Il est prévu qu'il dîne au début du mois de janvier avec son ami Bernard Kouchner, qu'il ne connaît ni d'Eve ni d'Adam, et qu'il lui rende son argent ce jour-là. Ils calent un rendez-vous le… samedi 9 janvier. "Il n'est pas dupe, souligne Jean-François Impini, directeur d'enquête de la section de recherche de Lyon. Quand les histoires d'argent le rattrapent, il sait que le château de cartes va s'écrouler."
Ce n'est pas la première fois qu'une personne lui demande des nouvelles de l'argent qui lui a été confié. En septembre 1988, le père de Florence émet l'idée de revoir une partie de sa prime de retraite. Quelques semaines plus tard, le 23 octobre, Pierre Crolet meurt des suites d'une chute dans l'escalier de sa maison. Il n'y avait qu'un seul témoin… Jean-Claude Romand. "Les circonstances de l'accident ont fait peser une présomption assez sérieuse sur lui, se remémore Jean-François Impini, mais sans éléments disponibles pour aller au-delà." L'intéressé s’est toujours défendu, lors de son procès ou durant les interrogatoires, d'avoir tué son beau-père.
Si je l'avais tué, je le dirais. On n'en est plus à un près.
Jean-Claude Romand, durant un interrogatoire
A la fin de l’année 1992, sa femme, Florence, commence également à se poser des questions. Une discussion à la sortie de l'école lui met la puce à l'oreille. Une dame dont le mari travaille aussi à l'OMS lui parle de l'arbre de Noël. Elle et ses enfants n'y sont jamais allés. Une drôle d’ambiance règne lors des fêtes de Noël où la famille Romand et les frères de Florence sont réunis. Emmanuel Crolet, l'un des deux frères, contacté par franceinfo, se souvient d'un Jean-Claude Romand marqué, "n'ayant pas la même prestance que d'habitude". "Ma femme m'avait dit qu’elle avait trouvé Florence triste", ajoute-t-il.
La semaine précédant le drame, Jean-Claude Romand a un comportement qui laisse peu de place au doute : il veut en finir. Dans son livre L'Adversaire, Emmanuel Carrère raconte que le 5 janvier, il demande des barbituriques à la pharmacie. Toujours dans son ouvrage, l'écrivain détaille que le lendemain, à Lyon, il achète dans une armurerie "un boîtier électrique servant à neutraliser un agresseur, deux bombes lacrymogènes, une boîte de cartouches et un silencieux pour une carabine 22 long rifle".
Vendredi 8 janvier, de retour à Prévessin-Moëns, il achète deux jerrycans qu’il remplit d'essence à la station-service du supermarché du coin. "Cet élément a achevé de nous convaincre de la préméditation", analyse Jean-François Impini. Le soir, il console sa femme attristée à la suite d'un coup de fil de sa mère. Puis vient l’horreur. Le samedi matin, il se réveille avec "le rouleau à pâtisserie taché de sang entre les mains", précise-t-il lors de son procès. Il est incapable de se rappeler avec exactitude le déroulé des faits. Certains supposent qu'une explication a mal tourné. Lorsque les enfants se réveillent, Florence est morte étendue sur son lit. Loin de se douter de la tragédie, Caroline et Antoine prennent le petit-déjeuner devant un dessin animé.
Je savais, après avoir tué Florence, que j'allais tuer aussi Antoine et Caroline et que ce moment, devant la télévision, était le dernier que nous passions ensemble. Je les ai câlinés. J'ai dû leur dire des mots tendres, comme : ‘Je vous aime’.
à suivre
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UNE VIE PARFAITEMENT FACTICE
Papa, je t’aime." Trois mots plein d’amour d'un enfant pour son père, écrits au bas d'un dessin accroché sur le mur de la cuisine. C'est ce dessin qui a frappé le substitut du procureur, Jean-Yves Coquillat, quand il est entré chez les Romand, le 11 janvier 1993. "C'était la maison du bonheur", dira-t-il plus tard à Christophe Hondelatte dans l'émission de France 2, "Faites entrer l'accusé". Car tout semble parfait dans la vie de Jean-Claude Romand : une belle situation professionnelle, une épouse dévouée, de beaux enfants, des amis…
Comme beaucoup de fonctionnaires internationaux, Jean-Claude s'installe, en 1983, avec son épouse Florence à Prévessin-Moëns, la banlieue chic et résidentielle de Genève. Le couple habite une grande maison. Deux ans plus tard naît leur fille, Caroline, puis leur fils, Antoine, en 1987. La famille Romand est rapidement acceptée dans la très sélecte communauté locale. Charmeur et érudit, le faux docteur a su rester modeste.
On l'écoute plus qu'on ne le questionne, celui qui dit connaître personnellement Bernard Kouchner et le professeur Léon Schwartzenberg, qui le soigne pour son cancer imaginaire. Les Romand mènent une vie bien réglée. Florence fait quelques remplacements à la pharmacie du village, mais s'occupe essentiellement de Caroline et d'Antoine. Leur père les dépose tous les matins à l’école. Quand il n'est pas dans son bureau au 3e étage de l'OMS, il dispense des cours à l'université et anime régulièrement des conférences. Mais cette image d'une famille parfaite n'est qu'une façade. Le médecin ne travaille pas à l'OMS. Il n'a d’ailleurs aucun travail.
S'il possède un badge "visiteur" de l'OMS, c’est pour lui permettre de suivre des conférences. Il fréquente les bibliothèques, lit beaucoup d'ouvrages scientifiques et acquiert une solide connaissance médicale. Son ami d’enfance, Thierry Devaux, se rappelle, dans "Faites entrer l'accusé", que lors d'un dîner où il avait invité une sommité en cardiologie, ce dernier s'était étonné du niveau de Jean-Claude. Il lui confie que "à côté de gens comme ça, on se sent tout petit". Tous les jeudis, le docteur Romand est censé donner ses cours en Bourgogne. Il s’arrête en chemin pour déjeuner avec ses parents. Puis repart errer dans les forêts alentours.
Il passe des heures dans sa voiture, stationnée sur un parking de supermarché ou sur une aire d'autoroute. Quand il part en mission à l'étranger, il reste, en réalité, cloîtré dans une chambre d'hôtel, à l’aéroport de Genève. Il y étudie les guides touristiques des régions qu'il a soi-disant visitées. Les souvenirs qu’il rapporte à ses enfants sont achetés à la boutique de l'aéroport. Jean-Claude ne laisse rien au hasard. Il prend toujours les devants. Sa femme ne peut le joindre qu'en lui laissant des messages sur son Alphapage.
Ce train de vie de notable a un coût. L'instruction, menée par le juge chargé de l'enquête, a démontré que la famille Romand a dépensé plus de 60 000 francs (9 150 euros) par mois durant plusieurs années. Sur la feuille d'impôt du couple ne figure que le salaire de madame. A l'OMS, les fonctionnaires internationaux comme lui sont directement prélevés à la source. Mais comment financer cette vie de mensonges ?
Sa principale source de revenus vient de ses parents. Il bénéficie d'une procuration sur leur compte qu'il finira par vider. Cela ne suffit pas à assurer le niveau de vie de la famille : loyer élevé, voiture de luxe, vacances en famille. Alors Jean-Claude emprunte de l'argent à son entourage. Entre 1985 et 1993, il aurait ainsi mis la main sur près de 3 millions de francs (un peu plus de 450 000 euros).
Le mythomane ne manque pas de ressources pour arriver à ses fins. Il évoque auprès de ses proches ses soi-disant placements financiers en Suisse à des taux de rendement très intéressants. Son entourage lui fait confiance et lui demande alors de placer leur argent.
Il était toujours calme, il maîtrisait tout. Il me servait presque un petit peu d’exemple.
Thierry Devaux, ami d’enfance de Jean-Claude Romand, dans l'émission "Faites entrer l’accusé"
Les frères de Florence, Emmanuel et Jean-Noël, lui donnent 15 000 francs (2 300 euros) chacun. Son beau-père, Pierre Crolet, lui confie l'intégralité de sa prime de retraite, soit 400 000 francs (61 000 euros). Il va jusqu'à vendre des faux médicaments à un oncle de sa femme, souffrant. Il lui extorque 60 000 francs (9 150 euros). L'oncle meurt quelque temps après. En 1988, après le décès de son beau-père, Jean-Claude s'occupe de la vente de la maison familiale et récupère 650 000 francs (100 000 euros). De quoi assurer le train de vie de la famille durant quelques années encore.
Mais les réserves s'amenuisent. Jean-Claude réussit un dernier coup au début des années 1990. A cette époque, il s'est rapproché de Chantal Delalande, l'ex-femme d'un ami du couple Romand qu'il couvre de cadeaux. Elle lui parle des 900 000 francs (137 000 euros) obtenus de la vente de son cabinet de dentiste et lui demande conseil. Comme les autres, Chantal confie son argent à Jean-Claude.
La vie de Jean-Claude Romand bascule dans l'horreur le 9 janvier 1993, le jour où il assassine sa femme, ses deux enfants, ses parents et tente de tuer sa maîtresse.
Samedi 9 janvier 1993, dans la matinée, Antoine regarde la télévision. Son père est assis à côté de lui, silencieux. Au bout d'un moment, il prétexte qu'il le trouve chaud et l'emmène dans sa chambre pour prendre sa température. Le fils s'allonge sur son lit. Le père met un oreiller sur sa tête, c'est pour jouer, le rassure-t-il, et tire. A côté, dans son lit, la grande sœur, Caroline, est déjà morte. Dans la chambre voisine, Florence, la mère, gît dans le lit conjugal, le crâne fracassé à coups de rouleau à pâtisserie. Ces trois meurtres sont les premiers d’une journée macabre qui scelle une longue série de mensonges.
Quelques mois avant le drame, Chantal, alertée par sa meilleure amie sur l'absence de garanties écrites, demande à récupérer son argent. Il joue la montre, l'attendrit avec son faux cancer, parle de délais à respecter. Mais lors d'un dîner à la fin de l'année 1992, elle revient à la charge. Il ne peut plus s'échapper. Il est prévu qu'il dîne au début du mois de janvier avec son ami Bernard Kouchner, qu'il ne connaît ni d'Eve ni d'Adam, et qu'il lui rende son argent ce jour-là. Ils calent un rendez-vous le… samedi 9 janvier. "Il n'est pas dupe, souligne Jean-François Impini, directeur d'enquête de la section de recherche de Lyon. Quand les histoires d'argent le rattrapent, il sait que le château de cartes va s'écrouler."
Ce n'est pas la première fois qu'une personne lui demande des nouvelles de l'argent qui lui a été confié. En septembre 1988, le père de Florence émet l'idée de revoir une partie de sa prime de retraite. Quelques semaines plus tard, le 23 octobre, Pierre Crolet meurt des suites d'une chute dans l'escalier de sa maison. Il n'y avait qu'un seul témoin… Jean-Claude Romand. "Les circonstances de l'accident ont fait peser une présomption assez sérieuse sur lui, se remémore Jean-François Impini, mais sans éléments disponibles pour aller au-delà." L'intéressé s’est toujours défendu, lors de son procès ou durant les interrogatoires, d'avoir tué son beau-père.
Si je l'avais tué, je le dirais. On n'en est plus à un près.
Jean-Claude Romand, durant un interrogatoire
A la fin de l’année 1992, sa femme, Florence, commence également à se poser des questions. Une discussion à la sortie de l'école lui met la puce à l'oreille. Une dame dont le mari travaille aussi à l'OMS lui parle de l'arbre de Noël. Elle et ses enfants n'y sont jamais allés. Une drôle d’ambiance règne lors des fêtes de Noël où la famille Romand et les frères de Florence sont réunis. Emmanuel Crolet, l'un des deux frères, contacté par franceinfo, se souvient d'un Jean-Claude Romand marqué, "n'ayant pas la même prestance que d'habitude". "Ma femme m'avait dit qu’elle avait trouvé Florence triste", ajoute-t-il.
La semaine précédant le drame, Jean-Claude Romand a un comportement qui laisse peu de place au doute : il veut en finir. Dans son livre L'Adversaire, Emmanuel Carrère raconte que le 5 janvier, il demande des barbituriques à la pharmacie. Toujours dans son ouvrage, l'écrivain détaille que le lendemain, à Lyon, il achète dans une armurerie "un boîtier électrique servant à neutraliser un agresseur, deux bombes lacrymogènes, une boîte de cartouches et un silencieux pour une carabine 22 long rifle".
Vendredi 8 janvier, de retour à Prévessin-Moëns, il achète deux jerrycans qu’il remplit d'essence à la station-service du supermarché du coin. "Cet élément a achevé de nous convaincre de la préméditation", analyse Jean-François Impini. Le soir, il console sa femme attristée à la suite d'un coup de fil de sa mère. Puis vient l’horreur. Le samedi matin, il se réveille avec "le rouleau à pâtisserie taché de sang entre les mains", précise-t-il lors de son procès. Il est incapable de se rappeler avec exactitude le déroulé des faits. Certains supposent qu'une explication a mal tourné. Lorsque les enfants se réveillent, Florence est morte étendue sur son lit. Loin de se douter de la tragédie, Caroline et Antoine prennent le petit-déjeuner devant un dessin animé.
Je savais, après avoir tué Florence, que j'allais tuer aussi Antoine et Caroline et que ce moment, devant la télévision, était le dernier que nous passions ensemble. Je les ai câlinés. J'ai dû leur dire des mots tendres, comme : ‘Je vous aime’.
à suivre
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