11-02-2019 07:45 - Entretien avec Imam Cheikh Ely: « …les mauritaniens ont bel et bien perpétué eux-mêmes la main mise de l’armée sur la vie politique du pays en 2009. »
Entretien avec Imam Cheikh Ely: « …les mauritaniens ont bel et bien perpétué eux-mêmes la main mise de l’armée sur la vie politique du pays en 2009. »
Initiatives News - Imam Cheikh est journaliste. Expert en communication et en développement social, ce grand commis de l’Etat a occupé d’importantes fonctions dans les sphères du pouvoir. Dans l’entretien qu’il a accordé à INITIATIVES NEWS, Imam Chaikh se prononce sur la Présidentielle de 2019 et des enjeux qu’elle représente pour la classe politique.
INITIATIVES NEWS : La Mauritanie va connaitre une élection présidentielle qui, pour la première fois, sera marquée par la sortie d’un président sur la base du respect de ses deux mandats légaux. Toutefois, c’est un général qui est pressenti pour briguer la magistrature suprême au nom du camp du pouvoir actuel. Cela ne donne-t-il pas l’impression que l’armée n’est pas prête à céder la direction du pays aux civils ?
IMAM CHEIKH ELY : Le pouvoir ne se cède pas. Il se conquiert ; de préférence de manière légale et légitime. Les militaires l’ont conquis en Mauritanie à travers plusieurs coups d’Etat successifs ; l’actuel président Mohamed Ould Abdel Aziz avait pris le pouvoir en 2008 suite à un coup d’Etat avant de démissionner de l’armée et de briguer les suffrages des mauritaniens qui lui ont accordé leur confiance en 2009 en l’élisant à près de 52%.
Quelque part, si l’on ne tient pas en considération les thèses de fraude et de non neutralité de l’administration avancées à l’époque par l’opposition, et qu’on veuille inscrire cette victoire comme une continuation de la présence de l’armée dans les rouages politiques, eh bien les mauritaniens ont bel et bien perpétué eux-mêmes la main mise de l’armée sur la vie politique du pays en 2009. Vont-ils récidiver dix ans plus tard en confiant la gestion du pays à un autre général muant en civil pour la circonstance ? Eh bien attendons que les urnes nous l’infirment ou nous le confirment. Espérons aussi que la transparence, l’égalité de chances entre tous les candidats, la neutralité de l’administration, la liste électorale soient au rendez vous et que la CENI soit à la hauteur de sa tache. Voyez- vous ?
Quelle que soit notre position vis-à-vis de la situation actuelle, nous devons toujours rester lucides et chercher à analyser les causes de la perpétuation de la prédominance de l’armée dans la vie politique.
La Mauritanie n’est pas le seul pays où l’armée joue un rôle prédominant. Chaque pays a ses réalités et sa propre stratégie de création des équilibres nécessaires entre l’armée et le civil pour la sauvegarde de la démocratie et des valeurs républicaines.
La capacité des mauritaniens à se libérer de cette prédominance et à retrouver cet équilibre résidera dans l’existence d’une société et d’une opinion publique plus consciente, plus instruite, plus libre, plus au fait des principes démocratiques et des valeurs républicaines. Regardez vous-même autour de vous et jugez….
Nous avons en Mauritanie, depuis 1986, franchi certaines étapes qui nous ont donné la possibilité aujourd’hui de remettre en question, de protester, de nous opposer, de critiquer, de marcher dans les rues, de nous exprimer dans une presse libre….Mais les demandeurs de changements, d’alternance, de partage du pouvoir, de contre pouvoir ont simultanément l’impression de tourner en rond, de se cogner à chaque fois contre un récif, bref le mythe de Sisyphe…
« Coté opposition énormément de temps et d’efforts ont été perdus dans un combat sans fin pour le leadership et le pouvoir dont l’issue espérée s’éloigne à chaque fois comme un mirage anéantissant les utopies, disloquant les rangs et annihilant les acquis. »
Ce récif c’est celui de l’incapacité de notre élite et surtout de notre élite politique à prendre ses responsabilités et à s’allier avec les masses populaires dans le cadre d’un long et fastidieux mouvement pour une prise de conscience collective et l’imposition de nouvelles règles du jeu et de normes démocratiques et républicaines.
Coté opposition énormément de temps et d’efforts ont été perdus dans un combat sans fin pour le leadership et le pouvoir dont l’issue espérée s’éloigne à chaque fois comme un mirage anéantissant les utopies, disloquant les rangs et annihilant les acquis. L’incessante alternance d’actions et de réactions infructueuses qu’a connues l’opposition depuis l’existence de la démocratie en Mauritanie est à nos yeux la meilleure preuve.
Entretien avec Imam Cheikh Ely: « …les mauritaniens ont bel et bien perpétué eux-mêmes la main mise de l’armée sur la vie politique du pays en 2009. »
Initiatives News - Imam Cheikh est journaliste. Expert en communication et en développement social, ce grand commis de l’Etat a occupé d’importantes fonctions dans les sphères du pouvoir. Dans l’entretien qu’il a accordé à INITIATIVES NEWS, Imam Chaikh se prononce sur la Présidentielle de 2019 et des enjeux qu’elle représente pour la classe politique.
INITIATIVES NEWS : La Mauritanie va connaitre une élection présidentielle qui, pour la première fois, sera marquée par la sortie d’un président sur la base du respect de ses deux mandats légaux. Toutefois, c’est un général qui est pressenti pour briguer la magistrature suprême au nom du camp du pouvoir actuel. Cela ne donne-t-il pas l’impression que l’armée n’est pas prête à céder la direction du pays aux civils ?
IMAM CHEIKH ELY : Le pouvoir ne se cède pas. Il se conquiert ; de préférence de manière légale et légitime. Les militaires l’ont conquis en Mauritanie à travers plusieurs coups d’Etat successifs ; l’actuel président Mohamed Ould Abdel Aziz avait pris le pouvoir en 2008 suite à un coup d’Etat avant de démissionner de l’armée et de briguer les suffrages des mauritaniens qui lui ont accordé leur confiance en 2009 en l’élisant à près de 52%.
Quelque part, si l’on ne tient pas en considération les thèses de fraude et de non neutralité de l’administration avancées à l’époque par l’opposition, et qu’on veuille inscrire cette victoire comme une continuation de la présence de l’armée dans les rouages politiques, eh bien les mauritaniens ont bel et bien perpétué eux-mêmes la main mise de l’armée sur la vie politique du pays en 2009. Vont-ils récidiver dix ans plus tard en confiant la gestion du pays à un autre général muant en civil pour la circonstance ? Eh bien attendons que les urnes nous l’infirment ou nous le confirment. Espérons aussi que la transparence, l’égalité de chances entre tous les candidats, la neutralité de l’administration, la liste électorale soient au rendez vous et que la CENI soit à la hauteur de sa tache. Voyez- vous ?
Quelle que soit notre position vis-à-vis de la situation actuelle, nous devons toujours rester lucides et chercher à analyser les causes de la perpétuation de la prédominance de l’armée dans la vie politique.
La Mauritanie n’est pas le seul pays où l’armée joue un rôle prédominant. Chaque pays a ses réalités et sa propre stratégie de création des équilibres nécessaires entre l’armée et le civil pour la sauvegarde de la démocratie et des valeurs républicaines.
La capacité des mauritaniens à se libérer de cette prédominance et à retrouver cet équilibre résidera dans l’existence d’une société et d’une opinion publique plus consciente, plus instruite, plus libre, plus au fait des principes démocratiques et des valeurs républicaines. Regardez vous-même autour de vous et jugez….
Nous avons en Mauritanie, depuis 1986, franchi certaines étapes qui nous ont donné la possibilité aujourd’hui de remettre en question, de protester, de nous opposer, de critiquer, de marcher dans les rues, de nous exprimer dans une presse libre….Mais les demandeurs de changements, d’alternance, de partage du pouvoir, de contre pouvoir ont simultanément l’impression de tourner en rond, de se cogner à chaque fois contre un récif, bref le mythe de Sisyphe…
« Coté opposition énormément de temps et d’efforts ont été perdus dans un combat sans fin pour le leadership et le pouvoir dont l’issue espérée s’éloigne à chaque fois comme un mirage anéantissant les utopies, disloquant les rangs et annihilant les acquis. »
Ce récif c’est celui de l’incapacité de notre élite et surtout de notre élite politique à prendre ses responsabilités et à s’allier avec les masses populaires dans le cadre d’un long et fastidieux mouvement pour une prise de conscience collective et l’imposition de nouvelles règles du jeu et de normes démocratiques et républicaines.
Coté opposition énormément de temps et d’efforts ont été perdus dans un combat sans fin pour le leadership et le pouvoir dont l’issue espérée s’éloigne à chaque fois comme un mirage anéantissant les utopies, disloquant les rangs et annihilant les acquis. L’incessante alternance d’actions et de réactions infructueuses qu’a connues l’opposition depuis l’existence de la démocratie en Mauritanie est à nos yeux la meilleure preuve.
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