LE LIVRE DES CONTEMPEATIONS DES SECRETS SANCTISSIMES ET DES LEVERS DES LUMIÈRES DIVINES
PAR LE CHEIKH AL AKBAR IBN ‘ARABÎ – «* KITAB EL MASHAHID EL QUODOSSIA.*»
Traduction
La mise au point finale de l’édition du texte arabe a été faite avec le concours bénévole de M. Ahmad Chleilat. Qu'il en soit vivement remercié ici.
PROLOGUE
1 - La rédaction de ce livre découle de la contemplation des secrets sanctissimes et de la vision des aurores des lumières divines. C’est à votre intention, pèlerins, que nous les avons extraits des trésors scellés dans les abysses de l’éternité où ils sont à l’abri des vicissitudes, accidents et méfaits (de l’humanité qui n’en est pas digne).
2 — Ce livre comporte au total quatorze Contemplations, et il se termine par un “Sceau” destiné à faciliter l’accès à ces dévoilements noétiques et à ces contemplations hiératiques. En vérité, seuls les adeptes de telles contemplations sont capables de les comprendre réellement, car elles reposent entre les mains des privilégiés qui y ont accès. Celui qui est de leur nombre pourra donc saisir intuitivement leur signification. Celui qui n’est pas de ce nombre, qu’il aille interroger directement leurs adeptes et détenteurs. Comme il est dit : “Dieu vous ordonne de restituer les dépôts qui vous ont été confiés à leurs détenteurs légitimes” (IV, 58). Toutes choses que tu ne peux Comprendre, que ta science ne saurait atteindre, que ton intelligence ne peut appréhender, tout cela repose entre tes mains. Dieu daigne accorder au pèlerin la lumière de la clairvoyance,la pénétration de l'esprit, la lucidité de la conscience, la pureté du cœur... Exalté soit le Tout-Puissant.
CHAPITRE PREMIER
CONTEMPLATION DE LA LUMIÈRE DE L’EXISTENCE PAR LE LEVER DE L’ASTRE DU DISCERNEMENT
Leçon sur le néant de l’homme dont l'existence réelle a sa source cachée en Dieu
3 - Dieu me fit contempler la lumière de l’existence et le lever de l’astre du discernement. Il me dit : “Qui es-tu ?” Je lui répondis : “Le néant manifeste.” Dieu me dit : “Comment le néant peut-il devenir existant ? Si tu n’existes pas, comment s'établit ton existence ?” Je lui répondis : “Voilà pourquoi j'ai déclaré être le néant manifeste. Quant au néant caché, ce néant-là n'existe pas.” Il me dit : “Etant donné que la première existence est identique à la deuxième existence, il n’y a pas de néant antérieur, ni d'existence advenante, ce qui établit ton adventicité.” Puis Il me dit : “La première existence n’est pas identique à la deuxième existence, car la première existence est comparable à celle des êtres universels, et la seconde exis- tence est comme celle des êtres particuliers.” Puis Il me dit : “Le néant est véritable, il n’y a rien d’autre, L'existence est véri- table, il n’y a rien d’autre.” Je répondis : “C’est bien ainsi !”
4 — Dieu me dit encore : “Je te vois soumis et docile, ou bien tu es un chercheur de preuves.” Je lui dis : “Je ne suis ni docile, ni un chercheur de preuves.” 11 me dit : “Tu n’es rien.” Je lui dis : ‘Je suis la chose sans ressemblance, et toi tu es la chose par ressemblance.” Il me dit : “Tu dis vrai ! Car tu n’existes par rien, tu n'es rien, tu ne reposes sur rien.” Je lui répondis : “En effet !
Si j'étais quelque chose, j'aurais la faculté de me saisir. Si je reposais sur quelque chose, la relation s’établirait selon trois termes. Si j'étais la chose, j'aurais un vis-à-vis, or je n'ai pas de vis-à-vis.” Je lui dis : “J’existe à travers le fragmentaire, mais je n’ai pas reçu l'existence, car je suis dénommé sans avoir de nom, qualifié sans avoir de qualification, spécifié sans avoir de spécification. Et c’est là ma perfection. Tandis que toi, tu es dénommé par le nom, qualifié par la qualification, spécifié par la spécification. Et c’est là ta perfection.”
5 - Dieu me dit : “I n’y a que le néant qui connaisse l’existant.” Puis Il me dit : “Seul l'existant connaît réellement l'existant.” Puis I me dit : “L'existence procède de moi, non de toi, par toi, non par moi.” Puis Il me dit : “Celui qui te trouve me trouve, et celui qui te perd me perd.” Puis : “Celui qui te trouve me perd, et celui qui te perd me trouve.” Puis : “Celui qui me perd me trouve, et celui qui m'a trouvé ne me perd plus.” Il me dit : “La trouvaille et la perte sont pour toi, non pour moi.” Il me dit : “La trouvaille et la perte sont pour moi, non pour toi.” Puis I me dit : “Tout être n’est établi que par conditionne- ment, et il est pour toi. Tout être absolu (inconditionné) est pour moi.” Puis 11 me dit : “L’être conditionné est pour moi, non pour toi.” Puis Il me dit : “L’être séparé est pour moi par toi, et l’être rassemblé est pour toi, par moi.” “Et inversement !” ajouta-t-Il.
6 — Puis Il me dit : “L’être (établi) par la primauté est autre que de l’être, et en dessous se trouve l’être véritable.” Puis II me dit : “L’être est par moi, de moi, pour moi.” Puis Il me dit : “L’être n’est pas par moi, n’est pas de moi, et n’est pas pour moi.” Puis Il me dit : “Si tu me trouves, tu ne me vois pas, et si tu me perds, tu me vois.” Dieu me dit enfin : “Dans la trou- Vaille est ma perte, et dans la perte est ma trouvaille. Si tu étais instruit de la saisie, tu saurais ce qu’est l'être véritable.”
PAR LE CHEIKH AL AKBAR IBN ‘ARABÎ – «* KITAB EL MASHAHID EL QUODOSSIA.*»
Traduction
La mise au point finale de l’édition du texte arabe a été faite avec le concours bénévole de M. Ahmad Chleilat. Qu'il en soit vivement remercié ici.
PROLOGUE
1 - La rédaction de ce livre découle de la contemplation des secrets sanctissimes et de la vision des aurores des lumières divines. C’est à votre intention, pèlerins, que nous les avons extraits des trésors scellés dans les abysses de l’éternité où ils sont à l’abri des vicissitudes, accidents et méfaits (de l’humanité qui n’en est pas digne).
2 — Ce livre comporte au total quatorze Contemplations, et il se termine par un “Sceau” destiné à faciliter l’accès à ces dévoilements noétiques et à ces contemplations hiératiques. En vérité, seuls les adeptes de telles contemplations sont capables de les comprendre réellement, car elles reposent entre les mains des privilégiés qui y ont accès. Celui qui est de leur nombre pourra donc saisir intuitivement leur signification. Celui qui n’est pas de ce nombre, qu’il aille interroger directement leurs adeptes et détenteurs. Comme il est dit : “Dieu vous ordonne de restituer les dépôts qui vous ont été confiés à leurs détenteurs légitimes” (IV, 58). Toutes choses que tu ne peux Comprendre, que ta science ne saurait atteindre, que ton intelligence ne peut appréhender, tout cela repose entre tes mains. Dieu daigne accorder au pèlerin la lumière de la clairvoyance,la pénétration de l'esprit, la lucidité de la conscience, la pureté du cœur... Exalté soit le Tout-Puissant.
CHAPITRE PREMIER
CONTEMPLATION DE LA LUMIÈRE DE L’EXISTENCE PAR LE LEVER DE L’ASTRE DU DISCERNEMENT
Leçon sur le néant de l’homme dont l'existence réelle a sa source cachée en Dieu
3 - Dieu me fit contempler la lumière de l’existence et le lever de l’astre du discernement. Il me dit : “Qui es-tu ?” Je lui répondis : “Le néant manifeste.” Dieu me dit : “Comment le néant peut-il devenir existant ? Si tu n’existes pas, comment s'établit ton existence ?” Je lui répondis : “Voilà pourquoi j'ai déclaré être le néant manifeste. Quant au néant caché, ce néant-là n'existe pas.” Il me dit : “Etant donné que la première existence est identique à la deuxième existence, il n’y a pas de néant antérieur, ni d'existence advenante, ce qui établit ton adventicité.” Puis Il me dit : “La première existence n’est pas identique à la deuxième existence, car la première existence est comparable à celle des êtres universels, et la seconde exis- tence est comme celle des êtres particuliers.” Puis Il me dit : “Le néant est véritable, il n’y a rien d’autre, L'existence est véri- table, il n’y a rien d’autre.” Je répondis : “C’est bien ainsi !”
4 — Dieu me dit encore : “Je te vois soumis et docile, ou bien tu es un chercheur de preuves.” Je lui dis : “Je ne suis ni docile, ni un chercheur de preuves.” 11 me dit : “Tu n’es rien.” Je lui dis : ‘Je suis la chose sans ressemblance, et toi tu es la chose par ressemblance.” Il me dit : “Tu dis vrai ! Car tu n’existes par rien, tu n'es rien, tu ne reposes sur rien.” Je lui répondis : “En effet !
Si j'étais quelque chose, j'aurais la faculté de me saisir. Si je reposais sur quelque chose, la relation s’établirait selon trois termes. Si j'étais la chose, j'aurais un vis-à-vis, or je n'ai pas de vis-à-vis.” Je lui dis : “J’existe à travers le fragmentaire, mais je n’ai pas reçu l'existence, car je suis dénommé sans avoir de nom, qualifié sans avoir de qualification, spécifié sans avoir de spécification. Et c’est là ma perfection. Tandis que toi, tu es dénommé par le nom, qualifié par la qualification, spécifié par la spécification. Et c’est là ta perfection.”
5 - Dieu me dit : “I n’y a que le néant qui connaisse l’existant.” Puis Il me dit : “Seul l'existant connaît réellement l'existant.” Puis I me dit : “L'existence procède de moi, non de toi, par toi, non par moi.” Puis Il me dit : “Celui qui te trouve me trouve, et celui qui te perd me perd.” Puis : “Celui qui te trouve me perd, et celui qui te perd me trouve.” Puis : “Celui qui me perd me trouve, et celui qui m'a trouvé ne me perd plus.” Il me dit : “La trouvaille et la perte sont pour toi, non pour moi.” Il me dit : “La trouvaille et la perte sont pour moi, non pour toi.” Puis I me dit : “Tout être n’est établi que par conditionne- ment, et il est pour toi. Tout être absolu (inconditionné) est pour moi.” Puis 11 me dit : “L’être conditionné est pour moi, non pour toi.” Puis Il me dit : “L’être séparé est pour moi par toi, et l’être rassemblé est pour toi, par moi.” “Et inversement !” ajouta-t-Il.
6 — Puis Il me dit : “L’être (établi) par la primauté est autre que de l’être, et en dessous se trouve l’être véritable.” Puis II me dit : “L’être est par moi, de moi, pour moi.” Puis Il me dit : “L’être n’est pas par moi, n’est pas de moi, et n’est pas pour moi.” Puis Il me dit : “Si tu me trouves, tu ne me vois pas, et si tu me perds, tu me vois.” Dieu me dit enfin : “Dans la trou- Vaille est ma perte, et dans la perte est ma trouvaille. Si tu étais instruit de la saisie, tu saurais ce qu’est l'être véritable.”
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