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Journée nationale des handicapés : Ces musiciens non-voyants qui ont fait le bonheur des mélomanes

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  • Journée nationale des handicapés : Ces musiciens non-voyants qui ont fait le bonheur des mélomanes

    REPORTERS.DZ
    Par El Halloui Tlemcani - 17 mars 2019


    Qui se souvient de Cheïkh Kazi Aoul Ghouti, Cheïkh Mohammed Benguerfi et Cheïkh Abdelghani Malti ? A la faveur de la célébration de la Journée nationale des handicapés et par devoir de mémoire, nous rappelons au souvenir des mélomanes, trois figures de l’art musical traditionnel de Tlemcen, en l’occurrence des non-voyants qui ont fait la gloire de la musique andalouse et du hawzi.

    Il s’agit de Cheïkh Ghouti Kazi Aoul (1910-1963), Cheïkh Mohammed Benguerfi (1921-2008) et Cheïkh Abdelghani Malti (1921-1991). Né en 1921 à derb H’laoua, dans le quartier de Bab El Djiad, Cheïkh Mohammed Benguerfi, dit Azizou, entama sa vie active (étant orphelin de père et de mère) comme babouchier puis plombier. Son père était artisan-graveur. Après derb H’laoua, sa famille remonte au quartier de Bab El Hdid. C’est dans la ruelle de l’école maternelle qu’il jouait au football avec ses amis qui l’avaient surnommé «Azizou». En 1936, il perdit la vue. A l’âge de dix-neuf ans, il a senti à la fin d’un match, un mal oculaire à la suite d’un lavage à l’eau froide. Depuis ce jour, il ne retrouva plus la vue et devint ainsi aveugle. Au lieu de constituer pour lui un handicap, cette infirmité (cécité) lui permit de changer de fusil d’épaule, en «favorisant» un transfert de sens, bonifié, en développant son ouïe. En effet, l’expérience manuelle (dextérité) aidant, il passa allègrement, voire aisément, de l’artisanat à l’art, et plus exactement la musique. En 1937, lorsque le flûtiste Settouti est mort, il l’a remplacé dans le groupe de Cheïkh Larbi Bensari comme percussionniste (tariste puis drabki) avant de céder sa place au fils du Cheïkh, Mohammed. C’est à partir de cette date qu’il embrassa la carrière artistique comme musicien polyvalent avec Cheikh Omar Bekhchi, Cheikh Larbi Bensari, Cheikha Tetma, Cheikh Lazhar Dali Yahia, Cheikh Braham Edda’ri. Au Maroc, il fréquenta Cheikh Salah (Ben Chabaâne) et Cheikh Hassouna (Ghomari) dans les années 70. Les mélomanes noctambules se souviendront toujours des soirées de Ramadhan (période 1966- 1974), animées tour à tour par le Cheikh aux cafés Lotfi, Andalous, l’Espérance et la Coupole, ainsi que le cercle de Derb Elihoud. Le site féerique d’El Ourit résonnera toujours des airs langoureux de Hawzi et du Gherbi, joués par le Cheikh aux deux Motels Bahlouli et Abbès (1974 -1981). Cheïkh Azizou avait l’esprit de la répartie et le sens de l’humour, illustrés par cette anecdote que nous racontera son fils aîné Fethi : «Lors d’une soirée de mariage, Si Mohamed, le fils de Cheïkh Larbi Bensari, surnommé Staline (ou Joker), un tantinet lourdaud, tomba à la renverse sur scène (échafaudage). Le bruit sourd de la chute attira l’attention de son Cheïkh, Benguerfi : «Que t’arrive-t-il ?», lui demanda-t-il, «Anqlebt (Je suis tombé)», lui répondit-il ; «A’melt inqileb jarka oula sika ?», ironisa Cheïkh Azizou». Le Cheikh participa au festival de la musique hawzi, au cinéma Lux en 1968 et au Grand Bassin en 1971. C’est à la faveur d’un enregistrement «at home» réalisé en 1980 par la RTA, au niveau de la villa de Rachid Baba Ahmed à Bel-Air, que son groupe (dont faisaient partie le père et l’oncle de Rachid) prit le nom de Ahbab Cheikh Larbi Bensari. Un hommage fut rendu au Cheikh en 1996 par l’association Riadh El Andalous à la Maison de la culture, à l’occasion de la semaine culturelle Cheikh Larbi Bensari, en présence du Dr. Yahia El Ghoul, et par Ettarab El Acil, à l’Office du tourisme en 2002, en marge de la commémoration du 38e anniversaire de la mort du cheïkh. Hormis ces deux gestes louables, ainsi que deux émissions radiophoniques (1991), le Cheikh sera hélas «oublié» lors du 16e congrès de l’Académie de musique arabe de 2001 (Alger). De surcroît, il sera «exclu» (localement) de la liste des musiciens du terroir à l’occasion de la cérémonie «sonnante et trébuchante», organisée en 2003 dans la capitale par le ministère de la Culture et l’Onda et dont ont bénéficié, entre autres, Cheïkh Mustapha Brixi, El Hadj Ghaffour et Ghaouti Fekhikhri (un disciple de Azizou). Après l’indépendance, il fit partie d’un groupe de musique «moderne» comprenant, entre autres, Hamid Texas, Mrabet Sid Ahmed, Mamoun, Kouka, Abdellah, Moustafa El Moghrabi. Cheikh Azizou, laissa, en bon passeur quatre fils musiciens : Fethi, Hamed, Rachid et Abdelkader, qui ne manqueront pas de transmettre à leur tour le riche répertoire (Hawzi, Gherbi et Senaâ) de leur défunt paternel. Cheikh Benguerfi demeura anonyme jusqu’à la fin de ses jours. Quant à Cheïkh Abdelghani Malti, c’était un percussionniste hors pair : il jouait avec brio du tar (tambourin à castagnettes).
    C’est lui l’«artisan» de l’onomatopée «taqtaq», son qu’il produisait avec son instrument, à l’occasion du khlass «qalbi ma yahmel taqtaq wala hammalou». Cheïkh Malti était un spécialiste dans l’exécution de l’istikhbar (solo vocal). Il fit partie de l’orchestre de Cheïkh Larbi Bensari ainsi que la Slam de 1934. Il côtoya plusieurs maitres de la musique andalouse, tels Rédouane Bensari, Mustapha Brixi, Bachir Zerrouki, Boumediène Benkebi.
    Cheïkh Malti possédait une petite boutique de détergents située à Ras Sagha (la rue des orfèvres) derrière le musée (mosquée Sidi Bellahcène) où il recevait des musiciens, notamment le musicien «émigré» Abderrahmane Mamoun. Le grand méconnu de ce trio est Cheïkh Kazi Aoul Ghouti, de derb El Fouqi (Bab El Djiad), né en 1910 et décédé en 1963, sur lequel on n’a pas beaucoup d’informations. Et pourtant, c’était le maître de Cheïkh Mohammed Bouali et Cheïkh Mustapha Belkhodja. Il était membre de la Slam des années trente. Il fit partie des orchestres de Cheïkh Larbi Bensari, de Cheïkh Redouane et Cheïkh Mustapha Brixi. Les trois Chouyouk étaient des voisins, ils habitaient le même quartier, Rhiba.n
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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