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Le Démon de Tripoli raconte la nuit où le sort de l’Algérie fut scellé

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  • Le Démon de Tripoli raconte la nuit où le sort de l’Algérie fut scellé

    Alors que les murs de la Casbah s’apprêtent à murmurer d’autres secrets, alors que les deux Araignées du centre des archives de Paris se préparent à éplucher le dossier sur l’exécution de Amirouche et Si El Houès et que l’âme de Boudiaf était sur le point de rencontrer le commanditaire de son assassinat dans le purgatoire, un autre événement, aussi important, est en train de se dérouler à Tripoli.
    Nous sommes le 20 août 2011. Un grand jour pour les rebelles libyens qui viennent de prendre le contrôle de Tripoli. Arrivé au bout d’une ruelle du centre-ouest de cette capitale, un groupe, dirigé par Abdelhakim Belhadj, tente de rentrer dans une vieille bâtisse qui servit de siège du Sénat de l’ancien roi de Libye, l’Algérien Idriss Senouci. L’accès à ce lieu, pourtant vide, était interdit par le régime libyen. Curieux de connaître le secret de cette villa vétuste, les rebelles défoncent la porte mais, avant d’y pénétrer, un officier de la Brigade Khamis, qui venait de faire défection, s’interpose et leur explique que ce n’était pas une bonne idée car l’ancien Sénat royal était hanté par la présence d’un puissant démon. Discipliné, le chef rebelle de la capitale appelle Mustapha Abdeldjalil, le président du CNT, pour lui faire part de cette troublante information. Le chef de la Révolution lui répond qu’il a déjà eu vent de ce secret bien gardé lorsqu’il était ministre de la Justice du régime. Il informa son interlocuteur que Kadhafi était au courant de l’existence de ce démon et le plus bizarre c’est qu’il avait interdit d’exorciser cette maison à la demande de ses amis algériens. Mustapha Abdeldjalil ajouta que cette salle fut aussi le lieu où l’avenir de l’Algérie se décida un certain mois de juin 1962. C’est ainsi qu’on fera appel à l’imam de la mosquée du quartier. Ce dernier, d’origine algérienne, procéda donc au rituel pour purifier cette demeure démoniaque…

    -L’exorciste : Sors de ta cachette démon et dis-moi comment tu t’appelles !

    -Le démon : Tiens tiens, enfin un visiteur et de surcroit algérien… Apparemment, je suis condamné à ne voir que des Algériens !

    -L’exorciste : Quel est ton nom et que fais-tu ici depuis tout ce temps ?

    -Le démon : Personne n’est venu me demander de quitter cette maison, et je suis encore figé de ce que j’ai pu voir et entendre dans cette salle… il y a 49 ans.

    -L’exorciste : Et qu’est-ce que tu as vu ?

    -Le démon : Une réunion du CNRA (Conseil National de la Révolution Algérienne) qui aura duré 11 jours, du 27 mai au 6 juin 1962, c’était cauchemardesque. Mauvais esprit que je suis, je me suis senti tout petit devant certains participants à ce conclave.

    -L’exorciste : Attends, attends, ne me dis pas que tu as assisté à ce fameux congrès de Tripoli qui devrait décider de l’avenir l’Algérie indépendante ?

    -Le démon : Crois-moi j’aurais aimé ne pas y assister, et ce qui se tramait en coulisses est pire que ce qui se disait en plénière.

    -L’exorciste : Ils étaient combien à y assister ? Te souviens-tu des personnalités présentes ?

    -Le démon : Evidemment, ils étaient 52 et certains parmi eux étaient munis de procurations écrites et signées par leurs collègues restés au maquis. En face, il y avait un brave jeune homme très gentil, Mohamed Seddik Benyahia. C’était le président de séance, il était épaulé par deux adjoints, Ali Kafi, à droite, et Omar Boudaoud, à sa gauche. Je me rappelle très bien l’ordre dans lequel étaient assis les congressistes. A partir de la gauche : Mohamedi Saïd, Boudiaf, Aït Ahmed, Dahlab, Bentobal, Krim, Benkhedda, Ben Bella, M’hamed Yazid, Khider, Bitat, Boussouf, Mehri, Mostefa Naoui, Hadj Lakhdar Abidi, Saïd Iouazourene, Noureddine Bensalem, Ferhat Abbes, Amar Akkache, Abdelkrim Souici, Saïd Bouaziz, Bouhadjar, Rouina, Si El Hocine, Hadj Benalla, Boumediene, Ahmed Bencherif, Ali Mendjli, Ammar Benaouda, Ali Haroun, Mokhtar Bouyzem, Kaïd Ahmed, Boumendjel, Lacheraf, Ahmed Boudjenane, Mohamed Kadi, Brahim Moulay, Tahar Zbiri, Ahmed Francis, Tayeb Taalibi, Chikh Khireddine, Rabah Belloucif, Salah Boubnider, Larbi Berredjem, Abdelmadjid Kahlarras, Tahar Bouderbala Kaci, et Sadek.
    Voilà… je crois que je n’ai oublié personne.

    -L’exorciste : Et que c’était-il passé ?

    -Le Démon : Au début, tout semblait normal, et le premier ordre du jour, à savoir le programme du FLN, a été adopté à l’unanimité et dans le calme. Mais tout a basculé subitement lorsque le deuxième ordre du jour a été abordé. Cela concernait l’élection du bureau politique. Une direction chargée de gérer provisoirement l’Algérie indépendante, de préparer le congrès du FLN et surtout de veiller à l’élection d’une constituante, laquelle devait prendre le relai.

    -L’exorciste : J’imagine qu’il y avait un désaccord au sujet de la composante de ce bureau politique, surtout qu’il y avait deux clans qui s’opposaient depuis longtemps…

    -Le Démon : Désaccord ??? Deux clans ????? C’était plutôt à couteaux tirés, et il y avait 3 clans !

    1- Le GPRA (Gouvernement Provisoire de la République Algérienne) présidé par un sage intellectuel, Benyoucef Benkhedda, et qui était composé de Boudiaf et Aït Ahmed, les 3 B (Belkacem Krim, Boussouf Abdelhafid et Bentobal Lakhdar) ainsi que d’autres jeunes à l’instar de Dahlab, Mehri, Benyahia etc.

    2- L’Etat-Major Général, présidé par Houari Boumediène avec lequel s’étaient alliés les Wilayas 1, 5 et 6 ainsi que Ben Bella et Khider. Ce groupe formera plus tard le fameux clan d’Oujda épaulé par la puissante armée des frontières

    3- Les autres Wilayas : Les 2, 3, 4, la Zone Autonome, et les deux Fédérations, de France et de Tunisie. Bien que ce dernier groupe prônait la neutralité, il n’en demeure pas mois qu’il était hostile au clan Ben Bella-Boumediene. D’ailleurs, quelques jours plus tard, lors de la fameuse réunion de Zemmoura, il a été décidé de condamner les activités criminelles des responsables de l’Etat-Major, accusés de rébellion.

    -L’exorciste : Penses-tu qu’il y avait aussi des pays étrangers qui tiraient les ficelles ?

    -Le Démon : Je ne le pense pas, j’en suis certain, mes collègues de la communauté des « Djinns » m’ont confirmé que certains congressistes étaient en contact permanent avec 3 pays, la France, l’Egypte et le Maroc. Et les trois soutenaient la paire Ben Bella-Boumediene.

    -L’exorciste : Je comprends que la France ne voulait pas que les Novembristes et les vrais maquisards gèrent le pays, c’est clair aussi que Djamel Abdenasser voulait que son boy, Ben Bella prenne le pouvoir, mais je n’arrive pas à croire que le Maroc soutienne ce clan… pourquoi donc ?

    -Le Démon : Pour deux raisons. La première est que le roi Hassan II voulait prendre sa revanche sur le GPRA qui avait refusé de reconnaître la Mauritanie partie intégrante du royaume. La deuxième, le monarque chérifien n’a pas réussi à obtenir du GPRA une promesse de modification de la frontière algéro-marocaine. Ainsi la monarchie facilitera le passage de l’armée des frontières ouest et appuiera de tout son poids le clan d’Oujda qui mettra au monde le fameux BP de Tlemcen, lequel prendra le pouvoir par la force et confisquera votre indépendance.

    -L’exorciste : Voilà que tout est clair, et ensuite ?

    -Le démon : C’était la nuit du 5 au 6 juin 1962, il fallait élire une seconde commission électorale pour proposer à l’assemblée, pour adoption, un bureau politique constitué de 7 membres. La première commission avait échoué vu les querelles qui existaient. Tahar Zbiri prend la parole et demande que lui soit reconnu le droit de voter par procuration au nom de trois membres de son conseil de la Wilaya 1, mais il ne possède pas de procurations écrites. Benkhedda, en légaliste s’y oppose en brandissant l’article 32 des statuts du FLN. Ben Bella intervient pour soutenir Zbiri. Regarde… dès que me rappelle ces images j’en ai la chair de poule.

    -L’exorciste : A ce point ? Ça devait être l’horreur pour qu’un démon comme toi puisse avoir la chair de poule hhhh !

    -Le démon : Adhak adhak…. Tu as de la chance d’être algérien et que j’ai juré de ne plus posséder aucun de ta race.
    Ecoute ce qu’a dit le premier président de l’Algérie indépendante au président du GPRA : « Ida hatta wahad mazal mahabatlakch serwalak , ana dork anji anhabothoulak ». De l’autre côté de la salle, le colonel Boubnider intervient pour défendre Benkhedda : « Tu n’as pas à t’adresser de la sorte au président, et si quelqu’un doit être déshabillé, c’est bien toi. »
    L’un des 3 B, à savoir Lakhdar Bentobal, bondit de sa place : « Ben Bella, ça fait juste un mois que tu es parmi nous et tes manœuvres et manigances ont déjà semé la fitna… »

    Ben Bella lui répond en gesticulant : « Tu n’as pas le droit de dire ça… »
    Bentobal renchérit et se dirige vers Ben Bella : « Si j’en ai le droit et je vais te le prouver tout de suite…

    Le ton monte, toute la salle s’en mêle, le brouhaha enfle… on entend des reproches, des injures et même que certains ont failli en venir aux mains.
    Pour éviter le pire, le président de séance suspend les débats. Il est exactement minuit dix.

    -L’exorciste : Je suppose que les esprits se sont calmés et que les travaux ont repris rapidement…

    -Le démon : Détrompe-toi ya Chikh, la séance n’a jamais repris, la majorité des ministres du GPRA et quelques membres importants du Conseil de la Révolution ont quitté la capitale libyenne dans la nuit, laissant sur place Ben Bella, Boumediene et leurs partisans. Le CNRA était donc en minorité, rendant impossible la poursuite du congrès. Et la séance demeure ouverte jusqu’à maintenant. C’est clair, non ?

    -L’exorciste : Comment ça ?

    -Le démon : Eh bien logiquement, tant que ce congrès n’a pas été clôturé officiellement, tout ce qui a été fait et décidé après était illégal, tout s’inscrit dans le faux, notamment le fameux bureau politique créé en catimini le 22 juillet à Tlemcen. Une direction qui a réussi à prendre le pouvoir et confisquer votre indépendance.

    -L’exorciste : Comment ont-ils pu ?

    -Le démon : Eh bien grâce à l’armée des frontières de Boumediène, laquelle était censée renflouer les maquis de l’intérieur en soldats, armes et logistique, mais au lieu de cela elle a plutôt servi à renverser le GPRA, torpiller le CNRA, prendre le pouvoir et instaurer une dictature.

    -L’exorciste : Pourtant, on croit savoir que Boumediene a été destitué juste avant l’indépendance…

    -Le démon : Effectivement, le 27 juin 1962, le chef d’Etat-Major et ses deux adjoints, Ali Mendjeli et Kaïd Ahmed, ont été officiellement limogés, dégradés et accusés de crimes et rébellion. Une décision appuyée par les chefs du maquis lors de leur conclave à Zemmoura, deux jours auparavant. Mes collègues démons basés à Tunis et Zemmoura m’ont montré les documents officiels concernant cette décision.

    -L’exorciste : Cela n’a pas empêché Boumediene de devenir l’homme fort du régime pendant plusieurs années.

    -Le démon : Je t’ai bien dit que tout s’inscrivait dans le faux, à partir du moment où le CNRA de Tripoli n’a pas pu élire une direction, la gestion provisoire des affaires de votre pays revenait de droit au GPRA, en attendant la reprise des travaux du Conseil de la Révolution qui devait se tenir en Algérie.

    -L’exorciste : Voilà que tout est clair, puis-je me permettre une dernière question avant de procéder au rituel pour te chasser de ces lieux conformément aux ordres que j’ai reçus ? Certains pensent que la France est directement impliquée dans ces tristes événements de l’été 1962, as-tu des détails à ce sujet ?

    -Le démon : Primo : tu ne vas pas me chasser mais me délivrer de cette salle dans laquelle je suis séquestré depuis un demi-siècle.
    Secundo : Concernant ta question, mes cousins démons qui habitent les palais de l’Elysée, du Quai d’Orsay, de Matignon et de l’immeuble Levallois-Perret m’ont fourni des informations très graves concernant les hommes qui travaillent pour l’Hexagone. Des documents qui concernent les déserteurs de l’armée française, d’autres au sujet des assassinats d’historiques qui se sont déroulés avant et après l’indépendance et aussi des documents concernant des hauts responsables qui roulent toujours pour votre ancien colonisateur.
    Tiens, par exemple, ce document concernant l’assassinat de deux de vos meilleurs ministres des Affaires étrangères, Mohamed Khemisti et Mohamed-Seddik Benyahia…

    La suite kach nhar

    Par Omar Khayam
    __________________
    Dernière modification par nacer-eddine06, 23 mars 2019, 18h29.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    Comment aurait pu etre l algerie sans ce coup de force
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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    • #3
      Lorsque la température monte trop, il existe un recours efficace : la suspension de séance. On reprend lorsque les esprits sont calmés.

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      • #4
        La reprise de seance est ouverte avec les monstres manifestations du peuple
        The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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        • #5
          nac006
          tu as déjà posté cet article wakila t"es en mode robotoeilfermé
          "sauvons la liberté , la liberté sauve le reste"

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          • #6
            ET T EN PENSE QUOI
            The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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            • #7
              ... la séance n’a jamais repris, la majorité des ministres du GPRA et quelques membres importants du Conseil de la Révolution ont quitté la capitale libyenne dans la nuit, laissant sur place Ben Bella, Boumediene et leurs partisans.
              Pas très crédible ou alors les membres du GPRA n'ont pas été à la hauteur de leur mission.

              Aujourd'hui lorsque l'on regarde l'histoire de l'Algérie avec le recul, on se dit que Boumédiène a accédé au pouvoir alors qu'il n'était qu'un enfant. C'est le drame de l'Algérie.

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