Djamel Zenati à Tichy (Béjaïa) : «L’article 102 empêche toute possibilité de transition»
El Watan - Djamel Zenati (Photo : Lyès Habbache)
KAMEL MEDJEDOUB 31 MARS 2019 À 8 H 05 MIN 1932
Le besoin de débattre de l’actualité du pays induite par le mouvement populaire et les manœuvres du pouvoir est grand au sein de la population. Hier, plusieurs cafés littéraires, Aokas, Timezrit, Tichy et Béjaïa, ont convié des personnalités politiques et scientifiques à des rencontres publiques dans la wilaya.
Djamel Zenati, en fin observateur de la scène politique nationale, a animé une conférence-débat à la Maison des jeunes de Baccaro. Les détails et les enjeux de l’article 102 de la Constitution algérienne ont focalisé une partie des débats, illustrant toute la soif de l’heure, et le besoin de déjouer les pièges et de réussir le mouvement. Les appels à l’application de cette disposition constitutionnelle ont été nombreux à avoir été lancés, le dernier en date étant celui émanant de Gaïd Salah, le chef d’état-major de l’armée.
«Il n’y a pas que Gaïd Salah, Ouyahia aussi a appelé à son application, et c’est un grand problème», a lancé Zenati qui s’étonne, au passage, que l’ex-Premier ministre «s’exprime encore !» Si Gaïd Salah a appelé le Conseil constitutionnel à activer l’article en question pour constater l’impossibilité du président de la République à assumer ses fonctions, et son remplacement par Abdelkader Bensalah, Ouyahia viserait plutôt une disposition précise de l’article 102.
Ce que Djamel Zenati appelle «alinéa 4» est un des trois cas stipulés dans cet article et qui concerne, non pas une «maladie grave et durable», mais la démission ou le décès du président de la République. Dans ce cas précis, la Constitution prévoit que le président du Conseil de la nation prenne l’intérim pendant 90 jours, et non plus 135, pour organiser une élection présidentielle.
L’appel d’Ouyahia «est pire» que celui de Gaïd Salah, considère Zenati. «Si Bouteflika est mort, pourquoi alors ils ne nous le disent pas. Et pour sa démission, comment l’avoir alors qu’il refuse de démissionner ?» s’interroge le conférencier, qui conclut au projet de faire démissionner Bouteflika. «Ils veulent le faire démissionner, le destituer», précise-t-il.
Pour lui, Ouyahia n’appelle à rien d’autre qu’à «un coup d’Etat». Dans les deux cas, une présidence intérimaire est assurée pendant l’intervalle par le président du Sénat, ou même, dans un cas, par le président du Conseil constitutionnel, et ce, avant la tenue d’une élection présidentielle.
Mais l’article 102 dispose que le président du Conseil de la nation, dans son nouveau statut de chef de l’Etat intérimaire, «exerce ses prérogatives dans le respect des dispositions de l’article 104 de la Constitution». L’article 104 vide, justement, de ses prérogatives présidentielles le chef de l’Etat intérimaire. «Il ne peut pas renvoyer le gouvernement en place, n’a pas le droit de dissoudre le Parlement, ni saisir le peuple par référendum sur une question donnée, ni réviser la Constitution, ni légiférer par ordonnance», souligne Zenati. «Avec quoi faire alors la transition ?» s’interroge-t-il.
Djamel Zenati attire l’attention sur l’inadéquation de l’application de l’article 102 avec les exigences du mouvement populaire qui réclame le changement du régime. «L’article 102 empêche toute possibilité de transition, c’est un article qui va préserver le système», assène-t-il, en avertissant sur ce à quoi risque de déboucher l’élection présidentielle que le régime entend organiser dans de telles conditions. «Ils vont revenir à travers un nouveau visage qu’ils vont mettre en avant ou, mieux, ils appliqueront le scénario égyptien», alerte-t-il.
Le scénario à l’égyptienne suppose que le régime actuel œuvrera pour aider les islamistes à gagner l’élection présidentielle et se substituer ensuite à eux dans les conditions que Djamel Zenati assimilent à celles de l’arrêt du processus électoral de 1992. «Le scénario égyptien c’est un peu le 1992 algérien», estime-t-il. Quoi qu’il en soit, l’article 102 ne permettra pas la transition et traduira une énième manœuvre du régime à ce maintenir.
Qu’est-ce qui expliquerait une telle obstination à s’agripper au pouvoir à travers la présidence ? «L’institution présidentielle en Algérie c’est la clé de voûte de tout l’édifice institutionnel. C’est à partir de la présidence que tout s’organise. Ils tiennent à elle parce qu’ils en ont encore besoin. C’est pour cela que Bouteflika a supplié de rester encore une année», explique le conférencier. Pour Djamel Zenati, le régime est à bout de souffle de proposition : «Une chose est sûre, c’est leur dernière carte, ils n’ont rien d’autre à proposer».
El Watan - Djamel Zenati (Photo : Lyès Habbache)
KAMEL MEDJEDOUB 31 MARS 2019 À 8 H 05 MIN 1932
Le besoin de débattre de l’actualité du pays induite par le mouvement populaire et les manœuvres du pouvoir est grand au sein de la population. Hier, plusieurs cafés littéraires, Aokas, Timezrit, Tichy et Béjaïa, ont convié des personnalités politiques et scientifiques à des rencontres publiques dans la wilaya.
Djamel Zenati, en fin observateur de la scène politique nationale, a animé une conférence-débat à la Maison des jeunes de Baccaro. Les détails et les enjeux de l’article 102 de la Constitution algérienne ont focalisé une partie des débats, illustrant toute la soif de l’heure, et le besoin de déjouer les pièges et de réussir le mouvement. Les appels à l’application de cette disposition constitutionnelle ont été nombreux à avoir été lancés, le dernier en date étant celui émanant de Gaïd Salah, le chef d’état-major de l’armée.
«Il n’y a pas que Gaïd Salah, Ouyahia aussi a appelé à son application, et c’est un grand problème», a lancé Zenati qui s’étonne, au passage, que l’ex-Premier ministre «s’exprime encore !» Si Gaïd Salah a appelé le Conseil constitutionnel à activer l’article en question pour constater l’impossibilité du président de la République à assumer ses fonctions, et son remplacement par Abdelkader Bensalah, Ouyahia viserait plutôt une disposition précise de l’article 102.
Ce que Djamel Zenati appelle «alinéa 4» est un des trois cas stipulés dans cet article et qui concerne, non pas une «maladie grave et durable», mais la démission ou le décès du président de la République. Dans ce cas précis, la Constitution prévoit que le président du Conseil de la nation prenne l’intérim pendant 90 jours, et non plus 135, pour organiser une élection présidentielle.
L’appel d’Ouyahia «est pire» que celui de Gaïd Salah, considère Zenati. «Si Bouteflika est mort, pourquoi alors ils ne nous le disent pas. Et pour sa démission, comment l’avoir alors qu’il refuse de démissionner ?» s’interroge le conférencier, qui conclut au projet de faire démissionner Bouteflika. «Ils veulent le faire démissionner, le destituer», précise-t-il.
Pour lui, Ouyahia n’appelle à rien d’autre qu’à «un coup d’Etat». Dans les deux cas, une présidence intérimaire est assurée pendant l’intervalle par le président du Sénat, ou même, dans un cas, par le président du Conseil constitutionnel, et ce, avant la tenue d’une élection présidentielle.
Mais l’article 102 dispose que le président du Conseil de la nation, dans son nouveau statut de chef de l’Etat intérimaire, «exerce ses prérogatives dans le respect des dispositions de l’article 104 de la Constitution». L’article 104 vide, justement, de ses prérogatives présidentielles le chef de l’Etat intérimaire. «Il ne peut pas renvoyer le gouvernement en place, n’a pas le droit de dissoudre le Parlement, ni saisir le peuple par référendum sur une question donnée, ni réviser la Constitution, ni légiférer par ordonnance», souligne Zenati. «Avec quoi faire alors la transition ?» s’interroge-t-il.
Djamel Zenati attire l’attention sur l’inadéquation de l’application de l’article 102 avec les exigences du mouvement populaire qui réclame le changement du régime. «L’article 102 empêche toute possibilité de transition, c’est un article qui va préserver le système», assène-t-il, en avertissant sur ce à quoi risque de déboucher l’élection présidentielle que le régime entend organiser dans de telles conditions. «Ils vont revenir à travers un nouveau visage qu’ils vont mettre en avant ou, mieux, ils appliqueront le scénario égyptien», alerte-t-il.
Le scénario à l’égyptienne suppose que le régime actuel œuvrera pour aider les islamistes à gagner l’élection présidentielle et se substituer ensuite à eux dans les conditions que Djamel Zenati assimilent à celles de l’arrêt du processus électoral de 1992. «Le scénario égyptien c’est un peu le 1992 algérien», estime-t-il. Quoi qu’il en soit, l’article 102 ne permettra pas la transition et traduira une énième manœuvre du régime à ce maintenir.
Qu’est-ce qui expliquerait une telle obstination à s’agripper au pouvoir à travers la présidence ? «L’institution présidentielle en Algérie c’est la clé de voûte de tout l’édifice institutionnel. C’est à partir de la présidence que tout s’organise. Ils tiennent à elle parce qu’ils en ont encore besoin. C’est pour cela que Bouteflika a supplié de rester encore une année», explique le conférencier. Pour Djamel Zenati, le régime est à bout de souffle de proposition : «Une chose est sûre, c’est leur dernière carte, ils n’ont rien d’autre à proposer».
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