REPORTERS.DZ
PAR SIHEM BOUNABI
L’actualité politique était au cœur de la
rencontre animée, avant-hier, par le professeur
Belaïd Abane, dans le cadre du café littéraire
de la Fondation Asselah, à Alger.
Lors de cette rencontre, l’écrivain et politologue a salué «la mise en mouvement» de la
contestation populaire en Algérie, ce qui démontre de l’imprégnation d’une certaine
conscience politique du citoyen qui fait la force
de ce mouvement. Tout en soulignant que l’Algérie est arrivée à un point de non-retour, il
estime qu’il est temps de passer à une période
de transition pour sortir de la crise.
Belaïd Abane a également mis en exergue le
fait que les manifestants ont fait preuve «d’une
organisation que je n’ai jamais vue auparavant.
Il y a une véritable émergence de la notion de
citoyenneté chez le peuple algérien dans le sens
profond du terme». Il appuie ses propos en soulignant que «j’ai constaté une solidarité, une
convivialité, un respect des valeurs citoyennes
qui montrent une véritable maturité citoyenne
et une force intelligente». Il a également salué
la sagesse des corps constitués, notamment l’armée, les services de sécurité et la police qui ont
fait preuve de retenue lors de ces marches citoyennes. Il estimera, toutefois, que même si la
spontanéité de ce mouvement peut prêter à de
nombreux questionnements et spéculations, le
fait est que le terreau existait et qu’il a suffi
d’un élément déclencheur, la goutte de trop du
5e
mandat, pour que le peuple exprime son rasle-bol d’un pouvoir et d’un système méprisants.
Au lendemain du sixième vendredi de marche,
Belaïd Abane met aussi en garde contre le risque d’embrasement de la situation.
Abordant la sortie médiatique de Gaïd Salah,
qui a «suggéré» l’application de l’article 102,
l’intervenant estime que l’Armée devrait «garder une position saine et ne pas être corrompue
par le combat politique», et «qu’il est temps de
tirer des leçons du passé et ne pas réitérer le
même scénario». Il rappelle que «le devoir de
l’Armée et de rester dans son rôle constitutionnel qui est la protection du territoire, de la nation et du peuple».
NÉCESSITÉ D’UN
ÉLECTROCHOC POLITIQUE
Dans ce sillage, Belaïd Abane estime que toutes
les lois, constitutionnelles et techniques ont été
obstruées, notamment avec l’arrêt de l’élection
et le verrouillage du Conseil constitutionnel. Il
souligne ainsi qu’«au moment où l’intérêt suprême de la nation doit primer, on est face à un
véritable vide juridique et qu’il n’y a pas de solutions constitutionnelles qui, de toute façon,
seront d’emblée rejetées par le peuple». Dès
lors, la véritable solution est un électrochoc politique. Soit une solution politique qui sera un
changement radical, en adéquation avec les revendications du peuple, il propose ainsi
«l’émergence d’un directoire national de la
transition». Ainsi, selon l’intervenant, six mois
seraient trop courts pour organiser des élections dans le contexte actuel, où le mouvement
citoyen ne s’est pas encore organisé en créant
de nouveaux partis politiques.
D’où la nécessité d’un directoire national de la
transition, composé de trois à cinq personnalités, qui auront une crédibilité nationale et internationale. Les critères du choix de ces personnes doivent être basés sur le fait que ces
personnes n’aient pas de sang sur les mains, ni
d’aff aires de corruption, ni avoir commis des
actes qui vont à l’encontre des intérêts supérieurs de l’Etat. Ces personnes seront entourées
par des compétences universitaires, juridiques,
et économiques et autres pour assurer cette période de transition qui pourrait durer deux années. Le deuxième point proposé pour cette
période de transition est la nomination d’un
gouvernement de technocrates qui devront signer une charte d’éthique politique pour la primauté de l’intérêt de la nation et de la souveraineté du peuple. Cette charte d’éthique devrait être également ratifi ée par tous les acteurs
politiques de cette période. Les autres points
proposés pour assurer cette période de transition sont la dissolution de l’Assemblée populaire nationale et la préparation d’élections
avec les nouveaux partis politiques émanant du
mouvement citoyen. Il conclut, en faisant la
proposition du passage d’un régime présidentiel à un régime parlementaire, ce qui serait
inédit et un véritable changement du système
qui pourrait faire tache d’huile en Afrique et
dans le monde arabe. Emanation de personnalités de la base vers le sommet. Le débat qui a
suivi l’intervention du professeur Belaïd Abane
a essentiellement tourné autour de propositions
concrètes pour assurer une sortie de crise. Parmi les propositions, celle de Rabah Zamoum,
fi ls du colonel Si Salah, chef de la Wilaya IV
durant la guerre de libération nationale, et neveu de Ali Zamoum, dont l’intervention a été
applaudie par l’assistance. Il met en relief le
fait qu’il s’agit maintenant de s’organiser pour
que des personnalités citoyennes émergent de
ce mouvement vers le sommet, pour être au
diapason des revendications. «Il est temps d’organiser des réunions au niveau des comités de
village et de quartier pour la désignation de délégués qui seront l’émanation de la base vers le
sommet mettant en avant la jeunesse et toutes
les tendances de la société pour arriver à un
véritable consensus». Pour sa part, le chroniqueur Kebdi Rabeh a insisté que l’acquis fondamental de ce mouvement de contestation populaire, à savoir le «fait qu’il a apparemment mis
fi n à la violence qui sévit dans la politique algérienne bien avant 1962» et qu’«aujourd’hui, il
devient crucial de sauvegarder ce climat de
non-violence». Il a été également applaudi lors
de ce débat. Le deuxième point essentiel présenté par l’intervenant et qu’«on soit capable
de récupérer l’écume des émanations du peuple», car «le deuxième acquis important mis en
relief par le mouvement populaire est la visibilité donnée aux compétences que l’on pensait
laminées. Une Algérie forte d’une jeunesse pétrie d’intelligence».
PAR SIHEM BOUNABI
L’actualité politique était au cœur de la
rencontre animée, avant-hier, par le professeur
Belaïd Abane, dans le cadre du café littéraire
de la Fondation Asselah, à Alger.
Lors de cette rencontre, l’écrivain et politologue a salué «la mise en mouvement» de la
contestation populaire en Algérie, ce qui démontre de l’imprégnation d’une certaine
conscience politique du citoyen qui fait la force
de ce mouvement. Tout en soulignant que l’Algérie est arrivée à un point de non-retour, il
estime qu’il est temps de passer à une période
de transition pour sortir de la crise.
Belaïd Abane a également mis en exergue le
fait que les manifestants ont fait preuve «d’une
organisation que je n’ai jamais vue auparavant.
Il y a une véritable émergence de la notion de
citoyenneté chez le peuple algérien dans le sens
profond du terme». Il appuie ses propos en soulignant que «j’ai constaté une solidarité, une
convivialité, un respect des valeurs citoyennes
qui montrent une véritable maturité citoyenne
et une force intelligente». Il a également salué
la sagesse des corps constitués, notamment l’armée, les services de sécurité et la police qui ont
fait preuve de retenue lors de ces marches citoyennes. Il estimera, toutefois, que même si la
spontanéité de ce mouvement peut prêter à de
nombreux questionnements et spéculations, le
fait est que le terreau existait et qu’il a suffi
d’un élément déclencheur, la goutte de trop du
5e
mandat, pour que le peuple exprime son rasle-bol d’un pouvoir et d’un système méprisants.
Au lendemain du sixième vendredi de marche,
Belaïd Abane met aussi en garde contre le risque d’embrasement de la situation.
Abordant la sortie médiatique de Gaïd Salah,
qui a «suggéré» l’application de l’article 102,
l’intervenant estime que l’Armée devrait «garder une position saine et ne pas être corrompue
par le combat politique», et «qu’il est temps de
tirer des leçons du passé et ne pas réitérer le
même scénario». Il rappelle que «le devoir de
l’Armée et de rester dans son rôle constitutionnel qui est la protection du territoire, de la nation et du peuple».
NÉCESSITÉ D’UN
ÉLECTROCHOC POLITIQUE
Dans ce sillage, Belaïd Abane estime que toutes
les lois, constitutionnelles et techniques ont été
obstruées, notamment avec l’arrêt de l’élection
et le verrouillage du Conseil constitutionnel. Il
souligne ainsi qu’«au moment où l’intérêt suprême de la nation doit primer, on est face à un
véritable vide juridique et qu’il n’y a pas de solutions constitutionnelles qui, de toute façon,
seront d’emblée rejetées par le peuple». Dès
lors, la véritable solution est un électrochoc politique. Soit une solution politique qui sera un
changement radical, en adéquation avec les revendications du peuple, il propose ainsi
«l’émergence d’un directoire national de la
transition». Ainsi, selon l’intervenant, six mois
seraient trop courts pour organiser des élections dans le contexte actuel, où le mouvement
citoyen ne s’est pas encore organisé en créant
de nouveaux partis politiques.
D’où la nécessité d’un directoire national de la
transition, composé de trois à cinq personnalités, qui auront une crédibilité nationale et internationale. Les critères du choix de ces personnes doivent être basés sur le fait que ces
personnes n’aient pas de sang sur les mains, ni
d’aff aires de corruption, ni avoir commis des
actes qui vont à l’encontre des intérêts supérieurs de l’Etat. Ces personnes seront entourées
par des compétences universitaires, juridiques,
et économiques et autres pour assurer cette période de transition qui pourrait durer deux années. Le deuxième point proposé pour cette
période de transition est la nomination d’un
gouvernement de technocrates qui devront signer une charte d’éthique politique pour la primauté de l’intérêt de la nation et de la souveraineté du peuple. Cette charte d’éthique devrait être également ratifi ée par tous les acteurs
politiques de cette période. Les autres points
proposés pour assurer cette période de transition sont la dissolution de l’Assemblée populaire nationale et la préparation d’élections
avec les nouveaux partis politiques émanant du
mouvement citoyen. Il conclut, en faisant la
proposition du passage d’un régime présidentiel à un régime parlementaire, ce qui serait
inédit et un véritable changement du système
qui pourrait faire tache d’huile en Afrique et
dans le monde arabe. Emanation de personnalités de la base vers le sommet. Le débat qui a
suivi l’intervention du professeur Belaïd Abane
a essentiellement tourné autour de propositions
concrètes pour assurer une sortie de crise. Parmi les propositions, celle de Rabah Zamoum,
fi ls du colonel Si Salah, chef de la Wilaya IV
durant la guerre de libération nationale, et neveu de Ali Zamoum, dont l’intervention a été
applaudie par l’assistance. Il met en relief le
fait qu’il s’agit maintenant de s’organiser pour
que des personnalités citoyennes émergent de
ce mouvement vers le sommet, pour être au
diapason des revendications. «Il est temps d’organiser des réunions au niveau des comités de
village et de quartier pour la désignation de délégués qui seront l’émanation de la base vers le
sommet mettant en avant la jeunesse et toutes
les tendances de la société pour arriver à un
véritable consensus». Pour sa part, le chroniqueur Kebdi Rabeh a insisté que l’acquis fondamental de ce mouvement de contestation populaire, à savoir le «fait qu’il a apparemment mis
fi n à la violence qui sévit dans la politique algérienne bien avant 1962» et qu’«aujourd’hui, il
devient crucial de sauvegarder ce climat de
non-violence». Il a été également applaudi lors
de ce débat. Le deuxième point essentiel présenté par l’intervenant et qu’«on soit capable
de récupérer l’écume des émanations du peuple», car «le deuxième acquis important mis en
relief par le mouvement populaire est la visibilité donnée aux compétences que l’on pensait
laminées. Une Algérie forte d’une jeunesse pétrie d’intelligence».