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    « La rue est passée du stade de la revendication à celui de force de proposition »

    TSA
    Par: Younès Djama 05 Mai 2019 à 07:15


    Quelle évaluation faites-vous des marches du 11e vendredi, notamment le contenu de slogans ?
    Toufik Bougaada, enseignant en sciences politiques. Ces marches ont prouvé l’unité du peuple algérien qui a mis en échec les tentatives de division. En termes de détermination à demander le départ des « trois B, les marches du 11e vendredi n’étaient pas différentes des précédentes marches. Bien au contraire, durant cette marche nous avons remarqué une créativité chez le peuple avec des slogans sous différentes formes et avec de nouveaux contenus. Parmi lesquels on peut citer le slogan brandi par un des manifestants et à travers lequel il explique que le peuple tient à sa silmya (pacifisme) et qu’il les disqualifiera avec son sang-froid. L’autre slogan le plus en vue, tout le long des trois derniers vendredis, consiste à dire que le maintien de Bensalah et Bédoui n’est que la continuité du 5e mandat (du président démissionnaire, Abdelaziz Bouteflika).

    Nous avons aussi vu que le nom de Bensalah est encore associé aux symboles de l’ancien système, malgré l’insistance de la rue sur la nécessité que l’armée accompagne la période de transition et cela s’est matérialisé par le slogan « djeich-chaâb khawa-khawa » (armée-peuple unis). Les manifestants ont également réitéré la revendication pour le jugement des symboles de la corruption. À rebours de l’option adoptée par le pouvoir, la rue a réclamé le jugement des symboles de la corruption politique. Et cela en partant du postulat qu’on ne peut assurer une justice sans jugement de ceux qui ont été à l’origine de la dilapidation des deniers publics et qui ont favorisé la corruption financière. La majorité des revendications ont porté sur le jugement de Saïd Bouteflika et l’emprisonnement d’Ahmed Ouyahia. Ce sont les symboles de la corruption politique qui ont facilité l’accès pour les hommes d’affaires à des facilitations et des privilèges en infraction à la loi.


    Ce qui a caractérisé ce 11e vendredi est l’apparition de propositions de certaines personnalités pour assurer la période de transition. De nombreux slogans ont réitéré le nom d’Ahmed Taleb Ibrahimi pour assurer la présidence du Conseil constitutionnel pour, ensuite, assurer le poste de chef d’État. Cette demande a été formulée dans plusieurs régions du pays, que ce soit à Alger, Constantine ou Batna…

    Même si le concerné a réservé une fin de non-recevoir…
    M. Taleb Ibrahimi s’est en effet excusé de ne pouvoir répondre à cette sollicitation pour raison de santé. Cependant, il demeure que cela dénote qu’au-delà de cette personnalité, le peuple est devenu maintenant une force de proposition en ce sens qu’il propose des solutions lesquelles peuvent être examinées et étudiées, et l’on peut même changer les personnalités. Il n’est pas dit que ce serait forcément Taleb Ibrahimi. La rue est passée du stade de la revendication à celui de force de propositions susceptibles d’être mises en œuvre.

    Est-ce que les élections du 4 juillet sont encore à l’ordre du jour du pouvoir?
    Je pense que les élections du 4 juillet ne sont plus possibles, et c’est une conviction du peuple algérien et qu’il a exprimée à travers ses slogans. Cette conviction de l’inutilité d’aller vers ces élections n’est pas seulement une conviction du peuple algérien, mais aussi c’est la conviction du pouvoir. Cela a été perceptible dans la lettre du chef de l’État Abdelkader Bensalah à l’occasion du la Fête des travailleurs, et nous avons perçu également cela dans le discours du chef d’état-major de mercredi dernier et dans lequel Gaid Salah avait insisté sur la nécessité d’aller vers des élections dans les plus brefs délais. On comprend, par là, que le pouvoir sait pertinemment qu’on ne peut aller vers ces élections du fait que les conditions ne sont pas réunies pour la tenue de ce scrutin, pas plus que les conditions opérationnelles surtout que de nombreux maires et des juges ont annoncé leur boycott de l’organisation et la supervision des élections. Il est donc impossible en l’état de crispation que vit la rue algérienne de tenir des élections dans ces conditions.

    Dans ce cas, quel est le scénario que vous projetez ?
    La lettre de Gaid Salah appelant au dialogue ainsi que le discours de Bensalah suggèrent qu’il y a un processus de dialogue en cours de préparation qui soit plus utile que les précédentes consultations pour lesquelles les conditions n’étaient pas réunies. C’est là une preuve que ces consultations ont été un échec avant même qu’elles ne commencent. Elles n’ont pas donné les résultats sur la base desquels le pouvoir pouvait mettre en place une instance indépendante pour l’organisation des élections.

    De mon point de vue, le pouvoir pourrait, comme première concession, annoncer l’annulation des élections prévues le 4 juillet. En second lieu, Bensalah dans son appel au dialogue devrait inclure sa disponibilité à étudier toutes les propositions qui font consensus au sein de la classe politique et de la population du Hirak, y compris le départ des trois B, dont lui-même.

    Un signe de bonne foi à l’adresse de la classe politique et du peuple, serait que les consultations donneront lieu à une feuille de route pour la période de transition dans laquelle lui et le Premier ministre ne seront pas parties prenantes.

    En outre, il est préférable que l’armée s’abstienne de lancer de messages politiques par le biais du commandement de l’état-major. De tels messages accentueront le sentiment de non-confiance voire l’inutilité de toute consultation. Il est aussi préférable que l’armée laisse la politique à ceux qui sont habilités constitutionnellement, plus précisément le chef de l’État.
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