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Singapour : laboratoire de la mondialisation en Asie

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  • Singapour : laboratoire de la mondialisation en Asie

    J'y suis en ce moment et franchement c'est le top. Sa devise pourrait etre labeur, travail, famille, prosperite.
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    Pionnière de la croissance économique dans la région, la cité-État croit toujours en son modèle, une « méritocratie » autoritaire qui a inspiré la Chine.

    LE CRAZY HORSE de Singapour a fermé le mois dernier après seulement un peu plus d'un an d'activité. L'établissement, sur le modèle du célèbre cabaret parisien, devait être un signe de plus de l'ouverture au monde de la cité-État, l'une des toutes premières réussites économiques asiatiques.

    Résolu à résister à la concurrence de la Chine et de l'Inde, Singapour entend se maintenir comme le pôle de modernité du Sud-Est asiatique, capable d'attirer touristes, investisseurs et chercheurs, garants d'une croissance durable.

    Pour cela, en plus des centres de haute technologie, des instituts de recherche et des campus d'universités prestigieuses comme l'Insead, deux ensembles touristiques ambitieux sont en projet sur un territoire où l'espace est compté. Des restaurants abriteront les meilleurs chefs de la planète et des casinos seront offerts à une clientèle chinoise de plus en plus nombreuse et que l'on sait adepte des tables de jeu.

    Mais, comme pour le Crazy Horse - dont l'échec est attribué aux restrictions publicitaires destinées à préserver la pudeur locale -, les machines à sous, la roulette et le black jack risquent de heurter les règles de moralité très strictes qui prévalent à Singapour depuis l'indépendance. Si Singapour éprouve le besoin de mettre à l'épreuve son mode de fonctionnement, c'est qu'en l'espace de quelques années la concurrence se renforce. À celle de Hongkong s'est ajoutée celle des grandes villes de la Chine continentale, comme Pékin, Shanghaï, ou Shenzhen, sans parler de Taïpeh et de Séoul et des autres centres d'Asie du Sud-Est. S'imposer sur le trajet des croisières touristiques, développer musées et activités culturelles, proposer aux patients étrangers des soins médicaux de qualité, parfois cinq fois moins cher qu'aux États-Unis sont de nouveaux axes de développement pour une cité-État qui se voit, avant tout, comme un laboratoire de haute technologie, un pôle financier et un centre d'affaires d'où les banques et les sociétés occidentales peuvent, en toute sécurité, s'attaquer au marché de la République populaire.

    Un territoire dépourvu de ressources naturelles

    Maintenant qu'ici aussi les délocalisations frappent les activités industrielles les moins sophistiquées, ce sont les Chinois de là-bas qui arrivent nombreux pour mettre à Singapour leur fortune à l'abri. Les nouveaux arrivants ne sont pas toujours accueillis à bras ouverts. Ainsi de ces femmes venues pour l'éducation de leurs enfants et qui, faute d'argent, sont contraintes à la prostitution.

    Mais Singapour sait qu'il est un des pionniers de la mondialisation et que sa prospérité en dépend. Le ministre des Affaires étrangères, George Yeo, résume la philosophie des dirigeants : « Nous sommes un petit bateau. Nous devons étudier soigneusement le courant, nous placer à l'endroit où il nous emmènera le plus loin et faire en sorte que tous les passagers comprennent la manoeuvre. »

    Kishore Mahbubani, ancien diplomate candidat malheureux au poste de secrétaire général de l'ONU et directeur de l'école Lee Kuan Yew de sciences politiques, voit dans « le haut degré de paranoïa » qui prévaut à Singapour l'un des moteurs qui font que ce territoire exigu, situé à l'extrémité de la péninsule malaise, dépourvu de ressources naturelles, ait pu survivre et prospérer, entouré de pays musulmans a priori hostiles. Au moment de l'indépendance, en 1965, des troubles raciaux avaient conduit Singapour, à majorité chinoise, à se séparer de la Malaisie pour fonder un État multiracial. Aujourd'hui, c'est la montée de l'islamisme et la menace du terrorisme qui contribuent à maintenir le niveau d'alerte.

    « Porte-avions des États-Unis »

    Depuis les attentats du 11 Septembre aux États-Unis, le pays a pris conscience que son rôle d'avant-garde de la modernité occidentale en fait une cible pour al-Qaida.

    « Singapour est perçu comme le porte-avions des États-Unis dans la région : c'est le pays le plus développé, une capitale culturelle et un centre de renseignements. C'est aussi ici que le groupe de la Jamaa Islamiya, qui sévit en Indonésie, a été détecté pour la première fois. Pour toutes ces raisons, nous sommes une cible du terrorisme », explique Rohan Gunaratna, directeur du Centre international sur la violence politique et la recherche sur le terrorisme, et auteur d'un livre de référence sur al-Qaida.

    L'Irak a transformé la menace terroriste, explique-t-il. En Asie du Sud-Est, les organisations terroristes comme la Jemaah Islamiyah ou le groupe Abu Sayyaf se sont « arabisées », ont augmenté la coopération entre elles et ciblent désormais les États-Unis ou leurs alliés, plutôt que les autorités locales. « Si nous avons réussi à réduire la menace opérationnelle des groupes terroristes grâce à la coopération internationale entre services de renseignements, la menace idéologique de l'extrémisme s'est accrue », ajoute Rohan Gunaratna, dont le centre tient une base de données sur les organisations terroristes dans le monde.

    Avec sa petite taille et un contrôle étroit de sa population, Singapour a les moyens que d'autres n'ont pas de se mettre à l'abri de cet extrémisme. Depuis l'indépendance, l'accent est mis sur l'aspect multiracial de la société, la « méritocratie » et l'intégration volontariste des communautés.

    Des quotas sont ainsi fixés dans les ensembles de logements pour que les minorités, malaise ou indienne, ne se retrouvent pas rejetées dans des ghettos. À l'école, le port de l'uniforme fait que la question du voile islamique ne se pose pas.

    « Les mosquées sont financées par la communauté, sans intervention étrangère, et nous surveillons de très près tous ceux qui veulent venir chez nous. Nous ne voulons pas d'extrémistes », explique le ministre chargé des affaires musulmanes, Dr Yaacob Ibrahim. Quatre cents élèves sont autorisés à suivre leur scolarité dans des madrasas, au programme soigneusement contrôlé.

    Les autorités envisagent de créer sur place un collège islamique pour former les imams, qui, pour l'instant, se rendent à l'université al-Azhar du Caire, bien encadrés, avant leur départ comme pendant leur séjour, et après... Dr Yacoob reconnaît qu'un tel contrôle de la population n'est possible que parce qu'elle est peu nombreuse, mais la prudence n'en est, selon lui, que plus nécessaire : « Nous ne pouvons rester à l'écart des influences extérieures. À cause de notre petite taille, nous ne pouvons pas nous permettre la moindre erreur. Une émeute raciale serait beaucoup plus grave ici qu'ailleurs. »

    Au pays de Lee Kuan Yew, le théoricien des « valeurs asiatiques », pour qui le développement économique prime sur l'ouverture démocratique, un seul parti domine la politique depuis l'indépendance. Dans un quartier fait de hautes tours d'habitation comme il y en a tant à Singapour, le député Michael Palmer tient sa perma*nence, chaque mardi soir, comme il le ferait dans une vraie démocratie.

    La suite...
    Dernière modification par zek, 20 mars 2007, 09h50.
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

  • #2
    « La loi est la loi, et ne souffre pas d'exception »

    Dans la cité, pas un papier gras ne traîne. Au pied des immeubles, les enfants ont droit à leur cour de récréation, les adultes peuvent se maintenir en forme en suivant le parcours de santé et les anciens ont leur coin télé où ils peuvent discuter entre eux. Le tout est impeccable et placé sous la surveillance bienveillante d'un détachement de résidants volontaires dédiés au bien-être de la collectivité.

    Le député reçoit les plaintes de ses électeurs et tente d'y répondre du mieux qu'il peut. Avocat, il peut aider à faire avancer une cause. Mais pas toujours. Dans ce pays où la détention de drogue mène à la peine capitale et à la pendaison, on ne badine pas avec la loi.

    Ce soir, Michael Palmer a devant lui un père séparé de sa petite fille depuis deux ans. La mère, une Philippine venue à Singapour avec un contrat d'employée de maison, s'est mise hors la loi en ayant une liaison sur place, circonstance formellement prohibée par son permis de résidence. Le père aura beau pleurer, plaider des dommages psychiatriques, rien n'y fera. « La loi est la loi, et ne souffre pas d'exception », lui répète son député après être intervenu auprès du ministre concerné. Le bannissement de la mère et de l'enfant est censé être dissuasif. Il ne sera pas levé.

    Deng Xiao Ping s'était inspiré de Singapour lorsque, en 1978, il avait lancé la Chine populaire sur le chemin de l'économie capitaliste. Le succès de l'entreprise, en l'absence de toute ouverture politique à Pékin, conforte les dirigeants singapouriens dans la conviction que leur recette est la bonne.

    En Afrique et au Moyen-Orient et au Maghreb, ils voient leur modèle, qui ne s'encombre pas de préceptes démocratiques ou d'impératifs de défense des droits de l'homme, susciter un intérêt croissant. Pour Kishore Mahbubani, « les pays arabes sont de moins en moins attirés par les États-Unis et l'Occident. Ils regardent vers nous. L'Asie pourra peut-être, mieux que l'Amérique, les aider à entrer dans la modernité ». Avec l'Arabie saoudite et les monarchies du Golfe, Singapour est en train de multiplier les contacts. Vue de Singapour, l'Europe paraît lointaine, présente avec ses entreprises mais politiquement peu impliquée dans la région. « Nous aimerions que l'Europe joue un rôle plus actif en Asie », relève le premier ministre, Lee Hsien Loong, fils de Lee Kuan Yew, arrivé en 2004 à la tête du gouvernement. « À la différence des États-Unis, vous ne voyez pas l'enjeu stratégique que l'Asie représente pour vous. Si l'Europe veut jouer un rôle significatif dans le monde, elle ne peut pas ignorer l'Asie. »

    PIERRE ROUSSELIN.
    12 mars 2007. Le Figaro
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

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