L’exploitation du gaz de schiste dévaste les États-Unis
27 juin 2019- Reporterre
Grâce à l’exploitation des roches de schiste, la production de gaz et de pétrole américaine explose. Et cause des dégâts environnementaux en pagaille : destruction des paysages, pollution des eaux, séismes locaux, voie migratoire des oiseaux chamboulée, émissions de méthane...
Washington (États-Unis), correspondance
En quelques années, les États-Unis sont devenus les rois du pétrole. L’Energy Information Administration (EIA) table sur une moyenne de 12,45 millions de barils produits par jour en 2019 et 13,38 en 2020. « La production américaine de pétrole est 2,5 fois plus importante qu’en 2008 », calcule Daniel Yergin, de la société de consulting IHS. Si bien que le pays est devenu le premier producteur mondial, devant la Russie et l’Arabie saoudite. D’ici quelques années, il devrait même devenir exportateur net.
La production de gaz naturel a elle aussi connu son plus haut niveau en 2018, en hausse de 11% par rapport à 2017, elle-même déjà une année record, selon l’EIA. Le sous-secrétaire d’État à l’énergie a d’ailleurs trouvé un nouveau nom pour désigner cette ressource qui a vocation à s’exporter : le « freedom gas » (« gaz de la liberté »).
Selon la Commission européenne, les exportations de gaz naturel liquide américain vers l’Europe ont augmenté de 272 % depuis juillet 2018.
Les paysages de plusieurs États américains ont été défigurés par les forages
À l’origine de ce phénomène, le boom de l’exploitation des roches de schiste depuis une quinzaine d’années. Le gaz de schiste a par exemple représenté 67 % de la production de gaz naturel sec en 2017. Et l’EIA prédit que le pétrole et le gaz de schiste fourniront encore la moitié des ressources énergétiques en 2050. Les apôtres de l’exploitation du gaz et du pétrole de schiste arguent qu’elle permet d’obtenir une énergie plus propre que le pétrole conventionnel ou le charbon tout en investissant pendant ce temps-là dans les énergies vertes. Les défenseurs de l’environnement dénoncent, eux, ses conséquences ravageuses : destruction des paysages, pollution des eaux, séismes locaux, émission de gaz à effet de serre… Ce nouvel eldorado a, aussi, un coût pour la santé (cancers, naissances prématurées, impacts sur le système nerveux et respiratoire…) puisque 17 millions d’Américains vivent désormais à moins de 1,6 kilomètre d’un puits de gaz ou de pétrole.
En Pennsylvanie, comme dans d’autres États, les forages trouent les forêts, les plaines ou les terres agricoles.
Pennsylvanie, Texas, Dakota du Nord… Les paysages de plusieurs États ont été défigurés par les forages. Une étude publiée dans la revue Science en 2015 estimait déjà que des millions d’hectares de Grandes Plaines des États-Unis et du Canada étaient « en train d’être transformés en paysages industrialisés ». « C’est l’échelle de cette transformation qui est importante, car l’accumulation de la dégradation des terres peut avoir un impact à l’échelle continentale qu’on ne peut pas détecter lorsqu’on se focalise sur une seule région », écrivent les auteurs.
Ils font état d’une « perte directe de végétation » au profit, par exemple, de la construction de routes d’acheminement d’hydrocarbures. Entre 2000 et 2012, c’est l’équivalent de plus de la moitié du pâturage annuel sur les terres publiques gérées par le Bureau de gestion du territoire américain (Bureau of Land Management) qui a disparu.
Sur les terres agricoles, la perte est équivalente à 120,2 millions de boisseaux de blé, soit environ 6 % du blé produit en 2013 dans le Midwest.
Les auteurs ont également estimé les conséquences sur la vie sauvage :
- voies migratoires chamboulées,
- comportement et mortalité de la faune modifiés,
- plantes invasives encouragées à s’implanter.
Autre coût environnemental : La pollution des eaux
engendrée par la technique utilisée depuis la fin des années 1990 pour extraire le pétrole et le gaz de schiste, appelée fracturation hydraulique (ou fracking). Pour briser la roche enfouie sous terre, il faut une quantité phénoménale d’eau et de produits chimiques injectés à forte pression. Le pompage sur place de cette ressource ou son importation depuis des lacs ou des rivières d’autres États menace les réserves d’eau potable. Des fuites risquent de polluer les nappes phréatiques, et le stockage des eaux usées ainsi que leur transport sont eux aussi des sources de pollution potentielle.
Le problème n’a fait qu’évoluer avec le temps. Une étude publiée dans Sciences Advances a conclu que les entreprises de forage ont utilisé 770 % d’eau supplémentaire par puits entre 2011 et 2016. Conséquence : une augmentation de 1 440 % d’eaux usées toxiques relâchées.
Le stockage et le transport des eaux usées, utilisées pour fracturer la roche, sont des sources de pollution potentielle.
27 juin 2019- Reporterre
Grâce à l’exploitation des roches de schiste, la production de gaz et de pétrole américaine explose. Et cause des dégâts environnementaux en pagaille : destruction des paysages, pollution des eaux, séismes locaux, voie migratoire des oiseaux chamboulée, émissions de méthane...
Washington (États-Unis), correspondance
En quelques années, les États-Unis sont devenus les rois du pétrole. L’Energy Information Administration (EIA) table sur une moyenne de 12,45 millions de barils produits par jour en 2019 et 13,38 en 2020. « La production américaine de pétrole est 2,5 fois plus importante qu’en 2008 », calcule Daniel Yergin, de la société de consulting IHS. Si bien que le pays est devenu le premier producteur mondial, devant la Russie et l’Arabie saoudite. D’ici quelques années, il devrait même devenir exportateur net.
La production de gaz naturel a elle aussi connu son plus haut niveau en 2018, en hausse de 11% par rapport à 2017, elle-même déjà une année record, selon l’EIA. Le sous-secrétaire d’État à l’énergie a d’ailleurs trouvé un nouveau nom pour désigner cette ressource qui a vocation à s’exporter : le « freedom gas » (« gaz de la liberté »).
Selon la Commission européenne, les exportations de gaz naturel liquide américain vers l’Europe ont augmenté de 272 % depuis juillet 2018.
Les paysages de plusieurs États américains ont été défigurés par les forages
À l’origine de ce phénomène, le boom de l’exploitation des roches de schiste depuis une quinzaine d’années. Le gaz de schiste a par exemple représenté 67 % de la production de gaz naturel sec en 2017. Et l’EIA prédit que le pétrole et le gaz de schiste fourniront encore la moitié des ressources énergétiques en 2050. Les apôtres de l’exploitation du gaz et du pétrole de schiste arguent qu’elle permet d’obtenir une énergie plus propre que le pétrole conventionnel ou le charbon tout en investissant pendant ce temps-là dans les énergies vertes. Les défenseurs de l’environnement dénoncent, eux, ses conséquences ravageuses : destruction des paysages, pollution des eaux, séismes locaux, émission de gaz à effet de serre… Ce nouvel eldorado a, aussi, un coût pour la santé (cancers, naissances prématurées, impacts sur le système nerveux et respiratoire…) puisque 17 millions d’Américains vivent désormais à moins de 1,6 kilomètre d’un puits de gaz ou de pétrole.
En Pennsylvanie, comme dans d’autres États, les forages trouent les forêts, les plaines ou les terres agricoles.
Pennsylvanie, Texas, Dakota du Nord… Les paysages de plusieurs États ont été défigurés par les forages. Une étude publiée dans la revue Science en 2015 estimait déjà que des millions d’hectares de Grandes Plaines des États-Unis et du Canada étaient « en train d’être transformés en paysages industrialisés ». « C’est l’échelle de cette transformation qui est importante, car l’accumulation de la dégradation des terres peut avoir un impact à l’échelle continentale qu’on ne peut pas détecter lorsqu’on se focalise sur une seule région », écrivent les auteurs.
Ils font état d’une « perte directe de végétation » au profit, par exemple, de la construction de routes d’acheminement d’hydrocarbures. Entre 2000 et 2012, c’est l’équivalent de plus de la moitié du pâturage annuel sur les terres publiques gérées par le Bureau de gestion du territoire américain (Bureau of Land Management) qui a disparu.
Sur les terres agricoles, la perte est équivalente à 120,2 millions de boisseaux de blé, soit environ 6 % du blé produit en 2013 dans le Midwest.
Les auteurs ont également estimé les conséquences sur la vie sauvage :
- voies migratoires chamboulées,
- comportement et mortalité de la faune modifiés,
- plantes invasives encouragées à s’implanter.
Autre coût environnemental : La pollution des eaux
engendrée par la technique utilisée depuis la fin des années 1990 pour extraire le pétrole et le gaz de schiste, appelée fracturation hydraulique (ou fracking). Pour briser la roche enfouie sous terre, il faut une quantité phénoménale d’eau et de produits chimiques injectés à forte pression. Le pompage sur place de cette ressource ou son importation depuis des lacs ou des rivières d’autres États menace les réserves d’eau potable. Des fuites risquent de polluer les nappes phréatiques, et le stockage des eaux usées ainsi que leur transport sont eux aussi des sources de pollution potentielle.
Le problème n’a fait qu’évoluer avec le temps. Une étude publiée dans Sciences Advances a conclu que les entreprises de forage ont utilisé 770 % d’eau supplémentaire par puits entre 2011 et 2016. Conséquence : une augmentation de 1 440 % d’eaux usées toxiques relâchées.
Le stockage et le transport des eaux usées, utilisées pour fracturer la roche, sont des sources de pollution potentielle.
Commentaire