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La Littératures....

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  • La Littératures....

    La littérature n'est pas née le jour où un jeune garçon criant « au loup, au loup ! » a jailli d’une vallée néandertalienne, un grand loup gris sur ses talons : la littérature est née le jour où un jeune garçon a crié « au loup, au loup ! » alors qu'il n'y avait aucun loup derrière lui. Que ce pauvre petit, victime de ses mensonges répétés, ait fini par se faire dévorer par un loup en chair et en os est ici relativement accessoire. Voici ce qui est important : c'est qu'entre le loup au coin du bois et le loup au coin d'une page, il y a comme un chatoyant maillon. Ce maillon, ce prisme, c’est l'art littéraire.
    La littérature est invention. La fiction est fiction. Appeler une histoire « histoire vraie », c’est faire injure à la fois à l'art et à la vérité. Tout grand écrivain est un grand illusionniste, mais telle également est l’architrompeuse Nature. La Nature trompe sans cesse.
    De la simple supercherie de la reproduction à l'illusion prodigieusement complexe des mimétismes protecteurs chez les papillons ou chez les oiseaux, il y a dans la Nature un merveilleux appareil de charmes et d'artifices. L'écrivain de fiction ne fait que suivre la voie tracée par la Nature.
    Revenons un instant à notre petit sauvage criant « au loup ! » au sortir du bois ; on peut en quelque sorte résumer la chose ainsi : la magie de l'art était dans l'ombre du loup qu'il a délibérément inventé, dans son rêve du loup. Après quoi, l'histoire des tours qu'il avait joués fit une bonne histoire. Enfin, lorsqu'il mourut, le récit de son histoire prit valeur d'exemple la nuit autour des feux de camp. Mais le petit magicien, c'était lui. L'inventeur, c'était lui.

    Vladimir Nabokov, Littératures / 1, traduction Hélène Pasquier, Fayard, 1983

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