contribution et témoignage de feu Benyoucef Ben Khedda,membre du comité central du PPA/MTLD , président du GPRA d'Aout 61 à septembre 62
Dans ces moments troubles de l'histoire nationale ou les cachiristes d'aujourd'hui,héritiers des harkis d'hier lancent une offensive sans précédent contre les fondements et les hommes de la révolution de novembre 54 et de son congrès structurant de la soummam en 1956.
L’apport de Ramdane Abbane à la Révolution
43ème Anniversaire du Congrès de la Soummam
Benyoucef Ben Khedda La tribune/ Mercredi 18 Août 1999
Abbane Ramdane a toujours constitué une énigme dans notre histoire
nationale : plus particulièrement celle de la guerre de libération.
Cette particularité est due au caractère exceptionnel de cet homme qui
a su marquer la révolution. Elle est due aussi à la manière avec
laquelle les gardiens de la mémoire officielle ont orienté l’écriture
de cette page de notre histoire. Beaucoup de choses n’ont pas encore
été dites sur la période 1954-62; des zones d’ombre subsistent et
menacent à chaque fois cette mémoire officielle de s’écrouler. C’est
ainsi : les totems finissent toujours par tomber et le temps en est
le plus grand ennemi. Mais cette chute n’est pas sans danger si notre
histoire n’est pas assumée dans la sérénité et par le débat
démocratique. Sans préjugés ni a priori.L’affaire Abane, qui nous
hante depuis l’indépendance, a rejailli cette fois-ci à la faveur de
la publication des Mémoires de Ali Kafi. Les passages qu’il a
consacrés dans son livre à Abane Ramdane ont soulevé un tollé général
dont nous espérons qu’il se traduise en un débat fécond sur la guerre
de libération et les tragédies qui l’ont accompagnées. La réponse de
Benyoucef Benkhedda aux écrits de Kafi sont à ce titre fort louables
et permettent de mieux saisir la personnalité exceptionnelle de celui
qui fut l’un des grands stratèges de larévolution. La Tribune
Chaque année la date du 20 août vient nous rappeler l’un des
moments-charnières de notre guerre de libération: le Congrès de la
Soummam, c’est-à-dire les premières assises de la jeune révolution
algérienne, en 1956. Un tel événement-fondateur a imprimé à
l’histoire de notre lutte un tournant majeur par la plate-forme qui en
est issue et qui trace les contours de l’édifice institutionnel de la
Révolution. On y retrouve, explicités, les trois éléments clés qui
identifient la nature du mouvement de libération et sous-tendent sa
cohérence idéologique et politique : une légitimité révolutionnaire
articulée sur un programme et une stratégie structurée; un statut
organique définissant les rouages de la Révolution et leur mode de
fonctionnement; une direction unique et homogène.Le nom du Congrès de
la Soummam reste intimement lié à celui d’un personnage d’une trempe
peu commune: Ramdane Abbane. Homme de conviction et de caractère, il
a été l’un des principaux promoteurs de l’idée de ce Congrès, comme il
a été à la fois l’inspirateur avisé de ses orientations et l’artisan
déterminé de sa préparation et de son succès.
Un homme de passion
Tout autant, le souvenir de Abbane demeure également associé à une
autre ‘uvre maîtresse pour la réussite de laquelle il s’est dépensé
avec passion: la promotion de la Zone autonome d’Alger -la fameuse
ZAA- en un fer de lance d’une redoutable efficacité. C’est sous ses
auspices, en effet, que l’organisation FLN/ALN d’Alger a pris un essor
fulgurant. Si elle s’est transformée en vitrine éloquente de la
Révolution en marche, l’élan incisif qu’il a su lui communiquer y est
certainement pour beaucoup.Abbane n’avait de cesse de hisser Alger au
rang de capitale de l’Algérie en armes. Avec l’installation en
septembre 1956 de l’Exécutif suprême du FLN dans cette agglomération,
il trouva en Ben M’hidi le compagnon idéal qui nourrissait des
ambitions identiques. Ensemble désormais, ils s’acharneront à mettre
Alger au diapason d’une ville symbole d’une fière citadelle où se
développait dans le vacarme des bombes, l’expérience inédite des
maquis urbains. Le triumvirat que nous formions alors avait reçu du
CCE mandat de superviser l’organisation algéroise. A leurs côtés, et
tout en y contribuant de mon mieux, j’ai pu apprécier combien leur
rôle avait été déterminant pour insuffler une âme au combat de la ZAA.
En améliorant et en renforçant les capacités de ses deux branches,
politique et militaire, en l’impliquant chaque jour davantage dans une
confrontation exacerbée avec l’ennemi, ils ont permis à la Zone
autonome de conquérir ses lettres de noblesse. En peu de temps, ils
ont réussi à faire de cet appareil révolutionnaire de premier ordre,
un outil offensif doté d’une force d’impact considérable. Les deux
chapitres qui suivent, consacrés successivement au Congrès de la
Soummam et à la Zone autonome d’Alger, font partie d’un livre en
chantier devant paraître prochainement (plaise à Dieu). Je profite de
l’occasion du 20 août pour en livrer la première mouture et apporter
ensuite mon témoignage sur le personnage Abbane, l’un des plus grands
acteurs de l’histoire du mouvement national. Un événement ne saurait
être saisi et compris que s’il est replacé dans son contexte
historique . a) Le contexte historique En Algérie: On sait que
l’insurrection algérienne a été déclenchée par les éléments du CRUA
(Comité révolutionnaire pour l’unité et l’action), tous issus de l’OS
(Organisation Spéciale) branche armée du PPA-MTLD, à la suite de
l’éclatement de la direction de ce parti en deux factions: Comité
central et Messali.La direction du Mouvement national révolutionnaire
assurée jusque-là par le Comité central du PPA-MTLD passe alors aux
«6» du CRUA qui sort au grand jour le 1er Novembre 1954 sous le sigle
du FLN (Front de libération nationale).Le partage des responsabilités
entre les «6» , après la réunion du 23 octobre 1954 à Bologhine
(ex-Saint-Eugène), s’était fait ainsi :Zone 1, Aurès-Némencha,
Mustapha Ben Boulaïd,Zone 2, Nord-constantinois, Mourad Didouche,Zone
3, Kabylie, Belkacem Krim,Zone 4, Algérois, Rabah Bitat,Zone 5,
Oranie, Mohammed-Larbi Ben M’hidi. (Les zones seront remplacées par
les wilayate après le Congrès de la Soummam).Boudiaf, quant à lui,
désigné «coordonnateur» par ses pairs, s’envole pour Le Caire porteur
de la Proclamation du 1er Novembre 1954 qui sera lue sur les ondes de
Sawt-El-Arab, la Radio du Caire, dans la nuit du 31 octobre au 1er
Novembre 1954. Ben Bella, Aït Ahmed et Khider, établis déjà depuis
deux ou trois ans dans la capitale égyptienne où ils représentaient la
délégation extérieure du PPA-MTLD avaient entre-temps opté pour le
CRUA et avec les «6» ils constituaient à «9» la première direction du
FLN.Avant de se séparer à Bologhine, les «6» s’étaient donné
rendez-vous à la mi-janvier 1955, semble-t-il, pour une évaluation de
la situation ; les événements surgis de la guerre ne leur permirent
pas de se rencontrer.Didouche meurt le 12 janvier 1955 dans un combat
face à l’ennemi. Ben Boulaïd est arrêté le 12 février 1955 à la
frontière tuniso-libyenne, alors qu’il se rendait au Caire pour hâter
l’entrée des armes promises.Boudiaf et Ben M’hidi se déplacent entre
le Maroc et l’Egypte en vue de prospecter le marché des armes et
organiser leur envoi en Algérie.Abbane, libéré en janvier 1955 après 5
ans de détention, regagne son village natal de Azzouza en Kabylie.
Là, il est contacté par Krim et Ouamrane.Bitat est arrêté le 23 mars
1955. Ouamrane prend la relève à la tête de la zone IV et confie, en
accord avec Krim, la responsabilité d’Alger à Abbane.Une «direction»
de fait s’impose avec Abbane, qui en devient l’âme, Krim, chef de la
zone de la Kabylie et Ouamrane, chef de l’Algérois ; Ben Khedda est
l’un des assistants de Abbane au début de 1956.Abbane impulse à cette
direction un souffle nouveau ; elle devient la véritable direction
nationale de l’Algérie, un centre de coordination entre les chefs de
l’intérieur et entre ces derniers et ceux de l’extérieur.
Dans ces moments troubles de l'histoire nationale ou les cachiristes d'aujourd'hui,héritiers des harkis d'hier lancent une offensive sans précédent contre les fondements et les hommes de la révolution de novembre 54 et de son congrès structurant de la soummam en 1956.
L’apport de Ramdane Abbane à la Révolution
43ème Anniversaire du Congrès de la Soummam
Benyoucef Ben Khedda La tribune/ Mercredi 18 Août 1999
Abbane Ramdane a toujours constitué une énigme dans notre histoire
nationale : plus particulièrement celle de la guerre de libération.
Cette particularité est due au caractère exceptionnel de cet homme qui
a su marquer la révolution. Elle est due aussi à la manière avec
laquelle les gardiens de la mémoire officielle ont orienté l’écriture
de cette page de notre histoire. Beaucoup de choses n’ont pas encore
été dites sur la période 1954-62; des zones d’ombre subsistent et
menacent à chaque fois cette mémoire officielle de s’écrouler. C’est
ainsi : les totems finissent toujours par tomber et le temps en est
le plus grand ennemi. Mais cette chute n’est pas sans danger si notre
histoire n’est pas assumée dans la sérénité et par le débat
démocratique. Sans préjugés ni a priori.L’affaire Abane, qui nous
hante depuis l’indépendance, a rejailli cette fois-ci à la faveur de
la publication des Mémoires de Ali Kafi. Les passages qu’il a
consacrés dans son livre à Abane Ramdane ont soulevé un tollé général
dont nous espérons qu’il se traduise en un débat fécond sur la guerre
de libération et les tragédies qui l’ont accompagnées. La réponse de
Benyoucef Benkhedda aux écrits de Kafi sont à ce titre fort louables
et permettent de mieux saisir la personnalité exceptionnelle de celui
qui fut l’un des grands stratèges de larévolution. La Tribune
Chaque année la date du 20 août vient nous rappeler l’un des
moments-charnières de notre guerre de libération: le Congrès de la
Soummam, c’est-à-dire les premières assises de la jeune révolution
algérienne, en 1956. Un tel événement-fondateur a imprimé à
l’histoire de notre lutte un tournant majeur par la plate-forme qui en
est issue et qui trace les contours de l’édifice institutionnel de la
Révolution. On y retrouve, explicités, les trois éléments clés qui
identifient la nature du mouvement de libération et sous-tendent sa
cohérence idéologique et politique : une légitimité révolutionnaire
articulée sur un programme et une stratégie structurée; un statut
organique définissant les rouages de la Révolution et leur mode de
fonctionnement; une direction unique et homogène.Le nom du Congrès de
la Soummam reste intimement lié à celui d’un personnage d’une trempe
peu commune: Ramdane Abbane. Homme de conviction et de caractère, il
a été l’un des principaux promoteurs de l’idée de ce Congrès, comme il
a été à la fois l’inspirateur avisé de ses orientations et l’artisan
déterminé de sa préparation et de son succès.
Un homme de passion
Tout autant, le souvenir de Abbane demeure également associé à une
autre ‘uvre maîtresse pour la réussite de laquelle il s’est dépensé
avec passion: la promotion de la Zone autonome d’Alger -la fameuse
ZAA- en un fer de lance d’une redoutable efficacité. C’est sous ses
auspices, en effet, que l’organisation FLN/ALN d’Alger a pris un essor
fulgurant. Si elle s’est transformée en vitrine éloquente de la
Révolution en marche, l’élan incisif qu’il a su lui communiquer y est
certainement pour beaucoup.Abbane n’avait de cesse de hisser Alger au
rang de capitale de l’Algérie en armes. Avec l’installation en
septembre 1956 de l’Exécutif suprême du FLN dans cette agglomération,
il trouva en Ben M’hidi le compagnon idéal qui nourrissait des
ambitions identiques. Ensemble désormais, ils s’acharneront à mettre
Alger au diapason d’une ville symbole d’une fière citadelle où se
développait dans le vacarme des bombes, l’expérience inédite des
maquis urbains. Le triumvirat que nous formions alors avait reçu du
CCE mandat de superviser l’organisation algéroise. A leurs côtés, et
tout en y contribuant de mon mieux, j’ai pu apprécier combien leur
rôle avait été déterminant pour insuffler une âme au combat de la ZAA.
En améliorant et en renforçant les capacités de ses deux branches,
politique et militaire, en l’impliquant chaque jour davantage dans une
confrontation exacerbée avec l’ennemi, ils ont permis à la Zone
autonome de conquérir ses lettres de noblesse. En peu de temps, ils
ont réussi à faire de cet appareil révolutionnaire de premier ordre,
un outil offensif doté d’une force d’impact considérable. Les deux
chapitres qui suivent, consacrés successivement au Congrès de la
Soummam et à la Zone autonome d’Alger, font partie d’un livre en
chantier devant paraître prochainement (plaise à Dieu). Je profite de
l’occasion du 20 août pour en livrer la première mouture et apporter
ensuite mon témoignage sur le personnage Abbane, l’un des plus grands
acteurs de l’histoire du mouvement national. Un événement ne saurait
être saisi et compris que s’il est replacé dans son contexte
historique . a) Le contexte historique En Algérie: On sait que
l’insurrection algérienne a été déclenchée par les éléments du CRUA
(Comité révolutionnaire pour l’unité et l’action), tous issus de l’OS
(Organisation Spéciale) branche armée du PPA-MTLD, à la suite de
l’éclatement de la direction de ce parti en deux factions: Comité
central et Messali.La direction du Mouvement national révolutionnaire
assurée jusque-là par le Comité central du PPA-MTLD passe alors aux
«6» du CRUA qui sort au grand jour le 1er Novembre 1954 sous le sigle
du FLN (Front de libération nationale).Le partage des responsabilités
entre les «6» , après la réunion du 23 octobre 1954 à Bologhine
(ex-Saint-Eugène), s’était fait ainsi :Zone 1, Aurès-Némencha,
Mustapha Ben Boulaïd,Zone 2, Nord-constantinois, Mourad Didouche,Zone
3, Kabylie, Belkacem Krim,Zone 4, Algérois, Rabah Bitat,Zone 5,
Oranie, Mohammed-Larbi Ben M’hidi. (Les zones seront remplacées par
les wilayate après le Congrès de la Soummam).Boudiaf, quant à lui,
désigné «coordonnateur» par ses pairs, s’envole pour Le Caire porteur
de la Proclamation du 1er Novembre 1954 qui sera lue sur les ondes de
Sawt-El-Arab, la Radio du Caire, dans la nuit du 31 octobre au 1er
Novembre 1954. Ben Bella, Aït Ahmed et Khider, établis déjà depuis
deux ou trois ans dans la capitale égyptienne où ils représentaient la
délégation extérieure du PPA-MTLD avaient entre-temps opté pour le
CRUA et avec les «6» ils constituaient à «9» la première direction du
FLN.Avant de se séparer à Bologhine, les «6» s’étaient donné
rendez-vous à la mi-janvier 1955, semble-t-il, pour une évaluation de
la situation ; les événements surgis de la guerre ne leur permirent
pas de se rencontrer.Didouche meurt le 12 janvier 1955 dans un combat
face à l’ennemi. Ben Boulaïd est arrêté le 12 février 1955 à la
frontière tuniso-libyenne, alors qu’il se rendait au Caire pour hâter
l’entrée des armes promises.Boudiaf et Ben M’hidi se déplacent entre
le Maroc et l’Egypte en vue de prospecter le marché des armes et
organiser leur envoi en Algérie.Abbane, libéré en janvier 1955 après 5
ans de détention, regagne son village natal de Azzouza en Kabylie.
Là, il est contacté par Krim et Ouamrane.Bitat est arrêté le 23 mars
1955. Ouamrane prend la relève à la tête de la zone IV et confie, en
accord avec Krim, la responsabilité d’Alger à Abbane.Une «direction»
de fait s’impose avec Abbane, qui en devient l’âme, Krim, chef de la
zone de la Kabylie et Ouamrane, chef de l’Algérois ; Ben Khedda est
l’un des assistants de Abbane au début de 1956.Abbane impulse à cette
direction un souffle nouveau ; elle devient la véritable direction
nationale de l’Algérie, un centre de coordination entre les chefs de
l’intérieur et entre ces derniers et ceux de l’extérieur.
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