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Au Maroc, les journalistes sous surveillance ?

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    Au Maroc, les journalistes sous surveillance ? [Edito]


    L’arrestation de Hajar Raïssouni est le nième épisode d’une longue série de harcèlements contre les journalistes. Notre silence lâche donne du cœur à l’ouvrage au pouvoir sécuritaire.


    Le Maroc a bien évolué en matière de liberté de la presse. Depuis Ali Anouzla en 2013, poursuivi pour «apologie de terrorisme», rares sont les journalistes ayant été attaqués pour leurs écrits. L’entrée en vigueur du nouveau Code de la presse en 2016 expurgeant le texte de loi des peines privatives de liberté a entériné ce virage libertaire.

    Hop hop hop. Coup de frein à main, tête à queue, crissement de pneus. Les traces laissées sur le bitume de nos libertés sont autant de preuves remettant en cause les discours satisfaits des ministres de la Communication successifs. En guise de virage, le Maroc a pris la route côtière, faite de beaux paysages, mais tout aussi dangereuse pour les journalistes.

    Ainsi, en lieu et place de poursuites immédiates pour leurs écrits, les journalistes se voient attaqués bien plus tard à travers des articles du Code pénal. Les exemples s’enfilent comme un collier de perles : Complicité d’adultère (10 mois de prison pour Hicham Mansouri) ; exercice illégal d’une profession réglementée (5 mois et un an de prison pour Mohamed El Hilali et Abdelouahed Kammoumi de Rif press) ; non dénonciation de l’atteinte à la sureté de l’Etat (3 ans de prison pour Hamid El Mahdaoui) ; viol, harcèlement sexuel et traite des êtres humains (12 ans de prison pour Taoufik Bouachrine), etc.

    Journalistes en sursis


    Affaire après affaire, les voix ont toujours été peu nombreuses pour s’indigner du sort des journalistes. Certaines fois, disons-le clairement, c’était par lâcheté, le sujet étant vu comme éminemment politique.

    Dans le cas de Bouachrine, la perplexité était plus compréhensible puisqu’il s’agissait de ne pas ignorer la souffrance des victimes, tout en gardant à l’esprit l’aspect politique de l’affaire. L’affaire Hajar Raïssouni a, quant à elle, suscité une vive et large émotion. De nombreuses femmes ont ressenti dans leur chair l’injustice et l’humiliation infligée à cette jeune journaliste par la police et les magistrats.

    Il est rare au Maroc que la cause d’un journaliste «mobilise» au-delà du cercle malheureusement habituel : une presse exsangue, quelques associations et encore moins de politiques. Saluons cette prise de conscience plus large de la fragilité des libertés quand le pouvoir sécuritaire cible une journaliste, sans oublier tout de même Hicham Mansouri, humilié et incarcéré dans l’indifférence générale pour une obscure affaire de mœurs.

    Ceci pour rappeler que le combat sociétal et la défense des libertés individuelles ne s’arrête pas au palier du politique. Cette mise en perspective est importante, notamment pour celles et ceux qui pointent dans l’affaire Hajar Raïssouni uniquement les lois archaïques régentant la vie personnelle des Marocain.e.s. Beaucoup des articles de lois sur les mœurs datent en effet du siècle dernier, certains ont même été imposés par le Protectorat français. Dans le cas présent, il est faux de croire qu’ils sont la source du problème ; uniquement un des nombreux instruments.

    En effet, le pouvoir sécuritaire ne se prive pas d’utiliser tout l’éventail juridique à sa disposition, quand il s’agit de faire taire des journalistes : des lois les plus archaïques au plus «modernes» (apologie de terrorisme, atteinte à la sureté de l’Etat…). Maâti Monjib n’est-il pas poursuivi pour avoir reçu une subvention de l’étranger pour son association ?



    Et après...


    Cela risque d’être difficile à entendre (ou à lire), mais l’affaire Hajar Raïssouni est plus qu’un bras de fer sur une question sociétale. C’est un combat politique de longue haleine, avec les risques que cela implique. Acceptons de nous mouiller pour nos droits fondamentaux et ainsi faire respecter nos libertés individuelles dans un Etat de droit. Demandons des comptes à nos politiques, notamment celles et ceux qui avaient fait du droit à l’avortement leur cheval de bataille. Un cheval devenu mulet, tellement leur indignation quant à l’incarcération de Hajar Raïssouni, met du temps pour arriver à nos oreilles. L’hypocrisie des politiques dans toute sa splendeur !

    Cela risque d’être difficile à entendre (ou à lire), mais si nous nous contentons de la posture du héros des libertés individuelles sans vouloir assumer le combat politique que nous sommes malheureusement en train de perdre, nous sommes tout aussi hypocrites que les politiques que nous nous complaisons à moquer pour leur lâcheté.

    Cela risque d’être difficile à entendre (ou à lire), mais n’oublions pas qu’après avoir enfermé les journalistes ou les militants associatifs, avec notre silence complice, il ne restera plus personne pour protester quand votre tour viendra.


    ya biladi
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "

  • #2
    En effet, c'est très inquiétant.

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    • #3
      rares sont les journalistes ayant été attaqués pour leurs écrits
      ...oui mais ils vont te trouver un moyen pour t’arrêter (un faux procès) comme le cas de cette journaliste

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      • #4
        Excellent article et qui ne concerne pas que le Maroc. Ceci dit, les journalistes sont quelques peu privilégiés car la presse fait état des journalistes ennuyés par un gouvernement, alors que les affaires de nombreux quidams ne sont pas toutes médiatisées. Il ne s'agit pas d'une critique, mais d'un constat.

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