Rien de surprenant quant à la situation désastreuse de la dictature marocaine.
Il convient être pragmatique et reconnaître que la colonisation marocaine du Sahara Occidental lui coûte " la peau des fesses" et qu'hormis les 23 milliards de dollars annuels rapportés par le cannabis, la dictature alaouite ne possède -effectivement- aucun pan économique crédible.
- Entre tourisme et grands projets, les impasses d’un modèle de développement
Reconnaissant que le modèle de développement du Maroc n’a pas atteint ses objectifs, notamment en matière de création d’emplois, les autorités du pays réfléchissent à une nouvelle stratégie. Une réflexion entamée dans un contexte marqué par l’aggravation des inégalités, par le retard accumulé dans des domaines tels que la santé et par la persistance de la contestation populaire incarnée par le « hirak » du Rif-.
Où va le Maroc ? Personne ne sait répondre à cette question. Pas même le roi Mohammed VI. Il a officiellement reconnu les limites d’un modèle qui, en 1999, a pourtant assuré le passage du régime du défunt Hassan II, son père, au sien. « Le devoir de clarté et d’objectivité impose de nuancer [le] bilan positif, dans la mesure où les progrès et les réalisations d’ores et déjà accomplis n’ont malheureusement pas encore eu des répercussions suffisantes sur l’ensemble de la société », répétait encore le souverain à la veille de la Fête du trône, en juillet 2019.
Ce modèle, c’est celui d’une monarchie toute-puissante qui assure la promotion d’une économie ultralibérale à travers des organismes publics pour la réalisation de projets spectaculaires : ligne ferroviaire à grande vitesse (LGV) Casablanca-Tanger, zone économique et industrielle Port Tanger Med, théâtre Mohammed-VI à Casablanca, nouvelles autoroutes… Des grands projets qui, certes, séduisent à l’international, et qui ont permis au roi de passer le cap des vingt ans de règne sans que la presse, y compris française, écorne son image. De Paris ou du centre-ville de Rabat, le pays semble toujours cet aigle tutoyant (sans pétrole !) les sommets de l’économie africaine et s’intégrant sans peine dans les chaînes de valeur mondiales, en devenant par exemple un producteur de poids dans les secteurs automobile et aéronautique.
Mais, au Maroc, les illusions s’évaporent comme les nappes phréatiques sous la double ponction du tourisme de masse — qui sera certainement très pénalisé par l’épidémie de Covid-19 et de l’agriculture intensive (lire « La sécheresse aggrave les difficultés du Royaume »). Dans le sillage du discours tenu par le palais, la théorie du ruissellement a cédé la place à la critique autorisée d’une répartition des richesses insuffisante. Dans leurs derniers rapports, la Cour des comptes, la Banque Al-Maghrib (la banque centrale) et le Conseil économique, social et environnemental (CESE) ont tous trois alerté sur les problèmes structurels du pays.
En apparence, tout va bien : croissance annuelle du produit intérieur brut (PIB) prévue de 3,5 % en 2020, indice des prix à la consommation maîtrisé (+ 0,6 %), taux de chômage à 9,2 % en 2019 (9,8 % en 2018) .
Fin octobre, devant un public garni de représentants internationaux (Allemagne, Suisse, Banque mondiale, etc.), le premier ministre Saadeddine El-Othmani posait tout sourires devant une superbe pâtisserie ornée d’un nombre : « 53 », comme la place du Maroc au classement Doing Business — ou « indice de facilité de faire des affaires » — 2020, établi chaque année par la Banque mondiale. Le royaume y a progressé de sept rangs.
Pourtant, seule une minorité a la chance de recevoir une part du gâteau. Le Maroc de Mohammed VI change d’allure dès que l’on évoque les indices qui comptent : compilation de tous les facteurs qui révèlent l’état d’une société, l’indice de développement humain (IDH) établi par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) ne ment pas : en 2019 (7), le pays s’y classait à la 121e place dans la catégorie « développement humain moyen », loin derrière l’Algérie (82e) et la Tunisie (91e), qui tous deux figuraient dans la partie « développement humain élevé ». De quoi agacer l’élite marocaine, qui, vantant les mérites du royaume, insiste souvent sur les situations conflictuelles chez ses voisins.
Cette 121e place traduit une réalité très crue. « Il y a 10 % de citoyens en situation de pauvreté extrême, totale », explique Taïeb Aisse, spécialiste du développement territorial, qui collabore avec le gouvernement actuel, dominé par le Parti de la justice et du développement (PJD, à référentiel islamique).
« C’est-à-dire qu’ils n’ont rien. Aucun revenu. C’est très dangereux ! » Outre ce dénuement absolu, la classe moyenne souffre elle aussi de l’écart abyssal entre ce que l’on nomme ici la « vitrine » et le pays réel-.
Le Monde diplomatique, un reportage de Pierre Puchot, livraison de ce mois.
Il convient être pragmatique et reconnaître que la colonisation marocaine du Sahara Occidental lui coûte " la peau des fesses" et qu'hormis les 23 milliards de dollars annuels rapportés par le cannabis, la dictature alaouite ne possède -effectivement- aucun pan économique crédible.
- Entre tourisme et grands projets, les impasses d’un modèle de développement
Reconnaissant que le modèle de développement du Maroc n’a pas atteint ses objectifs, notamment en matière de création d’emplois, les autorités du pays réfléchissent à une nouvelle stratégie. Une réflexion entamée dans un contexte marqué par l’aggravation des inégalités, par le retard accumulé dans des domaines tels que la santé et par la persistance de la contestation populaire incarnée par le « hirak » du Rif-.
Où va le Maroc ? Personne ne sait répondre à cette question. Pas même le roi Mohammed VI. Il a officiellement reconnu les limites d’un modèle qui, en 1999, a pourtant assuré le passage du régime du défunt Hassan II, son père, au sien. « Le devoir de clarté et d’objectivité impose de nuancer [le] bilan positif, dans la mesure où les progrès et les réalisations d’ores et déjà accomplis n’ont malheureusement pas encore eu des répercussions suffisantes sur l’ensemble de la société », répétait encore le souverain à la veille de la Fête du trône, en juillet 2019.
Ce modèle, c’est celui d’une monarchie toute-puissante qui assure la promotion d’une économie ultralibérale à travers des organismes publics pour la réalisation de projets spectaculaires : ligne ferroviaire à grande vitesse (LGV) Casablanca-Tanger, zone économique et industrielle Port Tanger Med, théâtre Mohammed-VI à Casablanca, nouvelles autoroutes… Des grands projets qui, certes, séduisent à l’international, et qui ont permis au roi de passer le cap des vingt ans de règne sans que la presse, y compris française, écorne son image. De Paris ou du centre-ville de Rabat, le pays semble toujours cet aigle tutoyant (sans pétrole !) les sommets de l’économie africaine et s’intégrant sans peine dans les chaînes de valeur mondiales, en devenant par exemple un producteur de poids dans les secteurs automobile et aéronautique.
Mais, au Maroc, les illusions s’évaporent comme les nappes phréatiques sous la double ponction du tourisme de masse — qui sera certainement très pénalisé par l’épidémie de Covid-19 et de l’agriculture intensive (lire « La sécheresse aggrave les difficultés du Royaume »). Dans le sillage du discours tenu par le palais, la théorie du ruissellement a cédé la place à la critique autorisée d’une répartition des richesses insuffisante. Dans leurs derniers rapports, la Cour des comptes, la Banque Al-Maghrib (la banque centrale) et le Conseil économique, social et environnemental (CESE) ont tous trois alerté sur les problèmes structurels du pays.
En apparence, tout va bien : croissance annuelle du produit intérieur brut (PIB) prévue de 3,5 % en 2020, indice des prix à la consommation maîtrisé (+ 0,6 %), taux de chômage à 9,2 % en 2019 (9,8 % en 2018) .
Fin octobre, devant un public garni de représentants internationaux (Allemagne, Suisse, Banque mondiale, etc.), le premier ministre Saadeddine El-Othmani posait tout sourires devant une superbe pâtisserie ornée d’un nombre : « 53 », comme la place du Maroc au classement Doing Business — ou « indice de facilité de faire des affaires » — 2020, établi chaque année par la Banque mondiale. Le royaume y a progressé de sept rangs.
Pourtant, seule une minorité a la chance de recevoir une part du gâteau. Le Maroc de Mohammed VI change d’allure dès que l’on évoque les indices qui comptent : compilation de tous les facteurs qui révèlent l’état d’une société, l’indice de développement humain (IDH) établi par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) ne ment pas : en 2019 (7), le pays s’y classait à la 121e place dans la catégorie « développement humain moyen », loin derrière l’Algérie (82e) et la Tunisie (91e), qui tous deux figuraient dans la partie « développement humain élevé ». De quoi agacer l’élite marocaine, qui, vantant les mérites du royaume, insiste souvent sur les situations conflictuelles chez ses voisins.
Cette 121e place traduit une réalité très crue. « Il y a 10 % de citoyens en situation de pauvreté extrême, totale », explique Taïeb Aisse, spécialiste du développement territorial, qui collabore avec le gouvernement actuel, dominé par le Parti de la justice et du développement (PJD, à référentiel islamique).
« C’est-à-dire qu’ils n’ont rien. Aucun revenu. C’est très dangereux ! » Outre ce dénuement absolu, la classe moyenne souffre elle aussi de l’écart abyssal entre ce que l’on nomme ici la « vitrine » et le pays réel-.
Le Monde diplomatique, un reportage de Pierre Puchot, livraison de ce mois.
Commentaire