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    LE NOUVEAU GOÛT DU PAIN


    par Abdou BENABBOU


    Avec l'arrivée du Ramadan, une basse polémique a pris naissance entre de prétendus rigoristes et des supposés bien-pensants. La guerre des mots et des verbes autour de la bouffe et des pénitences reste ancrée au plus bas des étages de la réflexion et encore une fois de réduites vérités s'entrechoquent pour ne pas aller aux sujets des plus importants. Si le carême est une obligation divine, il ne doit pas être un bilboquet entre les mains des hommes pour s'accorder une suffisance vide et inutile car Dieu reconnaît les siens.

    La religion est d'abord foi et engagement individuel. Elle est de la responsabilité intime et privée de chacun et celui qui se dit croyant n'a pas besoin de témoins pour démontrer son attachement à sa religion. Dans sa prosternation finale devant son Dieu, il n'aura pas recours à un avocat. La piété est d'abord respect de l'autre et l'obligation de ne pas lui imposer des vérités et mieux encore l'affirmation du respect que l'on attribue à soi-même.

    Jeûner pendant quelques heures est peu de chose devant la terrible pandémie. Ses conséquences pourraient bien imposer un carême permanent et le Ramadan qui s'annonce a de fortes chances d'être infini. Le ralentissement du commerce à la sauvette et le regard creux des quelques passants sont l'aveu d'un sacerdoce auquel chacun est soumis. Nul texte sacré pour s'y plier.

    Désobligeantes chamaillades que celles que l'on nous jette aujourd'hui à la figure au moment où La Mecque elle-même a cadenassé ses portes pour ouvrir les portes à la profonde pensée et battre le rappel de vieux souvenirs d'un passé colonial maudit quand la majorité de la population algérienne se nourrissait un jour sur deux de pain rassis.

    Libre à chacun donc de s'accommoder comme il l'entend et comme il le peut, en toute conscience, d'un Ramadan pas comme les autres et très particulier. De toutes les manières, le coronavirus contraint le monde entier à un jeûne aux multiples facettes. Le confinement qu'il impose à l'ensemble de l'humanité est en passe de donner un nouveau goût au pain nourricier et un sens réel aux tables garnies.


    Le Quotidien d'Oran
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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