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L’Algérie dans l’expectative : la transition vers une économie dynamique

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  • L’Algérie dans l’expectative : la transition vers une économie dynamique

    Économie Par: Taïeb Hafsi* 20 Avril 2020


    Comme dans la plupart des pays dans le monde, le gouvernement de l’Algérie a choisi de répondre à la crise sanitaire par l’arrêt des activités économiques, par le confinement.


    Cette décision spectaculaire a été justifiée, comme partout, par des préoccupations de santé publique. La crainte de voir le système de santé débordé par l’afflux de malade du Covid-SARS2 ou Covid19, plutôt que le danger de fatalité, semble avoir motivé les actions qui ont été prises partout dans le monde, à l’exception de quelques pays aux extrêmes, performants ou incapables de répondre.

    Les conséquences d’une telle situation sont désastreuses pour les pays avancés. Elles sont catastrophiques pour les pays émergents, en particulier l’Algérie, parce que le confinement est accompagné de plusieurs autres crises. Il y avait déjà une contestation populaire inédite, mettant en cause la capacité de l’État à agir. De plus, la chute des prix des matières premières, en particulier du pétrole, a entrainé une chute importante des ressources disponibles pour faire face à la crise, notamment des réserves nécessaires au commerce international, en particulier à l’importation de produits nécessaires à la sécurité alimentaire et économique du pays.

    Les marges de manœuvre pour faire face à cette crise du confinement, qui a été un choix des gouvernants, sont extrêmement réduites. Aujourd’hui, pour faire face, le consensus international est qu’il faut faire quatre choses : (1) compenser les pertes de revenu des acteurs économiques (ménages et entreprises). Cela demande beaucoup de ressources (voir exemples de l’Europe et des États-Unis); (2) il faut une politique fiscale qui tente de remettre l’économie en marche. Pour l’essentiel, cela signifie agir à la fois sur le côté demande (demand-side) et sur le côté production de biens et services (supply-side), ce qui implique encore plus de ressources, notamment la capacité de la banque centrale à faciliter le crédit et le fonctionnement du système financier; (3) il faut renforcer le système de santé pour éviter de retomber dans le même trou, si une autre urgence médicale apparaît; (4) finalement, il faut travailler sur un futur à définir.

    Le gouvernement algérien et chacun de ses ministres constatent, avec beaucoup d’amertume et d’inquiétude, les effets des 20 ans de management clanique et corrompu dans le système Bouteflika.

    Le niveau de déstructuration de tous les secteurs du pays (sauf en partie l’Armée nationale populaire) est considérable, avec une population méfiante et peu disposée à faire les efforts nécessaires pour sortir de l’ornière. Il est obligé de jouer aux pompiers sur tous les fronts. Les chercheurs ne peuvent l’aider beaucoup dans ces actions.

    Par contre, il est possible d’aider dans l’action 4 sur la conception du futur, en espérant que l’Algérie arrive à surmonter les épreuves de la survie à court terme, ce qui est possible.

    Ce texte évoque seulement les possibilités sur le futur à moyen et long terme, une réflexion qui a terriblement manqué au moment où l’Algérie avait les ressources pour construire un avenir brillant. Mais tout n’est pas perdu. Le futur est une construction humaine. Il est construit par des personnes de bonne volonté et celui qui a la volonté trouve les solutions, parce qu’il aura avec lui la bienveillance du Créateur. Allah Yarzaq Men Yasha’.

    Introduction

    Depuis au moins une décennie, l’Algérie cherche une voie pour échapper à l’attraction de la rente des hydrocarbures (HC). Cette rente ne peut être rejetée du revers de la main. Elle est bien sûr bienvenue, en ces temps difficiles. Mais il faut aussi se rendre compte qu’elle induit des comportements sociaux et économiques qui sont destructeurs pour la société.

    Au plan économique, la dépendance aux HC génère trois problèmes majeurs. D’abord, elle est aussi une dépendance aux marchés des matières premières, marchés qui ont connu des variations importantes, généralement en phase avec la croissance économique mondiale, l’humeur des membres de l’OPEP et celles des principaux producteurs mondiaux.

    Depuis 1970, ces marchés ont été marqués par des périodes de boum, suivi de crash. Ces périodes de boum et de crash induisent des comportements économiques qui privilégient le court terme et les dépenses fastueuses.

    Finalement, la rente des hydrocarbures induit la sous-évaluation et la négligence des autres secteurs de l’économie, aggravant la dépendance. Ces aspects ont été résumés sous le vocable de « maladie hollandaise ».

    Au plan social, on assiste aussi à trois effets encore plus désastreux. D’abord, les grandes sommes d’argent que rapportent les ventes des HC aiguisent les appétits des dirigeants et attirent les organisations criminelles.

    Il en résulte le développement de réseaux de corruption dans lesquels participent des acteurs peu fréquentables, nationaux et internationaux. Ensuite, la population a la fausse impression qu’elle est riche et cela induit d’abord une contestation permanente pour attirer une partie de la rente et ensuite un comportement citoyen qui privilégie le moindre effort. Finalement, les négociations permanentes empêchent le fonctionnement de toutes les institutions et progressivement détruisent l’unité et la capacité à fonctionner de la société.

    Au cours de 20 dernières années en Algérie, ce processus est malheureusement allé à son terme. L’économie de l’Algérie ne survit que grâce aux injections financières importantes, dites de rente, pour maintenir la paix et le fonctionnement de l’armée et des administrations.

    Les surplus accumulés depuis 20 ans, environ 200 milliards de dollars, ont permis de continuer à fonctionner au cours des 3 dernières années. La chute considérable des prix du pétrole en 2020 ne laisse plus beaucoup de marge de manœuvre. L’Algérie va donc inévitablement vers une situation où elle ne pourra plus payer pour ses importations. Il faut remettre en marche de manière durable la machine économique hors HC. Sinon, la paupérisation de la population peut amener désordre et violence pouvant mettre en cause l’existence même du pays. Comment peut-on faire cela ?

    Si on prend en compte les expériences pertinentes des autres nations, il faut faire trois grandes choses :

    Articuler une vision, une théorie sur ce qui va mener à des lendemains meilleurs. L’Algérien a besoin d’optimisme et donc d’une vision économique qui porte cet optimisme.
    Mettre l’accent sur « liberté, justice et fraternité, des valeurs qui sont chères à la population algérienne. En effet, si on voulait traduire les aspirations exprimées récemment par le Hirak, trois principes caractérisent le comportement algérien : (1) La recherche de la justice, en particulier de la justice sociale; (2) la soif de la liberté; (3) l’aspiration à une société unie et bienveillante
    Mettre en place la structure économique nationale qui va faciliter les initiatives économiques. On ne peut développer l’économie si on l’emprisonne dans des carcans idéologiques rigides comme socialisme et capitalisme. Il vaut mieux adopter une démarche pragmatique. Elle ne peut pas non plus fonctionner si le carcan administratif domine la vie du citoyen. La décentralisation et la simplification sont des nécessités impérieuses.
    Voyons cela plus en détail.

    A. Articuler une vision

    La vision de l’Algérie de demain doit être concrète et ambitieuse. Notre hypothèse est que l’Algérie a une population dynamique, industrieuse, ambitieuse et capable de travailler fort, si les conditions sont adéquates donc respectent les principes évoqués plus tôt. Les sacrifices des émigrés au cours des décennies écoulées attestent de ces caractéristiques. L’Algérie a aussi une diaspora de qualité et en plein développement, porteuse des valeurs de travail et d’ambition, dont les liens avec le pays d’origine sont forts.

    La situation économique est paradoxale. Elle est problématique, comme nous l’évoquions plus tôt. Mais elle est, par certains aspects, encourageante.

    Le problème qui a mené au constat évoqué plus tôt est la pauvreté du management. En effet, même si bien intentionnés, les départements de l’État fonctionnent en silo, sans coordination. Ils émettent des règles qui se contredisent et jettent le trouble chez les acteurs économiques. Dans tous les domaines où l’État pourrait aider le développement économique (foncier industriel, autorisations d’activité, subventions, aides à la compétitivité, encouragement de l’investissement), en fait, il le décourage par incohérence, incompétence, désorganisation ou tout cela à la fois.

    Pourtant, il y a en Algérie de nombreuses entreprises et initiatives de qualité, ayant un mode de management adapté, ouvert sur l’expérience universelle mais aussi sur les valeurs locales. Cela veut dire qu’une vision de qualité peut être portée par des acteurs qui sont déjà là.

    Pour que la vision ne soit pas perçue comme un rêve fantasque, il faut qu’elle tienne compte :

    De la compétition entre grandes puissances au plan politique et géopolitique
    De la concurrence économique entre les nations
    Des difficultés de construction du Maghreb
    Des capacités de l’Algérie et des possibilités de développement de plateformes de classe mondiales qui pourraient servir de locomotives pour la croissance économique
    Pour ne pas allonger le propos, voici une proposition de vision qui peut faire l’objet de discussion par les parties prenantes nationales (acteurs de la société civile surtout) et plus tard d’élaboration plus précise et plus étendue :

    L’Algérie 2040 sera un pays développé, avec une production intérieure brute correspondant à 75% de celle de la moyenne européenne, utilisant deux plateformes de classe mondiale : l’énergie renouvelable et la logistique, avec des industries de bas de gamme technologique florissantes, des industries de haut de gamme en forte croissance et avec une agriculture écologique et moderne, qui satisfait de manière durable 70% des besoins alimentaires du pays. Le pays jouera un rôle de premier plan comme intermédiaire entre les économies européennes et africaines.
    Ce sera un pays méritocratique mettant l’accent sur l’éducation et la santé du citoyen moyen, valorisant la liberté d’entreprendre et l’encouragement des initiatives économiques par les entreprises et les citoyens. Ce sera un pays qui mettra l’accent sur la qualité de la vie, la protection du terroir et le bonheur du citoyen. Au plan organisationnel, l’économie, l’éducation et la santé seront décentralisées et sous la responsabilité des régions.
    Il arrivera en 2040 avec les ressources et l’ambition légitime, pour devenir l’un des pays les plus influents de la Méditerranée au plan économique
    Les trois grands aspects de cette vision sont interreliés. Ainsi, par exemple, on ne peut pas faire le développement économique si la vision n’inclut pas l’objectif de protection du terroir et de bonheur du citoyen.

    .../

  • #2
    suite

    Liberté-Fraternité-Justice

    Les sociétés humaines sont mues par de grandes aspirations. A cause de leur histoire, les Algériens ont un grand besoin de liberté, de fraternité et de justice.

    La guerre d’indépendance qui a servi de réceptacle à toutes les aspirations a révélé l’importance de la liberté pour les Algériens. Nous ne nous sommes pas battus pour le pain, mais pour pouvoir agir à notre guise, un peu comme le faisaient nos ancêtres, un peu comme l’a renforcé la civilisation arabe, un peu comme nous l’avons expérimenté au cours de la guerre de libération.

    En fait, au cours de la lutte, la population a rapidement du se débrouiller par elle-même, sans chefs, sans directives. Elle a appris à prendre des initiatives et elle a découvert ses capacités créatives et entrepreneuriales. Elle s’attendait à ce que cela soit le socle des institutions de l’Algérie indépendante. Ce ne fut malheureusement pas le cas en pratique, l’essentiel des actions de l’État ayant contribué surtout à supprimer l’initiative et la liberté d’action.

    La décennie de violence, puis la grande obscurité et la noirceur de la période de Bouteflika ont accentué cela. Elles ont découragé une population qui haïssait la division, la fitna. Bouteflika s’est inspiré des outils des services de renseignement de la puissance coloniale pour détruire la capacité d’action populaire.

    La population a pris beaucoup de temps à réagir à ce qui n’était pas objectivement un régime patriotique. Le régime Bouteflika, par ses excès, a convaincu les Algériens qu’il leur fallait lutter, même contre ses propres enfants, pour assurer et protéger leur liberté.

    Les atteintes à la liberté ont aussi dérangé le comportement affectif des Algériens. Comme Bouteflika, le citoyen moyen était devenu malveillant, méfiant et destructeur. Aujourd’hui, il retourne à ses traditions ancestrales, généreuses, pacifiques, bienveillantes. Être capable d’admirer et d’aimer ses concitoyens, sans excès de démonstration, est un marqueur de ces traditions. Mais la démonstration ne peut être supprimée. Elle est naturelle dans nos traditions. Les Algériens s’embrassent facilement et expriment de l’affection, comme pour conjurer les démons de la division.

    Les atteintes à la liberté se sont aussi accompagné d’atteinte à la justice et à la dignité qui ont été insupportables pour la plupart des citoyens, notamment les plus jeunes. La sensibilité à la Hogra est un instrument de construction des rapports sociaux. L’injustice est intimement liée à l’absence de liberté. Chez les Algériens, elle génère des comportements de contestation brutale.

    Le chantier de la justice passe surtout par la justice au plan économique. Cela ne veut pas dire partager également les ressources, comme voulaient le faire croire les régimes précédents avec la démagogie socialiste et la distribution de la rente. Cela veut dire surtout donner la possibilité à tous de faire leur possible pour progresser au plan économique. Réduire les barrières, aider les moins nantis, fournir les soutiens, tout cela contribue à une justice économique acceptable.

    Aujourd’hui, le mouvement populaire salutaire du Hirak a mis sur la table des décideurs la nécessité de remettre sur ses pieds une société qui marchait à l’envers. On ne peut pas assurer le développement économique du pays, si on ne prend pas en compte les aspirations de la population.

    Pour que Liberté-Fraternité-Justice deviennent une réalité, il y a à la fois des actions symboliques à entreprendre, puis des actions structurelles à mettre en place. Les actions symboliques peuvent être rapides, les actions sur les structures prendront plus de temps. Nous les abordons maintenant.

    Structurer le développement économique


    La restructuration nationale est une action fondamentale, qui demande une reconfiguration majeure. Cela exige du temps et de la patience. Cela passe par structurer le développement économique. Structurer le développement économique en fait structure la société dans son ensemble, puisque l’essentiel de nos activités est de nature économique.

    Sous l’influence des idées de la puissance qui les a dominés longtemps, les élites algériennes ont adopté les structures françaises qui sont basées sur le contrôle central et la réduction des initiatives locales. Les citoyens français par exemple sont en négociation constante pour obtenir du Centre des ressources et un peu d’espace d’initiative locale.

    L’État et les citoyens français ont collectivement perfectionné cette capacité à gérer liberté et contrôle, grâce à beaucoup d’expérimentations, de souffrances et une pratique vieille de 9 siècles. Les Algériens n’ayant pas cette expérience n’arrivent pas à trouver un équilibre entre liberté et contrôle et ont erré surtout vers un contrôle excessif qui a paralysé la population et sa capacité d’action. Ce déséquilibre mène inévitablement vers la violence, déclenchée quotidiennement, lorsque le citoyen essaie de se construire un espace de liberté et d’initiative.

    Les États jeunes, en fait tous les états de pays en émergence, réussissent lorsqu’ils respectent les aspirations sociétales fondamentales et le désir des populations de se prendre en charge.

    En Chine, l’expérience maoïste a été très coûteuse, parce que l’État voulait contrôler totalement le citoyen. Elle a été très fructueuse, lorsque l’État a laissé un espace de liberté et d’initiative économiques(voir Hafsi et Tian, 2009).

    En Turquie, le développement économique a réellement démarré lorsque les militaires ont été tenu en respect par les groupes religieux locaux, qui ont ainsi favorisé une capacité d’initiative locale plus grande. L’Anatolie fortement religieuse a ainsi construit autour de ses grandes villes, dont Kayseri, des entreprises nombreuses, très compétitives à l’échelle mondiale (voir texte de M. Zabouri, 2006 ou European Stability Initiative, 2005). Tous les développements vertueux ont suivi le même chemin.

    En Algérie, le développement économique viendra de la décentralisation et de l’acceptation d’un peu de turbulence, toujours associé à la liberté. Paradoxalement, la décentralisation marche généralement mieux lorsque le Centre est fort aussi. Que signifie décentralisation ? Cela signifie que les décisions économiques principales (dans certains régimes décentralisés comme le Canada, on inclut aussi les décisions sur l’éducation, la santé et la main d’œuvre) sont prises par les autorités locales légitimes (mécanismes de choix à déterminer).

    Ces décisions doivent cependant être mises en application par des dirigeants administratifs dévoués et qualifiés. Les conditions principales à respecter sont : (1) la mise en place de règles de gouvernance politique et financière rigoureuses et (2) la formation des élites politiques et administratives.

    Les walis doivent ainsi devenir des leaders économiques de qualité, au service de leaders politiques locaux choisis pour leur dévouement et leurs qualifications. Tous doivent avoir la vision et la stratégie nationale comme guides et obéir à un modèle de gouvernance qui privilégie le mérite et la contribution à la progression de la société locale. La gouvernance suppose une transparence des actions et des décisions prises par les représentants de la population et par les administrateurs, une reddition de compte, structurée et soigneusement documentée, aux populations et aux autorités centrales.

    Toutefois, il y a nécessité d’arbitrage, au moins dans l’allocation des ressources, qui ne peut être fait que centralement. Les autorités centrales responsables seraient là aussi composées de représentants (nationaux) de la population et d’administrateurs hautement qualifiés pour le management des systèmes complexes. Les autorités centrales auraient alors d’abord la responsabilité sur l’établissement des standards de droits et devoirs, et une responsabilité d’audit pour s’assurer que le système fonctionne convenablement, que les règles de gouvernance soient respectées, pour récompenser les responsables et les collectifs de performances exemplaires ou punir les responsables des infractions et performances décevantes. C’est pour cela que le Centre doit être fort.

    Au sommet, la responsabilité est celle du bon fonctionnement du système dans son ensemble. Au niveau local, la responsabilité est celle de la qualité des actions économiques (peut-être y compris santé, éducation et main d’œuvre), donc des choix stratégiques des entreprises et de la communauté. Comment se développe l’économie locale ?

    En Turquie, comme en Chine, le développement économique s’est fait autour de villes. La gestion dynamique d’une ville permet l’utilisation rationnelle des infrastructures pour stimuler l’action économique. La ville est en fait le meilleur regroupement pour les startups et les initiatives entrepreneuriales. Elle fournit un marché de base pour les produits et pour l’emploi. On peut trouver plus facilement des talents en matière technique ou managériale et on peut trouver plus facilement des acheteurs pour les produits ou services.

    Mais les villes sont dans des régions qui peuvent avoir une unité économique et une culture forte. Dans ce cas, les villes deviennent les moteurs du développement de toute la région. Ainsi, Shenzhen, puis Guangzhou en Chine ont été les moteurs du développement du Guangdong. Kayseri a été le moteur du développement de l’Anatolie centrale.

    En Algérie, si nous voulions faire une projection optimiste, nous pourrions dire que l’ensemble Setif-Bordj est un exemple intéressant de dynamisme entrepreneurial. De même, l’Est d’Alger présente un dynamisme économique viable, susceptible de générer beaucoup d’entreprises et de développement économique. De même Oran, Annaba, Constantine, Tlemcen semblent être des pôles prêts à décoller. Comment commencer ?

    Rappelons d’abord qu’il faut :

    Une vision stimulante et inspirante
    Affirmer les principes de liberté, de fraternité et de justice
    Mettre en place les structures, donc la gouvernance nécessaire à la décentralisation
    Nous avons évoqué les éléments d’une vision. Insistons à présent sur les principes. La liberté n’est pas seulement la liberté politique. C’est surtout la liberté économique, la liberté d’agir. Concrètement, cela signifie que toutes les procédures qui sont imposées à la création et aux activités des entreprises doivent être supprimées. On doit pouvoir créer une entreprise sur simple déclaration, nécessaire pour l’imposition et la responsabilisation. L’entreprise doit ensuite être jugée sur sa capacité à créer de la richesse et donc à payer l’impôt. L’État, au niveau central ou régional, est alors autorisé à encourager spécialement, par le biais d’incitatifs ciblés, des comportements souhaités, comme l’innovation ou le développement industriels dans un secteur ou une région déterminée.

    .../

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    • #3
      suite et fin

      Pour que la liberté s’exprime, il faut de la connaissance. C’est là que la formation prend toute sa valeur. L’État, d’abord au niveau central, puis progressivement au niveau local, doit devenir un promoteur de formation managériale adaptée au développement économique. Les futurs gestionnaires du développement économique doivent comprendre les modalités et les secrets du fonctionnement organisationnel complexe, du développement de politiques publiques, ainsi que des raisons des succès des expériences pertinentes des autres (dans le pays ou à l’extérieur). En temps voulu, ils doivent bien sûr être assistés par des spécialistes de la gouvernance, pour éviter la démoralisation due à des débordements éthiques et à l’absence de contrôle populaire organisé.

      Conclusion : le financement et le soutien de la diaspora
      Les Algériens ont un comportement financier élémentaire, du fait de l’influence de la rente et aussi des traumatismes de la décennie de violence. Pour se financer, on peut certes puiser à une épargne accumulée, mais le financement le plus important est contenu dans la valeur des projets qui sont entrepris. Un projet qui est réellement générateur de valeur peut être financé par le système de financement mondial et, lorsqu’elle sera au point, par la Bourse d’Alger. Cela serait facilité si le dinar était convertible, pour garantir aux investisseurs que leur mise de fonds et leurs participations aux profits sont accessibles. La convertibilité du dinar est une action de première importance pour élargir le financement, au-delà des réserves en devises, et réduire son coût. Comme en Chine, la convertibilité peut être progressive, c’est-à-dire gérée.

      Si le financement est basé sur des projets de valeur, l’acteur principal est l’entreprise qui propose les projets. C’est elle qui doit faire les démarches et les démonstrations requises pour obtenir les financements. Cela signifie aussi que le système financier soit ouvert et dynamique. Les banques internationales pourraient servir d’exemple aux banques algériennes. La Banque d’Algérie pourrait alors utiliser les outils traditionnels pour augmenter ou diminuer l’accès au crédit, en relation avec la stratégie de développement national. Le chantier de modernisation des banques serait plus facile, si l’État ouvrait le capital des banques publiques, même avec des restrictions pour les investisseurs éventuels.

      L’entreprise est un acteur majeur pour les projets de développement et pour leur financement. Elle doit donc être encouragée et popularisée. La population doit considérer les entreprises comme leurs champions dans la course pour le développement économique. La responsabilité des autorités est très importante en la matière. L’État ferait beaucoup plus pour le développement économique en popularisant le rôle de l’entreprise et des autres acteurs économiques, qu’en engageant lui-même des actions entrepreneuriales.

      Dans l’effort de mise en place de tels changements, les cadres de la diaspora sont qualifiés, disponibles et mobilisés. Ils pourraient contribuer d’une part à la précision des actions contenues dans ce texte, et d’autre part organiser la formation, voire accompagner les personnes en autorité qui devraient dynamiser le développement local ou faire le suivi central.

      *CONTRIBUTION. Taïeb Hafsi est Professeur titulaire de la chaire Stratégie et Société à HEC Montréal
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      • #4
        Cette contribution est intéressante. Elle mérite d'être discutée et davantage enrichie pour aboutir un plan stratégique et des programmes de mise en œuvre concrets, pilotables avec succès. Cependant, elle a un caractère éminemment technocratique.
        Ce dont on a besoin fondamentalement et en premier lieu pour développer le pays c'est d'une solution politique qui implique la liberté, la démocratie, une justice réellement indépendante, une gouvernance issue des urnes, etc.
        Pour qu'un projet de développement de la société devienne réalisable, il doit d'abord commencer par une étape politique, sans quoi il sera voué à l'échec. Mettre la charue avant les bœufs ne sert à rien.

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