L'IMPUNITÉ AUX CRIMINELS
26 avril 2020 Energie 1
spc
L’arrestation, vendredi au Liban, du représentant de Sonatrach, en compagnie de 16 autres complices, nous renvoie vers l’immensité de la corruption et l’impunité dont jouissent les responsables du groupe pétro-gazier algérien, en charge de la commercialisation des hydrocarbures. Ce représentant de Sonatrach n’est qu’un petit délégué libanais, chargé du suivi des livraisons, au profit de Sonatrach Pétrolier Corporation (SPC) que dirige Rafik Demak, un nom à retenir.
Retour sur le lieu du crime…
Un réseau mafieux
Créée en 1989, la filiale londonienne, Sonatrach Pétrolier Corporation(PSC BVI) a été largement citée dans l’affaire Sonatrach II, avec notamment l’implication de Mohamed Bayou puis celle Chawki Rahal. Mais, à aucun moment les responsables algériens n’ont donné l’impression d’avoir retenu les leçons.
La livraison au partenaire libanais d’une quantité de fuel frelaté n’est, en fait, qu’une opération technique qui a mis à nu un business totalement illégal, qui dure depuis 2005.
En fait, le 11 mars dernier, une cargaison de fuel a accosté au Liban pour une livraison programmée pour vendredi dernier (24 avril) de fuel destiné à l’alimentation des centrales électriques. La cargaison a été embarquée de Sicile (Italie) et ne provient pas d’Alger. Mais, toutefois, l’équipage avait présenté un certificat de conformité de la marchandise, délivré par un laboratoire italien basé toujours en Sicile.
Les autorités libanaises ont également pris des échantillons qu’elles ont fait expertiser dans deux laboratoires distincts. Ces derniers ont de suite assuré de la conformité de la marchandise.
Mais, quand l’opérateur turc Karadeniz -qui loue deux navires-centrales à Électricité du Liban depuis 2013- reçoit son quota pour la transformation du fuel en énergie électrique, ses responsables décident de réaliser une contre expertise de la marchandise. Le résultat de l’analyse réalisée par un laboratoire à l’étranger ne tardera pas à mettre à nu tout un trafic sur la qualité des marchandises acheminées par Sonatrach vers les centrales électriques au Liban. Le fuel en question est déclaré frelaté.
Le directeur général de la société libanaise d’électricité (EDL) a transmis, le 6 avril courant, un courrier au ministre de l’énergie, à travers lequel il démontre l’immensité du préjudice . Il avait précisé que deux centrales de production de l’énergie électrique (liées à EDL par des contrats de Tolling), refusaient de réceptionner le fuel frelaté et a recommandé à la banque centrale libanaise de surseoir au payement de la facture de cette marchandise.
C’est alors qu’une enquête a été déclenchée au niveau du parquet et a conclu à l’existence d’un vaste réseau de corruption qui couvre la mauvaise qualité des produits raffinées, livrés au Liban, et surtout la dissimulation des fournisseurs qui se cachent derrière Sonatrach.
SPC Londres: un Etat dans l’Etat
Initialement, il s’agit d’un contrat d’Etat à Etat signé entre l’Algérie et le Liban.
Mais, à Sonatrach commençaient à avoir lieu des opérations douteuses qui donnaient lieu à des commissions faramineuses, à travers des sociétés de trading qui s’incrustent ici à là, entre Alger et Beyrout et engrangeaient des sommes colossales.
En mars 2019, eBourse avait publié un long reportage sur ce réseau et l’implication de plusieurs responsables et intermédiaires dans vaste trafic des produits raffinés. Voici un extrait de l’enquête publiée.
« Avec l’appui et surtout la complicité de Nassim Ould Kaddour, le parton de Sonatrach Petroleum Corporation (SPC), Rafik Demmak se livre à des activités extra-légales, notamment dans la vente des produits pétroliers.
Le plus choquant est surtout le dossier libanais qui est devenu l’objet d’un grand business pour le fils du P-dg de Sonatrach.
Ce business ne dérange nullement Abdelmoumene Ould Kaddour puisque les mauvaises performances de SPC Londres le confortent dans sa démarche visant à créer une JV pour la commercialisations des hydrocarbures.
La nomination de Rafik Demmak à ce poste de Londres n’a pour objectif que de reprendre un business dans lequel l’ancien patron de la commercialisation de Sonatrach, Chawki Rahal a engrangé des millions de dollars, que la justice algérienne a mis en évidence dans le cadre de l’affaire Sonatrach II.
Chawki Rahal avait été placé en détention en décembre 2013, pour une affaire de commissions d’un montant globale de 8 millions d’euros, transférés sur deux comptes domiciliés en Suisse, l’un en son nom et l’autre au nom de son épouse. Ces sommes ont été amassées, durant la période où il exerçait en tant que responsable de la filiale de Sonatrach basée à Londres.
Les enquêteurs soupçonnaient une société libanaise, BB Energy d’avoir versé des commissions à Rahal pour bénéficier d’avantages lors de l’exécution de contrats de vente de produits pétroliers.
Ces contrats portaient notamment sur l’achat par BB Energy de quantités de gasoil et de fuel oil pour ses besoins au Liban.
BB Energy, propriété du richissime libanais, Baha Bassatne exécutait des contrats de de Fronting vis à vis du Liban. Sur papier, BB Energy prenait une commission de 3,5 dollars par tonne de produits pétroliers. Mais, en réalité, elle gagnait quelque 25 dollars par tonne.
Pour Sonatrach, ce process permettait d’éviter les risques éventuels et avoir un bon partenaire pour le Liban.
Ce business, lancé en 2005, n’a pas été affecté par les poursuites judiciaires lancées contre Chawki Rahal. La nomination, plus tard, de Omar Maaliou à la tête de SPC Londres a permis la normalisation des relations avec les partenaires de Sonatrach.
26 avril 2020 Energie 1
spc
L’arrestation, vendredi au Liban, du représentant de Sonatrach, en compagnie de 16 autres complices, nous renvoie vers l’immensité de la corruption et l’impunité dont jouissent les responsables du groupe pétro-gazier algérien, en charge de la commercialisation des hydrocarbures. Ce représentant de Sonatrach n’est qu’un petit délégué libanais, chargé du suivi des livraisons, au profit de Sonatrach Pétrolier Corporation (SPC) que dirige Rafik Demak, un nom à retenir.
Retour sur le lieu du crime…
Un réseau mafieux
Créée en 1989, la filiale londonienne, Sonatrach Pétrolier Corporation(PSC BVI) a été largement citée dans l’affaire Sonatrach II, avec notamment l’implication de Mohamed Bayou puis celle Chawki Rahal. Mais, à aucun moment les responsables algériens n’ont donné l’impression d’avoir retenu les leçons.
La livraison au partenaire libanais d’une quantité de fuel frelaté n’est, en fait, qu’une opération technique qui a mis à nu un business totalement illégal, qui dure depuis 2005.
En fait, le 11 mars dernier, une cargaison de fuel a accosté au Liban pour une livraison programmée pour vendredi dernier (24 avril) de fuel destiné à l’alimentation des centrales électriques. La cargaison a été embarquée de Sicile (Italie) et ne provient pas d’Alger. Mais, toutefois, l’équipage avait présenté un certificat de conformité de la marchandise, délivré par un laboratoire italien basé toujours en Sicile.
Les autorités libanaises ont également pris des échantillons qu’elles ont fait expertiser dans deux laboratoires distincts. Ces derniers ont de suite assuré de la conformité de la marchandise.
Mais, quand l’opérateur turc Karadeniz -qui loue deux navires-centrales à Électricité du Liban depuis 2013- reçoit son quota pour la transformation du fuel en énergie électrique, ses responsables décident de réaliser une contre expertise de la marchandise. Le résultat de l’analyse réalisée par un laboratoire à l’étranger ne tardera pas à mettre à nu tout un trafic sur la qualité des marchandises acheminées par Sonatrach vers les centrales électriques au Liban. Le fuel en question est déclaré frelaté.
Le directeur général de la société libanaise d’électricité (EDL) a transmis, le 6 avril courant, un courrier au ministre de l’énergie, à travers lequel il démontre l’immensité du préjudice . Il avait précisé que deux centrales de production de l’énergie électrique (liées à EDL par des contrats de Tolling), refusaient de réceptionner le fuel frelaté et a recommandé à la banque centrale libanaise de surseoir au payement de la facture de cette marchandise.
C’est alors qu’une enquête a été déclenchée au niveau du parquet et a conclu à l’existence d’un vaste réseau de corruption qui couvre la mauvaise qualité des produits raffinées, livrés au Liban, et surtout la dissimulation des fournisseurs qui se cachent derrière Sonatrach.
SPC Londres: un Etat dans l’Etat
Initialement, il s’agit d’un contrat d’Etat à Etat signé entre l’Algérie et le Liban.
Mais, à Sonatrach commençaient à avoir lieu des opérations douteuses qui donnaient lieu à des commissions faramineuses, à travers des sociétés de trading qui s’incrustent ici à là, entre Alger et Beyrout et engrangeaient des sommes colossales.
En mars 2019, eBourse avait publié un long reportage sur ce réseau et l’implication de plusieurs responsables et intermédiaires dans vaste trafic des produits raffinés. Voici un extrait de l’enquête publiée.
« Avec l’appui et surtout la complicité de Nassim Ould Kaddour, le parton de Sonatrach Petroleum Corporation (SPC), Rafik Demmak se livre à des activités extra-légales, notamment dans la vente des produits pétroliers.
Le plus choquant est surtout le dossier libanais qui est devenu l’objet d’un grand business pour le fils du P-dg de Sonatrach.
Ce business ne dérange nullement Abdelmoumene Ould Kaddour puisque les mauvaises performances de SPC Londres le confortent dans sa démarche visant à créer une JV pour la commercialisations des hydrocarbures.
La nomination de Rafik Demmak à ce poste de Londres n’a pour objectif que de reprendre un business dans lequel l’ancien patron de la commercialisation de Sonatrach, Chawki Rahal a engrangé des millions de dollars, que la justice algérienne a mis en évidence dans le cadre de l’affaire Sonatrach II.
Chawki Rahal avait été placé en détention en décembre 2013, pour une affaire de commissions d’un montant globale de 8 millions d’euros, transférés sur deux comptes domiciliés en Suisse, l’un en son nom et l’autre au nom de son épouse. Ces sommes ont été amassées, durant la période où il exerçait en tant que responsable de la filiale de Sonatrach basée à Londres.
Les enquêteurs soupçonnaient une société libanaise, BB Energy d’avoir versé des commissions à Rahal pour bénéficier d’avantages lors de l’exécution de contrats de vente de produits pétroliers.
Ces contrats portaient notamment sur l’achat par BB Energy de quantités de gasoil et de fuel oil pour ses besoins au Liban.
BB Energy, propriété du richissime libanais, Baha Bassatne exécutait des contrats de de Fronting vis à vis du Liban. Sur papier, BB Energy prenait une commission de 3,5 dollars par tonne de produits pétroliers. Mais, en réalité, elle gagnait quelque 25 dollars par tonne.
Pour Sonatrach, ce process permettait d’éviter les risques éventuels et avoir un bon partenaire pour le Liban.
Ce business, lancé en 2005, n’a pas été affecté par les poursuites judiciaires lancées contre Chawki Rahal. La nomination, plus tard, de Omar Maaliou à la tête de SPC Londres a permis la normalisation des relations avec les partenaires de Sonatrach.
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