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Massacres du 8 mai 1945 : prodrome de novembre 1954

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  • Massacres du 8 mai 1945 : prodrome de novembre 1954

    Le Pr Mohamed Bounaâma, docteur en archives et chercheur en histoire : «Le 8 mai 1945 est le premier acte populaire pour l’indépendance»

    PUBLIE LE : 07-05-202
    Le 8 mai 1945, au moment où la France fête la victoire sur le nazisme, en acclamant le général de Gaulle qui descend les Champs Elysées, et où à Berlin, l'Allemagne signe la capitulation, es Algériens, qui espéraient que des réformes payées par le prix du sang allaient être opérées, manifestent à Sétif, Guelma et à Kherrata. Retour chronologique documenté sur une page sanglante et ses retombées politiques sur le cours de l'histoire contemporaine de notre pays.

    Le 8 mai 1945, au moment où la France fête la victoire sur le nazisme en acclamant le général de Gaulle qui descend les Champs Elysées, et où à Berlin l'Allemagne signe la capitulation, les Algériens, qui espèrent que des réformes payées par le prix du sang vont être opérées, manifestent à Sétif, Guelma et Kherrata. Retour chronologique documenté sur une page sanglante et ses retombées politiques sur le cours de l'histoire contemporaine de notre pays.
    Le 8 mai 1945, sont organisées sur tout le territoire des manifestations pacifiques avec, entre autres slogans, «Vive l'Algérie indépendante», «Libérez Messali», «À bas le racisme et le colonialisme»... Il n'y a pas eu de mot d'ordre d'insurrection mais, pour la plupart, ces émeutes tournèrent vite à l'émeute, notamment à Sétif et à Guelma où il y eu intervention violente de la police. Dans certaines régions du pays, les militants ont eu comme directive de s'armer et de riposter en cas d'attaque de la police. Partout ailleurs, les défilés ont gardé un caractère pacifique. La direction du P.P.A. décida alors d'élargir l'insurrection à l'ensemble du territoire national.
    Le 10 mai 1945, la répression est déclenchée sous la direction du général Duval. Elle fut sanglante et impitoyable, à la mesure de la peur et de la haine des colons. L'administration coloniale aura été féroce en ce qu'elle a renoué avec les procédés qui ont caractérisé la conquête du pays, mais admit tout de même qu'elle avait dû faire de nombreux morts. Elle rendra certes public un chiffre «officiel» (1.500 morts), mais sans jamais se résoudre à donner le chiffre exact de victimes algériennes tombées entre le 8 et le 13 mai 1945. Sans aucun doute y en eut-il quinze ou vingt fois plus ?
    On saura néanmoins qu'outre les personnes tuées, la répression judiciaire confiée à des cours martiales aboutit à 1.476 condamnations pour 4.560 prévenus, dont 99 à mort, 66 aux travaux forcés à perpétuité et 329 aux travaux forcés à temps.
    Toujours est-il que les émeutes du 8 mai 1945 feront 103 morts et 110 blessés parmi les Européens, 8.000 morts chez les Algériens selon les militaires,-45.000, chiffre avancé par le P.P.A. D'une manière générale et après de nombreux recoupements effectués ici et là par les historiens, les chiffres avancés seraient plutôt de 45.000 morts. Les Européens pensèrent généralement qu'un mouvement insurrectionnel plus ample venait d'être décapité. Leurs élus tentèrent d'en tirer argument pour obtenir le retrait de l'ordonnance du 7 mars 1944 et le rappel du gouverneur Chataigneau. Mais celui-ci fut maintenu à son poste et tenta «courageusement», après le désastre, de reconstruire une Algérie viable.

    Les retombées politiques du 8 mai 1945

    La réforme administrative fut mise en route, des centres municipaux furent créés. La réforme politique elle aussi fut étendue : une ordonnance du 17 août 1945 accordait aux musulmans du deuxième Collège d'envoyer au Parlement un nombre de représentants égal à celui des Français du premier Collège. Mais peine perdue pour l'ordre colonial qui aura à le vérifier à ses dépens, et pour cause :
    - Le 11 mai 1945, des délégués du P.P.A, parmi lesquels Belouizdad, Cherchali, Amrani, Bouda, Mahfoudi, Filali, sont envoyés par la direction pour demander aux organisations régionales du parti d'élargir l'insurrection. Quelques jours après, la direction revient sur sa décision. Asselah, Belouizdad, Abdoun et Mostefai prennent la responsabilité de donner un contre-ordre. Des responsables du constantinois demandent à la direction du P.P.A d'appeler à l'insurrection générale pour aider les populations du nord-constantinois, qui supportent seules le poids de la répression. Le comité directeur accepte. L'insurrection doit avoir lieu dans la nuit du 23 au 24 mai 1945. - Le 14 mai 1945, le P.P.A et les Amis du Manifeste et de la Liberté (dissous depuis le 14mai 1945, en même temps que furent fermées les medersas et arrêtés Ferhat Abbas et Bachir El Ibrahimi, recommandèrent l'abstention aux élections à la première constituante d'octobre 1945. Celle-ci (l'abstention) fut observée surtout dans les villes, à raison de 54,48 % des inscrits musulmans. D'une manière générale, le projet d'intégration qui procédait de l'ordonnance du 17 août 1945 fut repoussé par les élus européens et les communistes algériens et ne fut pas discuté par
    La Constituante qui se contenta de voter une loi d'amnistie le 16 mars 1946. - Le16 mars 1946, Ferhat Abbas et Bachir El Ibrahimi sont libérés, mais les militants du PPA restent en prison.
    - En avril 1946, renonçant à l'expérience du Rassemblement, Ferhat Abbas constitua un parti qui lui fut propre : l'Union Démocratique du Manifeste Algérien (U.D.M.A.). La République algérienne qu'il préconisait, autonome, mais membre associé de l'Union française, n'eut aucun succès et les députés U.D.M.A.
    (11 sièges sur 13 aux élections de 1946) furent mal accueillis à l'Assemblée. Après le référendum constitutionnel d'octobre 1946, les Algériens votèrent à nouveau, mais cette fois, après l'échec politique des députés U.D.M.A, qui recommandèrent le boycott : il n'y eut que 37% de votants. Les candidats officiels eurent 8 élus, les communistes 2, les messalistes, organisés depuis la libération de leur chef en un nouveau parti, le M.T.LD. (Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques), en eurent 5. En 1947, le Parlement français s'occupa enfin de définir le «Statut de l'Algérie». Parmi les sept projets proposés par les partis français
    ou algériens, aucun n'était assimilationniste, aucun non plus n'était favorable à l'indépendance (Le M.T.L.D. ne reconnaissant pas la souveraineté parlementaire s'était abstenu) . La principale conséquence de cet événement est l’adoption du «Statut du 20 septembre 1947» qui, du reste, ne donne satisfaction à personne. «Déshonorant» déclarent les Français, «provocateur» considèrent les musulmans. Deux catégories d’individus, deux Collèges pour les élections : le premier pour le vote de ceux qui sont reconnus comme français à part entière, le second pour les autres.
    Le principe de l’article premier de la Déclaration des droits de l’homme «Les hommes naissent libres et égaux en droits», chaque homme disposant d’une voix, est ignoré en Algérie. L'effet produit par les massacres du 8-Mai 1945 sur les Algériens fut en tout cas celui d'une provocation, suivie d'un massacre qui ne fut pas pardonné.
    Le traumatisme engendré par les tueries de Sétif, Guelma et Kerrata (V.encadré) a en effet été déterminant pour faire prendre conscience aux jeunes Algériens et à des Européens nés en Algérie de la nécessité d’engager la lutte pour l’indépendance. C’est en cela que le 8-Mai 1945 aura, par voie de conséquence directe, été le signe annonciateur d’une nouvelle situation politique, autrement dit le Prodrome du 1er-Novembre 1954, en ce que cette date est celle du déclenchement de la guerre d’indépendance de notre pays. D’ailleurs celle-ci, inexorablement, n'allait pas tarder à l’être, précisément un certain 1er novembre de l'année 1954.
    Kamel Bouslama

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    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

  • #2
    Complainte sur les massacres du 8 mai 1945

    «Les yeux versent des larmes / Comment arrêter les larmes / Alors que la patrie a perdu ses enfants / À Guelma, mes frères, l’aviation / N’a épargné ni femmes, ni fillettes / Je suis en deuil pour les Sétifiens / Qui sont morts par amour de la liberté. »
    (Chant très triste qui, au lendemain des massacres du 8 mai 1945, raconte les morts à Sétif, Guelma et, en fait, dans toute l’Algérie. Mais c’est l’Est algérien qui a été le plus touché et a payé le plus lourd tribut)


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    SÉTIF
    Funestes souvenirs

    Même si l’historique marche de la fidélité qui a sillonné le même itinéraire, emprunté par les artisans du 8-Mai 1945, ne s’ébranlera pas cette fois-ci de la mosquée Abu Dher el Ghiffari, pour rendre hommage aux précurseurs de novembre, Sétif n’oubliera pas de sitôt, 75 ans après, les odieux massacres perpétrés par les forces coloniales contre une population, dont le seul tort était d’être sortie pour revendiquer pacifiquement le droit à la liberté. A Sétif, Guelma, Kherrata, Beni Aziz, Âmoucha et Tizi n'Bechar, le cri du sang et de la liberté est plus que jamais présent dans la mémoire des Algériens qui ne cesseront jamais de rappeler à ceux que l’amnésie semble frapper, qu’un crime est resté impuni et que 45.000 enfants de ce peuple de «mai de la douleur», «mai de l’espoir» ont été massacrés, exterminés, brulés à la chaux vive ou jetés de ponts de Chaâbet Lakhra.
    A Sétif, en ce mardi d’affluence, jour de marché hebdomadaire marqué par les retrouvailles de nombreux citoyens venus des différentes contrées de cette wilaya pour faire leurs provisions, les nationalistes algériens ne tardent pas à transmettre le mot d’ordre et rendez-vous est donné face à la mosquée Abu Dher el Ghifari, édifiée à partir de fonds recueillis auprès de citoyens musulmans. La foule qui prend des proportions des plus importantes ne tardera pas à attirer l’attention des services de la police française qui en avise aussitôt le sous-préfet.
    Des responsables algériens sont marqués politiquement, dont maître Mostefai, avocat au barreau de Sétif, membre influent du bureau des AML, Hassene Belkhired, président des Scouts musulmans El Hayat, Haffad Hocine, conseiller municipal, président de la section des Amis du manifeste à Sétif, Guenifi Mahmoud membre du bureau des AML et Abdelkader Yala, chef scout qui me disait un jour : « Nous voulions montrer une grande force sans l’utiliser.»
    Les intimidations fusent de toute part et à l’origine de cette interpellation, le commissaire central Torre, chef de la police à Sétif. «Si c’est pour fêter l’armistice, pourquoi ne pas vous joindre à nous et la fête n’en sera que plus grande ?», dira le sous-préfet qui reprochera à ces responsables d’exposer des jeunes scouts au danger. Il s’interroge encore sur le caractère de cette marche. Les responsables algériens disent vouloir mettre à profit ce jour de marché pour marquer l’événement sans jamais renoncer de faire entendre pacifiquement la voix de l’Algérie.
    Le sous-préfet les tient pour responsables de tout ce qui pourrait arriver. Il est 9h, la foule prend des proportions importantes devant la mosquée, débordant même sur les avenues attenantes et encadrée par des organisateurs, Merad Ali, Ould Braham Lamri, Talbi Salah, Bentoumi Bouzid, Lakhdar Taarabit, Bella Slimane et Sabri Seghir.
    La foule s’ébranle, traverse une partie de la rue Ben Mhidi et débouche sur les actuelles avenue du 1er-Novembre et 8-Mai 1945, brandissant les emblèmes des pays alliés et en tête le drapeau algérien.
    Sur les banderoles déployées, on pouvait lire : « Algerie Libre», « Vive la charte de San Franscisco», «Libérez les détenus politiques » et d’autres slogans à portée politique.
    La foule avance en rangs ordonnés et chantent «Hayou Chamel et Min Djibalina», avant d’arriver à proximité de l’ancien café de France ou l’irréparable est commis par ces policiers dissimulés à l’intérieur de cafés, de bars et de véhicules stationnés non loin. Les manifestants sont pris à partie par le commissaire Olivieri, offusqué à la vue de l’emblème national dont il demande le retrait immédiat avec les banderoles à slogans politiques. Un refus catégorique lui est opposé, il sort son revolver et fait feu. Un jeune homme atteint mortellement à la poitrine, vacille et s’écroule dans une mare de sang, Saal Bouzid est abattu à la fleur de ses 22 printemps.
    Alors que la foule scande «Tahia el Djazair», cet assassinat sonne la charge d’une répression barbare. Les troupes françaises se livrent dès lors à un véritable génocide. Sétif est mise à feu et à sang. Kateb Yacine, alors élève au lycée Eugene-Albertini et qui s’engouffra dans cette marche fut emprisonné. Il écrira à ce propos : «Pour la première fois, mon humanitarisme fut confronté au plus atroce des spectacles. J’avais 20 ans, lorsque le choc que j’ai ressenti devant l’impitoyable boucherie qui provoqua la mort de plusieurs milliers de musulmans, je ne l’ai jamais oublié. Là se cimente mon nationalisme.»
    F. Zoghbi

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    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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    • #3
      Le Pr Mohamed Bounaâma, docteur en archives et chercheur en histoire :
      «Le 8 mai 1945 est le premier acte populaire pour l’indépendance»

      Dans cet entretien, le professeur Bounaâma revient sur les massacres du 8 mai 1945 estimant que cette période de l’histoire de l’Algérie avait accéléré le processus du déclenchement de la lutte armée pour libérer le pays du colonialisme.

      Entretien réalisé par : Karim Aoudia

      El Moudjahid : Comment analysez-vous les événements du 8 mai 1945 ?
      Bounaâma Mohamed : Ces événements constituent un haut fait historique. Le 8 mai 1945 est l’une des dates charnières qui a complètement bouleversé l’histoire de l’Algérie et que j’évoquerai en m’appuyant sur deux points centraux. Le premier concerne la politique intérieure de l’Algérie, c’est-à- dire le contexte politique inhérent à ces événements, et le second point traite du plan international qui a prévalu à cette époque. Nous sommes donc à la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe marqué par la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie. Concernant l’Algérie, l’autorité coloniale française de l’époque avait déjà promis de lui accorder son autonomie, comme proposé précédemment par des politiciens français en termes politico-diplomatiques destinés à conforter leur position avec leurs alliés. En Algérie, cette promesse faite lorsque la métropole était encore sous occupation allemande est intervenue dans un contexte où les leaders du mouvement national ont exprimé à l’unisson la revendication de l’indépendance. Ainsi au plan de la politique intérieure, le mouvement national venait de réussir sa mue après des années du militantisme au sein notamment de l’Etoile nord-africaine qui, sous l’impulsion de l’émir Khaled, puis de Messali Hadj a pu être reconvertie en véritable bastion politique au lieu de simple association de défense des intérêts économiques des travailleurs maghrébins en France. Avant même les événements du 8 mai 45, l’un des points fondamentaux et névralgiques des revendications du mouvement national et de son leader Messali Hadj avait porté clairement sur recouvrement de l’indépendance. C’est là une première sur le plan de la prise de conscience de la classe politique algérienne ayant agi dans des conditions marquées par une réunification des rangs notamment entre le mouvement national de Messali et le courant réformiste des ulémas dirigé par Abdelhamid Ben Badis. En effet, au-delà de leurs divergences, ces deux tendances étaient déjà parvenues à unifier leurs rangs en 1936 lors de la formation du congrès musulman auquel ont adhéré toutes les autres forces politiques ayant exprimé unanimement à l’occasion leur opposition au régime colonial. Lors des assisses populaires de ce congrès tenues au stade municipal à Alger (l’actuel stade de 20-Aout), les travaux ont vu l’apparition de Messali Hadj qui avait axé son discours sur l’indépendance de l’Algérie. Et c’est ainsi qu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le peuple algérien, tout en faisant front autour de ses leaders nationalistes, est sorti le 8 mai 1945 pour manifester en liesse, en perspective de cette indépendance après la victoire des Alliés.
      En dépit d’une répression sanglante à laquelle on ne s’attendait pas, et grâce à la prise de conscience des Algériens, le mouvement national a pu rebondir pour la défense de la cause algérienne dans le cadre d’un nouveau processus marqué par la reconfiguration de la classe politique ayant abouti au déclenchement de la lutte armée. Représentant une époque charnière de l’histoire de l’Algérie, les événements du 8 mai 1945 doivent par ailleurs être réétudiés sur le plan de l’historiographie afin de mieux promouvoir leur importance patrimoniale et comprendre leur impact en termes d’attachement à la souveraineté et en matière de prise de conscience de tout un peuple ayant pu redonner des forces au mouvement national de se reconstruire, de ressouder ses rangs et d’unifier à nouveau sa vision autour de l’objectif de l’indépendance. Les massacres qui ont lieu durant cette époque ne devraient en aucun cas être circonscrits à une vision parcellaire où micrographique les limitant aux régions de Sétif, Guelma et de Kherrata, dans le Constantinois. Ce sont des événements à dimension nationale qui ont été décisifs dans l’histoire du mouvement national et dans sa quête pour l’indépendance. Ils ne peuvent être aussi distanciés des autres mouvements de résistance qu'avaient opposés les Algériens au colonialisme, tels ceux dirigés par cheikh Ahaddad et El Mokrani, cheikh Bouamama, ou du combat héroïque de cheikh Abdallah Ibn Lamjad dit Boubaghla.

      Face à un mouvement de manifestation pacifique, l’armée coloniale a eu recours à la plus féroce des répressions qualifiées de crime contre l’humanité. Avez-vous une idée précise sur la durée de cette répression et la nature des moyens utilisés dans ses massacres ?
      Effectivement, la répression qui s’est abattue sur les Algériens, hommes, femmes et enfants qui sont sortis pour exprimer un choix politique et rappeler à l’administration coloniale qu’elle a failli à sa promesse, relève d’un crime contre l’humanité, d’un véritable génocide. Les assassinats collectifs perpétrés par l’armée coloniale et ses milices contre le peuple algérien se sont prolongés par des massacres calculés jusqu'à 1947. L’armée française tenait vraiment à étouffer dans l’œuf la revendication à l'indépendance qui avait pris forme progressivement dans l’esprit collectif des Algériens.
      Pour y parvenir, elle avait mobilisé sa grande artillerie, à l’exemple des fameux avions B 22 utilisés pour bombarder la population algérienne. Ses bateaux de guerre amarrés à Bejaia avaient aussi tiré sur la population de Sétif et celles des autres régions environnantes. Des parachutistes de l’armée française ont été également ramenés en grands renforts en Algérie pour les impliquer dans les massacres du 8 mai 1945 qui ont suscité par ailleurs plusieurs réactions à l’international. Il y a eu en effet beaucoup de rapports dans lesquels des pays comme la Grande Bretagne, la Suède, le Danemark et mêmes les Etats-Unis se sont soulevés contre la répression des forces coloniales ayant fait 45 000 morts parmi les manifestants. Ces statistiques relatives au nombre des victimes ont fait l’unanimité du côté de la classe politique de l’époque. Certains historiens français à l’exemple de Gilbert Meynier ont voulu faire croire que le nombre des victimes seraient moindre, mais ce n’est qu’une vaine tentative de minimiser la gravité d’une tragédie inexcusable à tout point de vue.

      Que faudrait-il faire, selon vous, pour qu’une épopée comme la date du 8 mai 1945 soit mieux promue et ancrée dans la mémoire des générations futures et qu’en est-il de la disponibilité des archives concernant ces massacres ?
      Bounaama Mohamed : J’ai toujours plaidé pour la constitutionnalisation de notre mémoire nationale. A mon avis, un Etat dont la mémoire est éparse ne pourra adopter une stratégie d’avenir où encore se doter d’une solide politique étrangère qui se base essentiellement sur des acquis historiques. De ce point de vue, celui qui ne sait pas d’où il vient retourne sur ses pas! Quand on parle de la mémoire, on parle des archives, de faits importants de notre histoire, des personnalités algériennes résistantes. Il est donc nécessaire de prendre conscience de l’importance des archives et de ce qu’ils représentent comme trésor national. Il reste que l’on ne peut faire valoir un meilleur recouvrement de nos archives sans une institutionnalisation des faits archivistiques. En ce sens, en plus de la création d’un institut historiographie, la mise en place d’une autorité de régulation des archives est nécessaire pour une action plus efficiente en matière de récupération de nos archives qui demeurent dispersées soit au niveau des associations où dans plusieurs autres départements. Il y a également une autre nécessité, celle de concevoir de nouvelles lois mieux adaptées à ce domaine d’extrême sensibilité. L’actuelle loi datant de 1988 est dépassée, voire désuète. Récemment, le président de la République a nommé M. Abdelmadjid Chikhi en tant que conseiller à la présidence chargé des archives nationales et de la mémoire nationale. Cette décision, une première du genre, augure d’une refonte globale sur le plan législatif et d’organisation de la politique des archives en vue de combler le vide constaté notamment en matière de décrets d’application sur les archives, de la domanialité de ce type des documents qui demeurent imprescriptibles, inaliénables et insaisissables. A cet égard, j’estime que la mission de M. Chikhi s’articule essentiellement autour de l’organisation des assises nationales de archives et de dessiner les contours de la nouvelle politique mémorielle. Les archives nationales font partie de la mémoire nationale, le président de la République en est conscient et il est déterminé à reconquérir cet aura.
      K. A.
      The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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      • #4
        Le président algérien Abdelmadjid Tebboune a décidé jeudi d'instaurer une «journée de la Mémoire» en souvenir des massacres du 8 mai 1945 perpétrés par les forces de l'ordre françaises dans le Constantinois, qualifiés de «crimes contre l'humanité».

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        • #5
          Salam

          Âmes sensibles s'abstenir.

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