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Oran avant Oran

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  • Oran avant Oran

    Oran avant Oran


    Période préhistorique


    Le site d'Oran fut un lieu d'activité humaine préhistorique comme l'ont révélé les fouilles archéologiques entreprises aux xixe et xxe siècles. Les vestiges de plusieurs occupations humaines et pré-humaines furent découverts en Oranie. Les artefacts d'hominidés à Tighennif près de Mascara remontent à 400 000 ans, ainsi que les occupations de grottes du Cuartel, de Kouchet El Djir et des carrières d'Eckmühl remontant aux époques Paléolithique et Néolithique.

    Il y a environ 21 000 ans, le groupe des Ibéromaurusiens voit le jour. À 120 km au sud ouest d'Oran, dans la région de Berkane, la grotte de Taforalt recèle le plus important gisement connu datant de cette époque. Cette civilisation se maintient et se répand sur l'ensemble du Maghreb avant de se métisser progressivement vers le neuvième millénaire avant notre ère avec les populations capsiennes pour former les ancêtres des Berbères et Touaregs.

    Antiquité

    L'installation dans la région des Phéniciens dont on peut étudier l'immense nécropole des Andalouses date de la période punique entre le vie et ier siècles av. J.-C..

    Alors que les Phéniciens avaient choisi la crique de Madagh à l’ouest d’Oran pour y installer leur comptoir, les Romains préférèrent développer le site de Portus Magnus à 40 kilomètres à l’est, sur la ville actuelle de Bethioua43. Le port d'Oran ainsi que Mers-el-Kébir étaient connus sous le nom de Portus Divini (Port divin).

    La région d'Oran, alors nommée Unica Colonia44, est réputée pour sa douceur de vivre et sa prospéritéa 4. De nombreuses statues antiques retrouvées dans l'oranais peuvent être vues au musée Ahmed Zabana. Au iie siècle, la région voit une immigration juive depuis la Cyrénaïque et l'Égypte à l'instar du reste du Maghreb45,46.

    La présence romaine induit vraisemblablement l'arrivée de chrétiens comme l'attestent de nombreux restes du ive siècle dont certains sont visibles au musée d'Orana 4. C'est elle également qui induit l'arrivée tardive des premiers Juifs, qui n'est bien attestée qu'au Bas-Empire, d'abord dans les villes du littoral45.

    Disparition de la Unica Colonia


    À la chute de l'Empire romain, la ville s'éteint sous les coups de l'occupation vandale en 445, de la reprise de la ville par les Byzantins en 533, de la peste Justinenne à partir de 541, puis de la conquête arabe en 645.

    Fondation d'Oran


    Au début du xe siècle, après plusieurs siècles d'abandon, il ne restait rien du Portus Divini. La situation dans la région est confuse et laisse les criques de cette côte sans aucune juridiction stable, ni aucun contrôle officiela 5. Le royaume rostemide dominant la région est en proie aux combats contre les Fatimides et aux difficultés internes. Il n'est pas en mesure de défendre ses intérêts.

    Pour les pouvoirs en place, la zone presque déserte d'Oran est d'un intérêt secondaire et reste sans contrôle.

    D'autre part, les côtes du Maghreb étaient utilisées périodiquement par les marins de Pechina, alors sous domination d'Al-Andalus, pour commercer avec le royaume Rostemides, sa proche capitale Taherta 6 et la ville de Tlemcen. Peu à peu ces implantations devinrent permanentes. Parallèlement, les émirs omeyyades de Cordoue souhaitaient s’installer sur les côtes africaines. Aux premiers signes de dislocation de l’empire abbasside, les Arabes d’Andalousie, au faîte de leur puissance, choisirent de développer des comptoirs commerciaux sur la côte nord-africaine.

    Ainsi Oran fut fondée en 90248 par les marins andalous Mohamed Ben Abou Aoun et Mohamed Ben Abdoun et un groupe de marins, appuyés par les émirs omeyyades de Cordoue39,49 et après avoir obtenu le consentement des Nefzas et des Mosguen faisaient partie de la grande tribu berbère des Azdadja qui occupait le Sahel d'Oran selon El Bekri. Ils fondèrent la ville pour commercer avec Tlemcen en développant l'occupation de la baie abritée de Mers el-Kébir.

    Dynasties arabo-berbères


    Peu après sa fondation, Oran devient un objet de conflit entre Omeyyades de Cordoue et Fatimides. La ville est prise et reprise au cours d'un conflit qui durera de 910 à 108250. Dès l'an 1000, la communauté juive est présente et structurée à Oranb 1. À cette époque, la valeur stratégique d'Oran dépasse celle d'Alger et de Tlemcen4. En 1077, la ville tombe sous le contrôle du fondateur de la dynastie des Almoravides, Youssef Ibn Tachfin, et subit cette souveraineté pendant 68 ans. En 1145, Oran est prise par les troupes Almohades de Abdl al Mumin Ibn Ali déjà victorieuses à Tlemcen, lorsque l'émir almoravide Tachfin Ben Ali et sa favorite Aziza sont tués lors de leur retraite en tombant avec leur cheval du haut d'une falaise de la montagne Murdjajoa 7, alors qu'ils comptaient rejoindre le port de Mers el-Kébir où ils devaient embarquer pour l’Andalousie51.


    En arrière-plan, Bordj El-Mehel (tour des Cigognes), ou Rozalcazar puis Château-Neuf sous les Espagnols et les Français
    Sous le règne almohade, la ville connait une longue période de stabilité et de prospérité de plus d'un siècle au cours de laquelle sont développés le port et des chantiers navals39. Malgré des persécutions sous les Almohades, la communauté juive se développe, et entre le xiie et le xive siècle, les Juifs de la Méditerranée occidentale commercent avec les Juifs d'Oranb 1.

    L'empire almohade qui domine le Maghreb plusieurs décennies s'émiette peu à peu pour finalement donner naissance à trois dynasties locales : Hafsides en 1230, Zianides en 1235 et Mérinides en 1258. Oran devient Zianide dès 1228, quand elle tombe entre les mains de Yaghmurasen. Plus tard la ville est prise par les Mérinides, et Abou El Hassan vient y résider en 134752.

    En moins d'un demi-siècle, dit M. L. Fey53, Oran passa neuf fois sous différents pouvoirs... Ben-Abbad réussit à se maintenir à la tête du gouvernement oranais, à la condition qu'il se reconnaîtrait vassal du royaume hafside (1437). Oran accueille dans ses murs à cette époque, le célèbre Mohammed IX al-Aysar, surnommé le gaucher et quinzième roi de Grenade, obligé de fuir devant ses sujets insurgés. À la mort de Ben-Abbad, Oran obéit aux Zianides de Tlemcen. Sous cette nouvelle domination, Oran jouit d'une grande prospérité ; elle devient le centre d'un commerce très actif et très étendu. Marmo et Alvarès Gomès en rendent témoignage53. L'ivoire, les dépouilles d'autruche, les peaux de bœuf tannées, la poudre d'or, les céréales étaient d'inépuisables sources de richesses pour les habitants, qui excellaient aussi dans la fabrication des étoffes de laine et dans celle des armes blanches. Les Vénitiens, les Pisans, les Génois, les Marseillais et les Catalans achetaient à l'envi ces produits, écoulant par contre des étoffes, des verroteries, de la quincaillerie grossière et du fer. Oran compte alors 6 000 maisons, des mosquées splendides, de vastes entrepôts commerciaux et de nombreux superbes édifices. Plusieurs édifices remarquables datent de cette époque, comme les fortifications de Mers El Kébir et probablement des donjons du Rozalcazar.

    Au xive siècle, Oran devient un centre intellectuel52. Plusieurs écrivains y séjournent et en vantent les attraits :
    Ibn Khaldoun : Oran est supérieure à toutes les autres villes par son commerce. C'est le paradis des malheureux. Celui qui arrive pauvre dans ses murs en repart riche54.
    Al Idrissi : Wahran est près du bord de la mer, elle fait face à Almería sur la côte d'Andalousie dont elle est séparée par deux journées de navigation. Mers El Kébir est un port sans pareil sur tous les rivages de la Berbérie. Les navires d'Andalousie y viennent souvent. On trouve à Wahran, des fruits à profusion. Ses habitants sont des hommes d'action, puissants et fiers55.
    Ibn Khémis : Les deux villes frontières qui m'ont plu dans le Maghreb sont Oran de Khazer et Alger de Bologhine55,56.
    Léon l'Africain : Oran est une grande cité bien fournie d'édifices et de toutes sortes de choses qui sont séantes à une bonne cité, comme collèges, hôpitaux, bains publics et hôtellerie, la ville étant ceinte par ailleurs de belles et hautes murailles55.
    Lors de la première expulsion en 1391 de juifs d'Espagne, les Séfarades prennent le chemin du Maghreb. En 1492, à la suite du décret de l'Alhambra, Séfarades et Marranes embarquent dans 25 navires au port de Santa Maria à Cadix à destination d'Oranb 1.

    À cette époque, Oran est une République maritime, une cité-État se comportant en principauté détachée du royaume zianide4. La ville est en guerre contre les souverains de Tlemcen et les habitants refusent d'avoir un gouverneur au sein de la cité. Ils choisissent chaque année un Juge Souverain ainsi que des assesseurs pour le gouvernement de la ville. Les pouvoirs de la cour de Tlemcen sont limités à la perception de l'impôt57.

    Deux phases d'occupation portugaise de la ville au XVe siècle sont signalées par quelques auteurs: de 1415 à 1437 et de 1471 à 147758.

    À partir de 1493, Oran accueille un nombre important de réfugiés grenadins chassés par la Reconquista. L'envie de vengeance, de reconquête, et le grand nombre de réfugiés vont faire de la côte algérienne le point de départ d'un grand nombre d'attaques contre l'Espagne chrétienne. Au début du xvie siècle, les rois catholiques au sommet de leur puissance, vont ordonner en retour l'annexion de nombreux ports d'Algérie.

    L'appui militaire ottoman chasse les Espagnols de tous les ports conquis, à l'exception de ceux d'Oran (1509-1708) et de Mers el-Kébir (1505-1792)

    Période espagnole


    Au mois de juillet 1501, les Espagnols lancent une expédition pour tenter d'accoster sur la plage des Andalouses60. L'opération tourna au désastre. Il faut attendre le débarquement de Mers-el-Kébir, en 1505, pour voir l'Espagne s'engager dans la première expédition organisée contre Oran.

    Oran compte alors 6 000 feux, soit environ 25 000 habitants. Au lendemain de sa chute, le 17 mai 1509, Oran est désertée de ses habitants et totalement occupée par les troupes espagnoles. C'est la plus belle ville au monde, s'écrie le cardinal Jiménez de Cisneros après avoir vu la ville qu'il vient d'annexer pour le compte des rois catholiquesa 8. Cette même année, il fait construire sur les ruines de la mosquée Ibn El Beitar l'église Saint-Louis qui domine la vieille ville.

    .../...

  • #2
    .../...

    En 1554, le gouverneur comte d'Alcaudete fait alliance avec le sultan saadien Mohammed ech-Cheikh contre les Ottomans alors installés à Alger, et parvient à maintenir la présence espagnole.

    Les Espagnols procèdent à des travaux de restauration de la forteresse destinée à loger les gouverneurs de la ville. Les fortifications de la place se composaient d'une enceinte continue, surmontée de fortes tours espacées entre elles, du château proprement dit, ou casbah. Le gouverneur espagnol établira son quartier général dans ce donjon61. Au xvie siècle, les Espagnols font d’Oran une place forte et construisent une prison sur un éperon rocheux près de la rade de Mers El Kebir, avant que le marquis de Santa Cruz n'entreprenne en 1563 la construction d'un fort à son nom au sommet de l'Aïdour, baptisé Murdjadjo par les nouveaux maîtres de la ville62.

    Contrairement à la péninsule ibérique, les trois religions monothéistes cohabitaient dans la ville, les musulmans vivaient en dehors des deux places, tandis que les juifs habitaient à l'intérieur d'Oran, jusqu'à leur expulsion en 166963. Certains s'établissent dans la montagne de La Corniche Supérieure. À partir de 1609, à la suite d'un décret d'expulsion d'Espagne, plusieurs vagues de Morisques débarquent à Oran63 et beaucoup s'établissent dans les environs64. Les Espagnols sont des soldats ou des « bagnards », qui purgeaient leurs peines à Oran, parmi ces bagnards, beaucoup désertaient, et pour échapper à l'esclavage et être libre, une partie importante se convertissait à l'islam, ce qu'on appelle les « renégats »63. Oran, n'avait pas de véritable commerce, son activité économique se limitait à la vente des esclaves, ou des razzias
    .
    La restitution de Mers el-Kébir d'Oran a été le fruit d'une longue période de lutte acharnée et persévérante des Algériens face aux Espagnols63. En 1563, le Beylerbey d'Alger Hassan Pacha, lance une offensive pour libérer Oran et Mers el-Kébir, avec ses troupes composées, de différentes tribus. Mais après plusieurs et vaines tentatives et d'affrontements militaires, il lève le siège65. En 1678, le gouverneur par intérim d'Oran, est tué au cours d'un nouveau siège. En 1687, un autre gouverneur espagnol, était tué dans les mêmes conditions. Bien que ces tentatives militaires aient échoué, un climat d'insécurité permanent s'installe tout autour de ces deux places63.

    Malgré ses fortifications, la ville est l'objet d'incessantes attaques jusqu'au pied même des remparts. En 1708, le Bey ottoman Mustapha Ben Youssef annexe la ville qui devient pratiquement déserte. La ville se repeuple rapidement de gens venus de toute la région d'Ouest. Le commerce se développe, avec l'installation des négociants juifs et français63. Les Espagnols la récupèrent en 1732. D'un point de vue urbanistique, Oran ne connait pas un grand changement, toutefois ses cinq principaux forts qui l'entouraient sont restaurés et renforcés63. En 1770, Oran compte 532 maisons particulières et 42 édifices, une population de 2 317 personnes plus 2 821 déportés libres qui vivent du négoce. Entre 1780 et 1783, Charles III d'Espagne propose à l'Angleterre d'échanger Oran contre Gibraltar63.

    La ville est devenue trop périlleuse et trop onéreuse à reconstruire et à défendre pour le roi d'Espagne Charles IV ; il entame des discussions de plus d'un an avec le Dey d'Alger pour la lui céder. Après un long siège et le tremblement de terre des 8 octobre 1790 qui désorganise les défenses espagnoles, un traité est signé le 12 septembre 1791 à Alger le 12 septembre 1791 par le dey Hassan Pacha et les Espagnols évacuèrent la ville l'année suivante. Le Bey de Mascara Mohamed Ben Othman, dit Mohamed el Kebir, prend possession d'Oran.

    Période ottomane


    Après une première annexion de la ville entre 1708 et 1730, le Dey d'Alger négocie entre 1790 et 1792 la cession de la ville et en fait la capitale du beylik de l'Ouest jusqu'en 1830 au détriment de Mascara.

    Le 8 octobre 1792, il accorde diverses faveurs aux Juifs pour qu’ils se réinstallent à Oran. En 1793 s'achève la construction de la Mosquée du bey Mohamed el Kébir, qui servit de Médersa et de cimetière familial au bey. En 1793 toujours, le bey fait reconstruire le mausolée (koubba) du saint patron de la ville Sidi El Houari. En 1794, des pèlerins venus de la Mecque apportent une nouvelle épidémie de peste et l'ancienne ville (aujourd'hui Quartier Sidi-El-Houari) redevient pratiquement déserte, la population préfère s'installer sur le plateau Karguentha encouragée par la construction de la mosquée du bey (actuellement au boulevard Tripoli). Un autre faubourg voit le jour sur l'emplacement de l'actuel boulevard de l'industrie, toujours à partir de 1794, ce deuxième faubourg s'étendait jusqu'à l'ancien cimetière de Sidi-bachir66.

    En 1796, la mosquée du Pacha, nommée en l'honneur d'Hassan Pacha, dey d'Alger, est construite par les ottomans avec l'argent provenant du rachat des prisonniers espagnols, après le départ définitif de ces derniers.

    Colonisation française


    Occupation de la ville


    Le 4 janvier 1831, Le général comte Charles-Marie Denys de Damrémont, chef de l'expédition entre dans Oran qui porte encore les stigmates du tremblement de terre de 1790 qui l'a en grande partie détruite. Le 17 août, le général Faudoas y installe une garnison, dont le 4e bataillon de Légion étrangère et fait de la ville la tête de ligne de la pénétration du Sud Oranais. Un premier recensement de 1831 indique que la ville compte 3 800 habitants dont 3 531 juifs formant une écrasante majorité. Les premières mesures de l'administration militaire sont de raser les habitations qui masquent la vue à l'Est entre Château Neuf et le Fort Saint Philippe, puis au coteau du Ras El Ain pour réduire les risques d'embuscades.

    En effet, la conquête coloniale française a eu pour résultat immédiat l'abandon de la ville par une très grande partie de sa population, exceptées les familles kouloughlis, les Noirs sans attaches tribales ainsi que les Juifs. Pour empêcher le retour des habitants, le général Boyer prétextant le motif que les faubourgs pré-coloniaux gênaient le dispositif de défense de la place, les a incendiés et rasés en 1832. Ces destructions ont eu des conséquences graves sur le dépeuplement de la ville67.

    À partir du 17 avril 1832, des combats sporadiques éclatent entre les troupes de la garnison, sous les ordres du général Boyer et des rebelles commandés par Mahi el Din et son fils Abd el-Kader. Le 11 novembre une attaque de grande envergure est repoussée par la garnison commandée par le chef de bataillon Cros Avenas. Des tribus de la région de Mascara proclament Abd El Kader, fils de Mahi el Din, leur émir, à 24 ans; il dirige le soulèvement contre la conquête coloniale française.

    Dès 1834, celui-ci commence son œuvre avec le traité Desmichels, puis étend son emprise lorsqu'en mai 1837 le Traité de Tafna lui reconnaît le titre d’Émir et consacre son autorité sur la majeure partie des provinces algéroises et oranaises, aux exceptions des villes d'Oran, Mostaganem et Arzew. Abd El Kader groupe ses territoires, assied sa puissance politique et unifie administrativement les populations dans un sens égalitaire et populaire contre les Français.

    En 1844, après la guerre, la ville commence à connaître le retour par vagues successives de ses anciens habitants, suivis par des éléments d'autres tribus paupérisées par la guerre, qui avaient échoué aux portes de la ville67. Le 31 janvier 1848, la ville est érigée en commune de plein exercice.

    Développement et peuplement


    Entre 1841 et 1847, le général Lamoricière réorganise la ville par la création de quartiers (Médina Jdida, ville nouvelle), le déplacement de populations autochtones, puis l'adaptation de la ville à la politique de colonisation de peuplement. C'est ainsi qu'Oran voit une vague d'immigration européenne : 47 300 Français venus d'Alsace, des Vosges, du Dauphiné et du sud de la France, 31 000 Espagnols, 8 800 Maltais, 8 200 Italiens et 8 600 Suisses et Allemands. La ville est décimée par une grave épidémie de choléra (du 11 octobre au 17 novembre 1849, 1 817 décès sont déclarés à l’état civil) avant de recevoir dix ans après une vague de migrants juifs de Tétouan.

    Devant la rapide croissance d'Oran le développement d'un port adapté à l'envergure de la ville est décidé. Les premiers travaux commencent en 1848. Ils ne finiront que lors de la décolonisation, en 1962, et donnent son aspect actuel au port.

    L'empereur Napoléon III séjourne en 1865 à l'Hôtel de la Paixb 2 et offre la nationalité française aux Juifs et Musulmans, ainsi qu'aux étrangers justifiant de trois années de résidence en Algérie68. Ce décret provoque des résistances parmi les colons et il faudra attendre le décret Crémieux du 24 octobre 1870 pour permettre à 37 000 Juifs d'Algérie de passer du statut de sujet français à celui de citoyen. Comme en métropole, Oran suit à cette période le développement de l'antisémitisme politique.

    L'hôtel de ville d'Oran et les deux lions de bronze datent de la Troisième République. La construction débutée en 1882 fut achevée en 1888 avec la pose des deux statues animalières du sculpteur Auguste Cain (1889). Dix ans plus tard, un monument commémorant la bataille de Sidi-Brahim (1845) fut érigé en face de l'Hôtel de ville. Situé sur la Place d'armes (rebaptisée Place du 1er novembre à l'indépendance en 1962), le monument comporte un obélisque de 8 m de haut surmontée d'une Gloire Ailée, allégorie du sculpteur français Jules Dalou (1898)

    Tournant du siècle


    À partir de 1890, la ville connait une croissance continue. La ville dépasse les 100 000 habitants au changement de siècle. À l'étroit à l'intérieur de ses remparts, elle sort de ses limites, se développe sur le plateau vers Karguentah. De nombreux faubourgs se créent : Saint-Antoine, Eckmuhl, Boulanger, Delmonte, Saint-Michel, Miramar, Saint-Pierre, Saint Eugène, Gambetta. Elle devient le lieu d'une activité intense, dans les jardins de l’orphelinat de Misserghin, le frère Clément crée la clémentine en 1892, en 1912 s'ouvre la première école coranique libre et moderne de Si Tayeb Al Mahaji (Zaouïa Derkaouia Al Mahajia) à Oran Médina Jdida (Tahtaha), en 1930, le port d'Oran dépasse en tonnage celui d'Alger, entre 1930 et 1932, plusieurs records aériens mondiaux de durée et de distance en circuit fermé sont établis sur l'aérodrome d'Es Senia.

    Oran est la cinquième ville de Francea 9. L'immigration espagnole y a été très importante au xixe siècle en provenance de la région d'Alicante, de Valence et de Murcie70 et a laissé des traces dans la ville avec les arènes d'Eckmuhl. En 2014, les vieux Oranais, au lieu de dire dinar, disent duro, pour parler de leur monnaie. Des républicains espagnols émigrent également à Oran pendant la guerre civile espagnole (1936-1939). Parmi les Européens d'Algérie célèbres originaires d'Oran, il faut citer Emmanuel Robles, qui est l'auteur de Saison violente71. Comme le premier homme de son ami Albert Camus, il s'agit d'une quête du père, référent majeur dans la culture hispanique alors que la mère est la gardienne des traditions.

    Commentaire


    • #3
      Seconde Guerre mondiale


      Pendant la Seconde Guerre mondiale, Oran est le lieu de plusieurs événements majeurs.

      Le 3 juillet 1940 a lieu la bataille de Mers el-Kébir. Une escadre britannique attaque une escadre française au mouillage. Cette canonnade entraîne la perte du cuirassé Bretagne. Le croiseur de bataille Dunkerque, le cuirassé Provence et le contre-torpilleur Mogador sont mis hors de combat. Ce combat cause la mort ou la disparition de 1 297 marins ainsi que 351 blessés.

      Le 8 novembre 1942, se déroule à Alger, Casablanca et Oran, l'opération Torch. Après deux jours de durs combats entre les forces de Vichy et les alliés, dont la supériorité en hommes et en matériels est écrasante, Oran capitule le 10 novembre. Le même mois, les Américains débarquent dans la baie, point de départ de la Campagne de Tunisie puis de celle d'Italie.

      En 1942, les habitants de l'Est d'Oranie fuient en masse vers la ville d’Oran. La ville incapable de les accueillir devient insalubre, et les migrants sont surnommés Chéragas72.

      En 1943, le café El-Widad est créé par un groupe de militants nationalistes en plein centre-ville européen. Cet établissement va jouer un important rôle dans le développement du patriotisme algérien. Au fil du temps, il devient un centre de regroupement des différentes tendances représentatives des partis indépendantistes de l'époque.

      Après-guerre et prémices de la guerre d'Algérie


      Après les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata, le 8 mai 1945, les familles oranaises adoptent des orphelins venus de l'est du pays. À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, et à la veille de la guerre d'Algérie, Oran est démographiquement la ville la plus européenne de l'Algérie ; c'est aussi celle où la population d'origine espagnole a la plus forte prépondérance numérique. En 1948, la ville compte 352 721 habitants. La population oranaise originaire d'Espagne est estimée à 65 % du total des Européens, eux-mêmes plus nombreux que les musulmans73.

      En mars 1949, Ahmed Ben Bella et Hocine Aït Ahmed, responsables du PPA, préparent depuis « l'hôtel de Paris » le cambriolage de la poste d'Oran avec l'aide de Belkacem Haddadine dont la poste telecom du centre ville porte le nom[réf. nécessaire]. Ce vol rapporte 3 070 000 francs et sert de trésor de guerre initial au FLN.

      Quant à la population de la ville, selon Benjamin Stora :

      « Il serait erroné de considérer ceux que l’on appellera plus tard les « pieds-noirs » comme un « peuple » homogène. Très souvent, par leur situation sociale, ils se heurtent à une couche sociale constituée de gros propriétaires fonciers. Mais en dépit de ces oppositions, ils sont unanimes, et particulièrement à Oran, où ils sont majoritaires, à défendre leurs privilèges, qui rendent le plus petit fonctionnaire français supérieur à n’importe quel Algérien musulman. Leur unité est due à une peur commune de la majorité musulmane74. »

      Si la Troisième République excluait de la politique les « indigènes »75, ce statut est aboli en trois temps par la Quatrième République qui leur reconnait pleinement l'accès à la nationalité le 7 avril 1946, puis impose l'année suivante l'égalité politique et l'égal accès aux emplois du service public. Bien que l'application de la loi ne soit pas complète76, la situation politique évolue avec l'élection de députés « indigènes » à Oran. Une des figures les plus importantes est Chérif Sid Cara, député oranais qui devient sénateur, secrétaire d'état, puis coprésident du Comité de salut public de l'Algérie avec le général Massu.

      Guerre d'Algérie


      Le 1er mai 1952, des émeutes troublent la tranquillité de la ville.

      « En 1954, la droite et la gauche se disputent ainsi comme dans n’importe quelle grosse ville française. Sans vraiment prêter attention à l’électorat "indigène". »

      — Benjamin Stora77

      Le 1er novembre 1954 marque le début officiel de la Guerre d'Algérie. Larbi Ben M'Hidi commande la Wilaya v qui englobe toute l'Oranie. À cette époque le FLN dispose de 50 à 60 hommes dans l'Oranie78. Il laisse le commandement de la Wilaya à Boussouf au début de l'année 195779. Ahmed Zabana fut désigné responsable de la zone de Zahana (Saint Lucien) 32 km dans la banlieue d'Oran. Il est chargé de préparer la révolution avec le nécessaire en hommes et munitions80. Le 8 novembre 1954, dans les environs d'Oran se déroule la bataille de Ghar Boudjelida à El Gaada un village dans la banlieue d'Oran, au cours de laquelle Ahmed Zabana est capturé après avoir été atteint de deux balles. Il est incarcéré à la prison d'Oran, puis transféré à la prison Barberousse (Serkadji) avant d'être exécuté le 19 juin 195681. Il fut le premier condamné à mort de la Guerre d'Algérie82. Deux ans plus tard, Cheriet Ali Chérif est le dernier combattant à être exécuté par la guillotine.

      Le 26 juin 1956, le 14e RCP de Toulouse débarque à Oran. La flotte basée à Mers el Kebir participe à l'interception de plusieurs cargaisons d'armes livrées depuis le bloc soviétique, notamment à l'arraisonnement de l'Athos le 16 octobre 195678. Lors de la visite du général de Gaulle en Algérie, entre le 9 et le 13 décembre 1959, les violentes manifestations dans la ville provoquent plusieurs morts. Le « non » au référendum de 1961 sur la paix en Algérie provoque un état de siège. Des incidents fomentés par le FLN éclatent à Oran. Ils font 25 morts. Les Européens quittent les quartiers musulmans.

      Dans la ville à majorité européenne, l'OAS est particulièrement violente et s'attaque à la population d'Oran y compris les Européens en désaccord avec elle. La ville est l'ultime refuge de l'organisation. En décembre 1961, elle tue le colonel Rançon, chef du 2e Bureau d'Oran. Alors qu'en 1962 les Français ont accepté par référendum le principe de l'autodétermination de l'Algérie, les affrontements entre musulmans et Européens éclatent à Oran. Le 13 janvier 1962, un commando de l'OAS exécute 3 membres du FLN dans la prison d'Oran, le lendemain, 4 fugitifs sont assassinés83.

      Au printemps et durant l'été, les Européens et les Musulmans pro FLN se livrent aux pires horreurs de la guerre d’Algérie : de sanglants combats opposent les forces de l’ordre et les membres de l’OAS. Le 26 juin, ces derniers incendient le port d'Oran et font exploser 2 voitures piégées dans les quartiers musulmans. On déplore 23 morts et 32 blessés. Le mois suivant, des incidents entre l'OAS et les forces de l'ordre éclatent en marge de l'arrestation du chef de l'organisation en Oranie, le général putchiste Edmond Jouhaud. Quatre jours plus tard, cette organisation tente de soulever les Européens pour chasser les Algériens d'Oran. Fin avril, une bataille éclate entre les gendarmes et l'OAS. Le 14 juin, le général Ginestet et le médecin-colonel Mabille sont assassinés. Trois jours plus tard, l'OAS capitule à Oran78.

      L’historien algérien Saddek Benkada estime le nombre des victimes civiles algériennes de l'OAS à 859, entre le 1er janvier et le 30 juin 1962. Le 28 février 1962, au mois du ramadan, une explosion simultanée de deux voitures piégées, dans le quartier musulman de Médina Jdida fait 78 morts, sans compter les corps non identifiables

      Indépendance


      Le 5 juillet 1962, alors que toute l'Algérie fête son indépendance, un drame se déroule à Oran, c'est le massacre d'Oran85. La foule se lance dans un massacre vengeur d'Européens d'Algérie. Le général Katz refuse d'intervenir. Le lieutenant français Rabah Kheliff, musulman de 29 ans à la tête de 300 soldats, pose un ultimatum à un détachement de l'ALN et réussit à libérer 400 des Européens retenus en otage. Condamné à mort par le FLN, il se réfugie en France86,87[réf. à confirmer].

      Les accords d'Évian prévoyaient la location de la base navale de Mers El-Kébir et de ses annexes militaires pour 15 ans. Elle sera rétrocédée en 1967.

      Des émeutes éclatent le 7 janvier 1964 à Oran. Plusieurs centaines d'Oranais manifestent contre le chômage, la vie chère et la rareté des produits alimentaires. À coups de barres de fer, de pavés et de chaînes de vélo, ils affrontent les forces de police. Quelque 300 manifestants sont appréhendés et aussitôt déférés devant deux tribunaux spéciaux88.

      Le 17 juin 1965, Oran abrite le match amical du siècle opposant l'Algérie au Brésil, joué au Stade Ahmed-Zabana devant 60 000 spectateurs. Ahmed Ben Bella, le premier Président de la république algérienne, et ancien joueur de l'Olympique de Marseille, est présent.

      Durant les années 1970, l'industrie pétrolière s’est installée à Arzew. Les autorités de l'époque détournent une partie des eaux du barrage de la Tafna vers la zone industrielle et le port d'Arzew situé à 50 km de la ville d'Oran pour assurer les exportations de pétrole et de gaz, privant la capitale de l'Ouest algérien d'une grande quantité d'eau douce.

      Au début des années 1980, les autorités ont démoli illégalement[réf. nécessaire] le quartier de La Calère (La Calaira en espagnol). C'était un quartier situé au pied du Murdjajo et construit par les Espagnols lors de leur présence dans la ville. Cet ancien quartier de pêcheurs du centre historique et patrimonial d’Oran était considéré comme le plus ancien quartier d’El Bahia.

      La quasi-totalité des grandes salles de cinéma ferment leurs portes. Les cinémas des quartiers subissent rapidement le même sort. Ils sont tous fermés et convertis à des activités artisanales et commerciales.

      Le début des années 1990, voit une vie politique dominée par les conservateurs religieux. La victoire du FIS en décembre 1991 au premier tour des élections législatives, puis l'annulation du scrutin au lendemain du vote, mèneront à des manifestations politiques de toutes tendances à Oran comme dans le reste de l'Algérie.

      À partir de 1992, débute une longue période de violences. Elle oppose l'État aux ultra-conservateurs religieux qui forment des groupes armés. Oran est relativement préservée de ces violences qui déchirent le pays. Elle verra néanmoins certains de ses célèbres citoyens tués à cause de l'intolérance : Abdelkader Alloula, considéré comme l'un des plus populaires dramaturges, est assassiné le 10 mars 1994 ; le 29 septembre de la même année, Cheb Hasni, Roi du Raï, est à son tour la victime du terrorisme.

      Au début des années 2000, la ville inaugure la réalisation de son quatrième boulevard périphérique, poursuivant sa croissance radio-concentrique entamée depuis un siècle

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