En Libye, des avions russes font craindre le pire
En déployant des avions de combat en Libye, la Russie vole au secours de son protégé le maréchal Khalifa Haftar. Ce dernier est très affaibli depuis deux mois par l’intervention de la Turquie qui soutient le camp libyen rival de Fayez al-Sarraj. Moscou risque d’aggraver encore une guerre civile qui dure depuis 2011.
Combien d’avions la Russie a-t-elle envoyés en Libye ? Officiellement aucun ! Comme, officiellement, Moscou n’a rien à voir avec le déploiement de 500 à 2 000 mercenaires russes, qui a permis au maréchal Khalifa Haftar de lancer, il y a maintenant un an, une offensive annoncée comme décisive contre son rival de Tripoli. Pourtant, depuis une semaine, les experts de l’Onu, mandatés pour recenser les violations (innombrables !) de l’embargo sur les armes, enquêtent sur l’arrivée en Libye d’au moins huit avions de combat de fabrication russe.
La photo d’un Mig29, prise le 19 mai sur la base d’al-Joufra, circule sur des sites internet spécialisés.
https://twitter.com/Brian_Castner/st...035607/photo/1
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En Libye, des avions russes font craindre le pire
En déployant des avions de combat en Libye, la Russie vole au secours de son protégé le maréchal Khalifa Haftar. Ce dernier est très affaibli depuis deux mois par l’intervention de la Turquie qui soutient le camp libyen rival de Fayez al-Sarraj. Moscou risque d’aggraver encore une guerre civile qui dure depuis 2011.
Dans Tripoli, les forces du Premier ministre Fayez al-Sarraj le 20 mai exhibent un système de défense antiaérien de fabrication russe pris à leurs ennemis de l’Armée nationale du maréchal Khalifa Haftar.
Dans Tripoli, les forces du Premier ministre Fayez al-Sarraj le 20 mai exhibent un système de défense antiaérien de fabrication russe pris à leurs ennemis de l’Armée nationale du maréchal Khalifa Haftar. | AFP / MAHMUD TURKIA
Ouest-France Patrick ANGEVIN.
Publié le 26/05/2020 à 19h40
Combien d’avions la Russie a-t-elle envoyés en Libye ? Officiellement aucun ! Comme, officiellement, Moscou n’a rien à voir avec le déploiement de 500 à 2 000 mercenaires russes, qui a permis au maréchal Khalifa Haftar de lancer, il y a maintenant un an, une offensive annoncée comme décisive contre son rival de Tripoli. Pourtant, depuis une semaine, les experts de l’Onu, mandatés pour recenser les violations (innombrables !) de l’embargo sur les armes, enquêtent sur l’arrivée en Libye d’au moins huit avions de combat de fabrication russe.
La photo d’un Mig29, prise le 19 mai sur la base d’al-Joufra, circule sur des sites internet spécialisés.
Hier, l’armée américaine a directement accusé la Russie. Les chasseurs Mig29 et les bombardiers Sukoï24 ont été transférés de Syrie et repeints aux couleurs de l’armée d’Haftar. Personne n’est dupe : pour ce type d’engins, les pilotes sont forcément des militaires russes ou des mercenaires.
Qui se bat contre qui ?
Dans la capitale Tripoli (à l’ouest), le Gouvernement d’accord national (GNA) est présidé par le Premier ministre Fayez al-Sarraj, 59 ans. Reconnu par l’Onu, le GNA s’appuie sur des milices islamistes et les combattants de puissantes tribus de la cité marchande de Misrata. Outre le soutien symbolique de la communauté internationale, le GNA est aidé financièrement par le Qatar et surtout militairement par la Turquie.
Basé en Cyrénaïque, (à l’est), le maréchal Khalifa Haftar, 76 ans, ancien général disgracié de Kadhafi, revenu d’exil en 2011, a unifié des forces disparates autour de son Armée nationale libyenne (ANL). Haftar est soutenu par l’Égypte, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite qui financent des mercenaires soudanais. Sans oublier les paramilitaires russes qui combattent pour lui avec le feu vert du Kremlin…
La guerre civile libyenne est donc également un affrontement pour le leadership régional, mais aussi une prolongation de la guerre en Syrie où la Russie et la Turquie soutiennent des camps opposés… Moscou et Ankara ont d’ailleurs déployé en Libye, dans chaque camp, des mercenaires syriens !
Pourquoi la Russie renforce-t-elle son engagement ?
Pour enrayer la dégringolade de son protégé. Sur le point de prendre Tripoli fin 2019, le maréchal Haftar a subi défaite sur défaite depuis que la Turquie a envoyé en Libye conseillers militaires, mercenaires syriens, matériels antiaériens et surtout des drones de combat, qui se sont révélés décisifs sur les champs de bataille.
Les forces du camp Sarraj ont successivement repris ces deux derniers mois les villes côtières à l’ouest de Tripoli jusqu’à la frontière tunisienne, puis la base aérienne stratégique d’al Watiya, obligeant les forces d’Haftar et les mercenaires russes à décrocher de Tripoli.
Le déploiement des avions russes a d’ailleurs probablement pour objectif de protéger le repli des Russes, ce week-end, sur la ville de Bani-Walid, à 150 kilomètres au sud-est de Tripoli. Le message aux Turcs est simple et limpide : Si vous ou vos protégés avancez trop, ou si vous bombardez Bani-Walid, nous avons les moyens de vous faire très mal.
Risque-t-on un affrontement direct Turquie/Russie ?
Dans le camp Haftar, l’arrivée des avions russes a poussé un de ses commandants à promettre une prochaine offensive aérienne de grande ampleur. Rien n’est moins sûr. Russie et Turquie savent « jusqu’où ne pas aller trop loin ». Comme en Syrie, où ils défendent des camps opposés depuis 2011 mais où ils ont toujours su s’unir quand il le fallait contre les Occidentaux, les Kurdes ou l’État islamique.
Spécialiste reconnu du conflit libyen, Wolfram Lacher, de l’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité, estime dans un entretien au Financial Times que le déploiement des Mig vise à remettre la Turquie à sa place et à limiter son ambition de repousser Haftar hors de la Libye occidentale . Pour lui, la grande question est de savoir si la Russie et la Turquie peuvent pousser une fois de plus leurs clients libyens à négocier un cessez-le-feu » .
ouest France
En déployant des avions de combat en Libye, la Russie vole au secours de son protégé le maréchal Khalifa Haftar. Ce dernier est très affaibli depuis deux mois par l’intervention de la Turquie qui soutient le camp libyen rival de Fayez al-Sarraj. Moscou risque d’aggraver encore une guerre civile qui dure depuis 2011.
Combien d’avions la Russie a-t-elle envoyés en Libye ? Officiellement aucun ! Comme, officiellement, Moscou n’a rien à voir avec le déploiement de 500 à 2 000 mercenaires russes, qui a permis au maréchal Khalifa Haftar de lancer, il y a maintenant un an, une offensive annoncée comme décisive contre son rival de Tripoli. Pourtant, depuis une semaine, les experts de l’Onu, mandatés pour recenser les violations (innombrables !) de l’embargo sur les armes, enquêtent sur l’arrivée en Libye d’au moins huit avions de combat de fabrication russe.
La photo d’un Mig29, prise le 19 mai sur la base d’al-Joufra, circule sur des sites internet spécialisés.
https://twitter.com/Brian_Castner/st...035607/photo/1
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En Libye, des avions russes font craindre le pire
En déployant des avions de combat en Libye, la Russie vole au secours de son protégé le maréchal Khalifa Haftar. Ce dernier est très affaibli depuis deux mois par l’intervention de la Turquie qui soutient le camp libyen rival de Fayez al-Sarraj. Moscou risque d’aggraver encore une guerre civile qui dure depuis 2011.
Dans Tripoli, les forces du Premier ministre Fayez al-Sarraj le 20 mai exhibent un système de défense antiaérien de fabrication russe pris à leurs ennemis de l’Armée nationale du maréchal Khalifa Haftar.
Dans Tripoli, les forces du Premier ministre Fayez al-Sarraj le 20 mai exhibent un système de défense antiaérien de fabrication russe pris à leurs ennemis de l’Armée nationale du maréchal Khalifa Haftar. | AFP / MAHMUD TURKIA
Ouest-France Patrick ANGEVIN.
Publié le 26/05/2020 à 19h40
Combien d’avions la Russie a-t-elle envoyés en Libye ? Officiellement aucun ! Comme, officiellement, Moscou n’a rien à voir avec le déploiement de 500 à 2 000 mercenaires russes, qui a permis au maréchal Khalifa Haftar de lancer, il y a maintenant un an, une offensive annoncée comme décisive contre son rival de Tripoli. Pourtant, depuis une semaine, les experts de l’Onu, mandatés pour recenser les violations (innombrables !) de l’embargo sur les armes, enquêtent sur l’arrivée en Libye d’au moins huit avions de combat de fabrication russe.
La photo d’un Mig29, prise le 19 mai sur la base d’al-Joufra, circule sur des sites internet spécialisés.
Hier, l’armée américaine a directement accusé la Russie. Les chasseurs Mig29 et les bombardiers Sukoï24 ont été transférés de Syrie et repeints aux couleurs de l’armée d’Haftar. Personne n’est dupe : pour ce type d’engins, les pilotes sont forcément des militaires russes ou des mercenaires.
Qui se bat contre qui ?
Dans la capitale Tripoli (à l’ouest), le Gouvernement d’accord national (GNA) est présidé par le Premier ministre Fayez al-Sarraj, 59 ans. Reconnu par l’Onu, le GNA s’appuie sur des milices islamistes et les combattants de puissantes tribus de la cité marchande de Misrata. Outre le soutien symbolique de la communauté internationale, le GNA est aidé financièrement par le Qatar et surtout militairement par la Turquie.
Basé en Cyrénaïque, (à l’est), le maréchal Khalifa Haftar, 76 ans, ancien général disgracié de Kadhafi, revenu d’exil en 2011, a unifié des forces disparates autour de son Armée nationale libyenne (ANL). Haftar est soutenu par l’Égypte, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite qui financent des mercenaires soudanais. Sans oublier les paramilitaires russes qui combattent pour lui avec le feu vert du Kremlin…
La guerre civile libyenne est donc également un affrontement pour le leadership régional, mais aussi une prolongation de la guerre en Syrie où la Russie et la Turquie soutiennent des camps opposés… Moscou et Ankara ont d’ailleurs déployé en Libye, dans chaque camp, des mercenaires syriens !
Pourquoi la Russie renforce-t-elle son engagement ?
Pour enrayer la dégringolade de son protégé. Sur le point de prendre Tripoli fin 2019, le maréchal Haftar a subi défaite sur défaite depuis que la Turquie a envoyé en Libye conseillers militaires, mercenaires syriens, matériels antiaériens et surtout des drones de combat, qui se sont révélés décisifs sur les champs de bataille.
Les forces du camp Sarraj ont successivement repris ces deux derniers mois les villes côtières à l’ouest de Tripoli jusqu’à la frontière tunisienne, puis la base aérienne stratégique d’al Watiya, obligeant les forces d’Haftar et les mercenaires russes à décrocher de Tripoli.
Le déploiement des avions russes a d’ailleurs probablement pour objectif de protéger le repli des Russes, ce week-end, sur la ville de Bani-Walid, à 150 kilomètres au sud-est de Tripoli. Le message aux Turcs est simple et limpide : Si vous ou vos protégés avancez trop, ou si vous bombardez Bani-Walid, nous avons les moyens de vous faire très mal.
Risque-t-on un affrontement direct Turquie/Russie ?
Dans le camp Haftar, l’arrivée des avions russes a poussé un de ses commandants à promettre une prochaine offensive aérienne de grande ampleur. Rien n’est moins sûr. Russie et Turquie savent « jusqu’où ne pas aller trop loin ». Comme en Syrie, où ils défendent des camps opposés depuis 2011 mais où ils ont toujours su s’unir quand il le fallait contre les Occidentaux, les Kurdes ou l’État islamique.
Spécialiste reconnu du conflit libyen, Wolfram Lacher, de l’Institut allemand des affaires internationales et de sécurité, estime dans un entretien au Financial Times que le déploiement des Mig vise à remettre la Turquie à sa place et à limiter son ambition de repousser Haftar hors de la Libye occidentale . Pour lui, la grande question est de savoir si la Russie et la Turquie peuvent pousser une fois de plus leurs clients libyens à négocier un cessez-le-feu » .
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