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Téhéran livre du pétrole à Caracas à la barbe de Trump

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  • Téhéran livre du pétrole à Caracas à la barbe de Trump

    Patrick Saint-Paul
    figaro

    UN PREMIER pétrolier iranien a accosté, mardi 26 mai, dans le port de la raffinerie d’El Palito, près de Puerto Cabello. Cette raffinerie, comme la plupart des raffineries vénézuéliennes, est « hors service », pour reprendre le titre du livre de l’anthropologue Paula Vasquez Lezama sur la crise du géant pétrolier d’Amérique latine, Un pays hors service. Au total, ce sont cinq tankers chargés de brut raffiné qui sont attendus au Venezuela dans les jours qui viennent, soit 1,5 million de barils. Cela représente trois semaines de consommation aujourd’hui. En 2014, le pays consommait plus de 400 000 barils d’essence par jour.

    Beaucoup de rumeurs courent autour de l’arrivée de ces tankers. Ils seraient aussi chargés de pièces de rechange pour remettre en fonctionnement les raffineries, voire d’armes. Un membre du gouvernement Maduro a promis que « dans 45 jours, les raffineries de Palito et Paraguana seraient remises en service ». Tous les spécialistes pétroliers estiment que les raffineries sont dans un tel état de délabrement que leur remise en route nécessitera des investissements colossaux que le gouvernement vénézuélien n’a pas les capacités de lancer.

    Stations-service clandestines
    Reste que ces probables trois semaines de consommation vont apporter un petit bol d’air à la population qui, depuis plusieurs semaines, ne dispose plus de carburant. Un grand incendie dans le quartier de Baruta, qui surplombe Caracas, est parti hors contrôle. Les pompiers n’avaient plus d’essence pour faire rouler leurs camions, laissant une population paniquée dans le désespoir face aux flammes. Beaucoup de médecins, d’infirmières ne peuvent plus depuis plusieurs mois se rendre dans les hôpitaux en raison des pénuries de carburant qui compliquent singulièrement les transports, alors que la crise du Covid-19 frappe aussi le pays.

    Mais ce soulagement de courte durée pour la population ne peut cacher les enjeux géopolitiques de cette livraison. Il s’agit d’une provocation majeure vis-à-vis de Donald Trump. L’Iran et le Venezuela, deux pays sous embargo américain, échangent du carburant au nez et à la barbe de la marine américaine positionnée dans les Caraïbes. Cette livraison cumule deux violations de sanctions imposées par Donald Trump.

    Selon l’analyste iranien Emad Abshenas, cité par Sputnik, « il y a moins d’un an, un navire qui traversait le détroit de Gibraltar a été arraisonné par les Britanniques, sur ordre des Américains, mais cette fois-ci ils n’ont pas osé, se souvenant de la gifle qu’ils ont reçue dans le golfe Persique ».

    « Le gouvernement Maduro présente cela comme un cadeau de Téhéran à Caracas. Mais c’est faux. Caracas paie cette livraison en or pour contourner les sanctions, à un moment où le pétrole ne vaut plus rien et où stocker les produits pétroliers coûte plus cher que de les donner car il n’y a plus de capacité de stockage disponible dans le monde. C’est *Téhéran, le grand gagnant de la transaction », analyse l’anthropologue du CNRS Paula Vasquez Lezama, spécialiste du Venezuela.

    Depuis plusieurs semaines, les stations-service vénézuéliennes ne délivrent pratiquement plus d’essence. Il faut acheter son carburant au noir dans des bidons de plastique, ce qui provoque de nombreux accidents dans les lieux de stockage clandestins. Dans ce pays pétrolier, le litre d’essence se paie désormais 2,5 à 3 dollars. Comment l’essence livrée par l’Iran sera-t-elle distribuée ? En absence d’information officielle, il est probable que les réseaux de trafiquants liés au gouvernement en tirent une fois de plus les profits. Dans les rues de Caracas habitées par la bolibourgeoisie (la bourgeoisie bolivarienne), des stations-service clandestines ont été détectées dans les jardins qui entourent les luxueuses résidences habitées par des proches du pouvoir.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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