Publié par LSA
le 31.05.2020 ,
Par Noureddine Khelassi
journaliste et conseiller du ministre de la communication,
porte-parole du gouvernement
«Les relations avec le Maroc sont anormales (…), même si les relations entre les deux peuples sont exemplaires.» On doit cette définition en forme d’aphorisme à M. Ramtane Lamamra, alors ministre des Affaires étrangères de l’Algérie du 4e mandat de l’ancien président de la République Abdelaziz Bouteflika. Trois épisodes récents, côté marocain, sont venus donner un peu plus de relief à cet axiome. D’abord un dérapage contrôlé du consul du Maroc à Oran qui a déclaré à des sujets de Sa Majesté chérifienne que l’Algérie indépendante est un «pays ennemi».
Ensuite, une étude intitulée «Pour une nouvelle stratégie de défense intégrée du Maroc», œuvre d’un think tank marocain qui considère notre pays comme une menace permanente.
Cette boîte à idées, caisse de résonance des Forces armées royales (FAR), voit elle aussi en l’Algérie un rival historique et un ennemi permanent. Et, en troisième lieu, la construction en cours d’une base militaire d’écoute juste à la frontière avec l’Algérie.
Le think tank en question, un forum d’études considéré comme une référence établie en matière de questions militaires marocaines, préconise en effet «une nouvelle stratégie de défense intégrée» contre les menaces militaires, jugées réelles, que représentent pour le royaume alaouite l’Espagne au Nord et l’Algérie à l’Est.
Une préconisation en forme d’aveu d’existence d’une paranoïa aiguë qui fait penser aux auteurs de l’étude que le Maroc est pris en tenailles entre deux menaces militaires puissantes et durables. Une recommandation, dont la sémantique guerrière trahit la démesure d’ambitions impériales, voire impérialistes. Qu’on en juge notamment à travers ce petit inventaire de formules éloquentes : «stratégie d’expansion des empires marocains», «prise de contrôle et d’influence dans la zone s’étendant jusqu’à la Guinée au Sud, et en se limitant au Mali à l’Est», soit une aire géographique s’étendant bien au-delà de l’ancienne Afrique soudanaise d’avant et du temps des colonisations. Ou encore le vocable «leadership» (politique, économique et militaire) utilisé trois fois dans une même page et une fois dans la courte conclusion de l’étude.
De même que le mot «puissance», deux fois usité en introduction et en conclusion. Le terme «empire», une seule fois mais au pluriel, et, dans la même logique d’appétit stratégique, les termes «influence», «contrôle», «expansion» et «profondeur stratégique» appuient en un seul usage la démonstration de l’ambition historique, mais toujours actuelle, de l’hégémonisme de la monarchie alaouite. L’obsession durable «d’identifier ses ennemis et rivaux historiques» est donc bien appuyée dans cette étude adossée à l’examen de la balance militaire et, en filigrane, le souci d’atteindre au moins la parité stratégique avec l’Algérie. Elle est fondée également sur la notion même de dissuasion. Ses auteurs ne manquent donc pas de suggérer que les FAR doivent au moins mettre à jour leur outil de défense pour rattraper les retards technologiques et être en mesure de répondre le cas échéant aux manifestations de la supposée menace stratégique venue de l’Est. On sait que la dissuasion consiste à prévenir un acte éventuel en persuadant celui qui l'envisagerait que les coûts consécutifs en excéderaient les bénéfices escomptés.
Il est vrai que l’adoption par le Makhzen de la théorie de la dissuasion stratégique est dans l’ordre logique des choses, l’idée que la possession de moyens militaires appropriés est de nature à dissuader un «pays ennemi» d'attaquer remontant à l'Antiquité. Mais le Maroc, qui est par essence géographique un pays essentiellement maritime — deux mers dessinent ses contours physiques et décident de son approche de la menace stratégique au Nord — et ne possède de frontières terrestres qu’avec l’Algérie voisine et, par le fait accompli de l’annexion coloniale du Sahara occidental, avec la Mauritanie, veut par conséquent renouveler la place de la dissuasion dans sa stratégie défensive-offensive.
Les crânes d’œufs qui ont proposé dernièrement «une nouvelle stratégie de défense intégrée du Maroc» basée sur un «nouveau dispositif militaire dissuasif» remplacent l’idée de «comment éviter la guerre ?» par «comment gagner la guerre ? A l’instar de la dissuasion nucléaire qui repose sur la peur du recours par l'autre à l'arme atomique, le souci de ces stratèges est de conserver des moyens suffisants de frappe contre l'agresseur présumé après avoir subi une première attaque : c'est la fameuse «capacité de seconde frappe», élément moteur de la course aux armements à laquelle se livre éperdument un Maroc qui n’a pourtant pas les moyens financiers de ses grandes ambitions qui dépassent en fait le cercle de l'équilibre de la menace.
Pour que cette nouvelle stratégie militaire offensive puisse avoir du sens, il faudrait que l’état-major des FAR et le cabinet du palais royal soient en mesure d'évaluer avec précision les coûts, les gains et les pertes de leurs actions.
Car les décisions irrationnelles du Makhzen pourraient conduire à des décisions rationnelles de l’autre côté de la frontière Est, et donc surprendre le Maroc et déclencher un engrenage des plus dangereux. Dans un contexte de crise endémique caractérisant les relations bilatérales, le discours de ce think tank, aux accents martiaux, est de nature à altérer le jugement de ceux auxquels il est destiné en premier ressort. La possibilité d'une mauvaise interprétation des intentions de l'autre peut conduire notre voisin de l’Ouest à des décisions irrationnelles au regard du principe même sur lequel repose la dissuasion, à savoir la neutralisation réciproque. Dans l’histoire de la guerre froide, la crise de Cuba a pourtant force de bon exemple. Elle a amené à prendre des mesures autres que militaires visant à diminuer les risques propres à la dissuasion nucléaire grâce à des moyens de communiquer en temps de crise entre les deux camps ; grâce aussi à la possibilité de toujours mieux connaître les intentions réelles de l'adversaire par des moyens précis d'observation et d'espionnage.
Enfin, grâce surtout à la maîtrise des décisions d'emploi et de préparation des armes par la centralisation et le renforcement de la sécurité de la chaîne de commandement qui est en Algérie une préoccupation permanente de l’état-major de l’ANP et de ses outils de veille et de vigilance.
À cette époque trouble des blocs Est-Ouest, Américains et Soviétiques œuvraient en permanence à évaluer l’aspect essentiellement défensif ou agressif de la politique militaire de l'autre camp par rapport à leurs intérêts vitaux respectifs, les Américains ayant plutôt tendance à prêter à l'autre des intentions plus agressives que la réalité telle qu'elle a pu être connue plus tard grâce aux archives disponibles.
Ce parallèle avec l’ex-Union soviétique et l’Amérique impérialiste suggère que le Maroc est dans une posture paranoïaque permanente. Délires découlant probablement du rêve grandiose du «Grand Maroc» et des «stratégies d’expansion des empires marocains», avec leurs corollaires la «puissance», le «leadership», le «contrôle», «l’influence» et la «puissance», mots-clés de la terminologie belliqueuse de l’étude objet de notre intérêt. En termes de doctrine et de moyens, le leadership de la «puissance régionale» au service d’une ambition géostratégique repose sur les outils traditionnels de la diplomatie, de l’influence économique, du lobbying, du rayonnement culturel, de la compénétration religieuse par l’emprise de l’islam maraboutique, du savoir-faire et du faire-savoir touristique.
En d’autres mots, de l’exercice du soft-power, domaine où, il faut le reconnaître, le Makhzen a acquis une certaine maîtrise. Aux gains cumulés de la capacité d’influence et de persuasion, de l’image de marque, de l’attractivité, du lobbying et de la performance du commerce extérieur, entre autres paramètres du renforcement du positionnement sur le théâtre régional et la scène internationale, s’ajoute, bien sûr, le facteur déterminant de la force militaire en perpétuel consolidation.
Sur ce plan, l’étude du think tank Forum FAR Maroc, qui a fait sienne la devise latine «si vis pacem para bellum» (pour avoir la paix il faut préparer la guerre), reconnaît de prime abord que la naissance de l’Algérie indépendante a constitué «la menace majeure sur l’existence du Maroc actuel».
Elle admet ensuite que la doctrine et l’outil de guerre des FAR ont été déterminés par cette «menace majeure» présumée. Les auteurs de l’étude le reconnaissent d’ailleurs sans ambages en soulignant que «l’équipement, la formation et la disposition des unités des Forces armées royales (FAR) ont, depuis ce jour (la fin de la colonisation de l’Algérie, ndlr), été orientés dans cette perspective d’une confrontation éventuelle avec l’Algérie».
Deux faits de guerre marquants, l’agression contre l’Algérie en 1963 et le conflit militaire au Sahara occidental annexé en 1975 sont considérés donc comme un déclic et un «tournant décisif dans la construction de la doctrine des FAR». Laquelle est notamment fondée sur «le souci de stopper l’assaut d’un ennemi en supériorité numérique et d’arrêt de colonnes blindées venant de l’Est».
Cette doctrine, structurée par la croyance permanente en une menace stratégique émanant d’un voisin foncièrement agressif et par définition offensif et expansif, est cependant spécieuse. Fallacieuse, oui, elle l’est assurément car elle suppose, comme le prétend l’étude du think tank, que les FAR ne s’équipent qu’en «réponse aux acquisitions récentes de l’ANP algérienne» et, de ce fait, «entreprennent un programme ambitieux de modernisation des dotations toutes armes confondues».
Et si l’Espagne et surtout l’Algérie n’existaient pas, le Maroc se serait-il abstenu de bâtir ses FAR pour être finalement le Costa-Rica du Maghreb et de l’Afrique ? On ne peut pas suggérer l’existence d’une doctrine militaire purement défensive et déterminée par l’existence supposée d’une menace offensive permanente et évoquer en même temps, comme le fait clairement ce Forum des FAR, une «stratégie d’expansion des empires marocains», et une «prise de contrôle et d’influence dans la zone s’étendant jusqu’à la Guinée au Sud, et en se limitant au Mali à l’Est».
le 31.05.2020 ,
Par Noureddine Khelassi
journaliste et conseiller du ministre de la communication,
porte-parole du gouvernement
«Les relations avec le Maroc sont anormales (…), même si les relations entre les deux peuples sont exemplaires.» On doit cette définition en forme d’aphorisme à M. Ramtane Lamamra, alors ministre des Affaires étrangères de l’Algérie du 4e mandat de l’ancien président de la République Abdelaziz Bouteflika. Trois épisodes récents, côté marocain, sont venus donner un peu plus de relief à cet axiome. D’abord un dérapage contrôlé du consul du Maroc à Oran qui a déclaré à des sujets de Sa Majesté chérifienne que l’Algérie indépendante est un «pays ennemi».
Ensuite, une étude intitulée «Pour une nouvelle stratégie de défense intégrée du Maroc», œuvre d’un think tank marocain qui considère notre pays comme une menace permanente.
Cette boîte à idées, caisse de résonance des Forces armées royales (FAR), voit elle aussi en l’Algérie un rival historique et un ennemi permanent. Et, en troisième lieu, la construction en cours d’une base militaire d’écoute juste à la frontière avec l’Algérie.
Le think tank en question, un forum d’études considéré comme une référence établie en matière de questions militaires marocaines, préconise en effet «une nouvelle stratégie de défense intégrée» contre les menaces militaires, jugées réelles, que représentent pour le royaume alaouite l’Espagne au Nord et l’Algérie à l’Est.
Une préconisation en forme d’aveu d’existence d’une paranoïa aiguë qui fait penser aux auteurs de l’étude que le Maroc est pris en tenailles entre deux menaces militaires puissantes et durables. Une recommandation, dont la sémantique guerrière trahit la démesure d’ambitions impériales, voire impérialistes. Qu’on en juge notamment à travers ce petit inventaire de formules éloquentes : «stratégie d’expansion des empires marocains», «prise de contrôle et d’influence dans la zone s’étendant jusqu’à la Guinée au Sud, et en se limitant au Mali à l’Est», soit une aire géographique s’étendant bien au-delà de l’ancienne Afrique soudanaise d’avant et du temps des colonisations. Ou encore le vocable «leadership» (politique, économique et militaire) utilisé trois fois dans une même page et une fois dans la courte conclusion de l’étude.
De même que le mot «puissance», deux fois usité en introduction et en conclusion. Le terme «empire», une seule fois mais au pluriel, et, dans la même logique d’appétit stratégique, les termes «influence», «contrôle», «expansion» et «profondeur stratégique» appuient en un seul usage la démonstration de l’ambition historique, mais toujours actuelle, de l’hégémonisme de la monarchie alaouite. L’obsession durable «d’identifier ses ennemis et rivaux historiques» est donc bien appuyée dans cette étude adossée à l’examen de la balance militaire et, en filigrane, le souci d’atteindre au moins la parité stratégique avec l’Algérie. Elle est fondée également sur la notion même de dissuasion. Ses auteurs ne manquent donc pas de suggérer que les FAR doivent au moins mettre à jour leur outil de défense pour rattraper les retards technologiques et être en mesure de répondre le cas échéant aux manifestations de la supposée menace stratégique venue de l’Est. On sait que la dissuasion consiste à prévenir un acte éventuel en persuadant celui qui l'envisagerait que les coûts consécutifs en excéderaient les bénéfices escomptés.
Il est vrai que l’adoption par le Makhzen de la théorie de la dissuasion stratégique est dans l’ordre logique des choses, l’idée que la possession de moyens militaires appropriés est de nature à dissuader un «pays ennemi» d'attaquer remontant à l'Antiquité. Mais le Maroc, qui est par essence géographique un pays essentiellement maritime — deux mers dessinent ses contours physiques et décident de son approche de la menace stratégique au Nord — et ne possède de frontières terrestres qu’avec l’Algérie voisine et, par le fait accompli de l’annexion coloniale du Sahara occidental, avec la Mauritanie, veut par conséquent renouveler la place de la dissuasion dans sa stratégie défensive-offensive.
Les crânes d’œufs qui ont proposé dernièrement «une nouvelle stratégie de défense intégrée du Maroc» basée sur un «nouveau dispositif militaire dissuasif» remplacent l’idée de «comment éviter la guerre ?» par «comment gagner la guerre ? A l’instar de la dissuasion nucléaire qui repose sur la peur du recours par l'autre à l'arme atomique, le souci de ces stratèges est de conserver des moyens suffisants de frappe contre l'agresseur présumé après avoir subi une première attaque : c'est la fameuse «capacité de seconde frappe», élément moteur de la course aux armements à laquelle se livre éperdument un Maroc qui n’a pourtant pas les moyens financiers de ses grandes ambitions qui dépassent en fait le cercle de l'équilibre de la menace.
Pour que cette nouvelle stratégie militaire offensive puisse avoir du sens, il faudrait que l’état-major des FAR et le cabinet du palais royal soient en mesure d'évaluer avec précision les coûts, les gains et les pertes de leurs actions.
Car les décisions irrationnelles du Makhzen pourraient conduire à des décisions rationnelles de l’autre côté de la frontière Est, et donc surprendre le Maroc et déclencher un engrenage des plus dangereux. Dans un contexte de crise endémique caractérisant les relations bilatérales, le discours de ce think tank, aux accents martiaux, est de nature à altérer le jugement de ceux auxquels il est destiné en premier ressort. La possibilité d'une mauvaise interprétation des intentions de l'autre peut conduire notre voisin de l’Ouest à des décisions irrationnelles au regard du principe même sur lequel repose la dissuasion, à savoir la neutralisation réciproque. Dans l’histoire de la guerre froide, la crise de Cuba a pourtant force de bon exemple. Elle a amené à prendre des mesures autres que militaires visant à diminuer les risques propres à la dissuasion nucléaire grâce à des moyens de communiquer en temps de crise entre les deux camps ; grâce aussi à la possibilité de toujours mieux connaître les intentions réelles de l'adversaire par des moyens précis d'observation et d'espionnage.
Enfin, grâce surtout à la maîtrise des décisions d'emploi et de préparation des armes par la centralisation et le renforcement de la sécurité de la chaîne de commandement qui est en Algérie une préoccupation permanente de l’état-major de l’ANP et de ses outils de veille et de vigilance.
À cette époque trouble des blocs Est-Ouest, Américains et Soviétiques œuvraient en permanence à évaluer l’aspect essentiellement défensif ou agressif de la politique militaire de l'autre camp par rapport à leurs intérêts vitaux respectifs, les Américains ayant plutôt tendance à prêter à l'autre des intentions plus agressives que la réalité telle qu'elle a pu être connue plus tard grâce aux archives disponibles.
Ce parallèle avec l’ex-Union soviétique et l’Amérique impérialiste suggère que le Maroc est dans une posture paranoïaque permanente. Délires découlant probablement du rêve grandiose du «Grand Maroc» et des «stratégies d’expansion des empires marocains», avec leurs corollaires la «puissance», le «leadership», le «contrôle», «l’influence» et la «puissance», mots-clés de la terminologie belliqueuse de l’étude objet de notre intérêt. En termes de doctrine et de moyens, le leadership de la «puissance régionale» au service d’une ambition géostratégique repose sur les outils traditionnels de la diplomatie, de l’influence économique, du lobbying, du rayonnement culturel, de la compénétration religieuse par l’emprise de l’islam maraboutique, du savoir-faire et du faire-savoir touristique.
En d’autres mots, de l’exercice du soft-power, domaine où, il faut le reconnaître, le Makhzen a acquis une certaine maîtrise. Aux gains cumulés de la capacité d’influence et de persuasion, de l’image de marque, de l’attractivité, du lobbying et de la performance du commerce extérieur, entre autres paramètres du renforcement du positionnement sur le théâtre régional et la scène internationale, s’ajoute, bien sûr, le facteur déterminant de la force militaire en perpétuel consolidation.
Sur ce plan, l’étude du think tank Forum FAR Maroc, qui a fait sienne la devise latine «si vis pacem para bellum» (pour avoir la paix il faut préparer la guerre), reconnaît de prime abord que la naissance de l’Algérie indépendante a constitué «la menace majeure sur l’existence du Maroc actuel».
Elle admet ensuite que la doctrine et l’outil de guerre des FAR ont été déterminés par cette «menace majeure» présumée. Les auteurs de l’étude le reconnaissent d’ailleurs sans ambages en soulignant que «l’équipement, la formation et la disposition des unités des Forces armées royales (FAR) ont, depuis ce jour (la fin de la colonisation de l’Algérie, ndlr), été orientés dans cette perspective d’une confrontation éventuelle avec l’Algérie».
Deux faits de guerre marquants, l’agression contre l’Algérie en 1963 et le conflit militaire au Sahara occidental annexé en 1975 sont considérés donc comme un déclic et un «tournant décisif dans la construction de la doctrine des FAR». Laquelle est notamment fondée sur «le souci de stopper l’assaut d’un ennemi en supériorité numérique et d’arrêt de colonnes blindées venant de l’Est».
Cette doctrine, structurée par la croyance permanente en une menace stratégique émanant d’un voisin foncièrement agressif et par définition offensif et expansif, est cependant spécieuse. Fallacieuse, oui, elle l’est assurément car elle suppose, comme le prétend l’étude du think tank, que les FAR ne s’équipent qu’en «réponse aux acquisitions récentes de l’ANP algérienne» et, de ce fait, «entreprennent un programme ambitieux de modernisation des dotations toutes armes confondues».
Et si l’Espagne et surtout l’Algérie n’existaient pas, le Maroc se serait-il abstenu de bâtir ses FAR pour être finalement le Costa-Rica du Maghreb et de l’Afrique ? On ne peut pas suggérer l’existence d’une doctrine militaire purement défensive et déterminée par l’existence supposée d’une menace offensive permanente et évoquer en même temps, comme le fait clairement ce Forum des FAR, une «stratégie d’expansion des empires marocains», et une «prise de contrôle et d’influence dans la zone s’étendant jusqu’à la Guinée au Sud, et en se limitant au Mali à l’Est».
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