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Lorsque l’on parle de la colonisation à nos contemporains, ils se disent que c’est du passé. L’Algérie n’est plus française (et, en vérité, elle ne le fut jamais) depuis les accords d’Evian en 1962 et le Congo n’est plus belge (et, en vérité, il ne le fut jamais) depuis le 30 juin 1960.
Pourtant, il subsiste en Afrique un territoire considéré par les Nations Unies comme non-autonome, c’est-à-dire dont les populations ne s’administrent pas encore complètement elles-mêmes. Il s’agit du Sahara Occidental, la dernière colonie d’Afrique.
Récapitulons[1]
En 1884, l’Espagne établit, dans la foulée de la Conférence de Berlin, un protectorat sur la terre des Sahraouis. Les frontières avec le protectorat français au Maroc n’étaient, au début de la colonisation de la région, pas clairement définies. Différents traités au cours du XXème siècle vont permettre de délimiter les contours d’une frontière définitive entre les deux colonies. Une stabilisation des relations entre le protectorat français sur le Maroc et la colonie espagnole voit ainsi progressivement le jour.
Dès 1974, l’Espagne annonce souhaiter quitter le Sahara Occidental, territoire sur lequel le Maroc a, depuis 1956 (date de son indépendance), des visées. Le départ des Espagnols donne naissance à un conflit politique, juridique et militaire qui dure encore aujourd’hui.
Le Maroc revendique sa souveraineté sur le Sahara Occidental au prétexte que des liens féodaux d’allégeance existaient entre certaines tribus sahraouies et les sultans du Maroc. Ce raisonnement spécieux est contesté par la Cour Internationale de Justice (CIJ) qui a statué « que les éléments et renseignements portés à sa connaissance n’établissent l’existence d’aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara Occidental d’une part, le Royaume du Maroc ou l’ensemble mauritanien d’autre part. La Cour n’a donc pas constaté l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514(XV) quant à la décolonisation du Sahara Occidental et en particulier l’application du principe d’autodétermination grâce à l’expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire »[2].
De surcroît, la CIJ a relevé que les actes internes et les actes internationaux invoqués par le Maroc à l’appui de sa cause ne démontraient « pas que le Maroc ait exercé une activité étatique effective et exclusive au Sahara Occidental »[3].
La réaction des autorités marocaines ne se fit guère attendre. Le roi Hassan II va alors lancer, le 6 novembre 1975, la Marche verte. Cette dernière consiste en un déplacement en masse d’une partie de la population marocaine (en fait, près de 350.000 volontaires) en direction du Sahara Occidental.
A cette époque, l’Espagne n’avait pas encore quitté le Sahara Occidental. La légende entretenue par le pouvoir marocain veut que les pèlerins mobilisés pour l’occasion étaient désarmés et n’avaient emporté avec eux qu’un Coran et un drapeau national. La réalité est un peu moins idyllique puisque 20.000 soldats de l’armée marocaine les accompagnaient. De surcroît, il est clair que la Marche verte correspondait à une opération de communication politique.
C’est ainsi qu’Hassan II a conçu « avec son ami Alexandre de Marenches, directeur général du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE) français depuis 1970, une cause nationale capable de mobiliser les Marocains, partis compris, autour de la monarchie : la Marche verte pour la récupération du territoire du Sahara Occidental, occupé par l’Espagne »[4].
La longue lutte des Sahraouis
La Marche verte terminée, la pression était maximale sur les Espagnols, davantage soucieux de régler la mise en œuvre de l’après-franquisme que d’octroyer aux Sahraouis leur droit légitime à l’autodétermination. L’Espagne va donc conclure, à la mi-novembre de 1975, les Accords de Madrid avec la Mauritanie et le Maroc. Selon les termes de ces Accords, le Sahara Occidental est partagé sans que les Sahraouis n’aient été à aucun moment consultés. Le Maroc obtient le nord de l’ancienne colonie espagnole tandis que la Mauritanie en reçoit la partie méridionale. C’est le Maroc qui reçoit la plus grande portion du territoire, environ les 2/3.
Les Accords de Madrid constituent une anomalie d’autant plus frappante que les Sahraouis se sont dotés, dès 1973, d’un appareil politique qui s’est donné pour mission de mener à bien le projet d’indépendance du Sahara Occidental. En effet, le Front Polisario (Front Populaire de Libération de la Saguia el Hamra et du Río de Oro) a été fondé le 10 mai 1973 « en tant que mouvement de libération nationale sans orientation idéologique particulière sauf l’objectif sacré et commun à tout un peuple, celui de la libération du Sahara Occidental »[5].
Lorsque l’on parle de la colonisation à nos contemporains, ils se disent que c’est du passé. L’Algérie n’est plus française (et, en vérité, elle ne le fut jamais) depuis les accords d’Evian en 1962 et le Congo n’est plus belge (et, en vérité, il ne le fut jamais) depuis le 30 juin 1960.
Pourtant, il subsiste en Afrique un territoire considéré par les Nations Unies comme non-autonome, c’est-à-dire dont les populations ne s’administrent pas encore complètement elles-mêmes. Il s’agit du Sahara Occidental, la dernière colonie d’Afrique.
Récapitulons[1]
En 1884, l’Espagne établit, dans la foulée de la Conférence de Berlin, un protectorat sur la terre des Sahraouis. Les frontières avec le protectorat français au Maroc n’étaient, au début de la colonisation de la région, pas clairement définies. Différents traités au cours du XXème siècle vont permettre de délimiter les contours d’une frontière définitive entre les deux colonies. Une stabilisation des relations entre le protectorat français sur le Maroc et la colonie espagnole voit ainsi progressivement le jour.
Dès 1974, l’Espagne annonce souhaiter quitter le Sahara Occidental, territoire sur lequel le Maroc a, depuis 1956 (date de son indépendance), des visées. Le départ des Espagnols donne naissance à un conflit politique, juridique et militaire qui dure encore aujourd’hui.
Le Maroc revendique sa souveraineté sur le Sahara Occidental au prétexte que des liens féodaux d’allégeance existaient entre certaines tribus sahraouies et les sultans du Maroc. Ce raisonnement spécieux est contesté par la Cour Internationale de Justice (CIJ) qui a statué « que les éléments et renseignements portés à sa connaissance n’établissent l’existence d’aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara Occidental d’une part, le Royaume du Maroc ou l’ensemble mauritanien d’autre part. La Cour n’a donc pas constaté l’existence de liens juridiques de nature à modifier l’application de la résolution 1514(XV) quant à la décolonisation du Sahara Occidental et en particulier l’application du principe d’autodétermination grâce à l’expression libre et authentique de la volonté des populations du territoire »[2].
De surcroît, la CIJ a relevé que les actes internes et les actes internationaux invoqués par le Maroc à l’appui de sa cause ne démontraient « pas que le Maroc ait exercé une activité étatique effective et exclusive au Sahara Occidental »[3].
La réaction des autorités marocaines ne se fit guère attendre. Le roi Hassan II va alors lancer, le 6 novembre 1975, la Marche verte. Cette dernière consiste en un déplacement en masse d’une partie de la population marocaine (en fait, près de 350.000 volontaires) en direction du Sahara Occidental.
A cette époque, l’Espagne n’avait pas encore quitté le Sahara Occidental. La légende entretenue par le pouvoir marocain veut que les pèlerins mobilisés pour l’occasion étaient désarmés et n’avaient emporté avec eux qu’un Coran et un drapeau national. La réalité est un peu moins idyllique puisque 20.000 soldats de l’armée marocaine les accompagnaient. De surcroît, il est clair que la Marche verte correspondait à une opération de communication politique.
C’est ainsi qu’Hassan II a conçu « avec son ami Alexandre de Marenches, directeur général du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE) français depuis 1970, une cause nationale capable de mobiliser les Marocains, partis compris, autour de la monarchie : la Marche verte pour la récupération du territoire du Sahara Occidental, occupé par l’Espagne »[4].
La longue lutte des Sahraouis
La Marche verte terminée, la pression était maximale sur les Espagnols, davantage soucieux de régler la mise en œuvre de l’après-franquisme que d’octroyer aux Sahraouis leur droit légitime à l’autodétermination. L’Espagne va donc conclure, à la mi-novembre de 1975, les Accords de Madrid avec la Mauritanie et le Maroc. Selon les termes de ces Accords, le Sahara Occidental est partagé sans que les Sahraouis n’aient été à aucun moment consultés. Le Maroc obtient le nord de l’ancienne colonie espagnole tandis que la Mauritanie en reçoit la partie méridionale. C’est le Maroc qui reçoit la plus grande portion du territoire, environ les 2/3.
Les Accords de Madrid constituent une anomalie d’autant plus frappante que les Sahraouis se sont dotés, dès 1973, d’un appareil politique qui s’est donné pour mission de mener à bien le projet d’indépendance du Sahara Occidental. En effet, le Front Polisario (Front Populaire de Libération de la Saguia el Hamra et du Río de Oro) a été fondé le 10 mai 1973 « en tant que mouvement de libération nationale sans orientation idéologique particulière sauf l’objectif sacré et commun à tout un peuple, celui de la libération du Sahara Occidental »[5].
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