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Les États-Unis ont pris des sanctions économiques contre les membres de la Cour pénale internationale qui enquêtent en A

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  • Les États-Unis ont pris des sanctions économiques contre les membres de la Cour pénale internationale qui enquêtent en A

    Les États-Unis ont pris des sanctions économiques contre les membres de la Cour pénale internationale qui enquêtent en Afghanistan. Une attaque inédite.


    Au plus fort de la pandémie de Covid-19 qui a ébranlé la planète, Washington voulait absolument faire payer l'État chinois pour ses manquements. Pendant plusieurs semaines, les responsables politiques – Donald Trump en tête – ont accusé la Chine d'avoir tardé à communiquer sur la gravité de la situation et d'avoir minimisé le nombre de décès liés au coronavirus. Avocats, militants et élus républicains ont multiplié les demandes de saisines de la Cour pénale internationale (CPI), invoquant la nécessité de sanctionner l'État chinois. C'est à la fois impossible – puisque les États-Unis ne reconnaissent pas la CPI, n'ayant pas ratifié le Statut de Rome – et très surprenant quand on connaît l'hostilité du pays à l'égard de la justice internationale.

    Mais depuis le 11 juin 2020, la CPI est de nouveau la cible des États-Unis. Donald Trump a en effet signé un décret présidentiel annonçant des sanctions économiques à l'encontre des magistrats et responsables de la CPI. Il reproche à la Cour d'avoir lancé une enquête sur de possibles crimes de guerre commis par les États-Unis pendant la guerre d'Afghanistan. Une enquête qui serait « une menace à la sécurité nationale », selon le président Trump. « C'est une bonne illustration des tensions qui pèsent sur la justice internationale, qui est utilisée ici comme un outil de realpolitik, ça souligne parfaitement la position des États-Unis vis-à-vis de la justice internationale », estime Raphaëlle Nollez-Goldbach, chercheuse en droit international au CNRS et à l'ENS.

    Des pratiques utilisées lors d'interrogatoires en question
    L'enquête de la CPI vise les talibans, l'armée afghane, mais aussi les techniques utilisées lors d'interrogatoires menés par des militaires américains ou des agents de la CIA dans les centres d'interrogatoires secrets créés après 2003. La procureure de la CPI ainsi que les juges se sont notamment appuyés sur des rapports du Sénat américain, publiés après des commissions d'enquête. Ces rapports font état de pratiques d'interrogatoire comme le waterboarding (la torture par l'eau), mais aussi l'isolement, le maintien à la lumière 24 heures sur 24 ou la nudité.

    Si la procureure a demandé l'ouverture d'une enquête dès 2017, la Cour s'était finalement déclarée incompétente en 2019. « La procureure avait alors fait appel de cette décision et les États-Unis, en réaction, avaient déjà pris des sanctions contre la Cour. En avril 2019, un décret présidentiel avait été signé pour révoquer le visa de la procureure de la CPI. Un acte évidemment symbolique », note Raphaëlle Nollez-Goldbach. Suspendue, l'enquête n'avait abouti à l'émission d'aucun mandat d'arrêt. Mais le 5 mars dernier, rebondissement, la chambre d'appel de la Cour a de nouveau autorisé l'ouverture d'une enquête en Afghanistan (pays qui a, lui, ratifié le Statut de Rome), provoquant de nouveau l'ire de Washington.

    Une pression symbolique
    « Malgré les appels répétés des États-Unis et de nos alliés en faveur d'une réforme, la Cour pénale internationale n'a rien fait pour se réformer et continue de mener des enquêtes motivées politiquement contre nous ou nos alliés, dont Israël », a déploré la porte-parole du président américain dans un communiqué. Une manière de faire monter la pression d'un cran alors que la CPI enquête également en Palestine. Face à cette nouvelle enquête, Donald Trump a annoncé le gel de tous les biens et avoirs financiers des membres de la CPI chargés de l'enquête en Afghanistan. Avec ces sanctions, les États-Unis espèrent dissuader la juridiction de poursuivre des militaires américains pour leur implication dans le conflit afghan

    Encore une fois, la pression reste assez symbolique, dans la mesure où la CPI ne peut pas prendre de sanctions contre un État. Elle ne peut en effet trancher que sur la culpabilité d'un individu. Dans le cadre de l'enquête sur les crimes possiblement commis lors de la guerre d'Afghanistan, la CPI ne pourrait donc qu'émettre des mandats d'arrêt à l'encontre de personnes. « Pour juger de la responsabilité d'un Américain lors d'un procès, il faudrait d'abord procéder à une arrestation puis à un transfert à La Haye [où se situe la CPI, NDLR]. C'est une hypothèse assez improbable, dans la mesure où la CPI n'a pas de police et dépend entièrement de la coopération des États », souligne Raphaëlle Nollez-Goldbach.

    « Une grave attaque »
    Pour la chercheuse, cette dispute illustre parfaitement le débat qui existe autour de la justice internationale, soumise à de très « grosses limites ». « On peut se demander quel est l'intérêt d'ouvrir ce genre d'enquête et d'émettre des mandats d'arrêt qui n'aboutiront pas. Mais à l'inverse, une totale inaction renverrait une image désastreuse. Il ne faut pas donner l'impression qu'il existe seulement une justice des puissants », affirme Raphaëlle Nollez-Goldbach.

    D'ordinaire assez discrètes sur ces questions, la France puis l'Europe ont exprimé leur « consternation » à l'annonce de la décision américaine. « Cette décision représente une attaque grave contre la Cour et, au-delà, une remise en cause du multilatéralisme et de l'indépendance de la justice », a estimé le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.

    « La France réitère son plein soutien à la CPI […], la seule juridiction pénale internationale permanente et à vocation universelle. Elle joue à ce titre un rôle primordial dans la lutte contre l'impunité des auteurs de crimes les plus graves. Elle apporte ainsi une réponse au besoin de justice des victimes de ces crimes et contribue à la paix et à la stabilité internationales », a estimé le chef de la diplomatie française. Le ministre a également appelé Washington à revenir sur sa décision tout en précisant que Paris « continuerait à agir pour que la Cour soit en mesure de remplir sa mission de manière indépendante et impartiale, conformément au Statut de Rome ».

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