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Les Quatres Livres Des Stratagemes

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  • Les Quatres Livres Des Stratagemes

    Si l’on veut apprécier à leur valeur les ouvrages de Frontin, il faut se pénétrer de l’idée qu’il n’a nullement songé à se créer une réputation d’écrivain.
    Homme de guerre et d’administra-tion, il a écrit dans l’unique but d’être utile à ceux qui suivraient la même carrière que lui.
    Être lu, être consulté avec profit au point de vue pratique des sciences qui ont occupé sa vie, c’est toute la gloire qu’il ambitionne : il le déclare lui-même. Ce qui le recommande surtout, c’est la netteté de ses idées, et l’ordre méthodique auquel il sait les plier toutes. Ainsi, pour commencer par ses Stratagèmes, l’antiquité ne nous a légué aucun monument plus logique dans son ensemble.
    Recueillir dans l’histoire un nombre aussi prodigieux de faits ; les réunir selon leurs analogies, et les séparer par leurs différences, abstraction faite des personnages, des temps et des lieux ; en un mot, se former un plan au milieu de ce dédale, et y rester fidèle jusqu’à entier épuisement des matériaux, voilà qui atteste une certaine puissance d’analyse, de la justesse et de la profondeur dans les conceptions.
    Quant au style, il a ses mérites et ses dé-fauts.
    Quoique Frontin appartienne à l’époque de la décadence, l’expression, chez lui, porte presque toujours le cachet de la bonne latinité.
    Habituellement même sa phrase a du nombre et de l’harmonie ; mais elle se présente trop souvent sous la même forme :
    il y a de longues séries de faits dont les récits, composés chacun de quelques lignes, commencent et finissent par les mêmes constructions, et très souvent par des termes identiques, ce qui en rend la lecture fastidieuse.
    Un autre reproche qu’on peut lui faire, c’est qu’il affecte une brièveté qui va parfois jus-qu’à la sécheresse. Mais, nous le répétons, il n’a point visé à la phrase ; et on lui doit cette justice, que la concision l’a rarement empêche d’être clair.
    Une fois qu’il s’est emparé d’un fait, il veut que deux mots suffisent pour que ses lecteurs en saisissent comme lui toute la portée, et qu’ils en fassent leur profit.
    Enfin, on trouve dans ce livre de nombreuses erreurs à l’endroit de l’histoire et de la géographie.
    Mais la plupart de ces fautes sont si grossières, qu’on ne peut raisonnablement les attribuer qu’à l’ignorance des copistes,
    gens qui n’ont épargné à notre auteur ni omissions, ni transpositions, ni interpolations.
    C’est ce que n’a pas observé Schoell , quand il a prétendu que l’ouvrage qui nous occupe était
    « une compilation faite avec assez de négli-gence, surtout dans la partie historique.»

  • #2
    LIVRE PREMIER.
    I. Cacher ses desseins. 23
    II. Épier les desseins de l’ennemi. 29
    III Adopter une manière de faire la guerre. 32
    IV. Faire passer son armée à travers des lieux occupés par l’ennemi. 35
    V. S’échapper des lieux désavantageux. 40
    VI. Des embuscades dressées dans les marches. 49
    VII. Comment on paraît avoir ce dont on manque, et comment on y supplée. 51
    VIII. Mettre la division chez les ennemis. 53
    IX. Apaiser les séditions dans l’armée. 57
    X. Comment on refuse le combat aux soldats, quand ils le demandent intempestivement. 59
    XI. Comment l’armée doit être excitée au combat. 61
    XII. Rassurer les soldats, quand ils sont intimidés par de mauvais présages. 67

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    • #3
      Livre premier

      I. Cacher ses desseins.

      1 Marcus Porcius Caton, soupçonnant que les villes soumi-ses par lui en Espagne se révolteraient dans l’occasion, sur la confiance qu’elles avaient en leurs murailles, leur prescrivit, à chacune en particulier, de démolir leurs fortifications, les mena-çant de la guerre si elles n’obéissaient pas sur le champ ; et il eut soin que ses lettres leur fussent remises à toutes le même jour. Chacune des villes crut que cet ordre n’était donné qu’à elle seule. Elles auraient pu s’entendre et résister , si elles avaient su que c’était une mesure générale.

      Himilcon, chef d’une flotte carthaginoise, voulant abor-der inopinément en Sicile, ne fit point connaître le lieu de sa destination ; mais il remit à tous les pilotes des tablettes cache-tées portant l’indication de la partie de l’île où il voulait qu’on se rendît ; et il leur défendit de les ouvrir, à moins que la tem-pête ne les éloignât de la route du vaisseau amiral.

      Caïus Lélius, allant en ambassade près de Syphax , em-mena avec lui des centurions et des tribuns qui, sous l’habit d’esclaves et de valets, lui servaient d’espions, entre autres L. Statorius, que quelques-uns des ennemis semblaient recon-naître, parce qu’il était venu souvent dans leur camp. Lélius, pour déguiser la condition de cet officier, lui donna des coups de bâton comme à un esclave.

      Tarquin le Superbe, jugeant qu’il fallait mettre à mort les principaux citoyens de Gabies , et ne voulant confier ses ordres à personne, ne fit aucune réponse au messager que son fils lui avait envoyé à ce sujet ; mais, comme il se promenait alors dans son jardin, il abattit avec une baguette les têtes des pavots les plus élevés. L’émissaire, congédié sans réponse, rendit compte au jeune Tarquin de ce que son père avait fait en sa présence ; et le fils comprit qu’il devait immoler les premiers de la ville.

      C. César, suspectant la fidélité des Égyptiens, visita avec une feinte sécurité la ville d’Alexandrie et ses fortifications, se livra en même temps à de voluptueux festins, et voulut paraître épris des charmes de ces lieux, au point de s’abandonner aux habitudes et au genre de vie des Alexandrins ; et, tout en dissi-mulant ainsi, il fit venir des renforts et s’assura de l’Égypte.

      Ventidius, dans la guerre contre les Parthes, qui avaient pour chef Pacorus, n’ignorant pas qu’un certain Pharnée, de la ville de Cyrrhus, et du nombre de ceux qui passaient pour alliés des Romains, informait l’ennemi de tout ce qui se passait dans leur camp, sut mettre à profit la perfidie de ce barbare. Il feignit de craindre les événements qu’il désirait le plus, et de désirer ceux qu’il redoutait. Ainsi, craignant que les Parthes ne fran-chissent l’Euphrate avant qu’il eût reçu les légions qu’il avait en Cappadoce, au delà du Taurus, il agit si habilement avec ce traî-tre, que celui-ci, avec sa perfidie accoutumée, alla conseiller aux ennemis de faire passer leur armée par Zeugma, comme par le chemin le plus court, et parce que l’Euphrate y coulait paisible-ment, n’étant plus encaissé dans ses rives. Ventidius lui avait affirmé, disait-il, que si les Parthes se dirigeaient de son côté, il gagnerait les hauteurs, pour éviter leurs archers, tandis qu’il aurait tout à craindre s’ils se jetaient dans le plat pays. Trompés par cette assurance, les barbares descendent dans la plaine, et, par un long détour, arrivent à Zeugma . Là, les rives du fleuve étant plus écartées, et rendant plus pénible la construction des ponts, ils perdent plus de quarante jours à en établir, ou à met-tre en œuvre les machines nécessaires à cette opération. Venti-dius profita de ce temps pour rassembler ses troupes, qui le re-joignirent trois jours avant l’arrivée des Parthes, et, la bataille s’étant engagée, Pacorus la perdit avec la vie.

      Mithridate, cerné par Pompée, et se disposant à fuir le lendemain, alla, pour cacher son projet, faire un fourrage au loin, jusque dans les vallées voisines du camp des ennemis ; et, afin d’écarter tout soupçon, il fixa au jour suivant des pourpar-lers avec plusieurs d’entre eux. Il fît encore allumer dans tout son camp des feux plus nombreux qu’à l’ordinaire. Puis, dès la seconde veille, passant sous les retranchements mêmes des Romains, il s’échappa avec son armée.

      L’empereur César Domitien Auguste Germanicus, vou-lant surprendre les Germains, qui étaient en révolte, et n’igno-rant pas que ces peuples feraient de plus grands préparatifs de défense, s’ils se doutaient de l’approche d’un si grand capitaine, partit sous le prétexte de régler le cens dans les Gaules. Et bien-tôt, fondant à l’improviste sur ces peuples farouches, il réprima leur insolence et assura le repos des provinces.

      Claudius Néron, désirant que l’armée d’Hasdrubal fût dé-truite avant que celui-ci pût opérer sa jonction avec son frère Hannibal, se hâta d’aller se réunir à son collègue Livius Salina-tor, qui était opposé à Hasdrubal, et dans les forces duquel il n’avait pas assez de confiance ; mais, afin de cacher son départ à Hannibal, qu’il avait lui-même en tête, il prit dix mille hommes d’élite, et ordonna aux lieutenants qu’il laissait d’établir les mêmes postes et les mêmes gardes, d’allumer autant de feux, et de donner au camp la même physionomie que de coutume, de peur qu’Hannibal, concevant des soupçons, ne fit quelque tenta-tive contre le peu de troupes qui restaient. Ensuite, étant arrivé par des chemins détournés en Ombrie, près de son collègue, il défendit d’étendre le camp, pour ne donner aucun indice de son arrivée au général carthaginois, qui eût évité le combat, s’il se fût aperçu de la réunion des consuls . Ses forces ayant donc été doublées à l’insu d’Hasdrubal, il attaqua celui-ci, le défit, et, plus prompt qu’aucun courrier, revint en présence d’Hannibal. Ainsi, des deux généraux les plus rusés de Carthage, le même stratagème trompa l’un et anéantit l’autre.

      Thémistocle avait exhorté ses concitoyens à reconstruire promptement leurs murailles, que les Spartiates les avaient obligés à démolir . Ceux-ci ayant envoyé des députés pour s’opposer à l’exécution d’un tel dessein, il leur répondit qu’il irait lui-même à Sparte, pour détruire leurs soupçons, et il s’y rendit. Là, il simula une maladie, dans le but de gagner un peu de temps ; et, lorsqu’il s’aperçut qu’on se défiait de ses lenteurs, il soutint aux Spartiates qu’on leur avait apporté un faux bruit, et les pria d’envoyer à Athènes quelques-uns de leurs principaux citoyens, auxquels ils pussent s’en rapporter sur l’état des forti-fications. Puis il écrivit secrètement aux Athéniens de retenir les envoyés de Sparte jusqu’à ce que, les travaux terminés, il pût déclarer aux Lacédémoniens qu’Athènes était en état de dé-fense, et que leurs députés ne pourraient revenir qu’autant qu’il serait lui-même rendu à sa patrie. Les Spartiates acceptèrent facilement cette condition, pour ne pas payer par la mort d’un grand nombre celle du seul Thémistocle.

      L. Furius, s’étant engagé dans un lieu désavantageux, et voulant cacher son inquiétude, pour ne point jeter l’alarme parmi ses troupes, se détourna peu à peu en feignant de s’éten-dre pour envelopper l’ennemi ; puis, par un changement de front, il ramena son armée intacte, sans qu’elle eût connu le danger qu’elle avait couru.

      Pendant que Metellus Pius était en Espagne, on lui de-manda un jour ce qu’il ferait le lendemain ; il répondit : « Si ma tunique pouvait le dire, je la brûlerais, »

      Quelqu’un priait M. Licinius Crassus de dire quand il lè-verait le camp : « Craignez-vous, répondit-il, de ne pas entendre la trompette ? »

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      • #4
        Plutarque (Vie de Caton le Censeur, ch. X) porte à quatre cents le nombre des villes que soumit Caton en Espagne. Tite-Live, après avoir rapporté ce fait, avec le détail de toutes les circonstances qui l’ont amené, ajoute (liv. XXXIV ch. 17) que le consul marcha contre les villes qui refusaient d’obéir, et qu’il fut même obligé d’as-siéger Segestica, ville riche et importante, qu’il prit d’assaut. Polyen a compris ce même fait dans son recueil de stratagèmes (liv. VIII, ch. 17). Voyez aussi Polybe, Fragments, liv. XIX ; et Aurelius Victor, qui a reproduit presque littéralement le texte de Frontin (Hommes illus-tres, ch. XLVII).

        Selon Diodore de Sicile (liv. XIV, ch. 55), le point de rallie-ment indiqué par Himilcon était Panorme, aujourd’hui Palerme. Cet usage des ordres cachetés, maintenant encore en vigueur dans la marine, était familier aux généraux de l’antiquité.

        C. Lélius était envoyé par Scipion. Celui-ci, après avoir fait reconnaître le camp de Syphax, parvint à l’incendier pendant la nuit, ce qui mit un tel désordre dans l’armée ennemie, que le fer et le feu détruisirent quarante mille hommes. Voyez Tite-Live, liv. XXX, ch. 3-6 ; et Polybe, liv. XIV, fragment 2.
        Gabies, ville du Latium et colonie d’Albe. Elle était déjà en ruines du temps d’Auguste.

        Les détails de cet odieux artifice des deux Tarquins sont dans Tite-Live, liv. I, ch. 24. Voyez aussi Florus, liv. I. ch. 7 ; Valère-Maxime, liv. VII, ch. 4 ; Denys d’Halicarnasse, liv. IV, ch. 54 ; Ovide, Fastes, liv. II, v. 686 à 711.

        Diogène Laërce rapporte que Thrasybule, tyran de Milet, don-na un conseil du même genre à Périandre, tyran de Corinthe, dans les termes suivants :

        THRASYBULE À PÉRIANDRE.

        « Je n’ai fait aucune réponse aux questions de votre héraut ; mais, l’ayant mené dans un champ, j’abattis à coups de bâton, pen-dant qu’il me suivait, ceux des épis qui dépassaient les autres. Si vous l’interrogez, il vous dira ce qu’il a vu et entendu. Imitez-moi donc, si vous voulez conserver votre autorité ; faites périr les pre-miers de la ville, qu’ils soient, ou non, vos ennemis. L’ami même d’un tyran doit lui être suspect. »
        Zeugma. Ville de Syrie, fondée par Seleucus 1er, ainsi appelée « joindre », parce que, bâtie sur l’Euphrate, elle était le point de communication entre la Syrie et la Babylonie.
        Hasdrubal s’aperçut en effet, mais trop tard, de la réunion des consuls. On ne doit donc pas prendre à la lettre cette dernière phrase de Frontin. Voyez le § 9 du chapitre suivant, et surtout le beau récit de Tite-Live, liv. XXVII, ch. 43-5o.

        « Quand on marche à la conquête d’un pays avec deux ou trois armées qui ont chacune leur ligne d’opération jusqu’à un point fixe où elles doivent se réunir, il est de principe que la réunion de ces divers corps d’armée ne doit jamais se faire près de l’ennemi, parce que non seulement l’ennemi, en concentrant ses forces, peut empê-cher leur jonction, mais encore il peut les battre séparément. » (Na-poléon.)
        Il y a ici une grave erreur. Lors de ce voyage de Thémistocle à Sparte, en 478 avant J.-C., les murailles d’Athènes avaient été dé-truites par les Perses ; et c’est soixante-quatorze ans plus tard, après la bataille d Ægos-Potamos, que les Spartiates exigèrent la nouvelle démolition de ces remparts. Cf. Cornélius Nepos, Vie de Thémisto-cle, ch. VI ; et Vie de Conon, ch. IV.
        La plupart des historiens attribuent ce mot à Metellus Ma-cedonicus, qui vivait longtemps avant Metellus Pius.
        Plutarque (Vie de Demetrius, ch. XXVIII) rapporte un mot semblable d’Antigone. Son fils Demetrius lui demandait quand on décamperait : « Crains-tu, répondit-il avec l’accent de la colère, d’être le seul qui n’entende pas la trompette ? »

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        • #5
          Voila quelque chose qui parait fastidieux, maix qui est facile a lire, si cela vous plais, faites moi signe, je post la suite.

          bonne lecture

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          • #6
            Bonsoir

            très intéressant !

            La suite !

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            • #7
              J'ai trouve cela troublant la ressemblance avec les 36 stratagemes chinois, que je cherche avidemment

              J'envoie la suite

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              • #8
                II. Épier les desseins de l’ennemi.

                1 Scipion l’Africain, ayant saisi l’occasion d’envoyer une ambassade à Syphax, députa Lélius, et le fit accompagner de tribuns et de centurions d’élite, qui, déguisés en esclaves, étaient chargés de reconnaître les forces du roi. Afin d’examiner plus facilement la situation du camp, ils laissèrent à dessein échapper un cheval, et, sous prétexte de chercher à l’atteindre, parcoururent la plus grande partie des retranchements. D’après le rapport qu’ils firent, on incendia le camp, et la guerre fut ainsi terminée.

                2 Pendant la guerre d’Étrurie, au temps où les généraux romains ne connaissaient pas encore de moyens plus adroits pour observer l’ennemi, Q. Fabius Maximus donna l’ordre à son frère Fabius Céson, qui parlaient la langue des Étrusques, de prendre le costume de ce peuple, et de s’avancer dans la forêt Ciminia, où nos soldats n’avaient point encore pénétré. Il s’ac-quitta de sa mission avec tant de prudence et d’habileté, que, parvenu de l’autre côté de la forêt, il sut amener à une alliance les Camertes Ombriens, ayant reconnu qu’ils n’étaient pas en-nemis du nom romain.

                3 Les Carthaginois ayant remarqué que la puissance d’Alexandre s’était accrue au point de devenir inquiétante même pour l’Afrique, un des leurs, homme résolu, nommé Ha-milcar Rhodinus, alla, d’après leurs ordres, se réfugier auprès de ce roi, comme s’il était exilé, et mit tous ses soins à gagner sa confiance. Aussitôt qu’il y eut réussi, il fit connaître à ses conci-toyens les projets du monarque .

                4 Les Carthaginois eurent à Rome des émissaires qui, sous le prétexte d’une ambassade, devaient y séjourner longtemps et surprendre nos desseins.

                5 En Espagne, M. Caton, ne pouvant pénétrer les desseins de l’ennemi par un autre moyen, ordonna à trois cents soldats de se précipiter ensemble sur un poste espagnol, d’en enlever un homme, et de l’amener au camp sain et sauf. Le prisonnier, mis à la torture, révéla tous les secrets des siens.

                6 Lors de la guerre des Cimbres et des Teutons, le consul C. Marius, voulant éprouver la fidélité des Gaulois et des Ligu-riens, leur envoya des lettres dont la première enveloppe leur défendait d’ouvrir, avant une époque déterminée, l’intérieur, qui était scellé ; puis il réclama ces mêmes dépêches avant ce temps, et les ayant trouvées décachetées, il comprit que ces peuples fomentaient des projets hostiles.

                Il y a encore, pour pénétrer les desseins de l’ennemi, des moyens que les généraux emploient par eux-mêmes, sans aucun secours étranger. En voici des exemples :

                7 Pendant la guerre d’Étrurie, le consul Emilius Paullus al-lait faire descendre son armée dans une plaine, près de Poplo-nie, lorsqu’il vit de loin une multitude d’oiseaux s’élever d’une forêt, en précipitant leur vol. Il pensa qu’il y avait là quelque embuscade, parce que les oiseaux s’étaient envolés effarouchés et en grand nombre. Des espions qu’il envoya lui apprirent, en effet, que dix mille Boïens s’y disposaient à surprendre l’armée romaine. Alors, tandis qu’il était attendu d’un côté, il fît passer ses légions de l’autre, et enveloppa l’ennemi.

                8 De même Tisamène, fils d’Oreste, averti que le sommet d’une montagne fortifiée par la nature était occupé par l’enne-mi, envoya reconnaître les lieux. Ses éclaireurs lui ayant affirmé qu’il se trompait, il se mettait déjà en marche, quand il vit que de cette hauteur, dont il se méfiait, une grande quantité d’oi-seaux s’étaient envolés à la fois, et ne s’y reposaient pas. Il en conclut qu’une troupe ennemie y était cachée, il tourna donc la montagne avec son armée, et évita ainsi l’embuscade.

                9 Hasdrubal, frère d’Hannibal, s’aperçut de la réunion des armées de Livius et de Néron, malgré la précaution qu’ils avaient prise de ne point étendre leur camp. Il avait remarqué de leur côté des chevaux plus efflanqués, et des hommes dont le teint était plus hâlé que de coutume, comme il arrive après une marche.

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                • #9
                  Le maréchal de Luxembourg avait un espion auprès du roi Guillaume, et était instruit de tout ce qui se passait dans l’armée ennemie. Le roi s’en aperçut, et obligea l’espion à donner un faux avis, qui faillit perdre l’armée française à Steinkerque ; mais le génie et le courage de Luxembourg triomphèrent de celle difficulté.

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                  • #10
                    III Adopter une manière de faire la guerre.

                    1 Alexandre, roi de Macédoine, ayant une armée pleine d’ardeur, préféra toujours, comme manière de faire la guerre, la bataille rangée.

                    2 Pendant la guerre civile, C. César, ayant une armée de vé-térans, et sachant que celle de l’ennemi était composée de re-crues, s’attacha continuellement à livrer des batailles.

                    3 Fabius Maximus, envoyé contre Hannibal, que ses victoi-res avaient enorgueilli, résolut d’éviter les chances des combats, et de mettre seulement à couvert l’Italie, ce qui lui valut le sur-nom de Temporisateur et, par cela même, la réputation de grand capitaine.

                    4 Les Byzantins, pour éviter les hasards des combats contre Philippe, renoncèrent à la défense de leurs frontières, se retirè-rent dans l’enceinte fortifiée de leur ville, et réussirent ainsi à éloigner ce roi, qui ne put supporter les lenteurs du siège.

                    5 Dans la seconde guerre Punique, Hasdrubal, fils de Gis-con, étant vaincu en Espagne, et poursuivi par P. Scipion, parta-gea son armée entre différentes villes. Il en résulta que Scipion, pour ne point occuper ses troupes à faire plusieurs sièges à la fois, les ramena dans leurs quartiers d’hiver.

                    6 À l’approche de Xerxès, Thémistocle, pensant que les Athéniens ne pourraient ni livrer bataille, ni défendre leurs frontières, pas même leurs remparts, leur conseilla d’envoyer leurs enfants et leurs femmes à Trézène et dans d’autres villes, d’abandonner Athènes, et de se disposer à combattre sur mer.

                    7 Périclès en fit autant, dans la même république, contre les Lacédémoniens .

                    8 Tandis qu’Hannibal s’obstinait à rester en Italie, Scipion, en faisant passer son armée en Afrique, mit les Carthaginois dans la nécessité de rappeler leur général. Par ce moyen Scipion transporta la guerre du territoire romain sur celui de l’ennemi.

                    9 Les Athéniens, souvent inquiétés par les Lacédémoniens, qui leur avaient enlevé le château de Décélie, et s’y étaient forti-fiés, envoyèrent une flotte pour ravager le Péloponnèse, et réus-sirent à faire rappeler l’armée lacédémonienne qui était à Décé-lie.

                    10 L’empereur César Domitien Auguste, voyant que du sein des bois et de retraites cachées, les Germains, par une tactique qu’ils avaient adoptée, venaient fréquemment assaillir nos trou-pes, et trouvaient ensuite un refuge assuré dans la profondeur de leurs forêts , recula de cent vingt milles les limites de l’empire ; par là, non seulement il changea la situation de la guerre, mais il réduisit sous sa puissance ces ennemis, dont les retraites furent mises à découvert.

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                    • #11
                      De constituendo statu belli. Les modernes disent de même constituer la guerre, ce qui équivaut à se faire un plan d’opérations.

                      Les principes résultant de l’expérience de tous les temps se ré-sument en ces mots : « Un plan de campagne doit avoir prévu tout ce que l’ennemi peut faire, et contenir en lui-même les moyens de le déjouer. Les plans de campagne se modifient à l’infini, selon les cir-constances, le génie du chef, la nature des troupes, et la topographie du théâtre de la guerre. » (Napoléon.)
                      Il y a ici une erreur historique que l’on peut rectifier, en transportant cet exemple après le § 9. Périclès u’a jamais conseille aux Athéniens d’abandonner leur ville, et d’envoyer ailleurs leurs femmes et leurs enfants. Mais, ainsi qu’on le voit dans Thucydide (liv. II), Périclès, au moment où les Spartiates ravageaient l’Attique, s’embarqua avec des troupes athéniennes, alla dévaster le territoire des Lacédémoniens, et les força ainsi à revenir défendre leurs pos-sessions.
                      Nudaverat. Domitien fit probablement couper ou incendier les forêts qui servaient de retraite aux Germains : c’est, du moins, l’opinion des commentateurs.

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                      • #12
                        IV. Faire passer son armée à travers des lieux occupés par l’ennemi.

                        1 Pendant que le consul Emilius Paullus conduisait son ar-mée en Lucanie, par un chemin resserré le long du rivage, la flotte des Tarentins, qui s’était mise en embuscade, lui lançait des flèches empoisonnées : il couvrit le flanc de sa troupe avec des prisonniers, et l’ennemi, craignant de les atteindre, cessa de tirer.

                        2 Agésilas, roi de Lacédémone, revenant de Phrygie chargé de butin, et poursuivi par les ennemis, qui le harcelaient partout où le terrain leur donnait l’avantage, étendit de chaque côté de ses troupes une file de prisonniers ; et les ennemis, en épar-gnant ceux-ci, donnèrent aux Lacédémoniens le temps de s’éloi-gner.

                        3 Le même roi, ayant à franchir un défilé qu’il trouva oc-cupé par les Thébains, changea de route, et feignit de se diriger sur Thèbes. Les ennemis, effrayés, étant accourus à la défense de leur ville, Agésilas reprit le chemin qu’il avait d’abord résolu de suivre, et passa le défilé sans obstacle.

                        4 Nicostrate, général des Étoliens, marchant contre les Épi-rotes, et ne pouvant entrer sur leur territoire que par deux pas-sages étroits, se présenta comme dans l’intention d’en forcer un. Tous les Épirotes étant accourus pour le défendre, il laissa sur ce point un détachement, pour faire croire que toute son armée y était arrêtée ; et il alla lui-même, avec le reste de ses troupes, passer par l’autre défilé, où il n’était point attendu.

                        5 Le Perse Autophradate, conduisant son armée en Pisidie, et trouvant un défilé gardé par les troupes de ce pays, feignit de craindre la difficulté du passage, et commença à faire retraite. Les Pisidiens s’étant fiés à cette manœuvre, il envoya pendant la nuit une troupe d’élite pour s’emparer du lieu, et le lendemain il y fit passer toute son armée.

                        6 Philippe, roi de Macédoine , se dirigeant vers la Grèce, et apprenant que les Thermopyles étaient occupées par les Éto-liens, retint leurs députés, qui étaient venus pour traiter de la paix ; puis, marchant lui-même à grandes journées vers les Thermopyles, dont les gardiens, en pleine sécurité, attendaient le retour de leur ambassade, il franchit inopinément le défilé.

                        7 Iphicrate, commandant l’armée athénienne contre le La-cédémonien Anaxibius, près d’Abydos, sur l’Hellespont, avait à traverser avec son armée des lieux occupés par des postes en-nemis. Le passage était, d’un côté, bordé de montagnes escar-pées, et de l’autre, baigné par la mer. Il s’arrêta quelque temps ; et, profitant d’un jour où il faisait plus froid qu’à l’ordinaire, ce qui inspirait moins de méfiance à l’ennemi, il prit les soldats les plus, robustes, les échauffa on les faisant frotter d’huile et en leur donnant du vin, et leur ordonna de suivre l’extrémité même du rivage, en passant à la nage les endroits impraticables. Au moyen de cette ruse, il fondit à l’improviste, et par derrière, sur les troupes qui gardaient ce défilé.

                        8 Cn. Pompée, ne pouvant traverser un fleuve dont l’autre rive était gardée par l’ennemi, faisait continuellement sortir ses troupes du camp, et les y ramenait ; quand il eut par là persuadé aux ennemis qu’ils n’avaient aucun mouvement à faire à l’ap-proche des Romains, il s’élança tout à coup vers le fleuve et le traversa.

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                        • #13
                          9 Alexandre le Grand, arrêté par Porus, qui lui disputait le passage de l’Hydaspe , donna l’ordre à une partie de ses trou-pes de se porter sans cesse vers le fleuve ; et lorsqu’il eut réussi, par cette manœuvre, à fixer les craintes de Porus sur ce point de la rive opposée, il fit subitement passer son armée plus haut.

                          Empêché par l’ennemi de traverser l’Indus, Alexandre fit entrer sa cavalerie en différents endroits du fleuve, comme pour forcer le passage ; et pendant qu’il tenait les barbares dans cette attente, il fit passer dans une île peu éloignée un détachement faible d’abord, mais qui, bientôt renforcé, gagna de là l’autre rive. À la vue de cette troupe, tous les ennemis s’élancèrent à la fois pour l’anéantir ; Alexandre eut alors le gué libre, passa le fleuve, et réunit toute son armée.

                          10 Xénophon, voyant que les Arméniens occupaient l’autre rive d’un fleuve qu’il devait traverser, fit chercher deux gués ; et, se voyant repoussé de celui du dessous, il gagna le gué supé-rieur. Également chassé de celui-ci, où l’ennemi était accouru, il revint au gué inférieur, laissant vers l’autre une partie de ses soldats, avec ordre de traverser par là, pendant que l’ennemi retournerait à la défense du gué inférieur. Persuadés que l’armée entière de Xénophon redescendrait le fleuve, les Armé-niens ne prirent point garde aux troupes qui restaient sur l’autre point ; alors celles-ci, ayant traversé sans obstacle, vinrent pro-téger le passage des autres.

                          11 Lors de la première guerre Punique, le consul Ap. Clau-dius, étant dans l’impossibilité de faire passer son armée de Rhegium à Messine, parce que les Carthaginois gardaient le dé-troit, répandit le bruit qu’il ne pouvait continuer une guerre commencée sans l’ordre du peuple, et feignit de ramener sa flotte du côté de l’Italie. Les Carthaginois se retirèrent, croyant au départ du consul, et celui-ci, revenant sur ses pas, aborda en Sicile.

                          12 Des généraux lacédémoniens, faisant voile pour Syra-cuse, et redoutant la flotte des Carthaginois, qui était en croi-sière devant cette ville, firent marcher à leur tête, comme en triomphe, des vaisseaux carthaginois qu’ils avaient capturés, et au flanc ou à l’arrière desquels ils avaient attaché leurs propres navires. Trompés par cette apparence, les Carthaginois les lais-sèrent passer.

                          13 Philippe, arrêté au détroit de Cyanée par la flotte athé-nienne, qui lui fermait le passage, écrivit à Antipater de tout quitter pour le suivre chez les Thraces, qui étaient en insurrec-tion, et avaient fait prisonnières les garnisons laissées dans leur pays ; et il eut soin que sa lettre fût interceptée par les Athé-niens. Ceux-ci croyant avoir surpris les secrets des Macédo-niens, retirèrent leur flotte ; et Philippe franchit le détroit sans trouver de résistance.

                          14 Ce roi, ne pouvant s’emparer de la Chersonèse, alors au pouvoir des Athéniens, parce que le passage de la mer lui était fermé, tant par la flotte de Byzance que par celle des Rhodiens et des habitants de Chio, sut gagner ces deux derniers peuples en leur rendant les vaisseaux qu’il leur avait pris, comme si cette restitution devait être un motif de médiation de leur part, pour conclure la paix entre lui et les Byzantins, seuls auteurs de la guerre. Puis traînant en longueur cette négociation, et apportant toujours à dessein quelques changements aux conditions du traité, il eut le temps de préparer sa flotte, qui passa le détroit sans que l’ennemi s’y attendit.

                          15 H. Chabrias, général athénien, qu’une flotte ennemie empêchait d’entrer dans le port de Samos, envoya quelques-uns de ses vaisseaux en vue de ce port, avec ordre de prendre le large, persuadé que les navires en station se mettraient à leur poursuite. Cette ruse, en effet, ayant éloigné l’ennemi, Chabrias ne trouva plus d’obstacle, et fit entrer dans le port le reste de sa flotte.

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                          • #14
                            Il s’agit sans doute de Philippe, fils de Demetrius, qui fit la guerre aux Étoliens. Voyez Tite-Live, liv. XXVIII, ch. 7.
                            Selon Quinte-Curce (liv. VIII, ch. 13) et Arrien (liv. V, ch. 2), ce fait s’accomplit, ainsi que le précédent, sur l’Hydaspe, et non sur l’Indus. Plutarque, dans la Vie d’Alexandre, parle d’une lettre de ce roi, qui lui-même rend compte du passage de l’Hydaspe, et ne fait nulle mention de l’Indus. Au reste, ces erreurs ne sont pas rares dans Frontin, surtout quand il sort de l’histoire romaine.

                            Des stratagèmes semblables ont été pratiqués par Gustave-Adolphe pour passer le Lech, que gardaient les Impériaux, et par Charles XII, qui franchit la Bérézina en marchant contre les Mosco-vites.
                            Les commentateurs pensent qu’il s’agit ici, non du détroit de Cyanée, mais de celui d’Abydos. Selon Polyen (liv. IV, ch. 2, § 8), Philippe aurait employé cette ruse lors d’une expédition qu’il fit dans le pays d’Amphisse.

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                            • #15
                              V. S’échapper des lieux désavantageux.

                              1 Q. Sertorius, serré de près par l’ennemi en Espagne, et devant traverser une rivière, creusa sur le bord un fossé en forme de demi-lune, le remplit de bois, auquel il mit le feu ; et, arrêtant ainsi l’ennemi, il passa librement la rivière.

                              2 Pélopidas, général thébain, recourut à un semblable arti-fice, dans la guerre de Thessalie, pour franchir une rivière. Ayant donné à son camp une vaste étendue sur la rive, il fit son retranchement avec des troncs d’arbres garnis de leurs bran-ches, et avec d’autres pièces de bois ; puis il y mit le feu. Pen-dant que les flammes tenaient l’ennemi à distance, il traversa la rivière.

                              3 Q. Lutatius Catulus, poursuivi par les Cimbres, et n’espé-rant leur échapper qu’en passant un fleuve dont ils occupaient le bord, fit paraître ses troupes sur une montagne voisine, comme dans l’intention d’y camper ; et il défendit aux soldats de délier les bagages, de décharger les fardeaux, et de s’écarter des rangs et des enseignes. Pour mieux tromper les ennemis, il fit dresser quelques tentes qu’ils pussent apercevoir, allumer des feux, construire le retranchement par quelques hommes, tandis que d’autres allaient à la provision de bois, toujours à la vue des Cimbres. Ceux-ci, croyant à la réalité de ce qu’ils voyaient, choi-sirent aussi un lieu pour leur camp ; et, pendant qu’ils se disper-saient dans les environs pour se procurer les choses nécessaires au séjour, Catulus, saisissant l’occasion, traversa le fleuve, et dévasta même leur camp.

                              4 Crésus, ne pouvant passer à gué l’Halys, et n’ayant aucun moyen de construire des bateaux ou un pont, fit creuser un ca-nal qui, de la partie supérieure du rivage, suivit la ligne de son camp, et donna au fleuve un nouveau lit derrière l’armée.

                              5 Cn. Pompée, vivement poursuivi par César, et voulant transporter la guerre hors de l’Italie, était à Brindes, sur le point de s’embarquer. Il obstrua quelques rues, en mura d’autres, en coupa quelques-unes par des fossés, qu’il couvrit en y dressant des pieux qui supportaient des claies chargées de terre. Les ave-nues qui menaient au port furent interceptées par des poutres serrées les unes contre les autres et formant une puissante bar-rière. Ces travaux terminés, il feignit de vouloir défendre la ville, en laissant çà et là quelques archers sur les remparts. Ses trou-pes s’embarquèrent sans bruit ; et, dès qu’il fut en mer, les ar-chers, se retirant par des chemins qui leur étaient connus, le rejoignirent à l’aide de petites embarcations.

                              6 Le consul C. Duilius, ayant pénétré imprudemment dans le port de Syracuse , et s’y voyant enfermé par une chaîne ten-due à l’entrée, fit passer tous ses soldats de la poupe de ses vais-seaux, qui, ayant par cette manœuvre l’arrière incliné et la proue relevée, furent lancés à force de rames, et s’engagèrent sur la chaîne. Après quoi, les soldats s’étant portés vers la proue, leur poids entraîna les vaisseaux de l’autre côté de l’obstacle.

                              7 Lysandre, de Lacédémone, enfermé avec toute sa flotte dans le port d’Athènes, dont les étroites issues étaient gardées par les vaisseaux ennemis, débarqua secrètement ses troupes sur le rivage, et fit passer, à l’aide de rouleaux, ses vaisseaux dans le port de Munychie, voisin de celui d’Athènes.

                              8 En Espagne, Hirtuleius, lieutenant de Sertorius, s’étant engagé entre deux montagnes escarpées, dans un long et étroit défilé, et n’ayant qu’un petit nombre de cohortes, apprit que l’ennemi approchait avec des forces considérables. Aussitôt il fit creuser un fossé d’une montagne à l’autre, le surmonta d’une palissade à laquelle il mit le feu, et s’échappa en arrêtant ainsi l’ennemi.

                              9 Pendant la guerre civile, C. César, s’étant avancé avec ses troupes pour présenter la bataille à Afranius, s’aperçut qu’il ne pourrait se retirer sans danger. Il fit rester la première et la se-conde ligne sous les armes, dans l’ordre primitif de la bataille, pendant que la troisième, travaillant derrière les deux autres, à l’insu de l’ennemi, creusait un fossé de quinze pieds, dans l’en-ceinte duquel ses soldats se retirèrent, au coucher du soleil, et restèrent sons les armes.

                              10 Périclès. général athénien, poussé par les troupes du Pé-loponnèse dans un lieu entouré de rochers escarpés qui n’of-fraient que deux issues, coupa l’une par un fossé très large, comme pour la fermer à l’ennemi, et étendit son camp vers l’au-tre, feignant de vouloir sortir de ce côté. Les troupes qui le te-naient investi, loin de croire que son armée s’échapperait par le fossé qu’elle avait creusé elle-même, accoururent toutes en tête de l’autre passage. Alors Périclès, qui avait préparé des ponts, les jeta sur le fossé, et fit sortir ses soldats sans éprouver aucune résistance.

                              11 Lysimaque, un des généraux qui se partagèrent l’empire d’Alexandre, avait dessein de camper sur une haute colline ; mais, conduit sur une autre moins élevée, par la faute de ses guides, et craignant que les ennemis, qui étaient postés plus haut, ne vinssent fondre sur lui, il établit son retranchement, et fit creuser en deçà trois fossés, ainsi que d’autres encore autour des tentes, de sorte que le camp tout entier en était sillonné. Puis, quand il eut ainsi coupé le passage à l’ennemi, il se fit des ponts sur les fossés avec de la terre et des branchages, et gagna en toute hâte des lieux plus élevés.

                              12 En Espagne, T. Fonteius Crassus, étant allé faire du bu-tin avec trois mille hommes, se trouva enfermé par Hasdrubal dans une position dangereuse. À l’entrée de la nuit, n’ayant fait part de sa résolution qu’aux premiers rangs, il s’échappa en tra-versant les postes ennemis, au moment où l’on s’y attendait le moins.

                              13 L. Furius, s’étant engagé dans un lieu désavantageux, et voulant cacher son inquiétude, afin de ne pas jeter l’alarme parmi ses troupes, se détourna peu à peu, en feignant de s’éten-dre pour attaquer l’ennemi ; puis, par un changement de front, il ramena son armée intacte, sans qu’elle eût connu le danger qu’elle avait couru.

                              14 Pendant la guerre contre les Samnites, le consul Corné-lius Cossus étant surpris par l’ennemi dans un lieu où il courait du danger, le tribun P. Decius lui conseilla de faire occuper une hauteur qui était près de là, par un détachement qu’il s’offrit à commander. L’ennemi, attiré sur ce point, laissa échapper le consul, mais enveloppa Decius, et le tint assiégé. Celui-ci triom-pha encore de cette difficulté par une sortie nocturne, et revint auprès du consul, sans avoir perdu un seul homme.

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