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Dr Mennad Infectiologue #24H_au_service #Covid
Sur le chemin de l’hôpital, les échos de la garde de la veille retentissent encore dans ma tête, mes confrères me racontaient leur calvaire, des patients compliqués partout, 3 patients transférés en réanimation, beaucoup d’admissions, un patient âgé ramené sur chaise roulante qui décède quelques minutes après, parce qu’il n’y a pas de tri, c’est l’infectiologue qui assure tout bien évidemment...
Service saturé, aucune place d’oxygène libre, mes confrères devaient partager des sources entre deux patients, le temps de trouver mieux...
Bilan de leur garde, 6 décès (Allah yarhamhom) entre services d’infectiologie et de réanimation.
Quitte à paraître choquant, les décès attristent et démoralisent l’équipe de garde mais soulage un peu l’équipe de relève...6 places de libre qui se libèrent... malheureusement, on en est réduit à penser ainsi.
À peine arrivé, le tableau des admissions déborde, beaucoup de patients compliqués, toutes les places dotées de sources d’oxygène occupées...les places vidées hier ont été réoccupées aussitôt...le stress de la garde commence...
Je vous épargnerai les détails sordides et les problèmes de gestion avec des femmes d’entretien indisponibles depuis 48h, des poubelles qui débordent et j’en passe...
Mais 24 heures de garde, c’était :
- Les agents de securité qui contenaient difficilement les consultants, tout le monde se voit malade et tout le monde veut passer en premier, la vieille qui respire mal sur sa chaise roulante? On s’en fout, j’étais là avant, ana tani rani grave!
- Les infirmiers qui courent dans tous les sens entre les étages...admission! Vérifiez si on a de la place au premier! Non, c’est complet! Vérifiez au 2ème étage ! Il reste une chambre, ah mais y’a pas de lumière, tant pis, pas le choix...
- Les médecins qui font de leur mieux pour tout gérer à la fois...la résidente qui fait le tri et tente de faire vite sans porter préjudice au patient, la 2ème résidente dans le couloir qui fait le dossier d’un patient sur chaise roulante, le maitre assistant qui remplit les fiches et interroge les patients pendant que l’assistant fait les prélèvements (Oui, même en temps de guerre, il faut toujours remplir cent fiches, sinon on te renvoie tes prélèvements) ...et l’externe, cet externe qu’on aime tous, notre héros aussi dévoué que compétent, bénévole et quelle efficacité, il fait passer les dizaines et dizaines d’ECG...
Il manque quelqu’un...? Notre chef d’équipe ? Notre professeur! Si si, elle est là, dans un coin, accroupie devant une patiente sur sa chaise roulante à prendre sa tension artérielle et à vérifier sa saturation en oxygène pour lui faire gagner du temps...
Tout le monde fait de son mieux, baignant dans sa sueur avec les tenues de protection, étouffant avec les masques, les oreilles lacérées par les élastiques.
Tout le monde parle en même temps...mais certains mots se répètent , les mêmes mots résonnent dans mes oreilles ...J’ai assisté à un mariage...j’étais aux funérailles d’un proche... oui je ne portais pas de masque...non, je ne calculais pas trop ce virus...
Il faut encore s’occuper des hospitalisés ... des patients qui manque d’oxygène mais...de l’oxygène ? Y’en a plus...on se retrouve à les rassurer qu’en se mettant en position demi-assise, en respirant calmement, ça ira mieux...et ça a l’air de marcher...les sources d’oxygène sont occupées par les plus atteints...
D’autres vagues de patients arrivent de l’EHU, où tout un hôpital annonce qu’il n’a plus de place, je vous laisse imaginer la situation...
On se retrouve à « troquer » les patients avec nos amis réanimateurs, je te prends celui qui est sous 9litres et je te file celui sous 15 litres...à choisir qui a le meilleur pronostic de survie...avec des patients qui t’implorent de les laisser dans ton service, parce qu’ils savent que la rea, c’est grave...
Avec tout ce chahut, on entend de loin: L’oxygeeeeeene! C’est notre patient qui s’asphyxie dès que le débit diminue, (un bon système d’alarme) parce qu’on marche encore avec le système des bouteilles externes qu’il faut remplacer à chaque fois...
Au milieu de tout ça, certains confrères trouvent le temps de t’envoyer un patient qui fait une DNV, sans l’examiner ni rien...
Bref, durant toute la garde, je portais un regard fier sur mon équipe qui se donnait à fond, une equipe soudée qui continue à donner son maximum malgré tout... un regard furieux contre tous ces ignorants qui payent le prix de leur bêtise...un regard triste sur les victimes contaminées par leurs proches...et puis, un regard vide sur la situation qui continue à empirer, sans qu’il y ait prise de conscience...pour qu’à la fin, j’arrive à me convaincre qu’on a l’obligation des moyens et pas des résultats.
Le temps de la sensibilisation est passé, il est temps d’assumer le prix de vos erreurs, le médecin ne sera là que pour essayer de rattraper ceux qui sont déjà sur le chemin des adieux...
Prenez soin de vous et de vos proches mes amis. Rabbi yahfedkom.
____Dr M.A. Médecin Infectiologue .
Service saturé, aucune place d’oxygène libre, mes confrères devaient partager des sources entre deux patients, le temps de trouver mieux...
Bilan de leur garde, 6 décès (Allah yarhamhom) entre services d’infectiologie et de réanimation.
Quitte à paraître choquant, les décès attristent et démoralisent l’équipe de garde mais soulage un peu l’équipe de relève...6 places de libre qui se libèrent... malheureusement, on en est réduit à penser ainsi.
À peine arrivé, le tableau des admissions déborde, beaucoup de patients compliqués, toutes les places dotées de sources d’oxygène occupées...les places vidées hier ont été réoccupées aussitôt...le stress de la garde commence...
Je vous épargnerai les détails sordides et les problèmes de gestion avec des femmes d’entretien indisponibles depuis 48h, des poubelles qui débordent et j’en passe...
Mais 24 heures de garde, c’était :
- Les agents de securité qui contenaient difficilement les consultants, tout le monde se voit malade et tout le monde veut passer en premier, la vieille qui respire mal sur sa chaise roulante? On s’en fout, j’étais là avant, ana tani rani grave!
- Les infirmiers qui courent dans tous les sens entre les étages...admission! Vérifiez si on a de la place au premier! Non, c’est complet! Vérifiez au 2ème étage ! Il reste une chambre, ah mais y’a pas de lumière, tant pis, pas le choix...
- Les médecins qui font de leur mieux pour tout gérer à la fois...la résidente qui fait le tri et tente de faire vite sans porter préjudice au patient, la 2ème résidente dans le couloir qui fait le dossier d’un patient sur chaise roulante, le maitre assistant qui remplit les fiches et interroge les patients pendant que l’assistant fait les prélèvements (Oui, même en temps de guerre, il faut toujours remplir cent fiches, sinon on te renvoie tes prélèvements) ...et l’externe, cet externe qu’on aime tous, notre héros aussi dévoué que compétent, bénévole et quelle efficacité, il fait passer les dizaines et dizaines d’ECG...
Il manque quelqu’un...? Notre chef d’équipe ? Notre professeur! Si si, elle est là, dans un coin, accroupie devant une patiente sur sa chaise roulante à prendre sa tension artérielle et à vérifier sa saturation en oxygène pour lui faire gagner du temps...
Tout le monde fait de son mieux, baignant dans sa sueur avec les tenues de protection, étouffant avec les masques, les oreilles lacérées par les élastiques.
Tout le monde parle en même temps...mais certains mots se répètent , les mêmes mots résonnent dans mes oreilles ...J’ai assisté à un mariage...j’étais aux funérailles d’un proche... oui je ne portais pas de masque...non, je ne calculais pas trop ce virus...
Il faut encore s’occuper des hospitalisés ... des patients qui manque d’oxygène mais...de l’oxygène ? Y’en a plus...on se retrouve à les rassurer qu’en se mettant en position demi-assise, en respirant calmement, ça ira mieux...et ça a l’air de marcher...les sources d’oxygène sont occupées par les plus atteints...
D’autres vagues de patients arrivent de l’EHU, où tout un hôpital annonce qu’il n’a plus de place, je vous laisse imaginer la situation...
On se retrouve à « troquer » les patients avec nos amis réanimateurs, je te prends celui qui est sous 9litres et je te file celui sous 15 litres...à choisir qui a le meilleur pronostic de survie...avec des patients qui t’implorent de les laisser dans ton service, parce qu’ils savent que la rea, c’est grave...
Avec tout ce chahut, on entend de loin: L’oxygeeeeeene! C’est notre patient qui s’asphyxie dès que le débit diminue, (un bon système d’alarme) parce qu’on marche encore avec le système des bouteilles externes qu’il faut remplacer à chaque fois...
Au milieu de tout ça, certains confrères trouvent le temps de t’envoyer un patient qui fait une DNV, sans l’examiner ni rien...
Bref, durant toute la garde, je portais un regard fier sur mon équipe qui se donnait à fond, une equipe soudée qui continue à donner son maximum malgré tout... un regard furieux contre tous ces ignorants qui payent le prix de leur bêtise...un regard triste sur les victimes contaminées par leurs proches...et puis, un regard vide sur la situation qui continue à empirer, sans qu’il y ait prise de conscience...pour qu’à la fin, j’arrive à me convaincre qu’on a l’obligation des moyens et pas des résultats.
Le temps de la sensibilisation est passé, il est temps d’assumer le prix de vos erreurs, le médecin ne sera là que pour essayer de rattraper ceux qui sont déjà sur le chemin des adieux...
Prenez soin de vous et de vos proches mes amis. Rabbi yahfedkom.
____Dr M.A. Médecin Infectiologue .