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Des milliers de nos compatriotes attendent désespérément leur rapatriement Le SOS des Algériens bloqués à l’étranger

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  • Des milliers de nos compatriotes attendent désespérément leur rapatriement Le SOS des Algériens bloqués à l’étranger

    Des milliers de nos compatriotes attendent désespérément leur rapatriement
    Le SOS des Algériens bloqués à l’étranger




    el-watan.com
    MUSTAPHA BENFODIL 11 JUILLET 2020 À 10 H 04 MIN






    Des opérations de rapatriement ont certes été organisées, mais depuis plusieurs semaines, c’est le statu quo, transformant la vie de ces personnes en un véritable cauchemar.

    C’est l’un des effets collatéraux les plus dramatiques de la crise du coronavirus : nos milliers de compatriotes bloqués à l’étranger, sans ressources, et dont beaucoup sont réduits à l’état de SDF, errant comme des âmes en peine, totalement livrés à leur sort.

    Depuis le 17 mars, faut-il le rappeler, nos frontières et notre espace aérien sont fermés, une mesure qui a eu pour effet l’annulation en cascade des vols commerciaux, empêchant de facto nos ressortissants qui se trouvaient en déplacement avant cette date de rentrer chez eux.

    Des opérations de rapatriement ont certes été organisées, mais depuis plusieurs semaines, c’est le statu quo, transformant la vie de ces personnes en un véritable cauchemar. Sur les réseaux sociaux, plusieurs pages ont été créées pour alerter sur cette détresse qui suscite, comme de juste, colère et incompréhension de la part des concernés et leurs familles. «Faites quelque chose pour nous ! On est bloqués mon mari et moi.

    Nous sommes âgés de 69 et 67 ans, hypertendus. Nous sommes angoissés et stressés. On est à Paris (Evry 2) depuis le 8 mars», supplie une dame ce mardi 7 juillet sur la page «Algériens bloqués en France», sur Facebook. Un citoyen a posté ce message : «Salam alikoum mes frères ! Il y a une sœur algérienne bloquée avec son bébé de 9 mois. Elle n’a pas de quoi acheter du lait. Si des gens peuvent l’aider, elle est en France, à Melun.»


    Des voyageurs devenus SDF

    Des images poignantes sont diffusées sur ces mêmes pages pour sensibiliser sur les souffrances de ces personnes qui, à l’origine, étaient juste de passage, et dont les ressources financières ont fondu comme neige au soleil, surtout quand on connaît la cherté de la vie «en euro».

    Sur certaines images, on les voit dormant dans la rue, dans les bois, en véritables sans-abri, dans le dénuement le plus total. «Chers responsables, dormez-vous l’esprit tranquille ? N’avez-vous pas de conscience qui vous rappelle vos compatriotes ?» lit-on dans un commentaire taguant une photo montrant des compatriotes devenus des SDF.

    Il faut souligner aussi que beaucoup ont pu compter sur l’élan de solidarité exceptionnel dont a fait preuve notre communauté émigrée, notamment en France où se concentre la majorité des cas d’Algériens bloqués. «Les femmes qui sont dans le besoin, mes sœurs, contactez-moi sur Facebook. Je suis de Paris, j’essayerai de vous aider du mieux que je peux Inchallah», a posté une Algérienne résidant dans la capitale française.

    Une autre a également proposé son aide en écrivant : «Bonjour chère communauté ! J’espère que tout le monde se porte bien malgré tout en ces temps difficiles. Je suis Algérienne vivant en France, à Paris, donc je ne suis pas bloquée ici, et je fais ce post pour proposer de l’aide, dans la mesure du possible bien sûr, à ceux qui sont bloqués à Paris ou en Île-de- France.»

    «Pourquoi ils ont rapatrié certains et abandonné les autres ?»

    Samia (le prénom a été changé), une jeune cadre dont la sœur est bloquée en France depuis quatre mois, ne comprend pas cette «inertie des autorités». «Ma sœur est partie en France le 12 mars. Elle travaille dans le secteur médical et voulait simplement prendre quelques jours de vacances pour se reposer moralement. Elle devait rentrer le 29 mars, mais cela fait quatre mois maintenant qu’elle est bloquée là-bas.

    Elle est à Lyon» témoigne-t-elle, avant de poursuivre : «Le problème, c’est qu’elle n’est pas la seule dans cette situation. Ils sont à peu près 3000 en France à être dans le même cas. Certains sont partis pour des soins, d’autres pour des vacances de quelques jours, d’autres pour une formation de courte durée…

    Chacun a ses raisons. Il y a eu des vols de rapatriement certes. Ma sœur s’est inscrite sur la plateforme (créée pour les opérations de rapatriement, ndlr). Ils l’ont ouverte pendant dix jours, ils ont permis à tous les gens qui sont bloqués de s’inscrire. Ils ont vérifié que ce sont des Algériens qui sont partis avec des visas en règle, qui ont des billets retour.

    A la fin, ils ont appelé certains et ont abandonné les autres à leur sort. Il y a eu deux vols de rapatriement sur Paris-Charles-de-Gaulle le 30 mai, après, plus rien. Imaginez la détresse des personnes qui sont restées là-bas. Il y a des gens qui passent la nuit dans les mosquées, il y a des familles entières avec des enfants qui sont dans la précarité la plus totale, et qui n’ont que les émigrés pour leur venir en aide.

    C’est un calvaire quotidien !» Interrogée sur l’état psychologique et matériel de sa frangine, Samia nous confie : «Ma sœur tient le coup grâce à nous. On lui envoie régulièrement de l’argent, on se débrouille comme on peut. Il n’y a personne avec elle, elle est seule. Au début, elle est partie chez des amis, des proches, mais les amis vous prennent en charge pendant une période, après, c’est fini.

    Il fallait se débrouiller pour trouver une petite location, et ce n’est pas donné. On doit lui envoyer à chaque fois de l’argent pour régler son bail. Psychiquement, elle est fatiguée, déprimée, vous ne pouvez pas imaginer…Ici, mes parents ne dorment pas, ils sont rongés par l’inquiétude. Jusqu’à quand cette situation va durer ? Sa vie n’est pas là-bas, elle est ici.»

    Et de faire remarquer : «Ce que je ne comprends pas : il y a tous les jours des vols de rapatriement de l’Algérie vers la France. La France est en train de rapatrier ses ressortissants, pourquoi l’Etat algérien ne rapatrie pas les siens ? Il faudrait qu’ils nous disent pourquoi ces difficultés de rapatriement ? Ces gens, ce ne sont pas des binationaux. Ils ont leur vie ici, ils ont tous un billet retour confirmé, l’Etat se doit de les rapatrier !»

    «Chaque jour je pleure en pensant à mes enfants»

    Selon la chaîne France 24 qui a consacré il y a quelques jours un reportage sur nos compatriotes retenus dans l’Hexagone, il y aurait quelque 5000 Algériens qui sont bloqués en France.

    A travers ce reportage réalisé devant l’ambassade d’Algérie à Paris, où plusieurs de nos ressortissants sont venus crier leur désarroi, on peut se faire une idée du profil des personnes qui sont dans cette situation. «Je suis venu pour soigner un cancer qui ne se traite pas en Algérie», a déclaré un jeune homme. Un maître de conférences a assuré pour sa part : «Je suis venu pour des recherches bibliographiques à Paris-Dauphine.»

    Une étudiante accompagnée de sa maman, s’écrie : «Ma mère est bloquée ici depuis 4 mois, on vit dans un 10 mètres carrés. (…) Elle a laissé mon père, elle a laissé notre famille, elle a laissé son travail !» Une dame a tenu à apporter cette précision : «Il y a beaucoup de gens qui pensent qu’on est correctement logés. Pour les trois-quarts non, ce n’est pas vrai.

    Il y en a qui passent leur journée dans les bus, et le soir, ils rentrent juste pour dormir, pour ne pas être un fardeau pour les personnes qui les hébergent.» Retenons également le témoignage poignant de cet homme de 42 ans, censé resté une semaine seulement en France avant de voir son séjour s’allonger indéfiniment : «Chaque jour je pleure en pensant à mes enfants. Mon travail au bled est stoppé. Je marche à 4h du matin et je crie. Je suis angoissé, j’ai le stress !»

    Nous avons tenté de joindre le ministère des Affaires étrangères pour faire le point sur ce dossier, sans résultat. Pour rappel, M. Bélaïd Mohand Oussaïd, porte-parole de la Présidence, a déclaré, lors d’une conférence de presse le 9 juin dernier, que l’Algérie a rapatrié «près de 13 000 ressortissants algériens bloqués à l’étranger depuis la fermeture de l’espace aérien à cause de la pandémie de Covid-19».

    De son côté, le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, a indiqué dans l’interview qu’il a accordée à la chaîne France 24 et diffusée le 4 juillet dernier, que l’Algérie maintenait la fermeture de son espace aérien en précisant : «Vous savez qu’avec la France, nous avons pratiquement 32 vols quotidiens.

    Faut-il ouvrir partiellement ou ne pas ouvrir ? L’environnement géographique de l’Algérie a opté pour un déconfinement total, bien que les chiffres soient élevés, que ce soit pour les contaminations et même les décès.» M. Tebboune a assuré qu’en fonction de l’évolution de la situation épidémiologique, «nous allons voir (…) si nous devons ouvrir ou non».

    Pour justifier le maintien de cette fermeture, le Président a fait savoir que «parmi les Algériens qui ont été rapatriés, nous avons trouvé quand même presque 50 personnes qui étaient contaminées». Pour Samia, le maintien de la fermeture de l’espace aérien n’empêche nullement le rapatriement de nos ressortissants se trouvant encore hors de nos frontières : «On n’a pas demandé l’ouverture des frontières. De toute façon, avec la persistance de la Covid, personne ne va voyager.

    Nous, on demande de rapatrier nos Algériens bloqués. Ils sont même prêts à se déplacer à Marseille et rentrer en bateau. D’ailleurs, je n’ai pas compris pourquoi ils ne l’ont pas fait. Je n’ai pas compris pourquoi l’Etat ne veut pas bouger.» Et de lancer : «Les gens qui sont bloqués là-bas sont prêts à payer l’hôtel pour les 14 jours de mise en quarantaine. Ce n’est pas un problème. Pourvu que ma sœur puisse rentrer.»

    Lettre ouverte au Président Tebboune

    A noter qu’une cagnotte Leetchi a été lancée en ligne pour collecter des aides au profit de nos concitoyens en détresse. Une pétition en ligne a également vu le jour le 6 juillet dernier. L’énoncé de la pétition est une lettre ouverte adressée au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, afin d’intervenir pour mettre fin à ce calvaire.

    Les signataires attirent l’attention à travers ce cri de détresse «sur la situation dégradante, indigne et inhumaine que nous subissons à l’étranger, depuis la fermeture des frontières, loin de nos familles et de notre pays». Ils poursuivent : «Monsieur le Président, cela fait maintenant quatre mois que nous sommes abandonnés à l’étranger, épuisés moralement et démunis financièrement.

    Nous survivons dans des conditions de vie misérables. Certains d’entre nous sont tombés en dépression en apprenant la perte d’un proche en Algérie.» Les signataires ajoutent : «En dépit de notre inscription à la campagne de rapatriement lancée par le ministère de l’Intérieur au début du mois d’avril, aucune information n’a filtré sur notre programme de rapatriement.

    Les services consulaires sont la plupart du temps injoignables, ou, au mieux, nous demandent de ‘‘patienter encore et encore …’’ !» Les initiateurs de cette pétition préviennent : «Aujourd’hui, après quatre mois d’attente interminable, notre patience a atteint ses limites. Monsieur le Président, nous sommes des mères et pères loin de leurs enfants, des filles et fils loin de leurs parents, des frères et sœurs loin de leurs familles… Nous sommes des centaines d’Algériennes et Algériens, loin de leur chère patrie. Monsieur le Président, nous, Algérien(ne)s bloqué(e)s à l’étranger, appelons votre Excellence pour intervenir rapidement et instruire les services compétents afin de mettre fin à notre détresse.»
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