L'heure du pardon
par Natacha Czerwinski
Hommes politiques, Eglises, institutions n'hésitent plus à faire acte de contrition. Même la justice s'interroge sur une démarche qui pourrait compléter la sanction. Au risque de banaliser le repentir?
Au moment de le quitter, elle lui a serré la main, «naturellement». Cette même main qui, trente ans auparavant, avait glissé une cordelette autour du cou de son frère et l'avait comprimé jusqu'à l'asphyxie. Brigitte Sifaoui avait tant attendu, désiré et redouté cette rencontre avec Etienne Gallois, le meurtrier de son frère de 9 ans, agressé et abandonné dans un bois un soir d'avril 1972. «Pendant toutes ces années, j'ai vécu dans ma tête en trio: mon frère, l'assassin et moi.» Exténuée par cette sensation de se cogner aux murs, à 38 ans, elle décide d'entreprendre une psychothérapie aux allures d'enquête sur elle-même et sur sa famille, qu'elle raconte dans un récit passionnant: L'Homme qui a tué mon frère (Albin Michel).
«Bien avant ma thérapie, je me disais qu'il fallait pardonner à cet homme: c'était beau, noble et ça correspondait à mon idéal d'humanité, dit-elle. Mais il fallait d'abord que je mesure ma souffrance. Quand nos mains se sont séparées, en prison, le lien qui existait entre nous s'est rompu. J'ai pardonné.» La notion morale de pardon, celui qu'on donne et celui qu'on quémande, a longtemps été abandonnée aux religieux. Aujourd'hui, alors que l'on commémore la libération des camps nazis et que, par ailleurs, on consacre un secrétariat d'Etat au seul sort des victimes, le pardon fait irruption dans le discours politique et privé. Les gouvernements et les Eglises n'hésitent plus à faire acte de repentance spectaculaire. Et le monde judiciaire, de plus en plus imbibé de culture psy, s'interroge sur la nécessité d'apporter aux victimes d'autres réponses à leur douleur que la sanction judiciaire. Exemple: faut-il symboliquement juger les malades mentaux criminels - qui, lorsqu'ils sont irresponsables, échappent à tout procès - afin de permettre aux familles blessées de «faire leur deuil», de tourner la page, en clair de pardonner? Peut-on acquitter un homme qui a voulu tuer sa femme par désespoir et à qui celle-ci a pardonné?
lire suite http://livres.lexpress.fr/dossiers.a...4/idR=4/idG=8]
Ma question : le pardon va-t-il jusqu'à là ?
par Natacha Czerwinski
Hommes politiques, Eglises, institutions n'hésitent plus à faire acte de contrition. Même la justice s'interroge sur une démarche qui pourrait compléter la sanction. Au risque de banaliser le repentir?
Au moment de le quitter, elle lui a serré la main, «naturellement». Cette même main qui, trente ans auparavant, avait glissé une cordelette autour du cou de son frère et l'avait comprimé jusqu'à l'asphyxie. Brigitte Sifaoui avait tant attendu, désiré et redouté cette rencontre avec Etienne Gallois, le meurtrier de son frère de 9 ans, agressé et abandonné dans un bois un soir d'avril 1972. «Pendant toutes ces années, j'ai vécu dans ma tête en trio: mon frère, l'assassin et moi.» Exténuée par cette sensation de se cogner aux murs, à 38 ans, elle décide d'entreprendre une psychothérapie aux allures d'enquête sur elle-même et sur sa famille, qu'elle raconte dans un récit passionnant: L'Homme qui a tué mon frère (Albin Michel).
«Bien avant ma thérapie, je me disais qu'il fallait pardonner à cet homme: c'était beau, noble et ça correspondait à mon idéal d'humanité, dit-elle. Mais il fallait d'abord que je mesure ma souffrance. Quand nos mains se sont séparées, en prison, le lien qui existait entre nous s'est rompu. J'ai pardonné.» La notion morale de pardon, celui qu'on donne et celui qu'on quémande, a longtemps été abandonnée aux religieux. Aujourd'hui, alors que l'on commémore la libération des camps nazis et que, par ailleurs, on consacre un secrétariat d'Etat au seul sort des victimes, le pardon fait irruption dans le discours politique et privé. Les gouvernements et les Eglises n'hésitent plus à faire acte de repentance spectaculaire. Et le monde judiciaire, de plus en plus imbibé de culture psy, s'interroge sur la nécessité d'apporter aux victimes d'autres réponses à leur douleur que la sanction judiciaire. Exemple: faut-il symboliquement juger les malades mentaux criminels - qui, lorsqu'ils sont irresponsables, échappent à tout procès - afin de permettre aux familles blessées de «faire leur deuil», de tourner la page, en clair de pardonner? Peut-on acquitter un homme qui a voulu tuer sa femme par désespoir et à qui celle-ci a pardonné?
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Ma question : le pardon va-t-il jusqu'à là ?
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