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Même l'Association des ouléma a dû défendre la daridja

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  • Même l'Association des ouléma a dû défendre la daridja

    Cet appel du coeur, édité il y a 84 ans, témoigne de l'angoisse des lettrés de l'époque face à la détérioration de la langue maternelle...

    Dans une des publications de l'association de Ibn Badis, Al-Basa'ir (21 février 1936), un article en première page se fait remarquer par son titre: «Nous avons atteint un stade où nous craignons pour la darija!». Son auteur est un illustre expert en science coranique, de même qu'un Cheikh reconnu et respecté, Aboulabbas Ahmed Benalhachimi (originaire de Aïn Madhi). Cet appel du coeur, édité il y a 84 ans, témoigne de l'angoisse des lettrés de l'époque face à la détérioration de la langue maternelle par manque de vigilance de ses locuteurs, mais aussi parce que son enseignement avait été délaissé. Sachant que l'Association des ouléma est réputée pour ses positions en faveur exclusive de l'arabe classique, il paraîtrait étrange qu'elle permette une tribune pour la défense de la langue 3amiya. L'auteur tire cela au clair en ces termes: «Quant à la langue du peuple (al-lugha al-3âmiya), il semblerait qu'elle ne bénéficie pas des égards de l'Association et n'entre pas dans le cadre de ses travaux.»

    Lien entre langue fosha et le dialectal
    Cependant, celui qui étudie méthodiquement la question constate le lien complet et global qui unit la langue fosha et le dialectal. Partant du lien entre les deux langues, il explique les évolutions naturelles que vivent les langues: «Rien de nouveau ni d'étonnant, puisque nous avons montré que, dans l'histoire des langues, il est arrivé au latin la même chose qu'à l'arabe aujourd'hui.» En somme, le latin reste langue de la science pendant que les langues dites «latin vulgaire» sont devenues les langues de communication comme c'est le cas de l'italien, de l'espagnol ou du français. Pour l'auteur, donc, la notion de 3amiya est à rapprocher de sa signification profonde de «fédératrice», donc langue qui fédère et qui rapproche les locuteurs, tandis que la langue fosha reste une langue pour les sciences. Cette dualité linguistique avec une répartition claire des fonctions de communication sociale permet de souligner l'indispensable solidarité entre les deux langues. L'une ne peut exclure l'autre, en somme. Ce commentaire, l'auteur le pousse plus loin pour souligner la nécessité de la 3amiya pour la survie de la ûmma: «Comment nier alors que la langue dialectale est l'une des plus grandes manifestations de la vie de la ûmma, indispensable instrument commun pour l'intercompréhension entre les catégories courantes?». Ce commentaire pousse l'auteur à une autre audace en cela qu'il considère que les hommes de sciences auraient intérêt à s'enrichir de la langue 3amiya car, dit-il: «Ce serait le moyen le plus sûr et le plus profitable pour attirer la masse vers la science et préparer les esprits à accepter la preuve (al-hujja), d'autant qu'elle n'impose ni frais ni fatigue à ceux qui l'étudient.»

    Patrimoine linguistique
    «La richesse de la langue 3amiya constitue un atout central dans la plaidoirie en faveur de la daridja. En effet, très tôt, l'auteur dit avoir ressenti «ce que cache la langue dialectale (al-lugha al-darija) sous le couvercle de son caractère commun (3amiya-ti-ha)) comme abondante richesse linguistique». Ceci donne l'occasion de pointer un autre argument de taille, celui du patrimoine linguistique (al-usul al-lughawiya). C'est de l'émerveillement de la richesse du vocabulaire dans les différents parlers ruraux et citadins qu'il conclut que cela doit être préservé et transmis aux générations montantes. Cela le conduit à s'inquiéter de ces situations où la vie sociale est limitée à des clichés linguistiques (où on s'essaie à parler en fosha) alors que la vie abonde de sujets de tous ordres qui intéressent tout le monde. Mais les limites que l'on s'oblige dans l'usage de la langue fait que l'on s'abstient de parler. Ceci est regrettable à plus d'un titre d'autant plus que cela pousse les gens à des «mélanges de langues» dont le résultat n'est ni la leur, ni la langue des étrangers.

    Langue maternelle
    Conscient du rôle déterminant de la langue maternelle, il ajoute: «C'est ainsi que nous avons vu qu'outre l'hypocrite en islam (munafiq fîl-islam), il en existe un autre, l'hypocrite dans la parole (munafiq fî l-kalam).C'est ce qui m'a amené à faire appel à vous, les jeunes, pour que vous accordiez à la langue de vos ancêtres et de votre communauté (ûmma) une grande part de vos efforts et votre intérêt sincère.» Voilà des recommandations vieilles de plus de 80 ans que j'aimerais partager avec mes compatriotes contemporains pour que la nouvelle Constitution enregistre ce patrimoine et s'engage à le préserver et le développer. En fin de compte, si l'arabisation a été contre-productive, c'est parce qu'elle s'est opposée à la 3amiya au lieu de prendre appui sur elle. On nous l'a dit 26 ans avant l'Indépendance nationale. Aucune équipe au pouvoir n'a pris cela au sérieux et la planification linguistique a été confiée à des idéologues plutôt qu'à des hommes de sciences amoureux de leur algérianité en même temps que solidaires de la ûmma.

    lexpressiondz
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