La nouvelle République au prisme de la révision constitutionnelle
par Djamal Kharchi*
Ex Directeur Général de la Fonction Publique - Ecrivain. Docteur en sciences juridiques
lequotidien-oran.com
Une révision constitutionnelle n'est pas un acte politique banal, pourtant la pratique qui en a été faite, notamment sous l'ère Bouteflika, peut aisément démentir une telle assertion. La Constitution, loi fondamentale de la nation, se situe au sommet de la hiérarchie des normes. Sa primauté par rapport aux autres règles de droit lui donne une place spécifique dans l'ordre juridique national.
De par son contenu et sa portée, la constitution représente le « statut » de l'Etat et la structure du pouvoir politique. A ce titre, elle régit le fonctionnement des institutions et énonce les principes qui fondent l'exercice de leurs compétences. En tant que norme suprême de l'Etat, la constitution noue le pacte social, ce lien de confiance qui unit les gouvernants et les gouvernés. Les droits inhérents à la citoyenneté y trouvent leur ancrage et les valeurs identitaires leur enracinement.
Rétrospective des révisions constitutionnelles
Historiquement, notre pays a connu plusieurs constitutions depuis son accession à l'indépendance. La première d'entre elles, celle du 10 septembre 1963, est le fruit des travaux d'une Assemblée constituante, dépositaire des attributs de la souveraineté nationale dont les autorités coloniales lui en ont fait transfert conformément aux accords d'Evian. Après le coup d'Etat du 19 juin 1965, la constitution de 1963 est suspendue par le nouveau pouvoir qui s'attelle tout d'abord à poser les fondements d'un « Etat fort et solide », avant de faire adopter par voie référendaire la constitution du 22 novembre 1976. Suite aux émeutes d'octobre 1988 contre le régime de Parti unique, une nouvelle constitution est adoptée par référendum, le 23 février 1989. Celle-ci consacre le pluralisme politique et son corollaire le principe de l'alternance démocratique. En 23 février 1992, la proclamation de l'état d'urgence consécutive au cycle de violence dû à l'arrêt du processus électoral pour le renouvellement de l'Assemblée populaire nationale, donne lieu à la suspension de la constitution de 1989. Le 28 février 1996, une nouvelle constitution est approuvée par référendum populaire. Toujours en vigueur, celle-ci a été modifiée à trois reprises sous la présidence de Bouteflika, en 2002, 2008 et 2016.
Toutes les révisions constitutionnelles ont procédé par à-coup, en réaction à des situations particulières, sans vision globale et sans bénéfice d'inventaire à la lumière des problèmes de fond qui affectent la nation. Cette démarche fragmentaire, dépourvue d'anticipation, a permis à un régime pervers et décadent de se perpétuer envers et contre tout.
De 1962 à ce jour, l'Algérie aura connu 4 constitutions et trois révisions constitutionnelles. Si la constitution originelle de 1963 comportait au total 78 articles, l'actuelle en compte 178.Comparativement la constitution française du 4 octobre 1958 a fait l'objet de 24 réformes et révisions. Des 92 articles originaux, seuls 30 articles sont demeurés inchangés. Le texte constitutionnel compte actuellement 118 articles.
Comparaison n'est pas raison dit le proverbe. Le pouvoir politique en Algérie a fait de la constitution un simple paravent d'apparat. Mus par une obsession irrépressible du pouvoir, les dirigeants n'ont eu de cesse de piétiner le texte constitutionnel, d'en contourner les dispositions et de les dévoyer délibérément de leur objectif initial. A chaque réforme constitutionnelle, les référendums populaires organisés avec la solennité des hautes ambitions nationales, n'ont servi qu'à masquer le despotisme sournois de la classe politique.
La constitution n'est pas une fin en soi, mais un moyen pour consacrer la volonté du peuple. Depuis 1962, toutes les constitutions ont été remodelées à la guise des dirigeants et adoptées par des simulacres de référendums. De la mêmemanière que des élections à elles seules ne font pas forcément une démocratie, l'adoption d'une constitution par voie référendaire ne fait pas nécessairement un régime démocratique. L'expression libre de la volonté populaire a trop longtemps été mise à mal par excès autocratique, par omission coupable, par surdité à la voix du peuple, constitutionnellement déclaré « source de tout pouvoir ». Dés lors faut-il s'étonner d'un système de gouvernance aussi mal en point, aussi chaotique, malgré des réformes constitutionnelles censées poser les fondements d'un Etat qualifié de droit. Quel bilan tirer de l'ouverture démocratique consacrée par la constitution de 1989? A quel résultat a abouti la constitution de 1996 qui a renforcé les pouvoirs du juge par l'institution d'un Conseil d'Etat? Est-ce vraiment l'expression de la volonté du peuple que la révision constitutionnelledu 12 novembre 2008 qui a établi le principe d'un renouvellement illimité du mandat présidentiel?
L'instrumentalisation de la constitution par les dirigeants qui se sont succédé au pouvoir est si flagrante que le texte constitutionnel en est réduit à un simple symbole. Au lieu d'être un moyen de limitation du pouvoir, les gouvernants ont transformé la constitution en un instrument de pouvoir. Le constitutionalisme en Algérie a connu un mouvement de balancier entre avancées et reculs voire régressions. La constitution de 1989 a mis fin au régime de l'ordonnance afin d'encadrer les pouvoirs démesurés de l'Exécutif, alors que celle de 1996l'a restitué au Président de la république. Autre exemple tout aussi édifiant. La constitution de 1996 a limité à deux le nombre de mandats présidentiels cumulables, alors que la révision constitutionnelle de 2008 avait exclusivement pour objet la suppressionde cette règled'or destinée à donner corps au principe de l'alternance au pouvoir. Toutes les constitutions, au-delà des proclamations mirobolantes contenues dans leur préambule, ont tôt montré leurs limites et des insuffisances pas tout à fait fortuites. Par de telles pratiques, la constitution apparait moins comme une charte fondamentale où se cristallise la relation de confiance Etat-citoyen que comme un instrument au service d'une politique de maintien au pouvoir. C'est là toute la question de l'écart entre le texte constitutionnel et la pratique qui en est faite. L'échec des réformes constitutionnelles trouve là ses racines. Les dérives qui en sont la cause expliquent la désaffection manifeste du peuple à l'égard des réformes constitutionnelles, mais aussi et surtout sa réticence quant à l'exercice de ses droits politiques. L'abstention sous toutes ses formes en est la conséquence directe. Dans l'opinion publique, l'idée même de constitution prend uneconnotation peu flatteuse. Le préjudice est immense pour l'Etat qui perd en autorité autant qu'en crédibilité.
Un postulat de départ prometteur
Dans son discours d'investiture du 22 décembre 2019, le Président Abdelmadjid Tebboune a placé le citoyen au cœur du processus de refondation de l'Etat, un Etat largement discrédité auprès de populations excédées par les injustices sociales et abus en tout genre de l'ère Bouteflika. Le rétablissement de la confiance entre l'Etat et le citoyen est une exigence majeure du renouveau national. C'est dans ce cadre et dans cette perspective que s'est articulé l'essentiel du discours présidentiel d'investiture. La sincérité du ton, ni feinte ni forcée, a su donner une résonnance particulière à chacun de ses engagements solennels envers le peuple. Selon ses propres termes, le chef de l'Etat entend « procéder à une réforme en profondeur de la constitution en vue de favoriser l'émergence de nouveaux modes de gouvernance et mettre en place les fondements de l'Algérie nouvelle ».
Un processus de transition politique est en cours comme l'illustre la remise officielle des propositions formulées par le Comité d'experts désigné à cet effet. De par sa dimension politique, la réforme constitutionnelle projetée représente la phase décisive de restructuration de l'Etat dans la perspective de solutions nationales salvatrices.
La dynamique historique propre à chaque pays est inséparable de la dynamique sociale et politique qui en est le ressort et le moteur. Le Hirak, ce mouvement citoyen pacifique, est assimilable par l'ampleur de la mobilisation populaire qui s'en est suivie, à une puissante vague surgie des profondeurs de la société. Ses revendications portées par la voix de tout un peuple ont crée une opportunité historique de rupture politique que le Président de la république a vivement appuyé dans son discours d'investiture? La révision de la constitution, pierre angulaire dans le processus d'édification d'une nouvelle République, une république en adéquation avec les réalités contemporaines, renouvelée dans ses fondements et principes, est un de ses principaux engagements. Dans ce moment historique de transition de l'ancien régime à une nouvelle gouvernance,le Président a donné des gages de bonne volonté. Il s'est dit à l'écoute de tous les Algériens,réceptif aux ambitions légitimes du peuple et à sa vision de l'avenir de la nation. Un discours édifiant à plus d'un titre.
La réforme constitutionnelle entre interrogations et incertitudes
Toujours attendu mais encore imparfaitement réalisé, l'Etat de droit suscite une permanenterevendication sociale, d'où les interrogations et incertitudes que s'expriment ici et là quant à la teneur des propositions d'amendements de la constitution que la Comité d'experts a soumis au Président de la république. D'où aussi une certaine difficulté pour la société à appréhender le sens de la réforme et de se faire facilement à l'idée de l'abolition de pratiques qui depuis toujours ont constitué l'expression de l'action étatique. La conjugaison de vaines attentes et d'exigences irrésolues laisse planer une ombre de doute quant aux promesses de changement du système politique,desurcroît dans un sens radicalement différent de celui qui a prévalu pendant des décennies. Le mal est profond et la méfiance tenace.
Crise sociale et crise du pouvoir se conjuguent pour conférer à l'Etat une image fortement dégradée par suite d'évolutions contrariées et de ruptures de pure forme.Les frustrations accumulées et rendez-vous manqués permettent de prendre la mesure du décalage qui existe entre l'Etat et la société dans ses différentes composantes, sans omettre la césure induite par le désenchantement démocratique au sein du peuple dont la cause en revient à un jeu partisan complètement faussé, sciemment initié par les tenants du pouvoir.
C'est sur un fond d'interrogations et de questionnements que le projet de réforme constitutionnelle fait son chemin au sein de la société. Un état d'esprit somme toute compréhensible après plusieurs constitutions adoptées sans qu'elles aient eues un impact significatif sur les carences, dérapages, hérésies et incohérences qui ont marqué le mode de gouvernance des années durant. Les turpitudes et les ruses légendaires du pouvoir donnent bien des raisons de douter du bien-fondé du projet de révision constitutionnelle ainsi que du modèlede société qui en découle.Si un tel scepticisme perdure encore à divers degrés dans l'esprit des citoyens, ne serait-ce pas là une sorte de réflexe atavique né d'une longue, trop longue période d'incubation et d'accoutumance à une gouvernance des plus détestables ? Aujourd'hui les signes annonciateurs de grandes mutations sont bien perceptibles à travers un nouveau style de pouvoir et l'émergence d'une culture d'Etat apte à promouvoir un climat de confiance.
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par Djamal Kharchi*
Ex Directeur Général de la Fonction Publique - Ecrivain. Docteur en sciences juridiques
lequotidien-oran.com
Une révision constitutionnelle n'est pas un acte politique banal, pourtant la pratique qui en a été faite, notamment sous l'ère Bouteflika, peut aisément démentir une telle assertion. La Constitution, loi fondamentale de la nation, se situe au sommet de la hiérarchie des normes. Sa primauté par rapport aux autres règles de droit lui donne une place spécifique dans l'ordre juridique national.
De par son contenu et sa portée, la constitution représente le « statut » de l'Etat et la structure du pouvoir politique. A ce titre, elle régit le fonctionnement des institutions et énonce les principes qui fondent l'exercice de leurs compétences. En tant que norme suprême de l'Etat, la constitution noue le pacte social, ce lien de confiance qui unit les gouvernants et les gouvernés. Les droits inhérents à la citoyenneté y trouvent leur ancrage et les valeurs identitaires leur enracinement.
Rétrospective des révisions constitutionnelles
Historiquement, notre pays a connu plusieurs constitutions depuis son accession à l'indépendance. La première d'entre elles, celle du 10 septembre 1963, est le fruit des travaux d'une Assemblée constituante, dépositaire des attributs de la souveraineté nationale dont les autorités coloniales lui en ont fait transfert conformément aux accords d'Evian. Après le coup d'Etat du 19 juin 1965, la constitution de 1963 est suspendue par le nouveau pouvoir qui s'attelle tout d'abord à poser les fondements d'un « Etat fort et solide », avant de faire adopter par voie référendaire la constitution du 22 novembre 1976. Suite aux émeutes d'octobre 1988 contre le régime de Parti unique, une nouvelle constitution est adoptée par référendum, le 23 février 1989. Celle-ci consacre le pluralisme politique et son corollaire le principe de l'alternance démocratique. En 23 février 1992, la proclamation de l'état d'urgence consécutive au cycle de violence dû à l'arrêt du processus électoral pour le renouvellement de l'Assemblée populaire nationale, donne lieu à la suspension de la constitution de 1989. Le 28 février 1996, une nouvelle constitution est approuvée par référendum populaire. Toujours en vigueur, celle-ci a été modifiée à trois reprises sous la présidence de Bouteflika, en 2002, 2008 et 2016.
Toutes les révisions constitutionnelles ont procédé par à-coup, en réaction à des situations particulières, sans vision globale et sans bénéfice d'inventaire à la lumière des problèmes de fond qui affectent la nation. Cette démarche fragmentaire, dépourvue d'anticipation, a permis à un régime pervers et décadent de se perpétuer envers et contre tout.
De 1962 à ce jour, l'Algérie aura connu 4 constitutions et trois révisions constitutionnelles. Si la constitution originelle de 1963 comportait au total 78 articles, l'actuelle en compte 178.Comparativement la constitution française du 4 octobre 1958 a fait l'objet de 24 réformes et révisions. Des 92 articles originaux, seuls 30 articles sont demeurés inchangés. Le texte constitutionnel compte actuellement 118 articles.
Comparaison n'est pas raison dit le proverbe. Le pouvoir politique en Algérie a fait de la constitution un simple paravent d'apparat. Mus par une obsession irrépressible du pouvoir, les dirigeants n'ont eu de cesse de piétiner le texte constitutionnel, d'en contourner les dispositions et de les dévoyer délibérément de leur objectif initial. A chaque réforme constitutionnelle, les référendums populaires organisés avec la solennité des hautes ambitions nationales, n'ont servi qu'à masquer le despotisme sournois de la classe politique.
La constitution n'est pas une fin en soi, mais un moyen pour consacrer la volonté du peuple. Depuis 1962, toutes les constitutions ont été remodelées à la guise des dirigeants et adoptées par des simulacres de référendums. De la mêmemanière que des élections à elles seules ne font pas forcément une démocratie, l'adoption d'une constitution par voie référendaire ne fait pas nécessairement un régime démocratique. L'expression libre de la volonté populaire a trop longtemps été mise à mal par excès autocratique, par omission coupable, par surdité à la voix du peuple, constitutionnellement déclaré « source de tout pouvoir ». Dés lors faut-il s'étonner d'un système de gouvernance aussi mal en point, aussi chaotique, malgré des réformes constitutionnelles censées poser les fondements d'un Etat qualifié de droit. Quel bilan tirer de l'ouverture démocratique consacrée par la constitution de 1989? A quel résultat a abouti la constitution de 1996 qui a renforcé les pouvoirs du juge par l'institution d'un Conseil d'Etat? Est-ce vraiment l'expression de la volonté du peuple que la révision constitutionnelledu 12 novembre 2008 qui a établi le principe d'un renouvellement illimité du mandat présidentiel?
L'instrumentalisation de la constitution par les dirigeants qui se sont succédé au pouvoir est si flagrante que le texte constitutionnel en est réduit à un simple symbole. Au lieu d'être un moyen de limitation du pouvoir, les gouvernants ont transformé la constitution en un instrument de pouvoir. Le constitutionalisme en Algérie a connu un mouvement de balancier entre avancées et reculs voire régressions. La constitution de 1989 a mis fin au régime de l'ordonnance afin d'encadrer les pouvoirs démesurés de l'Exécutif, alors que celle de 1996l'a restitué au Président de la république. Autre exemple tout aussi édifiant. La constitution de 1996 a limité à deux le nombre de mandats présidentiels cumulables, alors que la révision constitutionnelle de 2008 avait exclusivement pour objet la suppressionde cette règled'or destinée à donner corps au principe de l'alternance au pouvoir. Toutes les constitutions, au-delà des proclamations mirobolantes contenues dans leur préambule, ont tôt montré leurs limites et des insuffisances pas tout à fait fortuites. Par de telles pratiques, la constitution apparait moins comme une charte fondamentale où se cristallise la relation de confiance Etat-citoyen que comme un instrument au service d'une politique de maintien au pouvoir. C'est là toute la question de l'écart entre le texte constitutionnel et la pratique qui en est faite. L'échec des réformes constitutionnelles trouve là ses racines. Les dérives qui en sont la cause expliquent la désaffection manifeste du peuple à l'égard des réformes constitutionnelles, mais aussi et surtout sa réticence quant à l'exercice de ses droits politiques. L'abstention sous toutes ses formes en est la conséquence directe. Dans l'opinion publique, l'idée même de constitution prend uneconnotation peu flatteuse. Le préjudice est immense pour l'Etat qui perd en autorité autant qu'en crédibilité.
Un postulat de départ prometteur
Dans son discours d'investiture du 22 décembre 2019, le Président Abdelmadjid Tebboune a placé le citoyen au cœur du processus de refondation de l'Etat, un Etat largement discrédité auprès de populations excédées par les injustices sociales et abus en tout genre de l'ère Bouteflika. Le rétablissement de la confiance entre l'Etat et le citoyen est une exigence majeure du renouveau national. C'est dans ce cadre et dans cette perspective que s'est articulé l'essentiel du discours présidentiel d'investiture. La sincérité du ton, ni feinte ni forcée, a su donner une résonnance particulière à chacun de ses engagements solennels envers le peuple. Selon ses propres termes, le chef de l'Etat entend « procéder à une réforme en profondeur de la constitution en vue de favoriser l'émergence de nouveaux modes de gouvernance et mettre en place les fondements de l'Algérie nouvelle ».
Un processus de transition politique est en cours comme l'illustre la remise officielle des propositions formulées par le Comité d'experts désigné à cet effet. De par sa dimension politique, la réforme constitutionnelle projetée représente la phase décisive de restructuration de l'Etat dans la perspective de solutions nationales salvatrices.
La dynamique historique propre à chaque pays est inséparable de la dynamique sociale et politique qui en est le ressort et le moteur. Le Hirak, ce mouvement citoyen pacifique, est assimilable par l'ampleur de la mobilisation populaire qui s'en est suivie, à une puissante vague surgie des profondeurs de la société. Ses revendications portées par la voix de tout un peuple ont crée une opportunité historique de rupture politique que le Président de la république a vivement appuyé dans son discours d'investiture? La révision de la constitution, pierre angulaire dans le processus d'édification d'une nouvelle République, une république en adéquation avec les réalités contemporaines, renouvelée dans ses fondements et principes, est un de ses principaux engagements. Dans ce moment historique de transition de l'ancien régime à une nouvelle gouvernance,le Président a donné des gages de bonne volonté. Il s'est dit à l'écoute de tous les Algériens,réceptif aux ambitions légitimes du peuple et à sa vision de l'avenir de la nation. Un discours édifiant à plus d'un titre.
La réforme constitutionnelle entre interrogations et incertitudes
Toujours attendu mais encore imparfaitement réalisé, l'Etat de droit suscite une permanenterevendication sociale, d'où les interrogations et incertitudes que s'expriment ici et là quant à la teneur des propositions d'amendements de la constitution que la Comité d'experts a soumis au Président de la république. D'où aussi une certaine difficulté pour la société à appréhender le sens de la réforme et de se faire facilement à l'idée de l'abolition de pratiques qui depuis toujours ont constitué l'expression de l'action étatique. La conjugaison de vaines attentes et d'exigences irrésolues laisse planer une ombre de doute quant aux promesses de changement du système politique,desurcroît dans un sens radicalement différent de celui qui a prévalu pendant des décennies. Le mal est profond et la méfiance tenace.
Crise sociale et crise du pouvoir se conjuguent pour conférer à l'Etat une image fortement dégradée par suite d'évolutions contrariées et de ruptures de pure forme.Les frustrations accumulées et rendez-vous manqués permettent de prendre la mesure du décalage qui existe entre l'Etat et la société dans ses différentes composantes, sans omettre la césure induite par le désenchantement démocratique au sein du peuple dont la cause en revient à un jeu partisan complètement faussé, sciemment initié par les tenants du pouvoir.
C'est sur un fond d'interrogations et de questionnements que le projet de réforme constitutionnelle fait son chemin au sein de la société. Un état d'esprit somme toute compréhensible après plusieurs constitutions adoptées sans qu'elles aient eues un impact significatif sur les carences, dérapages, hérésies et incohérences qui ont marqué le mode de gouvernance des années durant. Les turpitudes et les ruses légendaires du pouvoir donnent bien des raisons de douter du bien-fondé du projet de révision constitutionnelle ainsi que du modèlede société qui en découle.Si un tel scepticisme perdure encore à divers degrés dans l'esprit des citoyens, ne serait-ce pas là une sorte de réflexe atavique né d'une longue, trop longue période d'incubation et d'accoutumance à une gouvernance des plus détestables ? Aujourd'hui les signes annonciateurs de grandes mutations sont bien perceptibles à travers un nouveau style de pouvoir et l'émergence d'une culture d'Etat apte à promouvoir un climat de confiance.
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