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L’omerta honteuse d’une société hypocrite

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  • L’omerta honteuse d’une société hypocrite

    Bienheureux encore qu’il existe la médecine légale, sinon il relèverait de la gageure d’établir la réalité de phénomène des violences faites aux enfants dans le pays ou du moins à Constantine. Pis, quand l’un des plus importants spécialistes de médecine pédiatrique, avant de condescendre à nous rencontrer, affirme au téléphone que c’est un sujet tabou, donc difficile à aborder, il n’y a plus qu’à emprunter le chemin le plus court pour constater qu’il y a quelque chose de pourri au royaume d’Algérie.

    Passe encore que parler de pédophilie serait, selon les bouches et oreilles chastes de nos compatriotes, de la pure hérésie, il n’en demeure malheureusement pas moins que la maltraitance des enfants est là, est bien là.Cette omerta consensuelle rend obligatoirement, en raison de l’hypocrisie ambiante, aléatoire toute velléité d’investigation autour du sujet, lequel horripile, comble du paradoxe, auteurs, victimes et tous intermédiaires confondus. La politique de l’autruche dans ce cas de figure est une aubaine pour tout le monde. C’est dans cet ordre d’idées que, si le directeur de l’action sociale ne pousse pas un «ouf !» de soulagement officiel parce que son «administration ne serait en rien concernée par la maltraitance des enfants», il n’en donne pas moins l’impression d’un sentiment de satisfaction mal dissimulé d’être «débarrassé» d’un dossier de plus qui pourrait être encombrant. A. B., le DAS, extrêmement obligeant, toutefois tiendra à souligner qu’«en général, cela se passe du côté de la médecine légale et des services de police. En ce qui concerne notre institution, il s’agit plutôt de parler de sauvegarde de l’intégrité d’un mineur…exposé à un danger moral».

    Nous avons compris, par conséquent, que faire subir des violences à un enfant n’entame en rien l’aspect moral…de la société chargée de le prémunir contre toute tentative de délit, sinon en raison de son appartenance à une famille en difficulté

    .Espérer obtenir des informations… des vraies, chiffres et statistiques, à titre d’exemple, équivaudrait à parler du sexe des anges.

    Quoique M. Kabouche Azziz, président de l’association des psychologues, rencontré à l’occasion d’une journée sur les risques professionnels, nous dise que «6 à 7 cas sont recensés mensuellement par notre association. Heureusement que les enfants commencent à parler de leurs problèmes ou des problèmes qui laminent la famille à laquelle ils appartiennent». Sur cet aspect du problème, en l’occurrence l’influence du milieu social sur la situation d’un enfant donné, les avis divergent entre deux spécialistes que nous avons rencontrés.

    Pour notre premier interlocuteur, «il n’est pas forcément établi qu’un enfant, issu d’un milieu social défavorisé, soit plus exposé à des violences parentales qu’un autre venu d’un milieu aisé». A contrario, pour Mme F. Bencheikh Lefgoun, Dr d’Etat en sociologie «un enfant brutalisé, victime de violences physiques ou sexuelles, appartient à un milieu familial vulnérable. En fait, je dirai même que cela coule de source, sachant que tous les problèmes et toutes les difficultés auxquels font face les parents se traduisent, sans pour autant qu’il y ait généralisation, par un défoulement parfois moral [insultes], parfois physique [coups et blessures] et là, également, ne sont épargnés ni les filles ni les garçons, malgré l’absence de données précises dues à une amnésie voulue et entretenue par les éléments d’une société recluse sur elle-même. C’est ce qui constitue pour les sociologues une véritable problématique et le fait d’essayer d’aborder le phénomène relève tout simplement de la véritable appréhension et ce, malgré la disponibilité de textes universels de protection de l’enfant […l’enfant a le droit à une protection spéciale qui lui garantit le droit d’être protégé contre les mauvais traitements subis au sein de sa famille, l’exploitation et violences sexuelles, les pratiques traditionnelles préjudiciables à sa santé] auxquels notre pays a adhéré… sans toutefois les appliquer parce qu’otage de lois nationales non adaptées. La seule loi qui prévaut est ce droit régalien qu’a le père sur son enfant et qui l’autorise d’autorité à user et abuser de cette ascendance même pour justifier des comportements extrêmes».

    Pourquoi les enfants sont-ils victimes de violence ?

    «Un enfant violenté par ses parents l’est généralement en raison d’une enfance difficile de ces mêmes parents», soulignera la sociologue. Ainsi, tout enfant qui n’est pas sérieusement pris en charge, une fois sa détresse connue, risque de refouler la terreur vécue pour la reproduire a posteriori. Nos deux interlocuteurs ont une appréciation unanime : «l’enfant battu l’est par des parents dont la propre enfance a été confisquée par leurs parents». Evacuant du revers de la main tout pessimisme, Azziz Kabouche dira que «par expérience, nous sommes arrivés à travers une thérapie précise et spécifique à reconstruire l’enfant, lui redonner des espérances et la joie de vivre une vie dans la sérénité et en même temps récupérer le ou les parents auteurs des violences. La tâche est dure mais il est nécessaire de l’accomplir en ce sens que c’est de la cellule familiale, première organisation sociale que dépend toute la société».

    Par La Tribune
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