En Algérie, il n'est parlé l'arabe mais un dialecte. Aussi ne faudrait-il pas abolir cet avatar (arabe non littéraire) et ne conserver que l'amazight?
- Le statut de la langue dans la révision constitutionnelle alimente les critiques du camp islamiste.
Le statut de langue nationale et officielle pour le tamazight – dont l’Algérie compte plusieurs millions de locuteurs – proposé dans le projet de nouvelle Constitution algérienne, soumis à un referendum populaire le 1er novembre 2020, fédère contre lui les partis islamistes algériens. Le projet de révision constitutionnelle, l’un des principaux chantiers de début de mandat d’Abdelmajid Tebboune, a été validé le 10 septembre à l’Assemblée nationale.
L’article 4 du nouveau texte stipule que le tamazight reste langue nationale et officielle, statut dont elle jouit déjà dans la constitution adoptée sous le régime de Bouteflika en 2016. Mais, et c’est là que le bât blesse, cette disposition est rendue désormais intangible par l’article 223, qui protège donc ce statut contre tout amendement futur.
Boycott:
Le Mouvement pour la société et la paix (MSP), le parti islamiste que dirige Abderrazak Makri et qui compte 33 députés, a ainsi boycotté la séance consacrée à l’adoption de la révision constitutionnelle. Makri, l’un des chefs de file de la fronde contre cette nouvelle disposition sanctuarisant le statut de la langue berbère, appelle ainsi à reconnaître le tamazight « dans son cadre arabo-islamique », en définissant d’abord les caractères de sa transcription.
"LE COURANT ISLAMISTE ALGÉRIEN S’EST TOUJOURS OPPOSÉ À LA TRANSCRIPTION DU BERBÈRE EN CARACTÈRES LATINS"
Le courant islamiste algérien s’est toujours opposé à la transcription du berbère en caractères latins, comme cela se fait pourtant couramment, et estime qu’il convient plutôt d’utiliser les caractères arabes.
Le Front de la Justice et du Développement (FJD) n’est pas en reste dans la polémique. Pour son patron Abdellah Djaballah, la question est si sensible qu’il juge la place renforcée accordée au tamazight comme un « danger pour la langue arabe et l’islam » et une « atteinte aux constantes de la nation ».
Pour ce leader historique de la mouvance islamiste algérienne, le paragraphe sur l’identité « arabe et numide » du territoire de l’Algérie ne passe pas. La référence à la Numidie du roi Massinissa, héros « national » pré-islamique, cadre mal avec sa perception d’une Algérie exclusivement arabo-islamique.
Le parti El Binna de Abdelkader Bengrina, arrivé en troisième position lors de la présidentielle de décembre 2019, a adopté une position moins radicale, et appelle à voter en faveur du projet de révision constitutionnelle. Mais bloque, lui aussi, sur le maintien de l’article 4, renforcé qui plus est par l’article 223, qui semble accorder un statut similaire à l’arabe et au tamazight. « L’Algérie et la nation algérienne sont une et unies avec son histoire, son destin, ses frontières, son drapeau, sa religion et sa langue, la langue du Coran », estime-t-il.
Bombes à retardement:
L’Association des Oulémas Musulmans, pourtant réputée proche du pouvoir, a aussi donné de la voix contre l’article 4, et plus généralement les dispositions qui abordent les questions de « l’identité nationale, la place de l’islam, la liberté de culte, l’unité nationale et la question de la langue ». L’Association juge ces amendements comme autant de « bombes à retardement menaçant l’identité nationale et la place de l’islam ». Pour résumer sa position, l’Association regrette que l’islam n’a pas été considéré « comme une source de législation ».
La montée au créneau des islamistes sur la question berbère s’inscrit dans la suite du Hirak, lors duquel l’ancien chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah, disparu en décembre 2019, avait lancé une véritable chasse contre les porteurs du drapeau berbère lors des manifestations du vendredi. Des dizaines de porteurs du drapeau amazigh ont été arrêtés par les services de sécurité et condamnés à des peines de prison après l’essoufflement du mouvement.
Ahmed Gaïd Salah avait ainsi semblé encourager les attaques de plus en plus décomplexées dont fait l’objet l’identité amazighe. Un courant idéologique, ouvertement anti-amazigh, s’est même formé, qui se désigne sous le nom de « Badissia-Novembria », en référence au penseur Abdelhamid Ben Badis (1889-1940), lequel avait érigé l’arabité et la fidélité à l’islam en piliers de l’identité algérienne.
La cause de la langue, de l’identité et de la culture berbères a fait de considérables avancées depuis l’ouverture démocratique de 1988 : ouverture de départements de langue et culture amazighes à l’université, enseignement de la langue dans les trois cycles scolaires, institution d’un Haut commissariat à l’amazighité, lancement de médias en langue amazighe puis reconnaissance officielle de la dimension amazighe dans la constitution de 2016 et octroi du statut de langue nationale et officielle.
Jeune Afrique
- Le statut de la langue dans la révision constitutionnelle alimente les critiques du camp islamiste.
Le statut de langue nationale et officielle pour le tamazight – dont l’Algérie compte plusieurs millions de locuteurs – proposé dans le projet de nouvelle Constitution algérienne, soumis à un referendum populaire le 1er novembre 2020, fédère contre lui les partis islamistes algériens. Le projet de révision constitutionnelle, l’un des principaux chantiers de début de mandat d’Abdelmajid Tebboune, a été validé le 10 septembre à l’Assemblée nationale.
L’article 4 du nouveau texte stipule que le tamazight reste langue nationale et officielle, statut dont elle jouit déjà dans la constitution adoptée sous le régime de Bouteflika en 2016. Mais, et c’est là que le bât blesse, cette disposition est rendue désormais intangible par l’article 223, qui protège donc ce statut contre tout amendement futur.
Boycott:
Le Mouvement pour la société et la paix (MSP), le parti islamiste que dirige Abderrazak Makri et qui compte 33 députés, a ainsi boycotté la séance consacrée à l’adoption de la révision constitutionnelle. Makri, l’un des chefs de file de la fronde contre cette nouvelle disposition sanctuarisant le statut de la langue berbère, appelle ainsi à reconnaître le tamazight « dans son cadre arabo-islamique », en définissant d’abord les caractères de sa transcription.
"LE COURANT ISLAMISTE ALGÉRIEN S’EST TOUJOURS OPPOSÉ À LA TRANSCRIPTION DU BERBÈRE EN CARACTÈRES LATINS"
Le courant islamiste algérien s’est toujours opposé à la transcription du berbère en caractères latins, comme cela se fait pourtant couramment, et estime qu’il convient plutôt d’utiliser les caractères arabes.
Le Front de la Justice et du Développement (FJD) n’est pas en reste dans la polémique. Pour son patron Abdellah Djaballah, la question est si sensible qu’il juge la place renforcée accordée au tamazight comme un « danger pour la langue arabe et l’islam » et une « atteinte aux constantes de la nation ».
Pour ce leader historique de la mouvance islamiste algérienne, le paragraphe sur l’identité « arabe et numide » du territoire de l’Algérie ne passe pas. La référence à la Numidie du roi Massinissa, héros « national » pré-islamique, cadre mal avec sa perception d’une Algérie exclusivement arabo-islamique.
Le parti El Binna de Abdelkader Bengrina, arrivé en troisième position lors de la présidentielle de décembre 2019, a adopté une position moins radicale, et appelle à voter en faveur du projet de révision constitutionnelle. Mais bloque, lui aussi, sur le maintien de l’article 4, renforcé qui plus est par l’article 223, qui semble accorder un statut similaire à l’arabe et au tamazight. « L’Algérie et la nation algérienne sont une et unies avec son histoire, son destin, ses frontières, son drapeau, sa religion et sa langue, la langue du Coran », estime-t-il.
Bombes à retardement:
L’Association des Oulémas Musulmans, pourtant réputée proche du pouvoir, a aussi donné de la voix contre l’article 4, et plus généralement les dispositions qui abordent les questions de « l’identité nationale, la place de l’islam, la liberté de culte, l’unité nationale et la question de la langue ». L’Association juge ces amendements comme autant de « bombes à retardement menaçant l’identité nationale et la place de l’islam ». Pour résumer sa position, l’Association regrette que l’islam n’a pas été considéré « comme une source de législation ».
La montée au créneau des islamistes sur la question berbère s’inscrit dans la suite du Hirak, lors duquel l’ancien chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah, disparu en décembre 2019, avait lancé une véritable chasse contre les porteurs du drapeau berbère lors des manifestations du vendredi. Des dizaines de porteurs du drapeau amazigh ont été arrêtés par les services de sécurité et condamnés à des peines de prison après l’essoufflement du mouvement.
Ahmed Gaïd Salah avait ainsi semblé encourager les attaques de plus en plus décomplexées dont fait l’objet l’identité amazighe. Un courant idéologique, ouvertement anti-amazigh, s’est même formé, qui se désigne sous le nom de « Badissia-Novembria », en référence au penseur Abdelhamid Ben Badis (1889-1940), lequel avait érigé l’arabité et la fidélité à l’islam en piliers de l’identité algérienne.
La cause de la langue, de l’identité et de la culture berbères a fait de considérables avancées depuis l’ouverture démocratique de 1988 : ouverture de départements de langue et culture amazighes à l’université, enseignement de la langue dans les trois cycles scolaires, institution d’un Haut commissariat à l’amazighité, lancement de médias en langue amazighe puis reconnaissance officielle de la dimension amazighe dans la constitution de 2016 et octroi du statut de langue nationale et officielle.
Jeune Afrique
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