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Jadis à Oran...

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  • Jadis à Oran...

    La bicyclette, un enfant du Quartier Plateau Saint Michel à Oran :

    Je lisais, tranquillement, " Tintin au Tibet ", assis à même le sol en lorgnant de temps en temps sur ce qui se passait autour de moi.

    J'avais toujours l’impression que quand je n’étais pas à un endroit de la maison ou du quartier il s’y passait, obligatoirement quelque chose d’extraordinaire.

    Aussi, quand je lisais mes bandes dessinées, ou quand je rêvassais quelque part, j’avais toujours l’ouïe bien orientée et le regard mobile autour de moi.

    Souvent, je me levais, rapide, mettais ce que je lisais sous mes bretelles et courais vite vers ce que je croyais être une bagarre de quartier ou des invités dans nos escaliers.

    Ce jour là, la maison était passablement, silencieuse.

    Ma mère contrairement à son habitude ne portait pas son tablier de cuisine.

    Elle s’affairait, dans la chambre à coucher.

    je sentis, même, le parfum du vaporisateur à poire en caoutchouc et vit, sur la commode -coiffeuse, le flacon de poudre de riz …signe que ma mère sortait et qu’elle allait à la rue d’Arzew ….

    Quand elle allait à M'dina Jdida ou au marché Michelet, elle se drapait juste de son haïk sans, souvent, enlever son tablier de cuisine.

    J’ai continué, ma lecture de " Tintin au Tibet ", tout en étant plus vigilant sur les va-et- vient de ma mère dans le couloir.

    « Djamel ! lève toi, tu viens avec moi au marché ?…. ».

    « Quel marché ? » Dis-je intrigué.

    « Ici…. » ‘ Ici ‘Englobait le Plateau ou la rue Claude Bernard, ou Bd Hyppolite Giraud, ou une de nos voisines…..pourquoi a-t-elle donc sorti son haïk à rayures dorées ?

    Pourquoi a-t-elle mis du parfum ?

    Pourquoi s’est elle saupoudré de ‘ boudouri et de hoummayr ’ (poudre de riz et fard à joues) ?

    Pourquoi a-t-elle orné ses ongles de
    ‘ rozozo ’(rouges aux ongles) ?

    Toutes ces senteurs et couleurs qui faisaient de ma mère un centre d’intérêt pour les commerçants et même les commerçantes et rendaient mon père bougon et suspicieux…..

    Moi je me contentais de tenir un de ses pans de Haïk très fort et de regarder avec un œil noir les commerçants qui lui souriaient aimablement sans réussir à leur faire peur.

    Nous quittâmes la maison, sous le regard attendri de ma sœur, qui me souriait de manière étrange, mais très affectueuse.

    Cela me rassura ….personne ne m’emmenait chez Dr Nekkache pour une piqure
    « de rappel »…

    J’essayais de marcher à la cadence des pas de ma mère.

    Elle a toujours marché vite.

    Elle était plus grande que mon père, qui dans ses moments de colère l’appelait ‘ balarej ’
    (la cigogne).

    C’était la malédiction de ma mère qui se trouvait haut perchée par rapport aux autres femmes d’Oran.

    Toutefois cela ne semblait pas déplaire à Abdallah l’épicier, et Abbes le maquignon qui lui parlaient longuement de leurs malheurs avec leurs épouses et disaient que mon père avait de la chance d’avoir une femme aussi
    ‘ capab i digourdi ’ (capable et dégourdie).

    J’essayais, donc, de marcher à la cadence des pas de ma mère en m’accrochant à son Haïk.

    Nous avions dépassé, Place Hyppolite Giraud, après avoir commandé une livre de mouton, chez Abbes, que l’on allait récupérer au retour.

    Une livre de mouton !

    Et mon père qui était absent….il allait se passer, donc, quelque chose, à la maison ce jour là !

    Je me suis aventuré timidement :

    « Mma (Maman)….on le fait avec de la ‘ loubia grini ’ (haricots blancs grainés) ? »

    C’était mon plat national à moi…pour de la
    ‘ loubia grini ’ je pouvais « donner » mon grand frère pour des bêtises qu’il n’avait jamais commises.

    Alors avec de la viande de mouton….il me tardait d’être au déjeuner.

    « Pourvu que ça ne soit pas en l’honneur de Khalti r’kia, grosse matrone, femme de l’associé de mon père.

    Une famille de mangeurs de loubia ! leurs enfants aussi, tous très gros…. »…

    Mais je fus vite rassuré.

    La maison n’était ni rangée, ni le sol balayé ou passé à la serpillière …donc pas d’invités !

    Ma mère amorça la descente de la rue Marceau.

    J’en conclus qu’elle allait aux ‘ Galeries ’ s’acheter des ‘ soutiens ’.

    Elle allait me demander de rester sur le trottoir devant la vitrine de Perez sans bouger.

    Un calvaire.

    Je trottinais derrière elle.

    Son pas équivalait à trois des miens ….

    Au moment où j’allais agripper enfin son Haïk, elle s’arrêta net devant chez CADENE CYCLES et attendit en se couvrant le visage, Sylvestre Cadène, en blouse grise, sortit du magasin et dit « entrez Madame Ben cheikh je vous attendais ».

    Il se dirigea vers une bicyclette non suspendue et dit :

    « Votre époux a commandé ce modèle en rouge grenat, j’y ai rajouté une selle molletonnée, au lieu du modèle standard, des gardes boues avant et arrière, un delco Manufrance et une autre sonnette à droite du guidon, c’est pour le petiot ? »

    Ma mère dit que oui…tout s’embrouilla, subitement, dans ma tête.

    j’avais souvent rêvé de plus de pignols, plus de
    ’ tue la toux ’, plus de ‘ Globos ’, plus de calentica, plus de créponné, plus de gazouzas, mais une bicyclette cela ne m’avait jamais effleuré l’esprit, c’était au dessus de mes méditations de gamin ….j’ai alors éclaté en pleurs en disant que ‘ je voulais entrer chez moi ’ !

    Je fus vite calmé, on m’expliqua que c’était pour mon passage en CM1 que le déjeuner amélioré au mouton, était pour fêter cela car mon père y tenait beaucoup et qu’il avait parlé au téléphone hier à son magasin ….

    Je fus le premier à avoir eu une bicyclette neuve dans le quartier…je refis le tri de mes amis….et suis devenu un héros…j’ai alors aimé ma mère beaucoup plus…

    - Auteur, Djamal Eddine, ORAN de jadis.a Montréal
    عيناك نهر من جنون... عيناك أرض لا تخون

  • #2
    Wech ya sahbi che , rak twahecht elplato ?

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    • #3
      Saha wahrani, ki dayra sahbi

      Elplato, c la ou il Y'a la caserne militaire ?
      عيناك نهر من جنون... عيناك أرض لا تخون

      Commentaire


      • #4
        Non il n'y a pas de caserne au plateau st Michel .

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