Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Le "Soldat de bronze" suscite des tensions entre la Russie et l'Estonie

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Le "Soldat de bronze" suscite des tensions entre la Russie et l'Estonie

    Le "Soldat de bronze", qui cristallisait depuis plusieurs mois les tensions entre Moscou et Talinn, a été déplacé du centre-ville, ce qui a provoqué de violents affrontements entre manifestants russes et forces de l'ordre. Les presses estonienne et russe réagissent à vif, alors que se profile une crise diplomatique aiguë entre la Russie et le petit Etat balte.

    Comptes-rendus des événements de la nuit, galeries de photos, déclarations d'officiels, revues de presse russes… Depuis l'aurore, vendredi 27 avril, le principal quotidien estonien Postimees couvre en temps réel sur son site les conséquences des violences ayant accompagné le déplacement du "Soldat de bronze", la statue du soldat de l'Armée rouge s'élevant en plein cœur de Talinn, ce qui a provoqué la colère de Moscou.

    Ce déplacement, qui s'est opéré à la faveur de la nuit, s'est effectivement accompagné de violents affrontements entre manifestants d'origine russe et forces de l'ordre, une bataille rangée, émaillée de pillages, qui s'est soldée par la mort d'une personne. Trois cents autres ont été interpellées, et de nombreux policiers blessés, parfois grièvement, relate Postimees. A la mi-journée, la ville était néanmoins redevenue calme ; deux cents personnes sont toujours en détention, et au moins trois enquêtes criminelles, dont une pour meurtre, ont été ouvertes par les autorités judiciaires sur les événements de la veille. La victime, que Postimees identifie uniquement par son prénom (russe), Dimitri, est décédée après avoir reçu un coup de couteau.

    Postimees a également publié presque en temps réel sur son site (l'Estonie est l'un des pays les plus connectés d'Europe) les interventions de responsables de la police, mais aussi du Premier ministre et du président du pays, Thomas Hendrik Ilves. Ce dernier a appelé la population à la "raison", alors que le chef du gouvernement, répondant aux questions d'un journaliste du site, s'est dit "surpris et déçu" que les événements aient pris une telle tournure. "Je ne pouvais imaginer que dans notre pays, nordique et de bon sens, de tels événements puissent se produire." "Dommage qu'au XXIe siècle une statue puisse encore être la cause d'effusions de sang", renchérit le journal dans un commentaire.

    Jeudi, tôt dans la matinée, des travaux d'excavation avaient débuté au pied du monument. Les fouilles menées devaient permettre d'identifier les personnes enterrées, probablement 14, au pied du Soldat. Un millier de jeunes gens, souvent ivres, selon la police, se sont réunis jeudi en fin de journée aux alentours du monument. Les heurts ont éclaté dans la nuit. La foule une fois dispersée, des actes de vandalisme ont été commis ailleurs dans la ville. Le gouvernement, en réunion de crise, a alors pris la décision de déplacer le monument dans un endroit tenu secret.

    Le "Soldat de bronze" est un monument controversé ; il cristallisait depuis plusieurs mois les tensions entre Moscou et le petit Etat balte. Cette statue symbolise pour les Russes la libération et la victoire sur les forces nazies à la fin de la Seconde Guerre mondiale ; pour les Estoniens de souche, elle marque le début de cinquante années d'occupation soviétique.

    Ainsi, dans son récit des événements, la Komsomolskaïa Pravda de Moscou adopte un ton patriotique pour dénoncer "l'attaque des autorités estoniennes". Le tabloïd se montre belliqueux. "Il est clair que la débauche d'hier ne restera pas pour la république d'Estonie sans conséquences économiques et diplomatiques, mais aussi, bien sûr, interethniques. Car l'Estonie a cette nuit modelé de ses propres mains un ennemi intérieur", menace le quotidien en référence à l'importante minorité russophone, forte de 300 000 personnes sur 1,3 million d'habitants. Ce scénario est peu probable, d'après Kommersant, qui souligne que, lors des dernières élections parlementaires, les Russophones ont préféré massivement le parti centriste du maire de Tallin au parti constitutionnel prorusse (1 % des suffrages), qui avait axé sa campagne sur la défense de la statue de bronze.

    A Moscou, les réactions politiques ont été néanmoins particulièrement virulentes. Pour le chef du Conseil de sécurité russe, Sergueï Ivanov, "la Russie doit accélérer la création de ports russes sur la Baltique afin de garder la main sur nos échanges sans permettre à d'autres Etats, et notamment à l'Estonie, de s'enrichir par le transit", rapporte la Komsomolskaïa. Le ministère des Affaires étrangères russe a menacé Tallin de "réaction concrète" et le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a parlé de "sacrilège", note Gazeta. De son côté, le Conseil de la Fédération, la Chambre haute du parlement russe, a voté vendredi un texte demandant la rupture des relations diplomatiques avec l'Estonie.

    Par A.L. (avec M. Vitureau et Ph. Randrianarimanana), Le Courrier internationale
Chargement...
X