Le Monde tourne le dos à l’Algérie qui n’a jamais été aussi isolée sur la scène internationale
ALGERIEPART PLUS
11 DECEMBER 2020
Une posture dangereuse et totalement inédite dans l’histoire de l’Algérie. Depuis l’arrivée d’Abdelmadjid Tebboune à la tête de l’Etat algérien le 12 décembre 2019, et depuis la chute du régime Bouteflika en avril 2019, l’Algérie enchaîne les désillusions diplomatiques et recule dangereusement sur la scène internationale. Perdant son influence dans la région du Sahel et du Maghreb, l’Algérie s’est transformée en un “petit nain” que de nombreux pays à travers le monde narguent faute d’un véritable soft power et d’un pouvoir fort qui peut protéger les intérêts nationaux face aux aléas internationaux.
C’est un constater très amer et qui fait très mal au coeur : l’Algérie n’a jamais été aussi isolée et esseulée sur la scène internationale. Le Monde nous tourne le dos. Le coup d’éclat de l’alliance officiellement scellée par le Maroc avec Israël en contrepartie de la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental sans oublier tous les privilèges de la coopération économique et financière qui profitera au Maroc en 2021 est plus qu’une défaite pour l’Algérie. C’est une véritable humiliation.
C’est, d’abord, l’effondrement d’une cause diplomatique, celle du Sahara Occidental, une cause noble que la diplomatie algérienne avait réussi à élever au firmament des luttes internationales au cours des années 70 et 80. Cette cause a perdu totalement sa crédibilité à cause des errances du régime algérien et de son entêtement à refuser d’adopter le pragmatisme dans sa guerre froide contre l’Algérie. Travaillant encore avec un logiciel dépassé, archaïque et parlant avec un langage figé aux années 70 et 80, l’Algérie a été dépassée par les mutations de la Realpolitik. Le monde a changé, mais l’Algérie est restée toujours figée et ankylosée. La liberté des peuples est, certes, une cause noble, mais le combat diplomatique et les guerres de l’information ont totalement changé. Or, le régime algérien ne s’est pas adapté à la modernité.
Le résultat des courses est un effondrement progressif de la question du Sahara Occidental. En 1990, 79 pays reconnaissaient l’Indépendance du Sahara Occidental. En 2020, ils sont à peine 30 à croire encore à la nécessité de l’existence d’un pays dont personne ne peut garantir sa fiabilité et sa sécurité dans un monde troublant et gangrené par les foyers de tensions.
Mais l’accord du Maroc avec les Etats-Unis et Israël ne porte pas seulement un coup fatal à l’Algérie sur la question Sahraouie. Il permet, surtout, d’isoler dangereusement l’Algérie et la pousse à s’enfermer dans ses derniers retranchements car cet accord est, en réalité, la mise en place d’une alliance internationale qui va d’Abu Dhabi jusqu’à Rabat. Une nouvelle alliance qui vise à contrer les avancées Turque et Russe dans la région notamment en Libye. Une alliance qui se veut une préparation à une future guerre contre l’ennemi Iranien. Dans ce jeu d’alliances, l’Algérie s’est placée dans une position très délicate à cause de l’aveuglement diplomatique d’Abdelmadjid Tebboune, un président faible et inexpérimenté qui a conduit l’Algérie dans les bras de la Turquie d’Erdogan provoquant ainsi une guerre froide avec les Emirats Arabes-Unis et ses alliés égyptiens ou saoudiens.
Le 18 novembre, la décision du département de l’immigration des Emirats arabes
unis de priver les ressortissants de treize pays, dont l’Algérie, de visa d’entrée et de
séjour, a électrisé la communauté algérienne sur place, qui compte 20 000
expatriés, dont de nombreux hommes d’affaires. C’était l’aboutissement logique de la détérioration des relations diplomatiques entre l’Algérie et les Emirats. Une détérioration qui a été provoquée par l’alignement de Tebboune sur les positions de la Turquie. Le président algérien, malade et affaibli, a placé ses espoirs dans un partenariat stratégique avec la Turquie d’Erdogan. Une Turquie agressive et offensive qui a provoqué une guerre froide avec tous les partenaires stratégiques traditionnels de l’Algérie comme l’Union Européenne, les pays du Golfe ou la Russie dans le dossier libyen.
Pour rendre service à la Turque, Tebboune va jusqu’à décider des actions les plus spectaculaires comme l’extradition vers la Turquie, la dernière semaine de novembre, d’un ressortissant turc qu’Ankara accuse d’avoir partie liée avec le prédicateur Fethullah Gülen, ennemi juré du président Recep Tayyip Erdogan. Cette extradition répond à celle, le 30 juillet dernier, de l’adjudant algérien Guermit Bounouira, qui fut le conseiller de l’ex-chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah et s’était réfugié en Turquie.
Le resserrement des liens entre l’Algérie et la Turquie est le principal grief des Emirats arabes unis envers le gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune. Mais c’est ensuite l’Union Européenne qui a commencé à afficher clairement son hostilité vis-à-vis de l’Algérie. Une résolution très sévère a été adoptée contre le régime algérien le 26 novembre dernier. Et les autorités de la Commission de l’Union Européenne ont sorti le dossier des Droits de l’Homme pour pointer du doigt les pratiques liberticides du régime algérien et justifier une révision des partenariats avec une Algérie dont tout le monde se méfie, désormais, en Europe en raison de ses alliances avec des puissances ouvertement anti-Européennes comme la Turquie.
Quant à la Maison Blanche, l’Algérie ne peut plus espérer quoi que ce soit de positif à l’avenir avec cet accord historique entre le Maroc et Israël. Les lobbys marocains ont totalement verrouillé le champ d’action et le futur Président américain Joe Biden affirme tout haut qu’il ne va pas ménager la Russie et ses alliés dans le monde ainsi que les régimes totalitaires. L’Algérie sera, malheureusement, au coeur d’une autre tornade géopolitique. Isolée sur la scène internationale, privé depuis plus de 45 jours d’un Président capable de travailler, recroquevillée sur elle-même avec des frontières fermées depuis le mois de mars dernier, ébranlée fortement par les chocs de la crise sanitaire de l’épidémie de la COVID-19, l’Algérie est dans une situation peu envieuse. Absente en Libye où les puissances influentes ne l’associent à aucune démarche de dialogue inter-libyen, éjectée du Mali où elle n’a pu jouer aucun rôle dans la crise née dans le sillage du coup d’Etat du 18 août 2020, l’Algérie a perdu sa marge de manoeuvre dans l’ensemble des dossiers régionaux où naguère elle jouait le rôle de l’arbitre écouté et respecté. C’est bel et bien la fin d’une époque, celle d’une Algérie forte et influente, et le début d’une sinistre période, celle d’une Algérie affaiblie, déboussolée et encerclée par des puissances hostiles.
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11 DECEMBER 2020
Une posture dangereuse et totalement inédite dans l’histoire de l’Algérie. Depuis l’arrivée d’Abdelmadjid Tebboune à la tête de l’Etat algérien le 12 décembre 2019, et depuis la chute du régime Bouteflika en avril 2019, l’Algérie enchaîne les désillusions diplomatiques et recule dangereusement sur la scène internationale. Perdant son influence dans la région du Sahel et du Maghreb, l’Algérie s’est transformée en un “petit nain” que de nombreux pays à travers le monde narguent faute d’un véritable soft power et d’un pouvoir fort qui peut protéger les intérêts nationaux face aux aléas internationaux.
C’est un constater très amer et qui fait très mal au coeur : l’Algérie n’a jamais été aussi isolée et esseulée sur la scène internationale. Le Monde nous tourne le dos. Le coup d’éclat de l’alliance officiellement scellée par le Maroc avec Israël en contrepartie de la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental sans oublier tous les privilèges de la coopération économique et financière qui profitera au Maroc en 2021 est plus qu’une défaite pour l’Algérie. C’est une véritable humiliation.
C’est, d’abord, l’effondrement d’une cause diplomatique, celle du Sahara Occidental, une cause noble que la diplomatie algérienne avait réussi à élever au firmament des luttes internationales au cours des années 70 et 80. Cette cause a perdu totalement sa crédibilité à cause des errances du régime algérien et de son entêtement à refuser d’adopter le pragmatisme dans sa guerre froide contre l’Algérie. Travaillant encore avec un logiciel dépassé, archaïque et parlant avec un langage figé aux années 70 et 80, l’Algérie a été dépassée par les mutations de la Realpolitik. Le monde a changé, mais l’Algérie est restée toujours figée et ankylosée. La liberté des peuples est, certes, une cause noble, mais le combat diplomatique et les guerres de l’information ont totalement changé. Or, le régime algérien ne s’est pas adapté à la modernité.
Le résultat des courses est un effondrement progressif de la question du Sahara Occidental. En 1990, 79 pays reconnaissaient l’Indépendance du Sahara Occidental. En 2020, ils sont à peine 30 à croire encore à la nécessité de l’existence d’un pays dont personne ne peut garantir sa fiabilité et sa sécurité dans un monde troublant et gangrené par les foyers de tensions.
Mais l’accord du Maroc avec les Etats-Unis et Israël ne porte pas seulement un coup fatal à l’Algérie sur la question Sahraouie. Il permet, surtout, d’isoler dangereusement l’Algérie et la pousse à s’enfermer dans ses derniers retranchements car cet accord est, en réalité, la mise en place d’une alliance internationale qui va d’Abu Dhabi jusqu’à Rabat. Une nouvelle alliance qui vise à contrer les avancées Turque et Russe dans la région notamment en Libye. Une alliance qui se veut une préparation à une future guerre contre l’ennemi Iranien. Dans ce jeu d’alliances, l’Algérie s’est placée dans une position très délicate à cause de l’aveuglement diplomatique d’Abdelmadjid Tebboune, un président faible et inexpérimenté qui a conduit l’Algérie dans les bras de la Turquie d’Erdogan provoquant ainsi une guerre froide avec les Emirats Arabes-Unis et ses alliés égyptiens ou saoudiens.
Le 18 novembre, la décision du département de l’immigration des Emirats arabes
unis de priver les ressortissants de treize pays, dont l’Algérie, de visa d’entrée et de
séjour, a électrisé la communauté algérienne sur place, qui compte 20 000
expatriés, dont de nombreux hommes d’affaires. C’était l’aboutissement logique de la détérioration des relations diplomatiques entre l’Algérie et les Emirats. Une détérioration qui a été provoquée par l’alignement de Tebboune sur les positions de la Turquie. Le président algérien, malade et affaibli, a placé ses espoirs dans un partenariat stratégique avec la Turquie d’Erdogan. Une Turquie agressive et offensive qui a provoqué une guerre froide avec tous les partenaires stratégiques traditionnels de l’Algérie comme l’Union Européenne, les pays du Golfe ou la Russie dans le dossier libyen.
Pour rendre service à la Turque, Tebboune va jusqu’à décider des actions les plus spectaculaires comme l’extradition vers la Turquie, la dernière semaine de novembre, d’un ressortissant turc qu’Ankara accuse d’avoir partie liée avec le prédicateur Fethullah Gülen, ennemi juré du président Recep Tayyip Erdogan. Cette extradition répond à celle, le 30 juillet dernier, de l’adjudant algérien Guermit Bounouira, qui fut le conseiller de l’ex-chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah et s’était réfugié en Turquie.
Le resserrement des liens entre l’Algérie et la Turquie est le principal grief des Emirats arabes unis envers le gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune. Mais c’est ensuite l’Union Européenne qui a commencé à afficher clairement son hostilité vis-à-vis de l’Algérie. Une résolution très sévère a été adoptée contre le régime algérien le 26 novembre dernier. Et les autorités de la Commission de l’Union Européenne ont sorti le dossier des Droits de l’Homme pour pointer du doigt les pratiques liberticides du régime algérien et justifier une révision des partenariats avec une Algérie dont tout le monde se méfie, désormais, en Europe en raison de ses alliances avec des puissances ouvertement anti-Européennes comme la Turquie.
Quant à la Maison Blanche, l’Algérie ne peut plus espérer quoi que ce soit de positif à l’avenir avec cet accord historique entre le Maroc et Israël. Les lobbys marocains ont totalement verrouillé le champ d’action et le futur Président américain Joe Biden affirme tout haut qu’il ne va pas ménager la Russie et ses alliés dans le monde ainsi que les régimes totalitaires. L’Algérie sera, malheureusement, au coeur d’une autre tornade géopolitique. Isolée sur la scène internationale, privé depuis plus de 45 jours d’un Président capable de travailler, recroquevillée sur elle-même avec des frontières fermées depuis le mois de mars dernier, ébranlée fortement par les chocs de la crise sanitaire de l’épidémie de la COVID-19, l’Algérie est dans une situation peu envieuse. Absente en Libye où les puissances influentes ne l’associent à aucune démarche de dialogue inter-libyen, éjectée du Mali où elle n’a pu jouer aucun rôle dans la crise née dans le sillage du coup d’Etat du 18 août 2020, l’Algérie a perdu sa marge de manoeuvre dans l’ensemble des dossiers régionaux où naguère elle jouait le rôle de l’arbitre écouté et respecté. C’est bel et bien la fin d’une époque, celle d’une Algérie forte et influente, et le début d’une sinistre période, celle d’une Algérie affaiblie, déboussolée et encerclée par des puissances hostiles.
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