UN NATIONALISME MAL CONJUGUÉ ÉCONOMIQUEMENT PEUT-IL ÊTRE UN FREIN AU DÉVELOPPEMENT NATIONAL ?
Maghreb Émergent - Othmane Benzaghou - 18 Septembre, 2017 1:55
Le modèle de croissance économique constitue l’alpha et l’Omega des politiques publiques de développement, souligne Othmane Benzaghou, dans cette contribution, en relevant les entraves au développement des “nationalismes qui se conjuguent mal avec l’économie”. Un appel à débat…
La nation, ce cheminement historique de liens entre le peuple et son État est une subtile construction politique que chaque parcours historique a su mettre en marche en partant de son propre contexte socio-politique, afin d’assurer divers objectifs jugés fondamentaux, d’émancipation, de justice et de sécurité, de développement et de bien-être qui fonde la puissance publique, en l’occurrence ce que le peuple souhaite déléguer à son émanation collective, l’état, comme principes, défis et instruments.
L’action des pouvoirs publics, un éternel sujet de réflexion et de construction, a été en Algérie le fruit d’une formidable ambition à l’aube de l’indépendance qui a octroyé à un État en construction, des pouvoirs, des défis, et des instruments incommensurables, justifiés par une immense ambition collective issue de l’extraordinaire révolution et ses principes fondateurs généreux qui a consacré l’indépendance du pays.
De grands espoirs qui ont parfois péché par manque de réalisme socio-politique, par une jeune génération de leaders émanant des entrailles du système colonial et arrachant après 5 ou 6 générations l’émancipation tant espérée.
Une jeune génération formée par leurs aînés à la résistance et marquée par le système colonial, mais aussi par les luttes politiques avant et pendant la révolution qui a diffusé chez certains cette obsession d’unité des rangs, d’ordre par tous les moyens sous le vocable “Ennidham”, poussé à son paroxysme pour exiger l’unité du peuple, puis l’unité de la pensée ; et enfin, une discipline quasi-militaire sur une société politique censée encadrer par le parti la population et non pas en être les relais politiques structurés des pensées majoritaires, et aussi incarner et émuler la diversité des modèles de développement.Certes, les défis étaient majeurs et la réalité socio-politique laminée par les affres du colonialisme et de la violente guerre d’indépendance.
Cette jeune génération arrivée au pouvoir à 30 ans, insuffisamment formée aux défis du développement, à la bonne gouvernance comme processus de construction de consensus politiques fondés sur une représentation réelle des différents projets de société et modèles de développement, et qui peine 50 ans après à accepter cette aspiration, le débat fécond qui peut en émaner, et le contrat politique qui peut s’en dégager, cantonnant la représentation politique à son appareil le plus simple.
Modèles de développement
Les modèles de développement tentent d’identifier quelle serait l’allocation la plus efficace de la dépense et de l’investissement, publiques ou privées. Quand elles sont privées, elles puisent et mobilisent les ressources disponibles pour offrir des biens et services, garantir une croissance et maximiser ses profits.
Quand elles sont publiques, elles extraient les ressources disponibles pour favoriser une politique de développement stratégique qui réponde aux principes et défis collectifs issus du contrat politique. Un contrat qui permet d’identifier les modalités de redistribution et de dessiner la stratégie de développement national en allouant les ressources disponibles tout en garantissant la disponibilité des ressources futures.
C’est ainsi sous l’angle de la pérennité et du développement de la richesse nationale que le débat politique tire en partie sa légitimité, et permet de proposer différents modèles d’allocations des ressources qui garantissent le meilleur rapport entre bien-être collectif et croissance. C’est ainsi que le débat sur le modèle de croissance économique constitue l’alpha et l’Omega des politiques publiques de développement. Il devrait mobiliser l’ensemble des partenaires politiques, acteurs et experts économiques et sociaux et plus globalement le citoyen intéressé de la chose publique.
Il s’agit de proposer les meilleures voies d’assurer un modèles de croissance économique, la redistribution qu’il est nécessaire d’en tirer afin de garantir des cycles de croissance longs permettant de réduire les fractures sociales et d’en favoriser le bien être. Il est le cœur des grandes théories économiques et des recherches économétriques et sociales permettant d’en mesurer la performance économique, d’en identifier ses leviers dans la société et ses effets en terme de bien-être social sous l’impulsion des politiques publiques.
Loin d’être cantonné à un débat d’experts économiques et scientifiques ou de chapelles idéologiques, il engage l’ensemble de la société et ses forces vives dans le choix d’une société qui garantisse un équilibre subtil entre les impératifs de la performance économique, les dynamiques sociales et leur aspiration à la promotion, la justice et le bien-être, et les réelles capacités et possibilités économiques qui peuvent se dégager d’un contexte national et international.
La performance reléguée au second plan
L’Algérie a pris un tout autre chemin depuis l’indépendance, puisque cette recherche de la performance économique a été reléguée en seconds lieux. Le souverainisme exacerbé avait bridé les modèles économiques d’entreprises et la valeur ajoutée était hypothéquée par une vision remarquable du capital à engager et à dégager, proscrit jusqu’au fond de roulement dans le socialisme scientifique où les moyens de productions étaient du ressort publique, y compris le financement assuré par des banques savamment segmentées par marchés et clients publiques.
La performance économique était non contrainte et non rétribuée, du fait d’un état producteur de biens dans quasi l’ensemble des secteurs industriels et agricoles sous environnement monopolistique, étouffant les rares entreprises privées algériennes, générant une offre dans un marché fermé où la demande était sommée de se conformer à cette offre nationale.
L’exemple Algérien est marqué à l’aube de l’indépendance par des ressources humaines rares et diversement formées aux défis du développement, à la maîtrise des sciences et des technologies, et notamment à celles économiques et de gestion, politiquement très polarisées.
Des ressources naturelles considérées abondantes, progressivement monétisées et garantissant l’investissement majoritairement publique devant permettre la création de richesse et donc les futures ressources nationales. Force est de constater que cette allocation est loin d’avoir été optimum, d’avoir remplis ses objectifs, non seulement en terme de croissance et de disponibilité des ressources avenirs, pire, elle a continué à absorber des ressources à perte loin de permettre la constitution d’un tissu et de pratiques économiques efficaces et productifs, et loin de favoriser le travail et l’initiative.
Un énorme investissement humain
L’investissement humain a été énorme en terme d’éducation et de santé, et le bien être des algériens a globalement progressé par une politique sociale favorable sans une contrepartie travaille qui devrait en être le fruit.Néanmoins, l’Algérie ayant vécu des secousses sociales marquantes depuis le colonialisme, a subit d’autres secousses qui ont réduit et dispersé le potentiel humain, et qui font aujourd’hui le bonheur d’autres contrés.
La faible croissance économique n’a pas permis une offre d’emplois suffisante et de qualité pour compléter l’effort important qui a été consenti à l’aube de l’indépendance dans l’éducation. Le socialisme scientifique, puis un environnement économique difficile n’a pas suffisamment encouragé les initiatives et la création d’entreprises, resté à un niveau très bas en Algérie en rapport à des économies comparables.
Mobilisation des ressources
La mobilisation des ressources internes, à travers divers mécanismes de financement, conventionnels ou non conventionnels, nécessite des réformes économiques profondes qui puissent fluidifier l’acte d’investir, la prise de risque, les pratiques économiques sous l’arbitrage d’un état régulateur et non plus administrateur, et d’un état de droit permettant le respect d’une juridiction économique transparente et stable sans lesquels on perpétue la loi du plus fort, les prébendes économiques et autres clientèles politiques constituant autant d’entraves à la croissance, de barrières à l’entrée, de distorsion à la concurrence et d’inefficacité économique.
Les investissements ont été jusqu’à présent majoritairement public, financés par la fiscalité des ressources naturelles, fiscalités de l’activité économique publique, générant une relation particulière de l’État et des agents économiques bien différente que quand les ressources d’un État sont tirées majoritairement de l’activité économique et sa plus-value, issue du secteur publique ou privé.
La mobilisation des ressources humaines subit les contre coups d’un environnement des affaires difficile, malgré un effort important de l’état envers les toutes jeunes générations offrant des modalités de financement des TPE extrêmement avantageuses.
Elle n’est pas suffisamment accompagnée et ne tire pas avantage du formidable gisement humain dans la diaspora qui pour certains hésitent à une prise de risque maximale dans un environnement économique biaisé et fermé, ou qui ne trouvent pas une employabilité nationale ou internationale qui réponde à leurs attentes et potentiels.
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Maghreb Émergent - Othmane Benzaghou - 18 Septembre, 2017 1:55
Le modèle de croissance économique constitue l’alpha et l’Omega des politiques publiques de développement, souligne Othmane Benzaghou, dans cette contribution, en relevant les entraves au développement des “nationalismes qui se conjuguent mal avec l’économie”. Un appel à débat…
La nation, ce cheminement historique de liens entre le peuple et son État est une subtile construction politique que chaque parcours historique a su mettre en marche en partant de son propre contexte socio-politique, afin d’assurer divers objectifs jugés fondamentaux, d’émancipation, de justice et de sécurité, de développement et de bien-être qui fonde la puissance publique, en l’occurrence ce que le peuple souhaite déléguer à son émanation collective, l’état, comme principes, défis et instruments.
L’action des pouvoirs publics, un éternel sujet de réflexion et de construction, a été en Algérie le fruit d’une formidable ambition à l’aube de l’indépendance qui a octroyé à un État en construction, des pouvoirs, des défis, et des instruments incommensurables, justifiés par une immense ambition collective issue de l’extraordinaire révolution et ses principes fondateurs généreux qui a consacré l’indépendance du pays.
De grands espoirs qui ont parfois péché par manque de réalisme socio-politique, par une jeune génération de leaders émanant des entrailles du système colonial et arrachant après 5 ou 6 générations l’émancipation tant espérée.
Une jeune génération formée par leurs aînés à la résistance et marquée par le système colonial, mais aussi par les luttes politiques avant et pendant la révolution qui a diffusé chez certains cette obsession d’unité des rangs, d’ordre par tous les moyens sous le vocable “Ennidham”, poussé à son paroxysme pour exiger l’unité du peuple, puis l’unité de la pensée ; et enfin, une discipline quasi-militaire sur une société politique censée encadrer par le parti la population et non pas en être les relais politiques structurés des pensées majoritaires, et aussi incarner et émuler la diversité des modèles de développement.Certes, les défis étaient majeurs et la réalité socio-politique laminée par les affres du colonialisme et de la violente guerre d’indépendance.
Cette jeune génération arrivée au pouvoir à 30 ans, insuffisamment formée aux défis du développement, à la bonne gouvernance comme processus de construction de consensus politiques fondés sur une représentation réelle des différents projets de société et modèles de développement, et qui peine 50 ans après à accepter cette aspiration, le débat fécond qui peut en émaner, et le contrat politique qui peut s’en dégager, cantonnant la représentation politique à son appareil le plus simple.
Modèles de développement
Les modèles de développement tentent d’identifier quelle serait l’allocation la plus efficace de la dépense et de l’investissement, publiques ou privées. Quand elles sont privées, elles puisent et mobilisent les ressources disponibles pour offrir des biens et services, garantir une croissance et maximiser ses profits.
Quand elles sont publiques, elles extraient les ressources disponibles pour favoriser une politique de développement stratégique qui réponde aux principes et défis collectifs issus du contrat politique. Un contrat qui permet d’identifier les modalités de redistribution et de dessiner la stratégie de développement national en allouant les ressources disponibles tout en garantissant la disponibilité des ressources futures.
C’est ainsi sous l’angle de la pérennité et du développement de la richesse nationale que le débat politique tire en partie sa légitimité, et permet de proposer différents modèles d’allocations des ressources qui garantissent le meilleur rapport entre bien-être collectif et croissance. C’est ainsi que le débat sur le modèle de croissance économique constitue l’alpha et l’Omega des politiques publiques de développement. Il devrait mobiliser l’ensemble des partenaires politiques, acteurs et experts économiques et sociaux et plus globalement le citoyen intéressé de la chose publique.
Il s’agit de proposer les meilleures voies d’assurer un modèles de croissance économique, la redistribution qu’il est nécessaire d’en tirer afin de garantir des cycles de croissance longs permettant de réduire les fractures sociales et d’en favoriser le bien être. Il est le cœur des grandes théories économiques et des recherches économétriques et sociales permettant d’en mesurer la performance économique, d’en identifier ses leviers dans la société et ses effets en terme de bien-être social sous l’impulsion des politiques publiques.
Loin d’être cantonné à un débat d’experts économiques et scientifiques ou de chapelles idéologiques, il engage l’ensemble de la société et ses forces vives dans le choix d’une société qui garantisse un équilibre subtil entre les impératifs de la performance économique, les dynamiques sociales et leur aspiration à la promotion, la justice et le bien-être, et les réelles capacités et possibilités économiques qui peuvent se dégager d’un contexte national et international.
La performance reléguée au second plan
L’Algérie a pris un tout autre chemin depuis l’indépendance, puisque cette recherche de la performance économique a été reléguée en seconds lieux. Le souverainisme exacerbé avait bridé les modèles économiques d’entreprises et la valeur ajoutée était hypothéquée par une vision remarquable du capital à engager et à dégager, proscrit jusqu’au fond de roulement dans le socialisme scientifique où les moyens de productions étaient du ressort publique, y compris le financement assuré par des banques savamment segmentées par marchés et clients publiques.
La performance économique était non contrainte et non rétribuée, du fait d’un état producteur de biens dans quasi l’ensemble des secteurs industriels et agricoles sous environnement monopolistique, étouffant les rares entreprises privées algériennes, générant une offre dans un marché fermé où la demande était sommée de se conformer à cette offre nationale.
L’exemple Algérien est marqué à l’aube de l’indépendance par des ressources humaines rares et diversement formées aux défis du développement, à la maîtrise des sciences et des technologies, et notamment à celles économiques et de gestion, politiquement très polarisées.
Des ressources naturelles considérées abondantes, progressivement monétisées et garantissant l’investissement majoritairement publique devant permettre la création de richesse et donc les futures ressources nationales. Force est de constater que cette allocation est loin d’avoir été optimum, d’avoir remplis ses objectifs, non seulement en terme de croissance et de disponibilité des ressources avenirs, pire, elle a continué à absorber des ressources à perte loin de permettre la constitution d’un tissu et de pratiques économiques efficaces et productifs, et loin de favoriser le travail et l’initiative.
Un énorme investissement humain
L’investissement humain a été énorme en terme d’éducation et de santé, et le bien être des algériens a globalement progressé par une politique sociale favorable sans une contrepartie travaille qui devrait en être le fruit.Néanmoins, l’Algérie ayant vécu des secousses sociales marquantes depuis le colonialisme, a subit d’autres secousses qui ont réduit et dispersé le potentiel humain, et qui font aujourd’hui le bonheur d’autres contrés.
La faible croissance économique n’a pas permis une offre d’emplois suffisante et de qualité pour compléter l’effort important qui a été consenti à l’aube de l’indépendance dans l’éducation. Le socialisme scientifique, puis un environnement économique difficile n’a pas suffisamment encouragé les initiatives et la création d’entreprises, resté à un niveau très bas en Algérie en rapport à des économies comparables.
Mobilisation des ressources
La mobilisation des ressources internes, à travers divers mécanismes de financement, conventionnels ou non conventionnels, nécessite des réformes économiques profondes qui puissent fluidifier l’acte d’investir, la prise de risque, les pratiques économiques sous l’arbitrage d’un état régulateur et non plus administrateur, et d’un état de droit permettant le respect d’une juridiction économique transparente et stable sans lesquels on perpétue la loi du plus fort, les prébendes économiques et autres clientèles politiques constituant autant d’entraves à la croissance, de barrières à l’entrée, de distorsion à la concurrence et d’inefficacité économique.
Les investissements ont été jusqu’à présent majoritairement public, financés par la fiscalité des ressources naturelles, fiscalités de l’activité économique publique, générant une relation particulière de l’État et des agents économiques bien différente que quand les ressources d’un État sont tirées majoritairement de l’activité économique et sa plus-value, issue du secteur publique ou privé.
La mobilisation des ressources humaines subit les contre coups d’un environnement des affaires difficile, malgré un effort important de l’état envers les toutes jeunes générations offrant des modalités de financement des TPE extrêmement avantageuses.
Elle n’est pas suffisamment accompagnée et ne tire pas avantage du formidable gisement humain dans la diaspora qui pour certains hésitent à une prise de risque maximale dans un environnement économique biaisé et fermé, ou qui ne trouvent pas une employabilité nationale ou internationale qui réponde à leurs attentes et potentiels.
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