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Meddeb: L’archaïsme et le fanatisme retardent les pays arabes

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  • Meddeb: L’archaïsme et le fanatisme retardent les pays arabes

    Plusieurs personnalités ont assisté à cette rencontre organisée par le quotidien El Khabar et la BNA, Mustapha Cherif, Amine Zaoui, Nadjet Khada et autres universitaires. Sofiane Hadjadj, directeur des éditions Barzakh, a, avant de donner la parole au conférencier, retracé le riche parcours de ce philosophe.

    Abdelwab Meddeb a longuement abordé la philosophie de Goethe, mais aussi traité de la peinture, notamment du tableau les Femmes d’Alger dans leur appartement, de Delacroix. Abdelwahab Meddeb a vanté le mérite de cette œuvre qui avait fait connaître l’Algérie durant la période coloniale.Chose contredite par nombre de participants, lorsqu’on sait que ces peintres orientalistes avaient un objectif clair : celui d’accompagner l’armée française dans sa besogne de colonisateur et ne pouvait être compris autrement.

    Abdelwahab Meddebl a également évoqué l’attentat du 11 septembre et des sujets d’actualité, comme les propos tenus par Benoît XVI à Ratisbonne, la caricature du Prophète (QSSSL) et la guerre en Irak.Dans le sillage, il a critiqué le comportement des musulmans et des Arabes. «Regardez les pays d’Asie, l’Inde… Ils sont en train de se développer, alors que les pays arabes et musulmans n’avancent pas.» Citant l’arrogance déplacée de Saddam Hocine en déclarant «regardez où elle la mené». S’agissant de son livre les Contre prêches, qu’il vient de publier, Abdelwahab Meddeb ne s’est pas contenté de visiter les songes polychromes de sa double généalogie et de sa double culture orientale et occidentale.

    Abdelwahab Meddeb ici soulève aussi le rideau des a priori et des ignorances, dans les deux mondes où il se meut, et trouve sur son chemin des raisons d’espérer. Meddeb hâte le pas, non sans courage, pour faire progresser sa réflexion commencée avec la Maladie de l’islam.

    Certains parmi l’assistance ont plutôt estimé qu’il aurait été préférable de titrer Maladie des musulmans. Avec stoïcisme, ce poète regarde la vérité des choses au-delà de la lettre des mots. Sa démarche ne relève pas du banal.
    Abdelwahab Meddeb montre du doigt des archaïsmes, isole les ferments du fanatisme, met à nu l’incapacité actuelle de la civilisation arabo-musulmane à penser notre monde et à l’enrichir.

    Abdelwahab Meddeb déclare également avec force : «S’ils ne réorientent pas la perspective, on peut raisonnablement penser que les Arabes, confinés dans le cadre de la croyance islamique, sont destinés à rejoindre les civilisations mortes.» Le terrible constat de Meddeb est tempéré par l’énumération des ressources dont l’islam dispose pour pouvoir s’adapter à ce qu’il est convenu d’appeler «la modernité».

    Abdelwahab Meddeb s’intéresse à tout ce qui peut donner matière à penser : peinture, poésie, saint Augustin. Ce «camusien» accepte le legs colonial et rend grâce à sa langue, point de vue que beaucoup de personnes présentes dans la salle n’ont pas partagé. Cependant, il porte beaucoup d’amour à l’émir Abdelkader dont il dit que «c’était un grand homme du siècle», ainsi qu’à Kateb Yacine, personnalités auxquelles il a consacré des ouvrages. Cependant, pour bien cerner ce poète et philosophe, il est intéressant de lire son ouvrage Talismano, roman mnémonique, multipliant les pauses et les traversées, mélangeant les genres, confondant les temps et donnant sur le lacunaire, l’elliptique, le fragmentaire.

    Le roman de la marche recrée son Babel. Le marcheur, voulant fuir le labyrinthe de l’enfance, s’y enfonce. Il suit le sentier de la répétition. Tout va et vient et l’écriture elle-même obéit à la scansion du corps marchant. Néanmoins, cette descente au «tombeau» témoigne du délabrement et de l’effritement du corps de Tunis, sa ville natale.

    Au fond, le narrateur, personnage nostalgique, inconsolé, dit le deuil de l’harmonie et de la beauté. Plus rien ne l’émeut. Les «toiles d’araignées» habitent les lieux saints désertés, les odeurs d’humidité et d’urine pourrissent les murs, les mouches et les ordures infestent l’espace.

    Tout se délabre, se démantèle. En somme, le narrateur - personnage des textes meddebiens semble à la recherche d’une nouvelle conception de soi et de l’autre. Or, telle est la «leçon» de la marche, il n’y a pas de «phantasia» sans «talismano», d’inspiration sans expiration, d’expatriation sans rapatriement, de connaissance sans reconnaissance.

    Le premier roman a permis au marcheur de se dépouiller du cocon familial et social, de sortir de son moi. «Je suis consumé par le pouvoir du soleil et, de mes cendres, je renais. Si j’avais des ailes, je survolerais la mer jusqu’au cap d’en face. Je serais accueilli par la nature à bras ouverts.» Meddeb s’est nourri de l’ambiance «zitounienne», car son père était recteur de l’université de Tunis. Et en bon Tunisien, il n’a pas hésité à attribuer la fameuse phrase du grand philosophe algérien Malek Bennabi qui avait dit : «Un peuple a été colonisé, parce qu’il est colonisable», à l’ancien président tunisien Habib Bourguiba.

    Né à Tunis en 1946, Abdelwahab Meddeb Franco-Tunisien a poursuivi des études d’histoire de l’art et de lettres.

    Abdelwahab Meddeb a publié une vingtaine d’ouvrages. Directeur de la revue internationale Dédale, Il enseigne la littérature comparée à l’université de Paris X-Nanterre et anime l’émission Cultures d’islam sur France Culture.Il est aussi professeur invité dans de nombreuses universités (dont Yale et Genève) Il dit s’identifier à Ibn Arabi en affirmant que «c’est pour habiter la mouvance». Il s’en explique : «Nous l’excavons comme trace et nous nous en imprégnons pour retrouver un renouveau dans notre énergie créatrice. La trace ne vaut rien en elle-même. Déplacée, ravivée, elle essaime dans le temps et dans l’espace et papillonne en approfondissant à chaque fois les différents signes.» L’œuvre de Meddeb peut être considérée comme un creuset où plusieurs références se juxtaposent, se chevauchent et s’enchevêtrent.

    Par Le Jeune Indépendant
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