Ecrit par Mohamed El Hamraoui - Le Reporter Updated: 14/02/2021 at 9:09 PM.
Des hommes se marient entre eux au Maroc. Et c'est au « moussem » annuel de Sidi Ali Ben Hamdouche qu'ils choisissent de célébrer leurs noces, sans se cacher. Le Reporter a été témoin d'une célébration, en grande pompe, de l'un de ces mariages... Reportage.
NOUS sommes à Sidi Ali (commune rurale de Maghrassiyine), à 30 km de Meknès. Perché sur une colline, ce petit village abrite le « moussem » annuel (sorte de festival) de Sidi Ali Ben Hamdouche. Comme à l'autre « moussem » de Cheikh El Kamel El Hadi Benaïssa qui se déroule en même temps, les festivités ont commencé sept jours après « aïd al mawlid » (fête du mouloud célébrant l'anniversaire du prophète). Elles sont célébrées de différentes façons par des milliers de visiteurs qui affluent des quatre coins du Royaume et même de l'étranger.
Minuit passé, le mausolée du marabout Sidi Ali Ben Hamdouche pullule encore de monde. Les uns ont toujours leur « hadra » (transe), les autres ont chacun sa fête.
L'une de ces fêtes est assez spéciale. C'est à elle que nous avons choisi de nous inviter, non sans difficultés.
Sous les youyous, quelques hommes aux gestes gracieux (plus gracieux que ceux de nombre de femmes de notre connaissance) et avec la musique endiablée d'un groupe de « Hmadcha » en délire, un couple franchit la porte d'une grande salle, jouxtant le mausolée. Deux silhouettes se tenant par la main, entrent à petits pas. Ils sont entourés d'enthousiastes accompagnateurs. Au même moment, les « sla ou slam àla Rassoul Allah » (prière et salut soient sur le prophète, une formule que l'on chante à tous les mariages) fusent de partout. D'autres youyous, plus stridents, sont lancés.
Les deux silhouettes ont tout d'un mari et d'une femme qui convolent en justes noces, sauf que nous découvrons qu'il s'agit de deux hommes. Le premier, en djellaba blanche, sourit aux convives. Le second, le henné plein les mains, est en caftan. Il déambule en distribuant des sourires qui, même mesurés, l'obligent à refaire plusieurs fois son maquillage. Des « neggafate » (maquilleuses et habilleuses...) sont là pour que le mari et son marié soient les stars de leur nuit de noces. Pour ce faire, les mariés sont placés sur des fauteuils trônant au milieu de la salle qui est bien gardée.
Des sbires veillent au grain en différents endroits de la salle. Ils sont là au cas où des indésirables se mêleraient de ce qui ne les regarde pas. Ces gardes du corps s'énervent à chaque fois que brille le flash d'un appareil photo ou qu'un étranger à la fête tente d'entrer dans la salle. Nous avons dû user de mille subterfuges pour entrer et plus encore pour pouvoir prendre, à la sauvette, les photos qui illustrent ce reportage.
Le rituel du saroual
dans cette nuit de fête, le couple s'éclipse, escorté par les « neggafates ». Mais, la musique et les chants ne cessent pas. Une heure après, un cercle fermé de convives célèbre, dans le secret, la sortie du saroual qui est posé sur un plateau d'argent.
A ce moment, les youyous se mêlent à un refrain spécial qui explique la situation : « Eddah eddah wallah ima khellah » (il l'a pris pour époux...). Ce rituel est le même que celui effectué traditionnellement pour un couple hétérosexuel qui vient de consommer son mariage. Après le premier rapport, le pantalon de la mariée est exposé, taché de sang, sur le plateau (c'est le saroual). Cela montre que l'épouse vient juste de perdre sa virginité. Le mari est ainsi félicité pour avoir choisi la bonne épouse. C'est ce que semblent exprimer tous ceux et toutes celles (plus rares) qui offrent une « hdia » (cadeau) pour féliciter les mariés en dansant, tout au long de cette nuit de folie. Ici, il est bien évident que le marié n'a pas de virginité à perdre, mais le rituel du saroual est quand même respecté.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, oui, ce sont bien deux hommes qui se marient entre eux. Ils sont tout contents de le faire. Et ça se passe à Meknès, au Maroc, devant des invités qui sont, pour la plupart, aux anges.
avecde la musique, des chants, des youyous et beaucoup de danses.
Nous avons appris que ces cinq dernières années, c'est ici que les couples gays préfèrent célébrer leur mariage. Souvent, cela se passe en présence non seulement de leurs amis, mais aussi de leurs proches.
Les homosexuels, Sidi Ali et les mauvais sorts
Comme les jeunes filles nubiles qui n'arrivent pas à se marier, les homosexuels (ayant le rôle de femmes) viennent à Sidi Ali pour conjurer leur sort. Eux aussi laissent leur petit slip dans un coin près du marabout. C'est là une superstition connue qui, selon la croyance populaire, pourrait permettre d'attirer des prétendants.
Même ceux qui ne vont pas jusqu'à laisser un sous-vêtement, viennent implorer le saint pendant sept jours et sept nuits pour briser « laàkes » (la mauvaise chance). Même les homosexuels liés le font pour demander paix et bonheur dans leur couple.
Suite ...
Des hommes se marient entre eux au Maroc. Et c'est au « moussem » annuel de Sidi Ali Ben Hamdouche qu'ils choisissent de célébrer leurs noces, sans se cacher. Le Reporter a été témoin d'une célébration, en grande pompe, de l'un de ces mariages... Reportage.
NOUS sommes à Sidi Ali (commune rurale de Maghrassiyine), à 30 km de Meknès. Perché sur une colline, ce petit village abrite le « moussem » annuel (sorte de festival) de Sidi Ali Ben Hamdouche. Comme à l'autre « moussem » de Cheikh El Kamel El Hadi Benaïssa qui se déroule en même temps, les festivités ont commencé sept jours après « aïd al mawlid » (fête du mouloud célébrant l'anniversaire du prophète). Elles sont célébrées de différentes façons par des milliers de visiteurs qui affluent des quatre coins du Royaume et même de l'étranger.
Minuit passé, le mausolée du marabout Sidi Ali Ben Hamdouche pullule encore de monde. Les uns ont toujours leur « hadra » (transe), les autres ont chacun sa fête.
L'une de ces fêtes est assez spéciale. C'est à elle que nous avons choisi de nous inviter, non sans difficultés.
[YT]/L0PmVxGBYMo[YT]
Sous les youyous, quelques hommes aux gestes gracieux (plus gracieux que ceux de nombre de femmes de notre connaissance) et avec la musique endiablée d'un groupe de « Hmadcha » en délire, un couple franchit la porte d'une grande salle, jouxtant le mausolée. Deux silhouettes se tenant par la main, entrent à petits pas. Ils sont entourés d'enthousiastes accompagnateurs. Au même moment, les « sla ou slam àla Rassoul Allah » (prière et salut soient sur le prophète, une formule que l'on chante à tous les mariages) fusent de partout. D'autres youyous, plus stridents, sont lancés.
Les deux silhouettes ont tout d'un mari et d'une femme qui convolent en justes noces, sauf que nous découvrons qu'il s'agit de deux hommes. Le premier, en djellaba blanche, sourit aux convives. Le second, le henné plein les mains, est en caftan. Il déambule en distribuant des sourires qui, même mesurés, l'obligent à refaire plusieurs fois son maquillage. Des « neggafate » (maquilleuses et habilleuses...) sont là pour que le mari et son marié soient les stars de leur nuit de noces. Pour ce faire, les mariés sont placés sur des fauteuils trônant au milieu de la salle qui est bien gardée.
Des sbires veillent au grain en différents endroits de la salle. Ils sont là au cas où des indésirables se mêleraient de ce qui ne les regarde pas. Ces gardes du corps s'énervent à chaque fois que brille le flash d'un appareil photo ou qu'un étranger à la fête tente d'entrer dans la salle. Nous avons dû user de mille subterfuges pour entrer et plus encore pour pouvoir prendre, à la sauvette, les photos qui illustrent ce reportage.
Le rituel du saroual
dans cette nuit de fête, le couple s'éclipse, escorté par les « neggafates ». Mais, la musique et les chants ne cessent pas. Une heure après, un cercle fermé de convives célèbre, dans le secret, la sortie du saroual qui est posé sur un plateau d'argent.
A ce moment, les youyous se mêlent à un refrain spécial qui explique la situation : « Eddah eddah wallah ima khellah » (il l'a pris pour époux...). Ce rituel est le même que celui effectué traditionnellement pour un couple hétérosexuel qui vient de consommer son mariage. Après le premier rapport, le pantalon de la mariée est exposé, taché de sang, sur le plateau (c'est le saroual). Cela montre que l'épouse vient juste de perdre sa virginité. Le mari est ainsi félicité pour avoir choisi la bonne épouse. C'est ce que semblent exprimer tous ceux et toutes celles (plus rares) qui offrent une « hdia » (cadeau) pour féliciter les mariés en dansant, tout au long de cette nuit de folie. Ici, il est bien évident que le marié n'a pas de virginité à perdre, mais le rituel du saroual est quand même respecté.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, oui, ce sont bien deux hommes qui se marient entre eux. Ils sont tout contents de le faire. Et ça se passe à Meknès, au Maroc, devant des invités qui sont, pour la plupart, aux anges.
avecde la musique, des chants, des youyous et beaucoup de danses.
Nous avons appris que ces cinq dernières années, c'est ici que les couples gays préfèrent célébrer leur mariage. Souvent, cela se passe en présence non seulement de leurs amis, mais aussi de leurs proches.
Les homosexuels, Sidi Ali et les mauvais sorts
Comme les jeunes filles nubiles qui n'arrivent pas à se marier, les homosexuels (ayant le rôle de femmes) viennent à Sidi Ali pour conjurer leur sort. Eux aussi laissent leur petit slip dans un coin près du marabout. C'est là une superstition connue qui, selon la croyance populaire, pourrait permettre d'attirer des prétendants.
Même ceux qui ne vont pas jusqu'à laisser un sous-vêtement, viennent implorer le saint pendant sept jours et sept nuits pour briser « laàkes » (la mauvaise chance). Même les homosexuels liés le font pour demander paix et bonheur dans leur couple.
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