Le peuple algérien a, encore une fois, tourné le dos à cette composante de la démocratie que sont les élections législatives censées nous permettre de choisir, en notre âme et conscience, les candidats à même de mener à bon port les destinées du pays, le temps d’une mandature. Que savons-nous des élections passées? Y a-t-il eu un bilan contradictoire des faits en faveur ou à la charge des partis politiques qui, après une léthargie profonde, se réveillent à qui mieux mieux pour revendiquer une parcelle de pouvoir et de cette rente imméritée qui a fini par parasiter la valeur ajoutée réelle d’une ancienne assemblée et d’un gouvernement qui en est issu?
De fait, les élections du jeudi 17 mai ont montré le profond malaise qui a été conforté par des prestations désastreuses des candidats du pouvoir ou dans l’opposition pendant la durée d’une campagne électorale incomprise, ignorée, voire méprisée par le peuple qui ne veut plus jouer d’alibi dans le jeu de la fausse démocratie où c’est plus le contenant, le rituel qui est mis en oeuvre que le contenu réel des propositions qui, il faut bien le dire, manquent cruellement d’imagination.
A l’époque, le slogan bien connu «Daoula islamiia bla man votioue» «Une nation islamique sans que l’on vote», avait le mérite de la clarté. Le spirituel l’emportait sur le temporel, au besoin par la force. Les Algériens ont, à la place de cela, un ersatz de démocratie. Depuis donc, trente ans et avec une régularité de métronome, les Algériens sont appelés à adouber des députés qu’ils ne connaissent pas, sans programme cohérent, loin de la réalité du monde et encore imbibés de slogans d’un autre âge. On y trouve, indifféremment, ceux qui ont, mis le cap sans l’affirmer haut et fort sur une rhétorique religieuse avec des non-dits. Ceux qui s’accrochent encore à l’utopie de «l’Internationale» totalement déconnectés de la réalité du monde avec des slogans qui sont peut-être généreux: «le plein emploi, l’état-providence, les ennemis publics tels que le FMI rendus responsables de notre gabegie»...Il y a aussi les théoriciens de la démocratie qui «volent haut» sans prise réelle sur la réalité de l’Algérie profonde et enfin, les petits partis qui ne sont visibles que lors des élections.
La réponse du peuple
Il est curieux de constater pour les citoyens que nous sommes, l’acrobatie sans filet de la vingtaine de partis qui doivent, à la fois «taper sur le gouvernement» pour tenter de flatter l’électeur et sa malvie dans le sens du poil, mais cependant, en n’en faisant pas trop, pour ne pas contrarier le pouvoir et donc risquer d’hypothéquer l’avenir. La très faible participation est la réponse du peuple. Même dans les communes rurales, le bon sens paysan a prévalu. Comme l’écrit Florence Beaugé: «A une vingtaine de kilomètres de là, on ne se bousculait pas non plus, jeudi, dans les bureaux de vote de Reghaïa et Boudouaou. Pourtant, dans ces communes rurales, la participation est supposée être plus élevée que dans des villes comme Alger ou Oran. Voter? A quoi bon?, répondait d’un air indifférent la quasi-totalité des personnes interrogées dans la rue, à deux pas des bureaux de vote presque déserts. Le taux de participation s’est établi officiellement à 35,5%, soit le taux le plus bas jamais enregistré lors d’une consultation électorale en Algérie depuis l’indépendance.»(1)
Pour Aïssa Hirèche, les résultats annoncés par le ministre de l’Intérieur ce vendredi matin ne seront, certes, définitifs qu’après validation par le Conseil constitutionnel. Toutefois, ils permettent déjà une lecture assez complète. Sur les 389 sièges de l’APN, le FLN en a pris 136, soit près de 35%, alors que le RND (61 sièges) et le MSP (52 sièges) ne totalisent ensemble que 29,4% des sièges. Cette répartition de la représentation au sein de l’APN débouche sur une structure du pouvoir au sein de l’assemblée doublement favorable au parti de Belkhadem.
Désormais, c’est le FLN qui imprimera aux travaux de l’APN ses choix et ses ambitions. Il en a tous les atouts et toute la latitude. Sur un autre plan, les chiffres rendus publics soulignent quelques aspects importants qui méritent attention. Les députés qui ont un niveau de post-graduation seront au nombre de 70, soit 18% des sièges, alors qu’ils étaient 73 lors du dernier mandat et occupaient presque 19% de ces sièges.
Ce «déclin» est confirmé par ailleurs dans le cas des universitaires qui, de 245 en 2002, soit un taux de 63%, ne sont plus que 235 avec un taux de 60,4%. Ceux qui n’ont pas de niveau d’instruction ou qui, au mieux, ont fréquenté le lycée, occuperont, pour leur part, 21,6% des sièges, dont 6,5% pour ceux qui n’ont aucun niveau d’instruction.
Au moment où, autour de nous, les compétences prennent possession des rênes de leur pays, en sommes-nous encore aujourd’hui à élire des gens sans niveau d’instruction pour leur confier la charge de légiférer pour le nôtre? Se rend-on seulement compte que nous ne sommes plus dans les années soixante? Le scrutin, frappé par un taux d’absentéisme des plus forts, est un rejet, entre autres, de ces pratiques. Alors, c’est pour quand le changement?(2)
Ceci étant dit un diplôme universitaire, voire une post-graduation ne garantit pas, loin s’en faut, une compétence dans ce domaine. Ce qu’il aurait fallu ajouter c’est la contrepartie de ce que l’Etat, c’est-à-dire le contribuable, va débourser pendant cinq ans puis à vie, pour les 500 députés et sénateurs à une moyenne de 5 millions de DA (tout compris) par individu, soit 2, 5 milliards de DA et pour les cinq ans de la mandature, pas moins de 12,5 milliards de DA. C’est l’équivalent de la bourse-aumône pour 250.000 étudiants/an à qui on demande d’être performants. C’est aussi l’équivalent de la création d’une grande école pour former l’élite du pays. C’est enfin, le salaire de 25.000 diplômés à qui le ministère des Affaires sociales en bon prince octroie généreusement des CDD à 10.000DA pour des bacs +5, 6, 7;à 800km d’Alger sur l’autre rive où, à diplôme égal; le diplômé perçoit par la force de sa compétence reconnue le même salaire qu’un député qui, bien souvent, a jailli du néant et dont on ne perçoit toujours pas quelle est sa valeur ajoutée malgré les satisfecits de toute la classe politique que cette mascarade arrange puisqu’ils auront pignon sur rue pendant que le peuple s’enfonce de plus en plus dans la détresse.
Même le président de la Commission nationale politique de surveillance des élections législatives (Cnpsel), Saïd Bouchaïr, faisant savoir qu’il venait d’adresser une lettre au président Bouteflika pour dénoncer des dérives graves qui avaient entaché la journée et avaient dépassé les limites des cas isolés, n’a pas convaincu. M.Bouchaïr qui accusait nommément le FLN d’avoir fraudé à l’échelle nationale, jetant ainsi le doute sur la crédibilité des élections, la réputation du pays et l’autorité de l’Etat.
La volte-face du président la Cnpsel, Saïd Bouchaïr, n’a pas été du goût du leader du MSP, Boudjerra Soltani. «Quand on adresse une lettre de contestation au président de la République, on ne recule pas», le moment appelle réflexion, imagination et décision. Il considère tout de même que le recours introduit par la Commission nationale politique de surveillance des élections aurait dû, dans un pays démocratique digne de ce nom, entraîner l’invalidation du scrutin.
Le ministre de l’Intérieur a minimisé les soupçons de fraude. Aux dernières nouvelles, Kamel Kecil, le rapporteur de la Commission nationale politique de surveillance des élections législatives, Cnpsel, a animé, vendredi 18 mai, un point de presse. Selon l’intervenant, et contrairement à ce qui a été affirmé par Zerhouni, «M.Bouchaïr ne s’est pas rétracté ou présenté des excuses». Selon le rapporteur de la Cnsepl «cette commission a élaboré un travail collectif et M. le coordinateur a été chargé de l’annoncer lors d’une conférence de presse, chose qu’il a faite sans présenter ses excuses». Le problème reste entier et curieusement tous les partis politiques d’un bout à l’autre du curseur, font preuve d’un silence assourdissant tout en introduisant, pour la forme, des recours dont on sait qu’ils n’aboutiront pas. Chacun étant globalement satisfait du nombre de députés, exception faite d’Ennahda. Pour Faycal Mettaoui, l’Alliance, le gouvernement et le programme présidentiel, tout ce package est frappé de sanction. Les Algériens, qui ne peuvent pas manifester pacifiquement leur colère dans les rues, ont pris leur revanche en rejetant l’acte électoral, devenu, par mécanique bureaucratique, un devoir au lieu que ce soit un droit.
Dans une analyse du faible taux de participation au vote, le ministre de l’Intérieur a invité les partis à «mieux s’adapter» aux mutations que connaît la société. Manière, encore une fois, de suggérer que la faille est ailleurs, pas au niveau de la classe dirigeante. Le jeu politique est-il ouvert pour que les uns et les autres «s’adaptent» aux réalités d’aujourd’hui? Avec une incompétence structurelle à contrôler l’action du gouvernement et des pouvoirs presque nuls, avec 35% de voix, la future APN aura du mal à parler au nom de tous les Algériens. Elle manque de crédibilité, voire de légitimité. En langage simple, cela s’appelle une régression...démocratique.(3)
De fait, les élections du jeudi 17 mai ont montré le profond malaise qui a été conforté par des prestations désastreuses des candidats du pouvoir ou dans l’opposition pendant la durée d’une campagne électorale incomprise, ignorée, voire méprisée par le peuple qui ne veut plus jouer d’alibi dans le jeu de la fausse démocratie où c’est plus le contenant, le rituel qui est mis en oeuvre que le contenu réel des propositions qui, il faut bien le dire, manquent cruellement d’imagination.
A l’époque, le slogan bien connu «Daoula islamiia bla man votioue» «Une nation islamique sans que l’on vote», avait le mérite de la clarté. Le spirituel l’emportait sur le temporel, au besoin par la force. Les Algériens ont, à la place de cela, un ersatz de démocratie. Depuis donc, trente ans et avec une régularité de métronome, les Algériens sont appelés à adouber des députés qu’ils ne connaissent pas, sans programme cohérent, loin de la réalité du monde et encore imbibés de slogans d’un autre âge. On y trouve, indifféremment, ceux qui ont, mis le cap sans l’affirmer haut et fort sur une rhétorique religieuse avec des non-dits. Ceux qui s’accrochent encore à l’utopie de «l’Internationale» totalement déconnectés de la réalité du monde avec des slogans qui sont peut-être généreux: «le plein emploi, l’état-providence, les ennemis publics tels que le FMI rendus responsables de notre gabegie»...Il y a aussi les théoriciens de la démocratie qui «volent haut» sans prise réelle sur la réalité de l’Algérie profonde et enfin, les petits partis qui ne sont visibles que lors des élections.
La réponse du peuple
Il est curieux de constater pour les citoyens que nous sommes, l’acrobatie sans filet de la vingtaine de partis qui doivent, à la fois «taper sur le gouvernement» pour tenter de flatter l’électeur et sa malvie dans le sens du poil, mais cependant, en n’en faisant pas trop, pour ne pas contrarier le pouvoir et donc risquer d’hypothéquer l’avenir. La très faible participation est la réponse du peuple. Même dans les communes rurales, le bon sens paysan a prévalu. Comme l’écrit Florence Beaugé: «A une vingtaine de kilomètres de là, on ne se bousculait pas non plus, jeudi, dans les bureaux de vote de Reghaïa et Boudouaou. Pourtant, dans ces communes rurales, la participation est supposée être plus élevée que dans des villes comme Alger ou Oran. Voter? A quoi bon?, répondait d’un air indifférent la quasi-totalité des personnes interrogées dans la rue, à deux pas des bureaux de vote presque déserts. Le taux de participation s’est établi officiellement à 35,5%, soit le taux le plus bas jamais enregistré lors d’une consultation électorale en Algérie depuis l’indépendance.»(1)
Pour Aïssa Hirèche, les résultats annoncés par le ministre de l’Intérieur ce vendredi matin ne seront, certes, définitifs qu’après validation par le Conseil constitutionnel. Toutefois, ils permettent déjà une lecture assez complète. Sur les 389 sièges de l’APN, le FLN en a pris 136, soit près de 35%, alors que le RND (61 sièges) et le MSP (52 sièges) ne totalisent ensemble que 29,4% des sièges. Cette répartition de la représentation au sein de l’APN débouche sur une structure du pouvoir au sein de l’assemblée doublement favorable au parti de Belkhadem.
Désormais, c’est le FLN qui imprimera aux travaux de l’APN ses choix et ses ambitions. Il en a tous les atouts et toute la latitude. Sur un autre plan, les chiffres rendus publics soulignent quelques aspects importants qui méritent attention. Les députés qui ont un niveau de post-graduation seront au nombre de 70, soit 18% des sièges, alors qu’ils étaient 73 lors du dernier mandat et occupaient presque 19% de ces sièges.
Ce «déclin» est confirmé par ailleurs dans le cas des universitaires qui, de 245 en 2002, soit un taux de 63%, ne sont plus que 235 avec un taux de 60,4%. Ceux qui n’ont pas de niveau d’instruction ou qui, au mieux, ont fréquenté le lycée, occuperont, pour leur part, 21,6% des sièges, dont 6,5% pour ceux qui n’ont aucun niveau d’instruction.
Au moment où, autour de nous, les compétences prennent possession des rênes de leur pays, en sommes-nous encore aujourd’hui à élire des gens sans niveau d’instruction pour leur confier la charge de légiférer pour le nôtre? Se rend-on seulement compte que nous ne sommes plus dans les années soixante? Le scrutin, frappé par un taux d’absentéisme des plus forts, est un rejet, entre autres, de ces pratiques. Alors, c’est pour quand le changement?(2)
Ceci étant dit un diplôme universitaire, voire une post-graduation ne garantit pas, loin s’en faut, une compétence dans ce domaine. Ce qu’il aurait fallu ajouter c’est la contrepartie de ce que l’Etat, c’est-à-dire le contribuable, va débourser pendant cinq ans puis à vie, pour les 500 députés et sénateurs à une moyenne de 5 millions de DA (tout compris) par individu, soit 2, 5 milliards de DA et pour les cinq ans de la mandature, pas moins de 12,5 milliards de DA. C’est l’équivalent de la bourse-aumône pour 250.000 étudiants/an à qui on demande d’être performants. C’est aussi l’équivalent de la création d’une grande école pour former l’élite du pays. C’est enfin, le salaire de 25.000 diplômés à qui le ministère des Affaires sociales en bon prince octroie généreusement des CDD à 10.000DA pour des bacs +5, 6, 7;à 800km d’Alger sur l’autre rive où, à diplôme égal; le diplômé perçoit par la force de sa compétence reconnue le même salaire qu’un député qui, bien souvent, a jailli du néant et dont on ne perçoit toujours pas quelle est sa valeur ajoutée malgré les satisfecits de toute la classe politique que cette mascarade arrange puisqu’ils auront pignon sur rue pendant que le peuple s’enfonce de plus en plus dans la détresse.
Même le président de la Commission nationale politique de surveillance des élections législatives (Cnpsel), Saïd Bouchaïr, faisant savoir qu’il venait d’adresser une lettre au président Bouteflika pour dénoncer des dérives graves qui avaient entaché la journée et avaient dépassé les limites des cas isolés, n’a pas convaincu. M.Bouchaïr qui accusait nommément le FLN d’avoir fraudé à l’échelle nationale, jetant ainsi le doute sur la crédibilité des élections, la réputation du pays et l’autorité de l’Etat.
La volte-face du président la Cnpsel, Saïd Bouchaïr, n’a pas été du goût du leader du MSP, Boudjerra Soltani. «Quand on adresse une lettre de contestation au président de la République, on ne recule pas», le moment appelle réflexion, imagination et décision. Il considère tout de même que le recours introduit par la Commission nationale politique de surveillance des élections aurait dû, dans un pays démocratique digne de ce nom, entraîner l’invalidation du scrutin.
Le ministre de l’Intérieur a minimisé les soupçons de fraude. Aux dernières nouvelles, Kamel Kecil, le rapporteur de la Commission nationale politique de surveillance des élections législatives, Cnpsel, a animé, vendredi 18 mai, un point de presse. Selon l’intervenant, et contrairement à ce qui a été affirmé par Zerhouni, «M.Bouchaïr ne s’est pas rétracté ou présenté des excuses». Selon le rapporteur de la Cnsepl «cette commission a élaboré un travail collectif et M. le coordinateur a été chargé de l’annoncer lors d’une conférence de presse, chose qu’il a faite sans présenter ses excuses». Le problème reste entier et curieusement tous les partis politiques d’un bout à l’autre du curseur, font preuve d’un silence assourdissant tout en introduisant, pour la forme, des recours dont on sait qu’ils n’aboutiront pas. Chacun étant globalement satisfait du nombre de députés, exception faite d’Ennahda. Pour Faycal Mettaoui, l’Alliance, le gouvernement et le programme présidentiel, tout ce package est frappé de sanction. Les Algériens, qui ne peuvent pas manifester pacifiquement leur colère dans les rues, ont pris leur revanche en rejetant l’acte électoral, devenu, par mécanique bureaucratique, un devoir au lieu que ce soit un droit.
Dans une analyse du faible taux de participation au vote, le ministre de l’Intérieur a invité les partis à «mieux s’adapter» aux mutations que connaît la société. Manière, encore une fois, de suggérer que la faille est ailleurs, pas au niveau de la classe dirigeante. Le jeu politique est-il ouvert pour que les uns et les autres «s’adaptent» aux réalités d’aujourd’hui? Avec une incompétence structurelle à contrôler l’action du gouvernement et des pouvoirs presque nuls, avec 35% de voix, la future APN aura du mal à parler au nom de tous les Algériens. Elle manque de crédibilité, voire de légitimité. En langage simple, cela s’appelle une régression...démocratique.(3)
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