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Pakistan: Musharraf entend bien rester au pouvoir

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  • Pakistan: Musharraf entend bien rester au pouvoir

    Musharraf n'entend pas lâcher les rênes du Pouvoir et réprime de façon sanglante toute manifestation et opposition. De plus le Pakistan est un poudrière qui détient l'arme nucléaire et si lui part qui lui succèdera?

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    Le général Musharraf n’en démord pas. Au lieu de se soumettre au suffrage universel, il compte finalement se faire réélire à la présidence du pays par les Assemblées. Il a également rappelé qu’il prendrait la tête de la coalition au pouvoir et qu’il la mènerait à la victoire aux prochaines législatives prévues à l’automne 2007. Il a ainsi ouvertement réaffirmé sa partialité, attitude particulièrement déplacée de la part du chef de l’Etat. Ses déclarations ont un écho dangereux en cette année électorale. D’aucuns auraient tendance à interpréter les manifestations du 12 mai dernier à Karachi [qui rassemblaient des opposants au régime] à la lueur de sa détermination à rester aux commandes avec l’aide de ses alliés du moment. Le général considère le mouvement des avocats – qui sont à l’origine des manifestations et qui réclament la réintégration du président de la Cour suprême limogé en mars dernier – comme une menace pour sa survie politique. Il accuse ses détracteurs de politiser la question de l’avenir professionnel d’Iftikhar Chaudhry, le premier magistrat du Pakistan.

    Tout le monde est d’accord pour reconnaître que, d’Islamabad à Lahore, le juge limogé a été accueilli de façon triomphale par le peuple, chose insupportable aux yeux de Musharraf et de ses conseillers. Il a donc été décrété que cela ne saurait se produire à Karachi, et qu’il faudrait l’empêcher par tous les moyens, même les plus radicaux. Le Muttahidda Qaumi Movement [MQM, groupe politique violent particulièrement bien implanté dans la capitale économique] a alors eu les mains libres et a pu veiller à ce que le juge ne puisse quitter l’aéroport, tandis que les juristes, les groupes représentant la société civile et les partis de l’opposition étaient dans l’incapacité d’organiser des rassemblements. Pour permettre au MQM de se charger du sale boulot, les forces de l’ordre ont été placées sous son contrôle. Le parti a proclamé que Karachi était son fief exclusif et qu’il ne tolérerait la présence d’aucune autre formation politique. Tout au long de la journée, des bandes armées ont perpétré des agressions meurtrières contre des manifestants pacifiques de l’opposition.

    Plus de 50 personnes ont été tuées et 150 blessées. Sous l’œil des caméras de télévision, des véhicules débarquaient des jeunes qui ont ouvert le feu et qui se comportaient comme des combattants professionnels entraînés. Des tireurs ont pris pour cible la salle de rédaction d’Aaj TV, dont ils ont encerclé les locaux pendant des heures. Les journalistes ont appelé à l’aide, en vain. Au même moment, la police et les brigades militaires surveillaient les événements le fusil au pied, au lieu d’intervenir pour rétablir la sécurité. La ville, cœur industriel du pays, est restée fermée pendant trois jours. Le 15 mai, les violences se poursuivaient et le nombre des victimes ne cessait d’augmenter.

    Un message très négatif en pleine année électorale


    Tout le pays a donc le sentiment que le président est décidé à mener la bataille pour sa survie politique sans faire de quartier. Les forces de l’ordre, censées agir avec impartialité, ont été mises à la disposition de ses alliés politiques. Cela ne s’était jamais produit par le passé. Survenant en pleine année électorale, le bain de sang de Karachi a fait passer un message extrêmement négatif. Les plus hautes autorités judiciaires avaient ordonné la libre circulation de l’ancien président de la Cour suprême dans la ville, en vain. Les directives exigeant le retrait des barrages sur les routes n’ont pas non plus été appliquées. Cela revient à montrer à l’homme de la rue que ni les forces de l’ordre ni les tribunaux ne pourront ou ne voudront venir à son aide dans le cas où il lui arriverait de s’opposer aux diktats du pouvoir.

    Et, maintenant, des indices tendent à prouver que le gouvernement se prépare à réprimer les médias. La coalition au pouvoir n’a guère apprécié la couverture accordée aux manifestations des avocats et l’écoute dont a bénéficié le juge Chaudhry de la part des groupes de défense des droits civiques et de l’opposition. A l’approche des élections, ce mécontentement ne peut que s’accroître. Les dirigeants doivent toutefois soupeser les implications de cette situation. Transformer les forces de l’ordre en valets du gouvernement sape la confiance du citoyen lambda dans les institutions et contribue à l’éloigner de l’Etat. Si les médias présentent la réalité du point de vue rose bonbon de la présidence, ils se discréditeront aux yeux du public. Dans des sociétés comme la nôtre qui pratiquent l’économie de marché, les journaux et les télévisions ne peuvent s’offrir le luxe de faire fi du sentiment de la rue.

    Le gouvernement semble déterminé à soumettre la justice, les médias et l’opposition, volonté qui ne manquera pas de torpiller la confiance populaire dans sa volonté d’organiser des élections libres et justes.
    A moins que le président ne fasse machine arrière en annulant le limogeage de Chaudhry, en exigeant que les forces de l’ordre restent impartiales et en laissant les journalistes travailler en toute indépendance. Sinon, il est probable que l’opposition parvienne à s’unir sur un point : non à des élections avec le président Musharraf, que ce dernier conserve ou non ses fonctions militaires.


    Aziz-ud-Din Ahmad The Nation- Le Courrier International
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