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1er Festival national de la musique gnawie à Béchar

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  • 1er Festival national de la musique gnawie à Béchar

    Quand la fusion phagocyte le gnawi originel
    Comme s'y attendaient les organisateurs, le public était plus nombreux lundi dernier à la deuxième soirée du premier Festival de la musique gnawie qui se clôture ce soir au stade Enasr à Béchar. Un bon nombre de familles ont occupé les gradins. Toutefois, la scène reste inaccessible, encore trop éloignée du public qui ne pouvait apercevoir les artistes qu'à travers le grand écran installé à cet effet. Le contact entre artistes et spectateurs est difficile.
    Au programme de cette soirée, El Ferda, Esserr de Kenadsa et la célèbre troupe Gaada diwan Béchar qui, gardée pour la fin, a animé la partie la plus importante de la soirée. El Ferda, fidèle à son style el melhoun, amorce les spectacles devant un public plus enthousiaste que la veille. Il cédera ensuite la place à un groupe natif de Kenadsa, Esserr, dont la prestation a agréablement surpris le public. Leur musique, inspirée du gnawi marocain, habille la poésie très présente. Le groupe ne se contente pas d'offrir du festif mais invite le spectateur à plonger dans la philosophie du gnawi à travers les poésies qui sont récitées dans une sorte d'istikhbar. Le mandole octave côtoie la percussion traditionnelle alors que le goumbri et les karkabous donnent les rythmes marocains qui rappellent Lem'chaheb, Essiham et El Ghiwan, ces groupes marocains qui, avec Djil Djilala, ont révélé, porté et transporté le gnawi au-delà des frontières du Maghreb.
    Le groupe emprunte à Lem'chaheb et Essiham leurs mélodies et à Nass El Ghiwan leurs textes percutants. Il y ajoute sa touche dans la composition. «Grâce à ces groupes, Nass El Ghiwan notamment, le tagnawit s'est libéré du monopole du goumbri, du tam-tam et du karkabu. De notre côté, nous tentons de faire la même chose en fusionnant les différents styles. Les musiciens qui se sont produits ce soir sur scène sont la 3ème génération de ce groupe qui existe depuis 28 ans et nous avons enregistré jusqu'à présent 28 chansons», a expliqué le leader du groupe.
    Enfin, Gaada diwan de Béchar investit la scène, pour le plus grand plaisir de ses fans. Bien que manquant un peu de tonus (on les a vus plus en forme sur d'autres scènes), le groupe a offert comme à son habitude un melting-pot de styles algériens variés avec une base gnawie. Aïcha Labgaa en tête, le groupe puise dans les rythmes africains, la musique classique algérienne et le chaabi.
    Basse et batterie se joignent à la percussion traditionnelle pour accompagner les voix graves des chanteurs et celle aiguë de Aïcha Labgaa qui ne manquera pas d’interpréter Ghoumari, la chanson à laquelle elle doit sa renommée.
    Pour le final, le public aura droit à une jam session que leur offriront Gaâda diwan de Béchar et el Ferda avec l’interprétation du fameux Abou Ziane, une des suppliques les plus célèbres du gnawi dont l’origine est encore indéfinie, comme l’histoire des gnawas et de leur culture.
    En effet, les recherches effectuées à ce jour sur cette population, ses origines et sa culture sont sujettes à débats, voire controverses. Une des thèses avancées affirme que les Gnawis sont les descendants d’esclaves qui, libérés avec l’avènement de l’islam, se sont établis sur le pourtour du plateau de Tadmaït. Cette thèse a été défendue par Hanane Abdelmalek de l’université de Sidi Bel Abbès lors de la conférence organisée en marge du festival à la maison de la culture de Béchar. Reprenant certains spécialistes, la conférencière dira que les rythmes et les sonorités de la musique gnawie seraient inspirés des sons de l’entrechoquement des fers par les esclaves en signe de protestation.
    C’est, à quelques nuances près, l’histoire de l’origine du blues.
    Cette thèse est cependant contredite par l’universitaire Hadj Miliani qui se déclare ne pas être convaincu. D’autres conférences suivront tout au long de ce festival pour essayer d’apporter plus de lumière sur cette musique et cette population qui, tant qu’elles étaient «confinées» dans ces régions ont su se préserver de toutes interférences dénaturantes. Mais le temps de la fusion venu, les choses ont évolué autrement. Des croisements des cultures, comme la rencontre du gnawi et du flamenco, qui préservaient l’authenticité des genres tout en les rapprochant et en mettant en valeur leurs points communs, on est arrivé aux fusions où, souvent, le gnawi n’était représenté que par les karkabous noyé dans une débauche de rythmes et sonorités très world music, un pâté cheval-alouette en somme.

    F. B.(La Tribune)
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