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Les 13% de l'Alliance présidentielle et les abstentionnistes

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  • Les 13% de l'Alliance présidentielle et les abstentionnistes

    Quand le peuple n'est pas content de son gouvernement, faut-il changer de peuple?

    Chez nous, l'on ne cesse de dire : « li b'id men zâzâ, bi 'aqlou » et l'on plaint ceux qui ont des responsabilités. La sublime de toutes est celle de gouverner. De gouverner au nom de tous. De gouverner comme Premier Magistrat du peuple souverain. Alors il est plus facile de prendre son clavier et de commenter, critiquer, stigmatiser : « après tout, personne ne l'a obligé ! pourquoi se gêner ? »

    Avec le gouvernement intérimaire du premier week-end de ce mois et, au finish, le non-remaniement ministériel, notre déception est grande. Le dégoût, la stupeur, l'incompréhension se sont installés. Surtout après l'espoir de la (vraie-fausse) démission du Chef du gouvernement - et le « enfin des technocrates ! ». Des commentaires désobligeants ont été faits. Certains évacuent la question épineuse : y a-t-il d'autres solutions ? Des solutions jouables ? Des solutions de gouvernance crédibles, durables ?

    Comment peut-on installer un gouvernement sans majorité parlementaire ? Telle est la quadrature du cercle face à laquelle l'on s'est trouvé. Que dira alors l'Algérie au monde ? Notre realpolitik, le politique à la Bouteflika, la vie politique à l'ère de Bouteflika (avec ses multiples ramifications connues - officielles ou souterraines) sont dominées par cette dimension lourde: l'image de l'Algérie à l'étranger.

    L'on ne peut en effet saisir les choix politiques « en interne » du président de la République en faisant fi de cette donnée. Aussi : Parlement il y a, faisons avec ! Là gît la légitimité constitutionnelle de l'action gouvernementale. Là coexistent les forces politiques d'appui. Et là aussi doit-on puiser certains ministres (qui représenteront ces forces).

    Bien sûr, gouverner avec les mêmes quand 2 Algériens sur 3 se sont abstenus et que l'Alliance présidentielle ne pèse que 13% (du corps électoral) n'est pas un choix heureux...et ne paraît pas politiquement crédible.

    Sans aller jusqu'à scruter la boule de cristal et y lire les « intentions du Président », ou affirmer que la reconduction du gouvernement n'a pas été faite de gaieté de coeur ou, pire, faire le procès de cette dernière (d'ailleurs malvenu : les prérogatives présidentielles ne se discutent pas !), nous pouvons néanmoins présenter quelques constats.

    Depuis la Législature issue de la Constitution de 1976, la longévité des gouvernements successifs a été marquée par sa réduction au point d'arriver à des Chefferies de moins d'un an (dans les années 90). Seuls les 2 avant-derniers Chefs de gouvernement (M. Benflis et M. Ouyahia) ont pu dépasser le cap de 30 mois et ont pu donc s'inscrire dans la durée. Avec le maintien de M. Belkhadem, une sorte de tradition s'installe. Est-ce que cette « règle » (introduite par M. Bouteflika) a-t-elle pesé dans les choix alternatifs actuels du jeu politique gouvernemental ? Qui pourrait le dire ?

    Selon nous, si quête de stabilité gouvernementale il y a, elle serait alors bien au-delà des questions : des partis politiques d'appui (Alliance ou Majorité présidentielle) ou de compétences individuelles (des Hauts Cadres de la Nation dont les ministres). L'idée sous-jacente ici est (comme disait un dirigeant) : « le problème en Algérie n'est pas d'avoir des ministres compétents mais des MINISTERES QUI MARCHENT ». Le président de la République, tout dernièrement à Annaba, allait (à peu près) dans le même sens en déclarant que deux (02) problèmes méritent la plus grande attention (ici en s'adressant aux investisseurs) : le management et la maintenance.

    De ce point de vue, remanier le gouvernement en profondeur aurait créer des dissonances. Ces dernières auraient non seulement été diversement interprétées mais nuiraient à l'efficacité de la mise en oeuvre des Lettres de mission (cadrant les périmètres d'activité et les cahiers des charges des ministres).

    Ces dissonances apparaîtraient quand, par exemple, l'opinion croirait que le Président a modifié le gouvernement et a, de ce fait, accédé à la demande de son Chef du gouvernement actuel (qui, il y a quelques mois, souhaitait des « retouches »). Le Président aurait penché vers le rouleau compresseur du plus vieux parti (au détriment des autres, RND et MSP, qui cependant veillent au grain).

    Alors (pour continuer avec les effets des dissonances), les « mauvaises langues » n'auraient pas hésité, pour certaines, à relever le grignotage des prérogatives du Président, et pour d'autres à parler de son « affaiblissement stratégique » (face aux Régents de la république, et à l'inverse : le non-remaniement n'est-il pas déjà interprété comme résultant d'un bras de fer où le statu quo est apparu comme la seule issue ?).

    De tout cela, aucun dirigeant politique - de ce niveau - n'en veut ! Car si l'image du pays à l'étranger est un point de focalisation, l'image du Président dans l'opinion est une obsession !

    Dans le même sillage, l'on pourrait tout aussi bien voir dans cette reconduction quasi intégrale du gouvernement Belkhadem un « message » : les ministres « politiques » sont des ministres choisis par le président de la République pour n'exécuter que son Programme et ne suivre que ses Directives, choisis en somme comme ministres de la République pour leurs « actifs spécifiques » (comme disent les économistes néo-institutionnalistes), « actifs » que seul le Président sait apprécier (comme tout Grand Manager) ?

    Dans ce cas de figure, l'évaluation - par le Président - de l'opportunité de leur démission répond à une toute autre logique que celle des « arrangements » politiciens. En l'occurrence ici, l'on pourra dire que M. Bouteflika n'a pas voulu céder : il veut rester maître du jeu (ses Décisions ne dépendant pas des « contingences » !). Or la tentation d'un gouvernement serré autour d'experts incontestés dans leur domaine - avec de grands départements ministériels (qui, dès 1999, ont eu la faveur du président-candidat) - est toujours là. Tant dans l'opinion que de larges franges de la société civile et de la classe politique. L'empreinte des premiers gouvernements de Boumédiène est, ferons-nous constater, encore prégnante. A la voie césaro-bonapartiste de ce dernier (avec un FLN-appareil du parti réduit au strict service minimum...), succède « la tentative d'assassinat du jeu démocratique » (avons-nous écrit dans Le Quotidien il y a quelques mois). C'est à cela que correspond cette demande politique de « gouvernement de technocrates ». Une demande qui a perçu dans les derniers événements politiques une valse-hésitation du président de la République (interprétée comme résultante d'un bras de fer).

    Mais dans le camp des abstentionnistes que rien de cela n'intéresse - même pour nourrir notre penchant à l'humour noir ! - la question, qui, de toutes les façons, tarabuste et demeure, est celle de savoir : quand le peuple n'est pas content de son gouvernement, faut-il changer de peuple (dixit B. Brecht) ?

    Par Fouad Hakiki , économiste-Le quotidien d'Oran
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