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L'Etat et le coût réel de l'eau en Algérie

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  • L'Etat et le coût réel de l'eau en Algérie

    En Algérie, du côté des pouvoirs publics et par la voie du ministère des Ressources en eau, on reconnaît que les tarifs appliqués actuellement sont largement loin du coût de revient. Il est utile de rappeler que, malgré cette réalité, les prix ont stagné pendant près de dix ans. Le mètre cube d’eau potable était vendu à 9,80 DA/m3 TTC pour un coût de revient de 25 DA/m3. Ce n’est qu’en janvier 2005 que le tarif de base a été revu à la hausse par décret exécutif n°05-13 correspondant au 9 janvier 2005 .

    Le gouvernement de l’époque le justifie par le coût de revient qui demeure élevé par rapport à la tarification exercée par l’Algérienne des eaux (ADE).
    Elle est donc depuis cette date de 6,30 DA/m3 en hors taxes pour la zone territoriale dont font partie Alger, Oran et Constantine ; 6,10 (zone Chlef) et 5,80 (zone Ouargla). Selon le ministère, cette augmentation, une moyenne de 2,5 DA/m3, concerne les ménages et les agriculteurs.

    Des coûts de revient à la production nettement supérieurs au tarif à la consommation

    Selon nos interlocuteurs, le coût de revient est la somme de plusieurs éléments. En d’autres termes, il se compose du coût de la collecte et de la mobilisation, de celui de la distribution de l’eau potable jusqu’aux robinets des consommateurs et de celui de la maintenance des ouvrages. «Au bout du compte, on se retrouve avec un écart flagrant entre le coût économique et la tarification exercée. Cette différence étant prise en charge par l’Etat sous la forme de subvention implicite tirée du budget de l’Etat. De plus, il faut savoir que le soutien dont bénéficie l’eau est multiforme et diffuse», nous ont déclaré d’ex-cadres du secteur auxquels nous avons demandé d’être plus explicites sur cette dernière lecture. Ils diront que «le soutien prend la forme de dépenses budgétaires non imputées au prix de la production de l’eau et de son transport ; de dépenses fiscales non identifiées comme telles, à l’effet de maintenir le prix de l’eau à des niveaux accessibles». Sur ce dernier point, on peut citer une déclaration du ministre des Ressources en eau qui, à l’occasion d’une intervention devant les micros de la Chaîne III, avait déclaré : «Compte tenu du pouvoir d’achat des Algériens, l’Etat ne peut pas augmenter si facilement le prix de l’eau.

    Aujourd’hui, il s’agit juste de réduire un peu l’écart, c’est-à-dire de rapprocher un tant soit peu le prix exercé par l’ADE du coût réel de l’investissement. Une telle démarche vise à améliorer la qualité de services, notamment en organisant le réseau de distribution». Il soulignera que la dernière tarification mise en application depuis janvier 2005 reposait sur le souci de sauvegarder les citoyens de la couche dite sociale. Et de préciser à la même occasion : «Le coût de l’investissement n’a pas été répercuté sur les prix exercés jusque-là. Si on le fait répercuter, le prix d’un mètre cube reviendra à près de 60 DA.» Aussi, le ministre exclut l’option de livrer l’eau à son coût économique.

    L’Etat peut-il continuer à maintenir le dispositif de subvention implicite ?
    Nos interlocuteurs se posent la question suivante : l’Etat aura-t-il toujours les moyens de livrer l’eau au prix actuel ? Pour eux, «le soutien apporté dans le domaine de l’eau, qu’il soit explicite ou implicite, a un effet pervers dont le pays ne pourrait plus assumer les conséquences». En clair, «la non-maîtrise des besoins par la voie des prix maintiendra le pays dans la situation de solutions de plus en plus coûteuses, voire de non-solutions». Ils feront savoir également : «La problématique des subventions dont bénéficie l’eau prend une dimension telle que sa prise en charge ne peut plus se contenter d’une gestion de l’offre». Et de lancer : «La logique de la gestion de l’offre seule est économiquement ruineuse, socialement inéquitable et politiquement insoutenable.» En somme, pour eux, «l’Etat seul ne peut plus aller loin.» Et d’expliquer : «Les enjeux des subventions implicites, comme des subventions explicites, interpellent l’Etat sur le devenir du dispositif à un horizon qui rattrape rapidement le pays : l’Etat aura-t-il toujours les moyens de livrer l’eau aux prix actuels ? Et même si la réponse était positive, aurait-il intérêt à le faire ? Les enjeux pour l’avenir concernent, entre autres, l’eau. Ce sont à la fois l’Etat, les opérateurs économiques et les consommateurs qui sont concernés.» A leur avis, «l’Etat est amené tout naturellement à reconsidérer les éléments de base pour que puissent être préservées les perspectives de satisfaction de la demande locale en eau. Une demande qui doit être gérée pour le présent et pour le futur».

    Pour l’heure, il s’agit de concilier le prix ou tarif administré et le prix économique

    Il est convenu que, si le tarif administré est connu, puisque fixé par voie réglementaire, celui économique est inscrit à l’enseigne de concept complexe. Cependant à quoi correspond-il ? Selon un cadre de l’Agence nationale des barrages (ANB) qui réalise les barrages et les installations en aval pour le compte de l’Etat, «il peut correspondre à différentes définitions suivant que l’on intègre l’ensemble des éléments de coûts ou pas».
    Et de préciser : «Il faut retenir le coût de production comptable moyen, le coût marginal comptable de production ou le coût marginal de long terme qui intègre le programme de développement. Cette grille de choix n’est sans doute pas exhaustive ; elle est nécessaire dans la mesure où elle va permettre de dégager les coûts normatifs et prendre en compte les surcoûts des ouvrages constituant les installations utiles pour la production de l’eau, à savoir toute la chaîne composée de barrages ou de forages, des unités de dessalement de l’eau de mer, des usines de traitement de l’eau, des canalisations d’adduction, des installations de stockage ainsi que les conduites de livraison.
    En somme, ce sont là des éléments mesurables par lesquels on détermine le prix économique à la production de l’eau et d’en mesurer les subventions implicites.»

    Calcul de la subvention implicite

    Il faut d’abord calculer le coût de production complet (ou full cost) tel qu’il a été défini plus haut pour les quantités livrées à partir des installations existantes. Le coût de production de l’eau distribuée se compose du coût de la mobilisation (barrages, entretien et fonctionnement), de ceux du traitement, de la distribution (réseau) et de l’assainissement des eaux usées.
    On apprendra par ailleurs que les coûts moyens pondérés se situent entre 18 et 23 DA le mètre cube. Ces coûts concernent l’eau mobilisée, traitée et transportée en tête de réseau. Les charges servant de base au calcul sont les charges d’entretien et de maintenance des ouvrages, propriété publique; celles d’exploitation et de fonctionnement des structures de gestion ; les provisions et amortissement des équipements ; les charges financières.
    Il est important de noter au sujet de l’eau produite à partir des unités de dessalement de l’eau de mer que le tarif proposé à Sonatrach et l’ADE est fixé à 0,75 dollars/m3 alors que le coût moyen est de 48 DA/m3. Ainsi, l’Etat participe dans le différentiel entre le prix et le coût de l’eau provenant des barrages. Reste à savoir combien de temps l’Etat continuera à assumer seul cette charge.

    L’hypothèse d’une nouvelle tarification n’est donc pas à exclure mais comme il est question de laisser le prix de l’eau accessible à une large frange de la population, on ne pourra jamais atteindre son coût de production réel.

    Par La Tribune
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