Si la présence de la Mauritanie aux négociations entre le Maroc Polisario peut se justifier, celle de l’Algérie n’a aucun sens.
Car le problème, c’est justement l’Algérie.
Que cherche Alger?
Le soutien algérien à la thèse du Polisario «est devenu une énigme peu explicable par la légalité internationale que l'Algérie défend». Ce n'est pas une publication marocaine qui fait ce constat, mais un journal algérien, Le Quotidien d'Oran. Les témoignages réconfortants qui viennent de l'autre camp sont les meilleurs, dit un vieux proverbe arabe. C'est précisément le cas.
Comment faut-il prendre cet aveu si proche d'une vérité têtue, dans un pays où la presse indépendante, à peine naissante, souffre encore de la culture du parti hégémonique et de tous les anachronismes qui vont avec? Avec prudence, évidemment. Mais ce sursaut de parler-vrai vient, néanmoins, à point nommé. À savoir au moment où s'ouvraient, les 18 et 19 juin 2007, dans la banlieue new-yorkaise, des négociations directes entre le Maroc et le Polisario. En présence de la Mauritanie et de… l'Algérie.
Deux questions viennent d'emblée à l'esprit: Négocier quoi? Et pourquoi la présence pesante de l'Algérie, même si celle de la Mauritanie se justifie à plus d'un égard?
Un rappel pour commencer. Ces négociations ont été voulues, supervisées et organisées par les Nations Unies. Elles se sont déroulées sous la conduite de Peter Van Walsum, représentant personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara. Le dernier du nom, après une procession d'illustres prédécesseurs aguerris, tout au long de la trentaine d'années que ce conflit dure et perdure. Le Maroc s'y est préparé. Il était temps, pourrait-on dire. On lui a souvent reproché de ne pas fournir d'alternative aux gesticulations séparatistes du Polisario. C'est fait. Le plan d'autonomie élargie pour nos provinces sahariennes tient lieu de proposition de “solution politique” négociée, pacifique et soumise à une appréciation concertée par les parties prenantes à ce litige trentenaire. Des émissaires officiels ont sillonné le monde pour expliquer l'offre marocaine adaptée à la spécificité de cette région sans, pour autant, attenter à l'intégrité territoriale du Maroc et à sa souveraineté nationale. Les membres permanents du Conseil de sécurité et ses “intermittents” tournants ont été sensibilisés quant à la nature pernicieuse de ce dossier et à la pertinence de l'initiative marocaine. Malgré l'édulcoration par les canaux convenus de l'information, sur un sujet aussi sensible, les échos ont été plutôt compréhensifs.
Dans les salons feutrés de l'esplanade gazonnée de la résidence Greentree, à Long Island, où se déroule cette prise de langue aux allures de dernière chance, la meilleure des diplomaties marocaines ne pouvait donner que ce qu'elle a. La construction d'un avenir régional commun au mieux des intérêts bien compris des cinq pays du Maghreb. Dans cet espace de négociation, toutes les formes de coopération économiquement développantes et humainement porteuses sont possibles. À l'exclusion de la cession d'une partie du territoire national pour qu’y soit installé un crypto-État croupion. Les jeux et les enjeux sont donc clairs, malgré les méandres, parfois troublants, de la diplomatie.
Ceci étant dit; et l'Algérie dans tout cela? L'Algérie est au cœur du problème. Le pouvoir d'Alger en a été le maître d'œuvre, l'instigateur, l'entreteneur et le premier pourvoyeur en encadrement et en gazo-dollars.
Il a été suffisamment écrit que la question du Sahara est une création algérienne, depuis Houari Boumediène, au début des années 1970, jusqu'à son ancien lieutenant, aujourd'hui au pouvoir, Abdelaziz Bouteflika. C'est désormais connu, encore faut-il le rappeler, “Le Sahara -disait le tombeur de Ahmed Ben Bella en 1965- c'est un cailloux dans la botte du Maroc”. Difficile d'être plus négatif dans les rapports entre États voisins. Houari Boumediène avait l'excuse du contexte, de la guerre froide et du mur de Berlin pas encore tombé. Trente ans après, son ex-poulain y est toujours. Cela paraît surréaliste, mais c'est ainsi. Ce qui n'empêche pas d'essayer de comprendre. Alors, allons-y!
Quels sont les ressorts de la position algérienne sur la question du Sahara? Quels en sont les slogans de façade et les motivations profondes?
L'Algérie brandit, comme un épouvantail rédhibitoire, le principe de “l'autodétermination des peuples” et de “l'achèvement de la décolonisation”. Quel peuple à autodéterminer et quelle décolonisation à parachever?
À moins que l'on brûle les annales historiques de la région, pour en faire un autodafé amnésiant, les Sahraouis sont marocains et le Sahara est partie intégrante du Maroc. Le pouvoir algérien sait, pertinemment, que le Maroc ne peut se concevoir sans ses provinces sahariennes.
Tout comme Sebta et Melilia, les deux présides du nord, encore sous occupation espagnole -comme l'était le Sahara- sont toujours revendiqués au nom du fil inaltérable de l'histoire humaine et de la logique immuable de la géographie. Si l'on admet ces données, somme doute faciles à intégrer, comment rendre intelligible l'acharnement algérien à empêcher une issue raisonnable et réaliste de la question du Sahara? Le chroniqueur du Quotidien d'Oran, tout comme nous-mêmes, ne comprend pas. Il évacue l'alibi de la décolonisation, le besoin d'une ouverture sur l'Atlantique et les richesses minières, réelles ou supposées, que recèlerait le sous-sol du Sahara. Il en arrive à retenir une seule hypothèse: “l'affaiblissement territorial du voisin”. Réflexion bien menée. Car, c'est de cela, effectivement, qu'il s'agit. Mais pourquoi affaiblir le Maroc, en voulant l'amputer d'une partie de son territoire? Pour quel objectif? C'est à partir de cette interrogation que l'on s'enfonce dans un irrationnel dangereux, érigé en raison d'État. Forte de ses cinquante milliards de dollars en revenus d'hydrocarbures, l'Algérie ne s'est jamais départie de son rêve de super-puissance régionale, voire continentale. Un fantasme hégémonique en décalage total avec les réalités actuelles. Par les temps qui courent très vite vers la mondialisation, la tendance irrésistible est au regroupement et au dépassement des frontières.
En principe et dans les faits, la question du Sahara devrait être soluble dans cette dynamique. À condition que l'Algérie de Boumediène et de Bouteflika s'y inscrive. Pour le présent et pour l'avenir.
maroc-hebdo
Car le problème, c’est justement l’Algérie.
Que cherche Alger?
Le soutien algérien à la thèse du Polisario «est devenu une énigme peu explicable par la légalité internationale que l'Algérie défend». Ce n'est pas une publication marocaine qui fait ce constat, mais un journal algérien, Le Quotidien d'Oran. Les témoignages réconfortants qui viennent de l'autre camp sont les meilleurs, dit un vieux proverbe arabe. C'est précisément le cas.
Comment faut-il prendre cet aveu si proche d'une vérité têtue, dans un pays où la presse indépendante, à peine naissante, souffre encore de la culture du parti hégémonique et de tous les anachronismes qui vont avec? Avec prudence, évidemment. Mais ce sursaut de parler-vrai vient, néanmoins, à point nommé. À savoir au moment où s'ouvraient, les 18 et 19 juin 2007, dans la banlieue new-yorkaise, des négociations directes entre le Maroc et le Polisario. En présence de la Mauritanie et de… l'Algérie.
Deux questions viennent d'emblée à l'esprit: Négocier quoi? Et pourquoi la présence pesante de l'Algérie, même si celle de la Mauritanie se justifie à plus d'un égard?
Un rappel pour commencer. Ces négociations ont été voulues, supervisées et organisées par les Nations Unies. Elles se sont déroulées sous la conduite de Peter Van Walsum, représentant personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara. Le dernier du nom, après une procession d'illustres prédécesseurs aguerris, tout au long de la trentaine d'années que ce conflit dure et perdure. Le Maroc s'y est préparé. Il était temps, pourrait-on dire. On lui a souvent reproché de ne pas fournir d'alternative aux gesticulations séparatistes du Polisario. C'est fait. Le plan d'autonomie élargie pour nos provinces sahariennes tient lieu de proposition de “solution politique” négociée, pacifique et soumise à une appréciation concertée par les parties prenantes à ce litige trentenaire. Des émissaires officiels ont sillonné le monde pour expliquer l'offre marocaine adaptée à la spécificité de cette région sans, pour autant, attenter à l'intégrité territoriale du Maroc et à sa souveraineté nationale. Les membres permanents du Conseil de sécurité et ses “intermittents” tournants ont été sensibilisés quant à la nature pernicieuse de ce dossier et à la pertinence de l'initiative marocaine. Malgré l'édulcoration par les canaux convenus de l'information, sur un sujet aussi sensible, les échos ont été plutôt compréhensifs.
Dans les salons feutrés de l'esplanade gazonnée de la résidence Greentree, à Long Island, où se déroule cette prise de langue aux allures de dernière chance, la meilleure des diplomaties marocaines ne pouvait donner que ce qu'elle a. La construction d'un avenir régional commun au mieux des intérêts bien compris des cinq pays du Maghreb. Dans cet espace de négociation, toutes les formes de coopération économiquement développantes et humainement porteuses sont possibles. À l'exclusion de la cession d'une partie du territoire national pour qu’y soit installé un crypto-État croupion. Les jeux et les enjeux sont donc clairs, malgré les méandres, parfois troublants, de la diplomatie.
Ceci étant dit; et l'Algérie dans tout cela? L'Algérie est au cœur du problème. Le pouvoir d'Alger en a été le maître d'œuvre, l'instigateur, l'entreteneur et le premier pourvoyeur en encadrement et en gazo-dollars.
Il a été suffisamment écrit que la question du Sahara est une création algérienne, depuis Houari Boumediène, au début des années 1970, jusqu'à son ancien lieutenant, aujourd'hui au pouvoir, Abdelaziz Bouteflika. C'est désormais connu, encore faut-il le rappeler, “Le Sahara -disait le tombeur de Ahmed Ben Bella en 1965- c'est un cailloux dans la botte du Maroc”. Difficile d'être plus négatif dans les rapports entre États voisins. Houari Boumediène avait l'excuse du contexte, de la guerre froide et du mur de Berlin pas encore tombé. Trente ans après, son ex-poulain y est toujours. Cela paraît surréaliste, mais c'est ainsi. Ce qui n'empêche pas d'essayer de comprendre. Alors, allons-y!
Quels sont les ressorts de la position algérienne sur la question du Sahara? Quels en sont les slogans de façade et les motivations profondes?
L'Algérie brandit, comme un épouvantail rédhibitoire, le principe de “l'autodétermination des peuples” et de “l'achèvement de la décolonisation”. Quel peuple à autodéterminer et quelle décolonisation à parachever?
À moins que l'on brûle les annales historiques de la région, pour en faire un autodafé amnésiant, les Sahraouis sont marocains et le Sahara est partie intégrante du Maroc. Le pouvoir algérien sait, pertinemment, que le Maroc ne peut se concevoir sans ses provinces sahariennes.
Tout comme Sebta et Melilia, les deux présides du nord, encore sous occupation espagnole -comme l'était le Sahara- sont toujours revendiqués au nom du fil inaltérable de l'histoire humaine et de la logique immuable de la géographie. Si l'on admet ces données, somme doute faciles à intégrer, comment rendre intelligible l'acharnement algérien à empêcher une issue raisonnable et réaliste de la question du Sahara? Le chroniqueur du Quotidien d'Oran, tout comme nous-mêmes, ne comprend pas. Il évacue l'alibi de la décolonisation, le besoin d'une ouverture sur l'Atlantique et les richesses minières, réelles ou supposées, que recèlerait le sous-sol du Sahara. Il en arrive à retenir une seule hypothèse: “l'affaiblissement territorial du voisin”. Réflexion bien menée. Car, c'est de cela, effectivement, qu'il s'agit. Mais pourquoi affaiblir le Maroc, en voulant l'amputer d'une partie de son territoire? Pour quel objectif? C'est à partir de cette interrogation que l'on s'enfonce dans un irrationnel dangereux, érigé en raison d'État. Forte de ses cinquante milliards de dollars en revenus d'hydrocarbures, l'Algérie ne s'est jamais départie de son rêve de super-puissance régionale, voire continentale. Un fantasme hégémonique en décalage total avec les réalités actuelles. Par les temps qui courent très vite vers la mondialisation, la tendance irrésistible est au regroupement et au dépassement des frontières.
En principe et dans les faits, la question du Sahara devrait être soluble dans cette dynamique. À condition que l'Algérie de Boumediène et de Bouteflika s'y inscrive. Pour le présent et pour l'avenir.
maroc-hebdo
Commentaire