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Une journée à Ikedjane -Tasga

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  • Une journée à Ikedjane -Tasga

    Ikedjane , Tasga, village distant d’une cinquantaine de kilomètres du chef-lieu de la wilaya de Béjaia, perché à 800 mètres d'altitude, est situé au sud-ouest de la forêt d’Akfadou. Le village d 'Ikedjane respire l’air frais grâce aux milliers d’hectares d’arbres (chêne, pin, olivier) qui couvrent cette région, lui offrant des paysages indescriptibles. Une forêt majestueuse plantée d'arbres aux essences variées.

    Ce village, qui a offert l’asile au colonel Amirouche au temps de la disette et de la misère, a vu tomber ses meilleurs enfants sous le joug colonial, d’ailleurs une plaque commémorative vient d’être érigée à la mémoire de 8 martyrs égorgés par la peste coloniale et un monument en signe de reconnaissance à la quarantaine de maquisards tombés aux champ d’honneur durant la guerre de Libération.

    Aujourd’hui, Tasga vit à un rythme calme à l’instar de tous les villages de la Kabylie. Petits commerces, constructions, culture animalière et quelques autres activités ne dépassant pas l’ordinaire. La rente en devises qui, naguère, fortifiait ce village aux ressources presque inexistantes en matière de richesses ou en celles investissement, ne fait plus recette. Les générations montantes, faute de diplômes, victimes d’un système éducatif avilissant et parfois avec, se sont adonnées à une activité peu apaisante : la coupe des arbres en pieds-droits à des fins de commercialisation. En effet pour beaucoup d’entre eux, cette activité est la seule resource à même de parvenir à subvenir aux besoins de leur famille respectives, faute d’infrastructures capables d’absorber le taux de chômage effrayant et le temps vide terrifiant qui rongent cette frange importante de la société. Pour Yacine, appelé communément "Big-boss ", car tous les jeunes du village en ont un), " mieux vaut faire ce travail, par ailleurs très dur, que d’aller cambrioler des maisons ou agresser des vieillards ". Celui-ci ajoute qu’il ne trouve aucunement plaisir à faire ce travail très pénible et faire souffrir son bourricot qu’il surnomme " Grosso " dont il avoue être fier. Une expression qui revient bizarrement, trop souvent, sur les lèvres de ces jeunes livrés à eux-mêmes. Les perches servent de pieds-droits dans les travaux de bâtiment et autres constructions et dont le prix officiel varie entre 80 DA et 180 DA la pièce. Des prix qui dépondent bien-sûr de la qualité des pieds-droits sollicités, de leur taille, de leur livraison, avec évidemment l’équation de l’offre et de la demande mais aussi, de l’art de négocier " la transaction ". Ainsi, un pied-droit de 4,5m peut se vendre à 90 DA et celui de 3m à 120 voire 130DA, surtout si l’acquéreur est dans une situation d’impératif.

    Une fois ayant une commande à satisfaire, les jeunes de Tasga, en s’entraidant d’une manière à partager le marché, des groupes " démarrent " comme à l’accoutumée, vers 3 heures du matin, de peur d’être repérés par les brigades forestières dont la gestion est de la compétence territoriale de la circonscription d’Adekar. Sur fond d’un froid glacial en hivers les jeunes cavalent à dos d’un âne jusqu’aux frontières de la wilaya de Tizi-Ouzou, avec leurs haches et des cordes à la recherche de pieds-droits de bonne qualité, très bizarrement, dans une obscurité à donner froid au dos. " Aujourd’hui, les pieds-droits sont de plus en plus rares, au-vue de la distance qu’on met, il n’est pas utopique de dire que d’ici quelques années, on atteindra M’haga ! ", déclare L’hadj, un jeune qui mobilise deux ânes pour la circonstance. En fait M’haga, visible à l’œil nu de l’endroit où ces jeunes coupent les arbres, n’est autre qu’un village relevant administrativement de la wilaya…de Tizi-Ouzou. Une fois ayant coupé le nombre suffisant pour le transporter au moyen de bourricots (entre 4 et 8 pieds-droits pour un seul bourricot), ces jeunes redescendent en ayant un regard extrêmement concentré, de crainte d’être confrontés à de mauvaises surprises, que ce soit d’être repérés par les gardes forestiers ou dans le meilleur des cas, être attaqué par des bêtes sauvages telles les loups et les sangliers, qui sont assez nombreux dans cette forêt. Et rebelote !

    Chaque jour est identique à son précédent

    Jour par jour en attendant des jours meilleurs. Une fois la quantité exigée par l’entrepreneur , généralement après trois ou quatre jours, les jeunes requièrent les services d’un camion pour charrier la marchandise, dans une livraison nocturne, jusqu’au lieu des travaux, les chantiers en construction où le chef des travaux ou l’entrepreneur les attendent pour leur remettre leur dû et dans certains cas, leur renvoyer quelques pieds-droits qu’il juge hors normes. Ces chantiers, sont souvent dans les communes environnantes ou parfois lointains, pouvant atteindre le chef-lieu de la wilaya, prenant ainsi de grands risques avec les barrages des services de sécurité qui s’y déploient sur les routes.

    Une certaine satisfaction se lit alors sur les visages de ces jeunes, un sentiment du devoir accompli. Il n’est pas rare de constater un sujet de discussion tournant dans ce sens, allant des commandes de pieds-droits faites ou acquises, des bourricots achetés ou vendus aux gardes champêtre dont leurs noms sont bien naturellement tristement évoqués. Ces derniers sont partagés entre le sentiment du devoir envers leur hiérarchie et envers la nature et celui de la compréhension de la situation dont laquelle ces jeunes se noient. Si des articles de presse prennent le parti indubitablement des pouvoirs publics, dans leur condamnation et leur répression face aux actes de déforestation sauvage que subit la forêt de l’Akfadou, l’on ne peut et l’on ne doit apparenter entre ces jeunes souvent, voire complètement poussé à cette activité illicite et la mafia du bois qui se cramponne aux arbres.

    Entre le mal des coupes illégales que subit la forêt domaniale d’Akfadou, située à cheval entre les deux wilayas de Tizi Ouzou et de Béjaia, et le besoin de vivre de ces jeunes, la forêt continue à souffrir autant que ces jeunes, sous un souffre-douleur et sous les lames des haches. Car, au bout du compte, si la coupe des pieds-droits nuit à la santé environnementale du massif, il n’en demeure pas moins que les vrombissements destructeurs des tronçonneuses, le trafic de tout genre des barons du bois, sont la véritable source de nuisance et une menace bien au-delà de ces jeunes qui n’ont d’ailleurs pas le choix sans quoi, ils auraient abandonné à la première opportunité offerte, cette activité au demeurant, très risquée et trop hasardeuse, face à la dureté des coupes, à l’acheminement des pieds-droits et à leurs transport sur le différents chantiers, souvent très distants, qui les expose à des risques majeurs. Car, en plus, des risque d’agressions de bêtes de proie ou de repérage des gardes forestiers, ils sont confrontés aux bombardements de l’ANP et aux embuscades des terroristes. Cependant, pouvaient-ils faire autrement, lorsqu’un pied-droit représente pour ces jeunes ce qui est pour l’économie nationale, un puits de pétrole ?

    Par La Dépêche de Kabylie

  • #2
    Et on dit que notre jeunesse est féniante.
    C'est triste que ces jeunes n'est pas d'autres choix.

    C'est au pouvoir public de réagir et de faire quelques choses pour ces jeunes et du meme coup sauver la foret.

    Merci morjan pour l'article.

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