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La stratégie antidrogue du Mexique mise à mal

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  • La stratégie antidrogue du Mexique mise à mal

    Plus de deux millions de dollars... Depuis mars dernier, les Mexicains savent ce que cette fortune représente : des piles de billets verts - 207 millions en coupures de 100 -, qui s'entassent sur un tel volume qu'il faut un camion de déménagement pour les déplacer. Cette fortune, dissimulée dans une villa de Mexico appartenant à un entrepreneur chinois soupçonné de trafic de drogue, représente la saisie la plus importante de narcodollars jamais réalisée. Mais depuis quelques jours, c'est aussi une pierre de plus dans le jardin de Felipe Calderon, le président mexicain : selon le propriétaire de la villa, cet argent avait été déposé chez lui par des émissaires du PAN, son propre parti... afin de financer sa campagne électorale.

    Ce doute, qui vient ternir un coup d'éclat du gouvernement mexicain, plane aujourd'hui sur toute sa politique antitrafic. Dix jours après son entrée en fonction, en décembre dernier, Felipe Calderon annonçait un déploiement massif de l'armée afin de briser la spirale de violence dans laquelle sont entrés le cartel de Sinaloa et le cartel du Golfe. Une mesure déjà utilisée par le président Zedillo dans les années 1990, mais que le nouvel élu va porter à des niveaux sans précédent : près de 30 000 militaires sont aujourd'hui déployés dans des régions de production ou de transit de stupéfiants, comme le Guerrero ou la Basse-Californie. Les barrages routiers protégés par des automitrailleuses et des soldats embusqués derrière leurs sacs de sable sont devenus la règle sur tous les grands axes du pays.

    Grâce à cette politique de fermeté, Felipe Calderon a su faire oublier les rumeurs de fraude (démenties par le tribunal fédéral électoral) qui entachaient son élection. Mais les résultats concrets, après six mois de guerre au narcotrafic, sont loin d'être aussi probants. Selon le parquet général du Mexique, seuls 19 trafiquants de drogue sont arrêtés quotidiennement, contre 28 l'année dernière. Le Mexique, qui était déjà le lieu de transit de 90 % de la cocaïne consommée aux États-Unis, et le principal producteur des métamphétamines destinées à ce marché, se distingue par ailleurs sur un autre terrain : celui de la marijuana, dont il est devenu en 2006 le premier producteur mondial.

    Dans les six premiers mois de 2007, enfin, le nombre d'assassinats liés au crime organisé dépasse les 1300, soit une augmentation de 30 % par rapport à l'année dernière.

    Regain de violence

    La violence s'étend aujourd'hui à des villes jusqu'ici épargnées comme Monterrey, au nord du pays, où un député déjà mêlé à des affaires de drogue a été abattu en pleine rue le mois dernier. Cadavres aux mains liées derrière le dos, torturés, voire décapités, apparaissent parfois au rythme d'une dizaine par jour, soulignant toujours un peu plus l'impunité dont semblent bénéficier les tueurs.

    Les autorités mexicaines attribuent ce regain de violence à une réorganisation du trafic, conséquence directe d'une baisse de la consommation de cocaïne aux États-Unis. Pour José Antonio Ortega, président du Conseil citoyen pour la sécurité publique et la justice, il illustre surtout la faillite d'une stratégie gouvernementale qui ne s'attaque pas aux protections officielles dont bénéficient les organisations criminelles : « Aucun opérateur politique, ni aucun responsable de blanchiment d'argent n'a été arrêté », s'étonne-t-il, malgré la « complicité évidente (...) entre les trafiquants et certains politiciens ». Ricardo Ravelo, journaliste et essayiste spécialiste du narcotrafic, compare quant à lui le Mexique à « la Colombie des années 1990 », où les barons de la drogue avaient infiltré toutes les institutions de l'État : « Beaucoup des exécutions dont nous sommes témoins, surtout ces deux dernières années, impliquent des membres de la police, constate-t-il. On savait que la police protégeait certains trafiquants, aujourd'hui il est clair qu'elle commet aussi des kidnappings et des exécutions en leurs noms. »

    Une situation que Felipe Calderon tente de retourner avec une autre mesure radicale : la destitution de tout l'état-major de la police fédérale préventive, soit 284 officiers. Pour occuper ces postes sensibles, les impétrants devront désormais se soumettre à des tests antidrogue, à des enquêtes approfondies sur leur patrimoine et leurs relations, et au détecteur de mensonge. Comme l'a souligné le ministre de la Sécurité publique, Genaro García Luna, ces précautions sont les seules qui peuvent garantir aux citoyens « une police honnête, intègre et fiable ».

    Par Le Figaro
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