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Le Liban, point de convergence entre Paris et Téhéran

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  • Le Liban, point de convergence entre Paris et Téhéran

    L'ébauche d'un rapprochement franco-iranien est le principal acquis de la réunion interlibanaise qui s'est déroulée les 14 et 15 juillet à La Celle-Saint-Cloud sous l'égide de la diplomatie française.

    Les représentants de la majorité et de l'opposition se sont mélangés autour de la même table. Tout le monde a bu un bon café, c'est sympathique. La glace a été brisée, à la bonne heure. Des constats aussi élémentaires que la pluie mouille ou un chat miaule ont été encore une fois rabâchés : attachement au plein respect des fondements de l'Etat ; rejet de toute tutelle extérieure et de la violence comme moyen politique ; élaboration d'un code d'honneur, etc. – que certains s'en souviennent est mieux que rien… Sauf que les deux jours au château de La Celle-Saint-Cloud n'ont rien donné du tout. Le Hezbollah a même refusé que soit publié un communiqué de synthèse ou une banale déclaration d'intentions.

    Il n'en reste pas moins que Bernard Kouchner [le ministre des Affaires étrangères français] est satisfait : la France a réussi là où les autres médiateurs ont échoué. Il a obtenu des infos sur les soldats israéliens kidnappés par le Hezb le 12-juillet-2006, et enfin, il revient au Liban, le 28-juillet, pour essayer de renouer le dialogue entre les leaders, après que Bernard Emié [l'ambassadeur de France au Liban] et Jean-Claude Cousseran [l'envoyé spécial du président français Nicolas Sarkozy] ont déblayé le terrain cette semaine avec les Libanais. Mais si le chef du Quai d'Orsay est satisfait, c'est surtout parce que la réunion s'est tout simplement tenue. Et cela n'aurait pu se faire sans cet encore discret mais primordial rapprochement franco-iranien, auquel le Hezbollah, en se rendant à La Celle-Saint-Cloud, a largement contribué, sans doute à son corps défendant – pour l'instant…

    C'est à ce niveau-là, entre Paris et Téhéran, que la réunion de ce week-end doit être perçue et conçue comme une réelle réussite – sachant que le chemin vers la concrétisation de ce succès est encore immensément long.

    En un mot, Téhéran a besoin de Paris, surtout dans le cadre de son bras de fer avec Washington. Et George W. Bush ne verrait pas d'un mauvais œil le (très) atlantiste Nicolas Sarkozy réussir à ramener l'Iran à de meilleurs sentiments au Proche-Orient en général, et au Liban en particulier. A condition que les Iraniens sachent quelle est leur priorité et qu'ils la communiquent aux Français. Est-ce que l'Iran, qui semble vouloir devenir un des acteurs et codécideurs principaux dans la région, est prêt à aller jusqu'au bout de sa logique ? En d'autres termes, est-il prêt à abandonner la Syrie ? Et plus encore, à prendre sa place au sein de l'équation régionale, et notamment libanaise ? Est-il prêt, lui que des sanctions économiques gêneraient considérablement et qui a besoin, notamment, des français Total et Peugeot sur son territoire, à modifier la donne et à en avertir, par le truchement du wali el-faqih [le guide suprême, l'ayatollah Khamenei], le Hezbollah, pour que se dénoue alors une bonne partie de la crise libanaise ?

    Rien n'est moins sûr et les preuves de cet éventuel virage sont encore rachitiques, d'autant que les leaders iraniens, pour qui les connaît et les pratique, sont passés maîtres dans l'art de la dissimulation. Et ce virage-là, très conséquent, dépend d'une multitude de facteurs purement iraniens mais aussi exogènes : Ryad serait ainsi plutôt réticent à voir Téhéran former une troïka avec lui et Paris ; quant à la France, l'éventualité la tenterait, sachant que sa politique étrangère sera toujours tributaire d'un bon équilibre et d'une bonne entente entre son incarnation, Bernard Kouchner, et son architecte, Jean-David Levitte [le conseiller diplomatique de l'Elysée]… Rien n'est donc acquis côté iranien. Sauf cette réunion de La Celle-Saint-Cloud, à laquelle les Iraniens ont fini par dire oui aux Français par le biais du tandem Cousseran-Mottaki [le ministre des Affaires étrangères iranien] et à laquelle les Syriens étaient naturellement farouchement opposés.

    Tout cela ne veut pas dire que les Libanais n'ont qu'à se croiser les bras et à attendre. La moindre des politesses serait de remercier les deux Bernard, Kouchner et Emié, en leur facilitant la tâche d'ici au 28. Mieux encore : en travaillant à leur place, parce que, finalement, c'est du Liban qu'il s'agit ; pas de l'Iran ni de la France.

    Par Ziyad Makhoul, L'Orient-Le Jour, Courrier international
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