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Les finances publiques en quête de stratégie en Algérie

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  • Les finances publiques en quête de stratégie en Algérie

    L’hégémonie des recettes en hydrocarbures perdure et l’ ‘’étalon’’ de 19 dollars le baril a toutes les chances d’être reconduit par le gouvernement en Algérie

    Les deux principales nouveautés apportées par la loi de Finances de l’année 2007 résident dans la réduction du bénéfice sur les sociétés (IBS), passant de 30 à 25%, et dans la supériorité des dépenses d’équipement par rapport au budget de fonctionnement dans un rapport de 43%.

    En quoi réside l’intérêt de ces deux innovations ? La première, la réduction de 5 % de l’IBS, est censée stimuler la création d’emploi par le levier de la diminution de la pression fiscale. Cette mesure est d’autant plus importante que les entreprises publiques, via les conventions de branches, et les entreprises privées, via la convention cadre entérinée par la tripartite de septembre 2006, voient leurs dépenses salariales augmenter suite aux sollicitations des pouvoirs publics.

    Le rehaussement du SNMG à 12 000 DA à partir du 1er janvier dernier et les augmentations proportionnelles et automatiques touchant les salaires moyens et les hauts salaires n’ont pas été acceptées de gaieté de cœur par les employeurs, particulièrement ceux à qui incombe la responsabilité de gérer les entreprise fragiles ou déstructurées.

    Il en est ainsi de plusieurs entreprises publiques lesquelles, à la veille des dernières élections législatives, cumulaient un nombre de quelque 40 000 travailleurs qui n’ont pas reçu leurs salaires depuis plusieurs mois.

    A ces boites, il a été adressé des mises en demeure pour procéder aux augmentations salariales alors qu’elles n’ont pas pu honorer de vieilles mensualités avec le niveau de l’ancienne grille salariale.

    Dans quelle proportion la nouvelle mesure de desserrement fiscal pourra-t-elle jouer en faveur de la création d’emploi, ou du moins à son maintien ? Aucune étude économique n’a jusqu’à présent établir les gains prévisionnels en la matière. Mais, au vu du désordre structurel-généré par des problèmes de qualification, de la cherté de la matière première et d’une concurrence étrangère féroce et à la limite de la ‘’loyauté’’- grevant un grand nombre d’entreprises, publiques et privées, il n’est pas du tout garanti que ce léger mouvement de défiscalisation ouvre de nouveaux horizons à une employabilité moins contraignante.

    La deuxième nouveauté caractérisant la loi de Finances 2007, à savoir le recul du budget de fonctionnement par rapport aux dépenses d’équipement risque, quant à elle, d’être vu comme un miroir aux alouettes. En effet, la loi de Finances votée par l’Assemblée populaire nationale à la fin de chaque année et signée par le président de la République, généralement le 31 décembre, prévoit et autorise pour l’année civile suivante les dépenses de l’État et les moyens de les financer.

    Le budget général de l’État regroupe les recettes et les dépenses des services publics administratifs et se caractérise par l’universalité budgétaire, ce qui signifie que les recettes sont affectées à l’ensemble des dépenses. Lorsque les recettes du budget sont inférieures aux dépenses, on parle alors de déficit budgétaire. Dans le cas contraire, il s’agit d’excédent budgétaire.

    Le déficit prévisionnel du budget pour l’année en cours est de 1 821,1 milliards de dinars, tandis que le déficit du Trésor s’établit à 1 722,4 milliards de dinars. Le niveau des recettes prévu par la loi de Finances 2007 est de 1 802,6 milliards de dinars. Les dépenses (fonctionnement et équipement) sont arrêtées à 3 623,8 dinars.

    Dans le cas spécifique de l’Algérie, le déficit budgétaire est, en quelque sorte, volontaire. Il participe de la conduite prudentielle des autorités financières du pays qui établissent l’assiette de la fiscalité pétrolière sur la base de 19 dollars le baril. Ce chiffre étant dépassé depuis plus de trois ans, le reste des recettes pétrolières sont affectées à un fon (FRR).

    Par rapport au Produit intérieur brut (PIB), les déficits du budget et du trésor représentent respectivement 29,2% et 27,6%. La loi de Finances 2006 prévoit la possibilité de faire face au déficit du Trésor par le recours au Fonds de régulation des recettes. Cette procédure est décriée par certains analystes en économie qui parlent d’un budget-bis soustrait aux regards des représentants du peuple. Jusqu’à présent, ces derniers n’ont fait qu’avaliser les décisions de l’Exécutif en la matière, hormis quelques récriminations sans grande portée politique faites par les députés de l’extrême gauche et, dans un excès de zèle plutôt idéologico-mystique, par certains islamistes portés surtout sur l’interdiction des importations des boissons alcoolisées.

    Le ministre des Finances assure que cette méthode de travail va durer au moins jusqu’à 2009, c’est-à-dire à l’échéance du bouclage du Plan de soutien à la croissance économique lancé par le Président Bouteflika. "

    Aucune somme ne sera soustraite au contrôle, parce que la différence entre les 19 dollars de base et les ressources financières enregistrées est versée au Fonds de régulation des recettes et est soumise à une loi qui en fixe l’usage ", assure Medelci dans un entretien à ‘’El Khabar’’ du 3 avril dernier. Dans la foulée de ses explications, M.Medelci révèlera que le montant consacré aux projets de développement programmés entre 2005 et 2010 est de 150 milliards de dollars. Ce montant est, d’après lui, susceptible d’induire une relative inflation. " Nous voulons maîtriser l’offre et le Fonds de régulation des recettes, et garder une partie des liquidités de ce Fonds. Les réserves y demeureront toujours sans qu’il y ait un quelconque gel. Il est prévu d’autres projets à financer ".

    Quelle place pour les compétences et les ressources humaines ?

    L’un des griefs faits à la loi de Finances 2007 est la faiblesse du budget de fonctionnement qui tourne autour de 1 600 milliards de dinars, soit moins de la moitié des dépenses d’équipement. De prime abord, cela donne une lecture optimiste sur la l’évolution de l’utilisation de l’argent de la collectivité- dont une grande partie est issue des recettes des hydrocarbures-, ce qui signifierait rationalisation des dépenses du fait qu’elles sont plutôt dirigées majoritairement vers les projets de développement pilotés par l’administration publique. Ces projets touchent tous les secteurs d’activité depuis les Affaires religieuses jusqu’aux chemins de fer, en passant par les ouvrages hydrauliques et l’autoroute. L’on a beau se réjouir de la place modeste que prend le budget de fonctionnement dans la loi de Finances 2007, on ne peut s’empêcher de réfléchir à la manière dont seront pris en charge les projets inscrits dans le cadre du PCSC (Plan complémentaire de soutien à la croissance), des Hauts-Plateaux et du Sud en matière de pilotage et de management. Le diagnostic de l’état de santé de l’administration algérienne n’est pas des plus reluisants. Elle a perdu, au cours de la décennie écoulée,- suite au système de retraite anticipée précipitamment mis en place aussi bien dans l’administration que dans le secteur public économique- la fine fleur du personnel technique et administratif, formé pendant les années 70 et ayant accumulé un précieux capital expérience.

    La vacance ainsi créée a été partiellement comblée par le recrutement des jeunes cadres issus de l’École fondamentale et ne disposant d’aucune expérience professionnelle. En fragilisant un peu plus l’ossature de la Fonction publique, le nouveau statut y afférent ne lui donne pas les moyens de sa politique pour affronter les nouveaux défis économiques, législatifs et réglementaires qui se posent à l’Algérie. Déjà bien mal en point et traînant la mauvaise réputation d’être une lourde machine bureaucratique, l’administration algérienne a très peu de prédispositions à manager des projets de grande envergure. Ses démembrements au niveau des wilayas et des communes sont exposés à tous les aléas- du fait de la régression sociale et du recul des compétences- qui font du fonctionnaire un candidat tout désigné à toutes formes de dérives, à commencer par celle qui a gangrené toute la société, la corruption.

  • #2
    Une administration valétudinaire et saignée par le départ des compétences et à laquelle sont confiés des projets grandioses- 150 milliards de dollars de projets de développement- financés par la rente pétrolière ne peut décidément pas faire de miracles. Par conséquent, la différence de montant entre le budget de fonctionnement et le budget d’équipement- que les voix officielles présentent comme une espèce de performance et de rationalisation des dépenses- ne signifie pas nécessairement une maîtrise des dépenses publiques. Les projets pour lesquels ne sont pas préparées les ressources humaines et qui souffrent de simples impondérables liés à l’intendance et à la logistique qu’exige le suivi sur le terrain voient nécessairement peser sur eux la plus grande des incertitudes.

    Entre les dépenses d’équipement- qui supposent des investissements publics- et le budget d’équipement, existe une relation dialectique dont sont tributaires l’efficacité de l’intervention de l’État et la durabilité des projets managés. Il est vrai que, au cours des années 90, la tendance au recrutement du personnel dans la Fonction publique et à l’augmentation du budget lié au fonctionnement général des établissements administratifs a été gênée par deux données conjoncturelles : le rétrécissement des projets publics d’investissement, phénomène dû à la forte récession de l’appareil économique algérien et à la situation sécuritaire du pays, et la soumission de l’économie du pays aux conditionnalités dictées par le Plan d’ajustement structurel (PAS) issu du processus du rééchelonnement de la dette extérieure. Ces deux contraintes majeures étant dépassées, il s’avère impératif d’étoffer l’administration et les services publics algériens de nouvelles ressources humaines à même de conduire les grands projets de développement initiés par l’État. Cette réhabilitation devrait s’accompagner impérativement des possibilités de la formation continue qui permet l’accès aux nouvelles méthodes de management et aux technologies de l’information et de la communication. Au moment où les contrebandiers, les harrags et les terroristes utilisent et manipulent les appareils de guidage et de levé topographique GPS, les ingénieurs et techniciens des travaux publics, du génie civil, du service des eaux et forêts, n’en connaissent pas encore la forme.

    L’enjeu de la diversification des recettes

    Outre cet équilibre dont la réalisation est devenue impérieuse, la loi de Finances algérienne souffre encore de l’hégémonie des recettes pétrolières. La fiscalité hors hydrocarbures est appelée chez nous ‘’fiscalité ordinaire’’ ! Ayant trop longtemps compté sur le pétrole, le budget de l’État a du mal à se redéployer sur les autres secteurs pour lever les impôts. L’inventaire des acteurs économiques et des activités imposables n’est pas encore tout à fait complètement établi. La preuve, l’évasion fiscale générée par le secteur informel (IRG, TVA et autres taxes) se compte en plusieurs milliards de dinars. " La pression fiscale en Algérie reste assez faible par rapport aux pays voisins. Elle est de l’ordre de 19% hors fiscalité pétrolière. L’objectif de la modernisation de l’administration fiscale est justement de faire monter la pression fiscale et de la rendre comparable aux pays qui ont le même niveau de développement hors fiscalité pétrolière ", assure Abdou Bouderbala, directeur général des Impôts.

    La dette fiscale et le détournement des avantages fiscaux sont deux autres phénomènes qui limitent les sommes d’argent issues de la fiscalité. Le DG. des Impôts avoue que la dette fiscale dépasse largement les 600 milliards de dinars. Une partie est déclarée irrécouvrable. Pour les 600 Mds restants, il est prévu, ajoute-t-il, un dispositif de recouvrement. Les avantages fiscaux, initialement destinés à mieux fouetter la machine économique en stimulant les investissements et la création d’emploi, sont souvent détournés de leurs objectifs et sont ainsi assimilés à une fraude fiscale. " Ce sont des gens qui profitent des avantages fiscaux qui leur sont accordés dans le cadre des projets d’investissement pour vendre le matériel ou les produits qu’ils ont achetés en totale exonération de droits de douane. Ce détournement est un délit et l’administration fiscale ainsi que l’ANDI (Agence nationale du développement des investissements, ex-APSI) poursuivent ces actes délictueux. Il y a de nombreuses décisions de droit d’importation qui ont été annulées et les personnes traduites en justice ", affirme M. Bouderbala dans un entretien avec El Watan Économie du 2 janvier 2007.

    En tout cas, la diversification des ressources fiscales s’avère indispensable dans une conjoncture caractérisée par une forte volatilité de la principale matière première que l’Algérie exporte et qui lui assure l’essentiel de ses importations. La hausse des prix du pétrole ne doit pas reproduire les réflexes rentiers qui ont mis le pays à genoux au début des années 90 du siècle dernier et qui ont livré l’Algérie, pieds et points liés, aux conditionnalités des institutions financières internationales. En faisant jonction avec le renchérissement vertigineux de la monnaie européenne par rapport au dollar, l’envolée des prix du pétrole voit ses effets sur les économies des pays pétroliers, comme l’Algérie, doublement relativisés : d’abord par un déséquilibre de la balance des payements vu, que la majorité de nos importations sont libellées en euros et que la plus grande partie de nos exportations le sont en dollars ; ensuite, par un effet complexe de l’interdépendance des économies, un ralentissement de la croissance en Amérique, en Europe ou en Extrême-Orient induira inéluctablement une baisse de la croissance mondiale qui affectera, de facto, même les pays exportateurs de pétrole, lesquelles importent la presque totalité de leurs produits alimentaires, médicaments, équipements, etc.

    Au début de l’année 2007, les baisses enregistrées sur le marché de l’énergie fossile ont fait craindre aux autorités algériennes une chute libre qui remettrait en cause même le très raisonnable calcul de la loi de Finances sur la base de 19 dollars le baril. A chaque secousse importante sur le marché des hydrocarbures, l’Algérie ‘’touche du bois’’ et se souvient, comme d’un cauchemar, de la fragilité de son économie dépendant presque exclusivement du pétrole.

    Par la Dépêche de Kabylie

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