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Ce qui s’est passé à Yakouren -Tizi Ouzou

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  • Ce qui s’est passé à Yakouren -Tizi Ouzou

    Celui qui s’exprime ainsi est un habitant de la cité ex-EPLF, située à moins de 100 m de la bâtisse de la gendarmerie nationale.

    Encore sous le choc, l’homme est perturbé. Une fois, il accepte de se laisser photographier pour les besoins de ce reportage, mais une autre fois il insiste et supplie pour que ni son visage ni son nom ne soient publiés. « Je compte sur vous. Ne publiez rien qui puisse me faire reconnaître. Je vous raconte tout, mais surtout respectez mon vœu. Les terroristes ont frappé à ma porte, nous avons fait les morts. Ils ont ensuite cassé la porte en bois de mon voisin qui n’occupe pas son appartement. Ce n’est que ce matin qu’il a placé une porte métallique» , précise-t-il.

    Plus révélatrice de l’état de choc des résidents de cette cité sera l’attitude de ce locataire pourtant du rez-de-chaussée (d’où visiblement aucun tir n’a eu lieu contre les gendarmes) qui n’accepte de nous entretenir qu’en présence d’un des gendarmes de la brigade, mais qui se rétracta quand nous fîmes venir l’un d’eux. Peut-être ne veut-il pas faire des révélations à cause de l’enquête ?

    A un autre étage, cette fois ce sera une femme qui apportera son témoignage sans condition préalable. « Je dormais lorsque j’ai été réveillé par une forte explosion, je pensais que c’était un séisme… Je me suis dirigée tout de suite vers mes enfants... J’ai vu alors la porte de mon appartement ouverte : il n’y avait personne ; la serrure avait été cassée par le souffle de l’explosion. Il y a eu des tirs, des rafales, des individus couraient dans les escaliers de l’immeuble tandis que d’autres tiraient sur les gendarmes à travers les trous d’aération du palier… Nous croyions que nous allions mourir. Certains appartements inoccupés par leurs locataires et qui n’avaient pas de porte métallique ont été forcés par les terroristes ; d’autres, qui avaient des portes en fer, n’ont pas été touchés. Certains logements ont été vidés de leurs occupants par les terroristes sans que ces derniers ne ne leur fassent de mal». Un dernier propos lourd de sens sur la démarche des criminels : gagner à eux la population et lui prouver que le GSPC-El Qaîda n’est opposé qu’aux services de sécurité.

    C’était aussi la démarche des GIA avant qu’ils ne se retournent contre les petites gens de Ramka et autres douars.En tous cas, les criminels ont fait le bonheur d’un homme : le forgeron qui a réalisé en un seul jour les commandes d’une année.

    A la cité ex-EPLF, au moment de notre passage, il n’y avait pas un seul appartement sans nouvelle porte métallique ! La peur a envahi la population. Contrairement à leurs attentes, l’effet de cette action offensive criminelle s’est retourné contre ses auteurs. Aujourd’hui, les habitants rencontrés à Yakouren-ville ou dans les dechras environnantes sont unanimes à demander non pas le retour des gendarmes mais leur renforcement.

    «Nous avons une brigade de gendarmerie pour sept communes. C’est comme un encouragement aux terroristes. C’est à l’Etat d’assurer notre sécurité : il doit être présent partout.. De Yakouren à la wilaya de Béjaïa, il n’y a pas une seule brigade de gendarmerie, un seul commissariat. Certes, il y a des patriotes, des GLD, mais ils ne sont qualifiés que pour la riposte et la défense», fulmine un jeune, cafetier de son état, qui confie avoir rencontré «plusieurs fois les gars du GSPC». «Une fois, ils étaient une soixantaine à prier dans une clairière, tandis que quelques-uns faisaient le guet. Je les ai salués en passant. Je suis certain que ce sont eux qui ont commis l’attaque contre la gendarmerie». Puis, il ajoute :«Le GSPC veut pousser les habitants à demander le départ des gendarmes en disant qu’il n’y aura pas d’actions armées en l’absence de ces derniers. Alors, le GSPC fera de nous ce qu’il voudra», conclut-il.
    Son commentaire est digne de réflexion.

    Pourquoi le GSPC-El Qaîda a-t-il programmé cette attaque contre la brigade de gendarmerie de Yakouren ?

    Coûte que coûte, et à tout prix, il fallait au GSPC-El Qaîda mettre fin aux revers qu’il a subis de la part de cette même brigade qui couvre… sept communes de la wilaya de Tizi Ouzou ! Par ailleurs, la conférence de presse tenue début janvier dernier par le colonel Salim Benazzouz, chef du groupement de wilaya de Tizi Ouzou, n’est pas passée inaperçue. Celui-ci annonçait l’ouverture prochaine de 15 nouvelles brigades. Un danger pour les terroristes qui n’ignorent pas que cette présence renforcée des gendarmes ne leur laissera plus les coudées franches et la possibilité d’agir à leur guise en toute impunité.


    Aussitôt, dès la fin janvier, une nouvelle tactique fut mise en œuvre : démontrer à la population que le retour des gendarmes signifiait retour de l’action armée du GSPC-El Qaîda et qu’il n’a «aucun conflit avec les citoyens». D’une manière indirecte, ceux que le délégué à la sécurité de Yakouren nomme les «voyous et les anarchistes» demandaient aux habitants de ne pas s’interposer entre le GSPC et les forces de l’Etat car c’est une affaire qui concerne eux deux seulement».

    Au plan pratique, le GSPC-El Qaîda planifie des «opérations». Une pseudo «offensive courageuse» qui lui coûtera cher. Isoler les services de sécurité de la population et les harceler par des actions terroristes d’envergure, tel est le nouveau credo du GSPC-El Qaîda dès l’annonce de l’ouverture de nouvelles brigades de gendarmerie. Le 12 février 2007, une attaque à la bombe est menée contre la sûreté de daïra de Mekla. Le même jour, un véhicule piégé destiné à exploser dans une brigade du Daraq el watani est intercepté par les gendarmes. Quelques jours plus tard, deux personnes appartenant à des groupes de soutien activant à Boumerdès et Dellys sont arrêtées.

    D’autre part, l’étau se resserre davantage sur les criminels à la suite des opérations de ratissage et d’investigation menées par les unités de l’ANP… La région d’Azazga (dont dépend la commune de Yakouren) n’est plus un lieu de repos pour les criminels qui se sont installés dans le difficile maquis, dans des grottes et refuges inaccessibles pour les véhicules. Les pistes et sentiers sont minés en vue de freiner les ratissages. Les forces de sécurité attendent que le loup sorte de sa tanière…

    Les criminels s’engraissent. Seuls quelques-uns parcourent le maquis (à l’insu de leurs acolytes ?) pour ramasser des rançons et butins : au maquis, on s’enrichit, on devient milliardaire et l’on construit des villas somptueuses en ville… La poste de Beni Douala est attaquée : 900 millions sont volés, précédés d’une mort d’homme; Le bureau-PTT d’Icherdaïen aussi : cette fois les criminels ne trouvent que 6 millions de centimes. Le 28 mars 2007, le cas d’un entrepreneur kidnappé crée la panique. Rançon exigée : un milliard de centimes. En gros, de février à début juillet 2007, 38 affaires de crime et délit contre les personnes sont enregistrées, et 19 affaires d’atteinte aux biens. Rouvertes fin 2006, les anciennes brigades de la gendarmerie réoccupent le terrain. Elles apportent aide et assistance aux citoyens, interviennent à la suite de requêtes, surveillent les circonscriptions.

    Le GSPC n’est plus en terrain conquis, d’autant que les citoyens des douars et dechras formulent le vœu d’une plus grande présence des darkis. Les criminels décident alors de monter un grand coup avec l’attaque du 14 juillet contre la brigade de Yakouren, mais au lieu d’être grand, il sera dur pour les criminels. D’abord par la mise hors d’état de nuire de quatre des leurs qui, au vu de leurs cadavres, seraient des membres influents du GSPC-El Qaîda.

    «Des vieux du maquis, dit-on à Yakouren, qui se nourrissaient d’huile et de miel. Cheveux longs, barbes fournies, visages joufflus débordant de vitalité : tout indique que ces éléments du GSPC ne manquaient de rien dans ces maquis qu’ils n’ont pas investis la veille seulement. Aussi, on se demande si l’attaque déjouée aurait pu être évitée. Bien sûr que oui s’il existait dans chaque agglomération une brigade de la gendarmerie comme le souhaitent les habitants», souligne le délégué à la sécurité de la commune de Yakouren, un enfant de la région.

    Par La Nouvelle République
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